dicataire, n'est point passible du droit proportionnel de vente, s'il n'est pas en méme temps revêtu de la signature du notaire. (L. 25 vent. an 11, art. 68.) L'adjudication non signée du notaire commis ne forme pas un contrat et n'a aucune valeur, même comme acte sous seing privé. En effet, le notaire commis remplit un office purement judiciaire; il est le délégué du tribunal; comme le juge, il donne acte aux parties de leurs déclarations, reçoit leurs dires, constate leurs aveux, et en exprimant son avis sur leurs contestations il fait acte de juridiction contenticuse; le procès-verbal non signé est donc, comme un jugement qui présenterait la même irrégularité, sans aucune valeur. Du 20 mars 1866.-Solut. de l'admin. de l'enregistr. INSTR. DIRECT. GÉN. FOR. 27 septembre 1866. CHEMINS VICINAUX, BOIS ET FORÊTS, EXTRAC- Instruction de M. le directeur général de l'administration des forêts, relative au règlement des indemnités dues à raison de l'extraction, dans les bois soumis au régime forestier, de matériaux destinés aux travaux de la voirie vicinale. nistration des forêts, des matériaux ayant pour objet les travaux des chemins vicinaux, dispose, art. 4: « L'évaluation des indemnités dues à raison de l'occupation ou de la fouille des terrains et des dégâts causés par l'extraction, sera faite conformément au deuxième paragraphe de l'art. 17 de la loi du 21 mai 1836. » - Mais elle s'abstient, aussi bien que la loi de 1836 et que l'instruction ministérielle de 1854, de mentionner le prix des matériaux extraits, d'où il résulte clairement que ce prix ne saurait être exigé, et que le propriétaire du terrain ne peut prétendre qu'au paiement d'une indemnité. Les dispositions qui régissent les extractions de l'espèce sont précises, tout particulièrement en ce qui concerne les bois régis par l'administration des forêts, et c'est pour les avoir perdues de vue que les agents forestiers ont cru pouvoir imposer le paiement des matériaux à extraire. - S. Exc. le ministre des finances, à qui la question a été soumise, s'est prononcé dans ce sens par une décision, en date du 21 août 1866, que le service devra prendre pour règle à l'a venir. Du 27 sept. 1866.-Instr. du direct. gén. des forêts. INSTR. DIRECT. GEN. ENREG. 25 novembre 1866. AMENDES, RECOUVREMENT, GRACE (RECOURSEN). Le recours en grâce à fin de remise d'amendes, a pour effet de suspendre les poursuites en recouvrement jusqu'à la décision à intervenir. aby Eramood Une difficulté s'est élevée entre les agents forestiers et les agents du service vicinal, au sujet de la fixation de l'indemnité due au Trésor, à raison de l'extraction, dans une forêt domaniale, de matériaux destinés à des travaux de voirie vicinale. — Les agents forestiers étaient d'avis d'exiger le paiement des matériaux extraits. Les agents du service vicinal repoussaient cette prétention, en faisant remarquer que les extractions, ayant pour objet des travaux d'intérêt public, sont soumises à des règles spéciales, d'après lesquelles il est payé au propriétaire, non pas le prix des matériaux enlevés, mais simplement une indemnité pour occupation du terrain et dégâts causés. Le droit d'ex-2120); que leur devoir est de refuser tout traction de matériaux dans les propriétés particulières est inscrit, au profit des chemins vicinaus, dans l'art. 17 de la loi du 21 mai 1836. Il s'exerce, moyennant paiement d'une indemnité réglée, soit à l'amiable, soit à la suite d'expertises, par le conseil de préfecture. L'instruction du ministre de l'intérieur, du 21 juill. 1854, relative à l'exécution de la loi précitée, prévoit (art. 348 et suiv.) le cas d'extraction de matériaux, et elle fait uniquement mention de l'indemnité due au propriétaire pour occupation de terrain. - Enfin, une ordonnance royale du 8 août 1845 (1), portant règlement sur les formalités à observer lorsqu'il y a eu lieu d'extraire, dans les bois régis par l'admi (1) V. le 2e vol. des Lois annot. Devill, et Car., p. 406. Le recours en grâce, adressé au souverain pour obtenir la remise d'amendes, a pour effet de suspendre les poursuites jusqu'à la décision à intervenir. Des instructions dans ce sens ont été déjà transmises aux receveurs. Elles portent notamment que ceux qui feraient payer des amendes, après l'avis officiel du recours en grâce, compromettraient leur responsabilité (Instr. n. 2206 et paiement, même s'il leur était offert, sauf, dans le cas d'urgence et sur l'autorisation du directeur, à faire des actes conservatoires (Inst. n. 2128). - Malgré ces recommandations réitérées, il est arrivé trop souvent que des amendes ont été recouvrées, et même que, lorsqu'il s'agissait d'amendes sujettes à attribution, la portion attribuée a été payée aux ayants droit, avant qu'il ait été statué sur les recours en grâce des condamnés. - Pour prévenir le retour de semblables irrégularités, les receveurs mettront désormais sur les mandats de paiement d'amendes attribuées à divers, la mention suivante : Je, soussigné, certifie qu'il ne m'est parvenu aucun avis officiel derecours en grace, ou bien: que le recours en grâce a été rejeté Du 25 nov. 1866.-Instr. du dir. gén. de Uroccior CASS.-CIV. 21 août 1867. 10 tiroq 1° ECRITS PÉRIODIQUES, Revue, Droits DU DIRECTEUR ET DE L'AUTEUR, MODIFICATION D'ARTICLES. 2° APPEL, ACQUIESCEMENT, EXÉCUTION. 1o Si le directeur d'une revue périodique a le droit de modifier seul les manuscrits de ses collaborateurs, l'exercice de ce droit ne saurait cependant avoir pour effet d'obliger le rédacteur d'un article publié à couvrir de son nom les changements et corrections auxquels il n'a pas participé (1). 31: (1-2) Il résulte plus ou moins explicitement de l'arrêt que nous recueillons, 1° que le directeur d'une revue a le droit de modifier de sa propre autorité les articles qui lui sont fournis par ses collaborateurs; 2o que, toutefois, si les changements apportés à un article au bas duquel se trouve le nom du collaborateur, et qui l'ont été sans son concours ni son adhésion, sont de nature à nuire à sa réputation comme écrivain et à engager sa responsabilité, le directeur peut être tenu envers lui à des dommages-intérêts; 3o qu'en tous cas, il suffit que l'article ait subi des change ments, quelqu'insignifiants qu'ils puissent être, pour que l'auteur ait le droit d'annoncer au public, dans la revue elle-même, que son écrit a été modifié. - De ces trois propositions la première est incontestable, à la condition, néanmoins, comme nous l'avons fait observer en rapportant l'arrêt cassé de la Cour de Paris du 16 mars 1865 (P.1865.709. – S.1865.2.157), qu'il s'agira d'articles fournis par un collaborateur chargé d'un travail déterminé et habituel; autrement, et si le directeur se trouvait en présence d'un auteur qui aurait accidentellement offert un article ou à qui cet article aurait été demandé, il semble que son pouvoir se bornerait (sauf bien entendu les corrections de détail) à un simple droit d'admission ou de refus. - Il n'est pas moins certain, d'un autre côté, que si le directeur se permet d'apporter à l'article qui lui est fourni par le collaborateur et qui est publié avec la signature de celuici, des modifications importantes de nature à changer l'esprit ou le caractère de l'œuvre, ou à compromettre plus ou moins sa réputation d'écrivain, l'auteur aura le droit de se plaindre, de désavouer une paternité qui ne sera pas sienne, et même d'exiger des réparations dont il appartiendra aux juges de déterminer l'étendue et la forme. Il nous semble même que, sous ce rapport, les juges devront, dans leur appréciation, faire très large la part de l'auteur, et ne consacrer le droit du directeur qu'autant qu'il se sera exercé dans des limites restreintes, sous l'empire de l'urgence et de la nécessité, et que l'auteur, à aucun point de vue, ne pourra se plaindre de l'existence d'un abus et d'un préjudice. Mais, à côté de ces deux premières propositions, toutes deux sans véritable difficulté, l'arrêt que nous recueillons en place une autre, à savoir qu'il suffit que des modifications aient été faites à un article, pour que, alors même qu'elles seraient insignifiantes et sans portée, l'auteur ait le droit de signaler au ANNÉE 1867.-10° LIV. En conséquence, et alors méme que les modifications faites paraîtraient sans importance et exclusives de toute atteinte portée à sa réputation et à sa dignité d'écrivain, l'auteur peut, non à titre de réparation de préjudice causé, mais en vertu de son droit de propriété, exiger l'insertion, dans la revue même, d'une lettre annonçant que l'écrit publié sous son nom a été modifié sans sa participation (2). (L. 19-24 juill. 1793, art. 1er; C. Nap., 1382.) 2o L'accomplissement d'une mesure prescrite par un jugement, quand il a cu lieu avant public, dans la revue même où l'article a paru sous sa signature, que son œuvre primitive a été modifiée. En décidant ainsi, d'une manière absolue, sans restriction aucune, et en plaçant, à cet égard, le droit de l'auteur sous la protection du principe qui déclare la propriété inviolable, la Cour de cassation ne va-t-elle pas bien loin? Ainsi, il suffira qu'un paragraphe, qu'une phrase aient été déplacés ou modifiés, pour que l'auteur ait le droit de réclamer! Mais, par cela même qu'il a consenti a devenir le collaborateur habituel d'une œuvre collective, c'est-à-dire d'une œuvre dont les éléments ont besoin d'être coordonnés et mis en harmonie par une seule main, celle du directeur, n'est-il donc pas censé avoir donné à l'avance, à ce directeur, certains pouvoirs de correction, d'agencement et de remaniement? - II nous avait semblé que le droit, pour le collaborateur, de protester publiquement et dans la revue elle-même contre les modifications faites à son insu, était, comme celui de demander des dommages-intérêts, subordonné à la question de savoir si le directeur avait ou non abusé de son pouvoir, et que, du moment où, les corrections ou modifications étant insignifiantes, et l'auteur ne pouvant en souffrir sous le rapport ni de sa dignité personnelle, ni de ses opinions, ni de sa réputation comme écrivain, il était bien certain que le directeur n'avait fait qu'user du droit inhérent à ses fonctions, aux nécessités de son œuvre et même à la nature des relations existant entre lui et ses collaborateurs habituels, la prétention de l'auteur devait être repoussée comme sans intérêt. Il est à craindre que le principe posé dans des termes si absolus par la Cour de cassation n'introduise, l'amour-propre des auteurs aidant, un élément de trouble dans ces œuvres collectives dont les collaborateurs devraient être les premiers à comprendre les exigences, et n'oblige les directeurs à obtenir d'eux, comme condition de leur collaboration, des adhésions anticipées dont la concession ferait sans doute plus échec à leur dignité que le support de corrections auxquelles leur vanité blessée est seule, le plus souvent, à reconnaître de l'importance. - V. au reste, nos observations sous l'arrêt attaqué. Adde M. Renouard, Tr. des dr. d'auteurs, t. 2, n. 192. Cet auteur enseigne, dans le sens de l'arrêt ci-dessus, « que si les corrections, ne portant que sur quelques détails, ne pouvaient évidemment dénaturer la pensée de l'auteur, ni causer la plus légère atteinte à sa renommée, le défaut de préjudice suf65 toute signification de ce jugement et même | tinguer: si un article doit paraître dans la avant qu'il ne fût exécutoire, ne rend pas la partie condamnée non recevable à interjeter appel, alors qu'il ressort des circonstances qu'en faisant ce que le jugement a prescrit, cette partie n'a pas eu l'intention de l'exécuter (1). (C. proc., 443.) (Delprat C. Charpentier.) Le sieur Delprat s'est pourvu en cassation contre l'arrêt de la Cour de Paris du 16 mars 1865 rapporté Vol. de 1865, p. 709. 1er Moyen. Violation de l'art. 1338, C. Nap., et fausse application de l'art. 443, C. proc., en ce que l'arrêt a déclaré recevable l'appel interjeté par le sieur Charpentier du jugement qui le condamnait à insérer la lettre à lui adressée par le sieur Delprat, bien qu'il eût exécuté ledit jugement en faisant volontairement l'insertion ordonnée. 2a Moyen. Violation de l'art. 1er de la loi des 19-24 juill. 1793, des art. 544, 545 et 1382, C. Nap., et de l'art. 11 de la loi du 25 mars 1822, en ce que l'arrêt attaqué a décidé que l'éditeur d'une revue qui faisait paraître sous le nom et avec la signature d'un rédacteur, un article auquel il avait seul, et sans le consentement de celui-ci, apporté des modifications, était en droit de se refuser à l'insertion d'une lettre écrite par ce rédacteur dans le but d'indiquer au public que l'article ainsi publié n'était pas son œuvre. - Si, a-t-on dit, l'auteur d'un ouvrage ou d'un écrit quelconque peut y apporter les changements qu'il juge convenables, l'éditeur ne saurait avoir la même faculté; il est interdit à celui-ci d'apporter, sans le consentement de l'auteur, la moindre modification revue sans le nom de l'auteur, alors, cet article n'étant pas livré au public comme une œuvre individuelle, le directeur de la revue doit être présumé avoir, à moins de stipulations contraires, le droit de modifier et de ne pas reproduire textuellement le manuscrit de l'auteur. Mais lorsque, au contraire, l'article doit être publié avec la signature de l'auteur, les principes ci-dessus rappelés doivent recevoir complétement leur application. Le propriétaire de la revue n'est, en effet, dans cette hypothèse, que l'éditeur de l'article; il le présente au public, non comme son œuvre, non même comme l'œuvre collective de la rédaction de la revue, mais comme l'œuvre individuelle exclusive de l'auteur dont il revêt le nom et la signature. Il est vrai qu'une revue n'est pas seulement une réunion d'articles, qu'elle représente un ensemble de doctrines littéraires, artistiques, morales ou politiques; qu'il faut donc, autant que possible, que les articles soient conçus dans le même esprit, inspirés par les mèmes idées; qu'enfin c'est au directeur de la revue qu'il appartient d'établir entre les articles émanés d'auteurs différents l'harmonie et l'unité nécessaires. Cela est incontestable; aussi faut-il reconnaître que ce directeur ne sera pas tenu d'insérer dans sa revue des articles qui ne seraient pas conformes à cette pensée commune; qu'il aura le droit de se refuser d'une manière absolue à les publier si les auteurs ne consentent pas à tous les changements, suppressions et corrections qu'il exigera d'eux; qu'enfin il a, à cet égard, un droit de veto souverain. - Mais c'est là que s'arrête son au manuscrit qui lui a été remis. C'est ce que | droit. Il peut refuser l'insertion; soit; mais reconnaissent tous les auteurs (Pardessus, Dr. comm., t. 1, n. 310; Renouard, Dr. d'aut., t. 2, p. 327, 331; Ed. Blanc, de la Contref., p. 93). Ce principe doit-il être également appliqué lorsqu'il s'agit de déterminer les droits, non plus de l'éditeur d'un ouvrage, mais du directeur d'une revue? Il faut dis firait, sans doute, pour faire écarter une condamnation à des dommages; mais que les tribunaux n'en devraient pas moins consacrer son droit à s'opposer à des rectifications faites malgré lui, » et il cite comme consacrant ces principes un jugement du tribunal civil de la Seine du 17 août 1814. Il faut toutefois observer que M. Renouard et le jugement qu'il rappelle n'ont examiné la question qu'au point de vue d'un éditeur publiant un livre, œuvre d'un seul auteur, et non, comme dans notre espèce, au point de vue d'une revue périodique écrite par divers collaborateurs sous la direction d'un propriétaire éditeur. Faisons remarquer, en terminant, que notre arrêt qualifie de droit de propriété celui de l'auteur sur l'article de revue modifié. Cette expression est-elle bien exacte? Que l'auteur d'un roman, d'une série d'articles sur un sujet donné insérés dans un journal ou tout autre recueil pé il lui est interdit non moins absolument qu'à l'éditeur de porter la main, sans le consentement de l'auteur, sur l'œuvre qui lui est confiée. De là, il suit que si l'article remis au directeur d'une revue et publié sous la signature individuelle de son auteur, ne l'a été qu'avec des changements non autorisés, celui-ci a le riodique, conserve la propriété de son œuvre quand il n'y a pas renoncé en faveur du publicateur du journal, nous l'admettons. Mais en estil de même de l'auteur de simples articles de polémique on de revue courante, tel que celui dont la modification a donné lieu au procès ici jugé (il s'agissait d'une chronique politique)? Nous avons peine à le croire, et il nous semble qu'à moins de réserve expresse, la propriété de pareils articles qui n'ont, du reste, que l'intérêt du moment, reste au propriétaire du recueil qui les a publiés, après en avoir payé le prix arrêté entre lui et son collaborateur. (1) Mais, en principe, il y a acquiescement lorsqu'on exécute un jugement avant toute poursuite. V. Rép. gen. Pal. et Supp., v° Acquiescement, n. 211 et suiv.; Table gén, Devill. et Gilb., eod. verb., n. 52 et suiv, droit de faire connaître au public, par l'intermédiaire de la revue elle-même, que l'article publié sous son nom n'a pas paru tel qu'il est sorti de sa plume. - L'arrêt attaqué semble bien le reconnaître en principe; mais, dit-il, « aucune des modifications n'a pu avoir pour effet de dénaturer le sens et l'esprit de l'article, ni de compromettre la responsabilité ou la réputation de l'écrivain». Puis il en conclut que le sieur Delprat n'ayant éprouvé aucun préjudice est sans droit pour demander, à titre de réparation, l'insertion de sa lettre. - Il n'est pas besoin de faire ressortir toute la gravité d'une telle doctrine. Comment admettre que le directeur d'une revue puisse faire à l'insu de l'auteur toutes les corrections qu'il croira convenables, à la seule condition « de ne pas dénaturer le sens et l'esprit de l'article, et de ne pas compromettre la responsabilité de l'écrivain » ? Ne serait-ce pas méconnaître les conditions les plus essentielles de toute publication littéraire? Il ne suffit pas à l'écrivain que sa pensée ne soit pas dénaturée, il faut qu'elle soit exprimée dans la forme qu'il a choisie. Un membre de phrase supprimé, un mot remplacé par un autre, n'est-ce pas assez parfois pour enlever au style toute sa force et toute sa gráce? Cette expression, est-ce à l'auteur de l'article ou au directeur de la revue qu'il appartient de la choisir? Il ne saurait, à cet égard, y avoir de doute. A une époque où trop d'auteurs sont plus préoccupés de beaucoup écrire que de bien écrire, il serait dangereux d'encourager une théorie qui, en transportant au directeur une faculté qui appartient exclusivement à l'auteur, serait aussi contraire aux principes du droit qu'aux exigences de l'art, et il convient de décider que la forme est, comme le fond, la propriété inviolable de l'auteur. Il faut donc reconnaître que si le défaut de préjudice constaté par l'arrêt, eu égard à la nature des changements apportés par le directeur de la revue, suffisait pour refuser à l'auteur toute action en dommagesintérêts, la Cour impériale n'en devait pas moins consacrer le droit de l'auteur en ordonnant l'insertion dans la revue de la lettre émanée de lui et en prévenant les lecteurs que l'article publié sous son nom avait été modifié par une plume étrangère. Il importe, au reste, d'autant plus de maintenir avec fermeté les droits des auteurs vis-à-vis des directeurs de revues, que la loi du 18 juill. 1850, en exigeant la signature des auteurs, a voulu faire peser sur eux une plus lourde responsabilité, et empêcher que l'œuvre individuelle des rédacteurs ne fût absorbée dans l'œuvre collective de la rédaction. S'il a paru nécessaire au législateur que l'auteur fût responsable de tout ce qu'il a écrit, il faut aussi qu'il ne le soit que de ce qu'il a écrit. On terminait en disant qu'il serait difficile de comprendre, lorsque toute person ne nommée ou désignée dans un journal ou un écrit périodique a, aux termes de l'art. 11 de la loi du 25 mars 1822, la faculté d'y faire insérer une réponse, que l'auteur dont la signature a figuré au bas d'un article qui n'est pas son œuvre exclusive ne pût pas désavouer, en exigeant l'insertion de sa réclamation, la collaboration étrangère qui, au mépris de la loi et des convenances, se serait imposée à lui. ARRÊT. LA COUR; - Sur le premier moyen: -Attendu que Charpentier a inséré la lettre de Delprat dans le numéro de la Revue nationale du 10 août 1864, non-seulement avant toute signification du jugement du 5 du même mois qui l'avait condamné à faire l'insertion, mais encore avant que ledit jugement fût exécutoire; que l'arrêt attaqué a pu, par appréciation de ce fait et des autres circonstances de la cause (1), déclarer que l'insertion n'avait pas eu lieu en exécution dudit jugement, et qu'en écartant par ce motif la fin de non-recevoir opposée à Charpentier contre son appel et tirée de l'exécution prétendue du jugement du 5 août 1864, ledit arrêt n'a fait que se livrer à une appréciation de faits qui ne saurait constituer la violation des dispositions de loi invoquées par le demandeur; -Rejette le pourvoi en ce point; Mais sur le deuxième moyen : - Vu l'art. 1er de la loi des 19-24 juill. 1793 et l'art. 1382, C. Nap.; - Attendu que si la situation du directeur d'une publication ou revue périodique et celle de l'éditeur d'un livre ne sont pas identiques à tous égards, ce n'est pas à dire quele directeur de la revue puisse, plus que l'éditeur du livre, se substituer à l'auteur dans les actes dérivant du droit de propriété, et spécialement modifier, sans l'assentiment de ce dernier, le manuscrit qu'il publie; que, sans doute, obligé d'assurer l'exactitude de sa publication et de la maintenir dans ses limites et dans son cadre, le directeur peut être contraint par les circonstances à modifier seul les manuscrits de ces collaborateurs; mais que cette nécessité doit se concilier avec le droit des écrivains, qu'elle ne saurait absorber et détruire, et que notamment elle ne peut avoir pour effet d'obliger ceux-ci à accepter les modifications faites à leur insu dans les écrits par eux livrés et à couvrir de leur nom les change (1) Voici comment sont conçus les motifs de l'arrêt sur ce point: « Considérant que si Charpentier a inséré la lettre de Delprat dans la Revue nationale du 10 août 1864, après s'y être refusé d'abord, rien n'établit qu'il ait voulu, en la publiant, exécuter le jugement qui l'y avait condamné. Que ce qui prouve qu'il a eu une intention toute différente, c'est le soin qu'il a pris, dans les observations dont il a accompagné cette lettre, de ne faire aucune allusion à son procès; d'où il suit qu'il n'en résulte pas une fin de non-recevoir contre son appel. » présence de modifications, non consenties, dont, en sa qualité d'auteur signataire de l'article, il lui appartenait d'apprécier le caractère et l'importance, il ne dut pas être reçu à affirmer ce droit au moyen de la lettre dont il avait réclamé l'insertion; - D'où ments et les corrections auxquelles ils n'ont pas participé; - Attendu, dans l'espèce, que J'article de chronique politique, inséré par Charpentier dans la Revue nationale du 10 juill.1864. a été par lui présenté aux lecteurs de la revue, non comme son œuvre personnelle ou comme l'œuvre collective de la ré-il suit qu'en décidant le contraire, et en niant, daction, mais comme l'œuvre individuelle et exclusive de Delprat dont la signature figurait au bas de l'article; que, néanmoins, Ja chronique, écrite en effet par Deiprat, n'a pas été publiée telle que la rédaction en avait été arrêtée entre lui et le directeur de la revue; et qu'outre les corrections convenues, l'écrit a subi, sans l'agrément de l'auteur, des modifications et des coupures dans une mesure qui n'est pas contestée entre les parties; Attendu qu'en cet état des faits résultant des qualités de l'arrêt attaqué, ledit arrêt ne pouvait pas refuser, en principe, à Delprat, le droit d'exiger l'insertion, en principe, le droit, pour Delprat, de protester à raison de coupures et de corrections qu'il reconnaissait avoir été faites à l'insu de celui-ci, l'arrêt attaqué a méconnu les règles les relatives relati au droit de propriété et ex pressément violé les dispositions ci ci-dessus visées; - Casse, etc. Du 21 août 1867. - Ch. civ. MM. Pascalis, prés.; Pont, rapp.; Blanche, av. gén. (concl. conf.); Tambour et Groualle av Bolle dans la revue, d'une lettre annonçant que JOURNAL, RÉDACTEUR, REVOCATION, INDEM son écrit avait été modifié; - Que l'arrêt objecte vainement queles corrections avaient été faites en petit nombre, qu'elles avaient, de même que les coupures, un caractère insignifiant, que la pensée de l'auteur n'en avait pas été dénaturée, que ni sa responsabilité ni sa réputation n'avaient été compromises, et qu'en conséquence aucun préjudice ne lui avait été causé; - Qu'il pouvait bien résulter de ces constatations qu'à défaut d'un dommage matériel Delprat n'aurait pas été fondé à réclamer une réparation | déterminé à la rédaction principale du jour pécuniaire; mais qu'il n'en résulte aucunement que ce dernier ne dût pas être admis à exciper de son droit de propriété, et qu'en (1) Le premier arrèt rendu par la Cour de cassation dans la même affaire, le 24 janv. 1865 (P. 1865.16.-S.1865.1.11), avait déterminé d'une manière fort nette, comme cela résultait déjà d'un précédent arrêt du 31 août 1864 (P.1864.1231. -S.1864.1.479), quels sont les droits respectifs du propriétaire d'un journal et des rédacteurs qu'il s'est adjoints. D'une part, la responsabilité qui pèse sur le propriétaire exige qu'il puisse instantanément se séparer de rédacteurs dont la collaboration serait de nature à compromettre sa propriété; de l'autre, la dignité personnelle de l'écrivain veut qu'il lui soit loisible de rompre sans délai avec une entreprise dans laquelle on lui demanderait le sacrificede ses convictions. L'arrêt que nous recueillons ne méconnaît pas ces principes; mais, tout en les rappelant, quoique d'une manière moins accentuée que les arrêts précédents, il décide que, s'il s'agit d'un rédacteur engagé depuis longtemps pour un travail déterminé, le propriétaire ne saurait, en l'absence de tout motif sérieux, le congédier instantanément sans lui payer une indemnité en rapport avec le préjudice que peut lui causer son renvoi précipité. C'est ce que reconnaissaient également les arrêts précités de 1864 et de 1865, lesquels n'ont prononcé la cassation de décisions accordant à des rédacteurs congédiés des dommages-intérêts, que parce qu'il Si le propriétaire d'un journal est entière ment libre quant au choix et au maintien de ses rédacteurs, et s'il peut, dès lors, mettre fin quand bon lui semble à leur collabora tion, l'exercice de ce droit doit, toutefois, se concilier avec l' l'équité, qui ne permet pas, en l'absence de motifs sérieux, de congédier brusquement et sans indemnité un écrivain engagé depuis longtemps et pour un travail nal, moyennant une rétribution annuelle en rapport avec l'importance de son concours (1). (C. Nap., 1134, 1135, 1370, 1382.) 260 ne résultait pas des motifs de ces décisions que ces rédacteurs eussent été engagés pour un temps ou pour un travail déterminés, ou que la révocation fût intervenue dans des circonstances constituant le propriétaire du journal en état de faute. - La Cour d'Orléans, dont l'arrêt faisait aujourd'hui l'objet du pourvoi, avait évité cet écueil et cons taté, en fait, l'existence d'un engagement durant déjà depuis longues années, pour un travail de terminé; aussi sa décision, qui mentionnait en outre l'absence, dans la cause, d'aucun motif denature à exiger une rupture immédiate, a-t-elle ét maintenue. Comme conséquence du principe ci-n dessus posé, il est bien évident que si la rupture, sans motifs sérieux, de l'engagement contracté pour un travail déterminé, venait du rédac-b teur, celui-ci, par une juste reciprocité, serait tenu à des dommages-intérêts envers le propriétaire dont une cessation brusque de collaboration pourrait troubler et compromettre l'entreprise. On comprend, au reste, que, dans l'appréciation de pareils débats, l'ancienneté des rapports existants entre le journal et le rédacteur, le plus ou moins d'importance du travail dont il aura été chargé, et la nature des motifs donnant naissance à a la la rupture, rupture, auront nécessairement une grande influence. - V. V. les observations jointes l'arrêt précité de 18 and 19 ott |