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à raison des changements soit dans le service des chemins de fer, soit dans les annon ces commerciales et industrielles qui y sont jointes ubaoo 20-novib 299

(Enregistr. C. le journ. le Train.)- ARRE LA COUR; Vu l'art. 6 du décret du 17 fév. 1852; Attendu, en fait, que l'écrit dit le Train, indicateur spécial des chemins de fer, a pour objet la publication de documents concernant le service des chemins de fer et l'indication des divers établissements de commerce ou d'industrie existant sur le parcours de ces chemins; qu'il paraît à des époques successives déterminées par la nécessité de modifier les annonces et indications, en raison, soit des changements qui se font dans le service des chemins de fer, soit des modifications, renouvellements et augmentations dans les établissements commerciaux ou industriels; que les numéros ou tirages divers ne sont donc pas uniquement la reproduction d'une publication antérieure, mais une publication nouvelle qui se rattache à la première par le plan et le but proposé et qui s'y annexe et en fait la suite, avec les changements nécessités au jour le jour par les changements dans l'état des choses Que cette continuation des nu; méros ou tirages les uns par les autres rend ainsi successive la publication qui en est faite en vue d'une même entreprise, et que la pé riodicité dans cette publication successive résulte suffisamment de son retour néces saire à des époques plus ou moins rapprochées et plus ou moins connues à l'avance, mais qui, par la

quence du place des choses, sont la consé

même et du but de l'écrit

publié ; --- Qu'il suit de là que le Train, indicateur spécial des chemins de fer, constitue un écrit périodique, et que, n'étant pas compris dans l'exception établie par le décret du 28 mars 1852 en faveur des écrits exclu

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détail du service de diverses lignes de chemins de fer sont assujetties au timbre, lorsqu'elles contiennent en outre des annonces industrielles : Trib. de la Seine, 9 janv. 1858 et 17 janv. 1859 (Pal. Bull. d'enreg., art. 530 et 586).-V. le jugement du trib. de la Seines du 23 mai 1863, cassé par l'arrêt ici rapporté (Ibid., art. 856)!!

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(1-2) Par deux arrêts du 21 mars 1862 (P. 1862.911.-S.1862.1.541), la Cour de cassation avait déjà jugé, comme l'a fait, dans l'espèce actuelle, la Cour d'assises du Var, qu'en pareil cas, soit da condamnation, soit l'acquittement de l'étranger par les juges de son pays, ne mettait pas obstaclesȧnce qu'il fût poursuivi de nouveau en France. Une doctrine analogue a été aussi consacrée par un arrêt de la Cour de cassation de Belgique du 31 oct. 1859 (P.1862.914). Nous avons, en recueillant les arrêts du 21 mars 1862, donné le texte da rapport et des remarquables observations présentées alors par M. le conseiller Faustins Hulierrotasestrouvent résumés d'une manière lumineuse tous les arguments qui, sur

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En est-il ainsi, même alors qu'après la décision des juges étrangers, le pays de cet accusé a été réuni à la France?—Non rés. (2). 2o L'arrêt incident par lequel la Cour d'assises statue sur une exception de chose jugée proposée par l'accusé après la lecture de l'acte d'accusation, a le caractère d'arrét interlocutoire; dès lors, et à défaut de pour voi spécial dirigé contre cet arrét, l'accusé n'est pas recevable à comprendre le rejet de l'exception de chose jugée parmi les moyens du pourvoi forme contre l'arrêt même de condamnation (3)(C.inst. crim.; 4161) 780

L'accusé est-il non recevable, pour défaut d'intérêt, à déférer à la Cour de cassation! l'arrêt qui prononce contre lui une peine,

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cette grave difficulté, peuvent être invoqués pour ou contre la doctrine adoptée par la Cour. qui, dans l'espèce que nous relatons aujour d'hui, donnait un nouvel intérêt à la question, c'est, d'une part, qu'il ne s'agissait plus de l'en-s visager seulement en présence du Code d'instruction criminelle, mais aussi en présence de la loi du 27 juin 1866 qui est venue apporter quelques modifications à ce Code.-C'est, d'autre part, que le pays dans lequel l'étranger avait été déjà jugé une première fois, était devenu, avant la nouvelle poursuite dirigée en France, un pays français, DN Aussi, bien que par suite de l'adoption d'une fin de non-recevoir, la Cour de cassation n'ait pas eu à résoudre la question envisagée à ce double et nouveau point de vue, croyons-nous d'un haut intérêt de reproduire le rapport@présenté par M.de conseiller Salneuve et dans lequel cos di vers points ont été savamment examines (V! les autorités citées dans ce rapport), wog 002 sibisy go(3) V. les indications dans le rapport de M. le conseiller.asvin siste 1.7

alors que cette peine doit se confondre avec celle plus forte dont l'a frappé une décision | antérieure pour un autre fait ? Arg. nég. dans le rapport (1). (C. inst. crim., 365 et 408.)

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2

En mai 1857, deux individus, se donnant le nom de Vincent, ouvrirent à Toulon un magasin de dentelles. Six mois plus tard, ils disparurent emportant avec eux pour 26,000 fr. de valeurs. Avant leur arrivée à Toulon, ces individus s'étaient déjà rendus coupables à Compiègne d'un fait analogue. L'information qui eut lieu révéla qu'ils se nommaient en réalité Michel et qu'ils étaient originaires du canton de Saint-Jean-de-Maurienne (Savoie). Par arrêt de la chambre d'accusation de la Cour impériale d'Aix, du 30 déc. 1858, ils furent renvoyés devant la Cour d'assises du Var à raison du crime de banqueroute frauduleuse, commis par eux à Toulon. Le 28 janvier 1859, arrêt de cette Cour d'assises qui les condamne par contumace chacun à huit ans de travaux forcés. Plus tard, et par suite de la communication qui fut faite, sur l'ordre du garde des sceaux, à l'autorité judiciaire sarde, de la procédure suivie en France, intervint, le 12 avril 1859, un arrêt de la Cour d'appel de Turin qui, rendu contradictoirement avec Joseph Michel, l'un des deux frères, le condamna, pour crime de banqueroute frauduleuse commis à Toulon, à trois ans de réclusion. Après avoir subis buits mois de sa peine, Joseph Michel fut grâcié des 23 décembre 1859. Postérieurement, et par sénatus-consulte du 12 juin 1860, la Savoie, et par conséquent Saint-Jean-de-Maurienne, pays d'origine de Joseph Michel, fut réunie à la France.Les choses étaient en cet état, lorsque Joseph Michel, rentré en France, fut arrêté et condamné en 1865, par le tribunal correctionnel de Grenoble, à trois ans d'emprisonnement pour escroquerie.-Le 13 nov. de la même année, le procureur impérial de Toulon, avisé de cette arrestation, réclama ledit Michel pour lui faire purger sa contu, mace; mais l'accusé fut, auparavant, jugé au Havre pour d'autres délits qu'il y avait commis, puis par la Cour d'assises de l'Oise, qui le condamna contradictoirement, mle

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13 mars 1866, par arrêt devenu définitif, à huit ans de travaux forcés, pour la banqueroute frauduleuse commise à Compiègne. 293 C'est après ces diverses condamnations qu'il a 1866, devant le jury du comparu le 28 plat à la Cour décider qu'il n'y avait lieu de passer outre au jugement, parce qu'il avait déjà été poursuivi et condamné et avait subi sa peine pour le même crime à raison duquel le ministère public demandait qu'il fût jugé par la Cour d'assises du Var 139 1st

1

Le 28 juill. 1866, arrêt de la Cour d'assises qui rejette l'exception de chose jugée par les motifs suivants: «Attendu qu'il est constant, en droit criminel français, qu'un même fait ne peut donner lieu à deux poursuites successives; que le respect de la chose jugéer est un principe de justice et d'équité qui doit être appliqué tout aussi bien en matière criminelle qu'en matière civile; que ce principe tutélaire et social a été consacré par les dispositions de l'art. 360, C.inst. crim. —Attendu qu'il faut se demander si la maxime Non bis in idem, qui est une règle incontestable de notre législation française, peut s'appliquer à un jugement de condamnation rendu à l'étranger pour un crime comiuis en France par un étranger, et si Michel, condamné en Italie, à raison de la banqueroute frauduleuse commise à Toulon en 1857, peut-être poursuivi et jugé en France pour le même fait;

Attendu que, si le principe de la chose jugée prend sa source dans un sentiment d'équité qui défend de juger deux fois la même personne à raison du même fait, il faut néanmoins mettre ce principe en balance avec cet autre, non moins respectable, de la souveraineté territoriale et pénale; Attendu que chaque nation a, non-seule ment le devoir, mais encore le droit de faire respecter dans son sein l'ordre et la sécurité des citoyens; qu'un crime commis sur le territoire porte atteinte à ce respect et produit un désordre moral que cette nation doit réprimer; que ce droit de punir, qui est le corollaire et l'apanage de la souveraineté, trouve sa consécrations dans l'art. 13 du G. Nap. et qu'il obliges tous ceux qui se trouvent sur le sol français jy Attendu qu'il importe à la dignité et à la sécurité d'un pays de faire respecter ses lois ; qu'une

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au cas où la peine encourue devrait se confondre avec celle appliquée par une condamnation antérieure, le juge n'en doit pas moins statuer sur la culpabilité de l'accusé, non-seulement pour les condamnations accessoires à prononcer dans l'inté

4) Le rapport de M. le conseiller Salneuve paraissait pencher pour la non-recevabilité du pourvoi, en se fondant sur ce que la peine pro noncée ne devant pas en réalité être subie par de condamné, il y avait pour lui absence d'intérêt à faire tomber l'arrêt de condamnation. Cette dog-rêt de la partie civile et du trésor, mais aussi pour l'effet moral du châtiment encouru. Or, sile ministère public est en droit de poursuivre une con+ damnation pour son effet moral, l'accusés n'a-tvil pasje pars identité, de, motifs, le droit de chercher asse purger de l'effet moral de la condamnation qui l'a frappé, et ce, indépendamment de l'appli+ eation matérielle de la peine prononcéed 975insor

trine ne nous semblerait pas admissible. Il est évident, en effet, que le condamné a toujours un intérêt moral à se purger d'une condamnation contre lui, prononcée. Or, cet intérêt suffit pour rendre son pourvoi recevable. Ikacau reste, été jugé par un arrêt récent de la Cour de cassation du 3 janv. 1867 (V. l'article suivant), que, même

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répression intervenant à l'étranger, pour un crime commis en France, ne peut ni ne doit désarmer la justice territoriale française; qu'elle seule est juge de la question de savoir si le désordre matériel et moral produit par un crime est suffisamment réparé par le châtiment infligé au dehors; que lui enlever ce droit, ce serait porter une atteinte grave à la souveraineté et accorder aux étrangers un dangereux privilége; Attendu que, les jugements criminels rendus en pays étranger ne pouvant être exécutés en France, la réparation obtenue serait souvent insuffisante et dérisoire; Attendu que l'analogie qu'on voudrait tirer de l'art. 7, C. inst. crim., n'est point applicable à l'espèce; que cet article, en permettant de poursuivre, à son retour en France, le Français qui s'est rendu coupable à l'étranger d'un crime contre un Français, reconnaît la prééminence de la juridiction territoriale sur la juridiction personnelle, en ajoutant qu'il ne pourra en être ainsi que dans le cas où le coupable n'aurait pas été poursuivi et jugé déjà à l'étranger; que c'est là une protection spéciale que la France accorde à ses nationaux outragés à l'étranger et une conséquence de la juridiction personnelle qu'elle exerce toujours sur ses régnicoles;-Attendu que ce n'est pas à cause de la maxime Non bis in idem que la poursuite est prohibée à l'étranger quand la justice locale et territoriale est satisfaite, mais bien parce que la juridiction personnelle n'a pour but que de suppléer, dans certains cas, à l'insuffisance de la juridiction territoriale; Attendu que dans la pratique, l'application absolue de cette maxime: Non bis in idem, conduirait souvent à des résultats fâcheux et regrettables; que l'étranger, jugé dans son pays par ses compatriotes, loin du théâtre du crime, trouverait souvent une indulgence trop grande, et que la réparation ne serait pas toujours en rapport avec la gravité du crime; Attendu qu'en l'absence de toute disposition légale, ce sont ces principes. tutelaires de la souveraineté nationale qui doivent être suivis ; Par ces motifs, déclare les conclusions prises au nom de Michel mal fondées, l'en déboute, et ordonne qu'il sera passé outre aux débats. >>

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Les débats ont eu alors leur cours régulier, et Michel a été condamné par arrêt du même jour à six ans de réclusion, laquelle condamnation devait se confondre avec celle à huit ans de travaux forcés, prononcée par la Cour d'assises de l'Oise.

POURVOI en cassation contre cet arrêt de

condamnation a été formé par Michel, pour violation du principe de la chose jugée, mais sans énoncer que son pourvoi était également étendu à l'arrêt incident qui, préalament aux débats sur le fond, avait rejeté l'exception proposée à ce sujet par la défense.

M. le conseiller Salneuve a présenté les observations suivantes :

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« La Cour d'assises du Var a-t-elle pu juger le demandeur et passer outre à sa condamnation, malgré la sentence de la Cour d'appel de Turin ? -Pour que cette question pût être résolue négativement, il faudrait que les jugements rendus å l'étranger eussent en France l'autorité de la chose jugée, et qu'ils y fussent exécutoires.-La question de savoir si les jugements rendus par les tribunaux étrangers sont exécutoires en France, se rattache plutôt au droit politique qu'au droit civil proprement dit. Or, c'est un principe universel qui a son fondement tant dans les droits de souveraineté que dans l'indépendance des nations, que l'autorité publique d'une souveraineté est renfermée dans les limites de son territoire, qu'elle expire à la frontière. L'autorité des magistrats qu'elle institue est nécessairement restreinte dans les mêmes limites. Par conséquent, les jugements qu'ils prononcent sont sans force, sans aucune puissance, dans les pays soumis à une autre domination. Ce principe est de tous les temps, de tous les pays. De toute antiquité il a fait partie du droit public en France. Il y a été proclamé, en termes exprès, par l'art. 121 de l'ordonnance de 1629, ainsi conçu : Les jugeaments rendus... ès royaumes et souverainetés étrangères, pour quelque cause que ce soit, « n'auront aucune hypothèque ni exécution en ⚫ notre royaume; et nonobstant ces jugements, nos sujets contre lesquels ils ont été rendus << pourront de nouveau débattre leurs droits comme << entiers par-devant nos officiers. -Cet article contient deux dispositions: la première proclame le principe général, absolu, que les jugements rendus à l'étranger ne sont pas exécutoires en France; la seconde renferme une application de ce principe en faveur des Français.-Toutes nos constitutions depuis 1789 ont gardé le silence le plus complet sur le principe que consacre cet article, et ni le Code Napoléon ni le Code de procédure civile ne l'a abrogé. L'art. 546 de ce dernier porte, en effet, que « les jugements rendus par les tribunaux étrangers... ne seront susceptibles d'exécution en France, que de la ⚫ manière et dans les cas prévus par l'art. 2123, C. Nap.-D'après ce dernier article, l'hypothèque ne peut résulter des jugements rendus en pays étranger, qu'autant qu'ils ont été dé⚫ clarés exécutoires par un tribunal français, sans préjudice des dispositions contraires qui peua vent être dans les lois politiques ou dans les a traités. » Or, il résulte évidemment de ces dispositions, que les jugements rendus à l'étranger ne peuvent être déclarés exécutoires en France que dans les cas spécifiés par la loi. Elles confirment, par conséquent, le principe ancien, et n'y dérogent que par exception, pour les cas spécialement prévus. justifiée par un avis du Conseil d'Etat du 34 mai Cette conséquence semble encore 1806, approuvé le 4 juin suivant. pece, un étranger avait été condamné en France Depuis, son pays étant réuni à la France, il souà l'amende pour un délit qu'il y avait commis. tint que, par une juste réciprocité du droit proclamé par l'art. 121 de l'ordonnance de 1629, en

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faveur des Français condamnés dans des souverainetés étrangères, les jugements rendus en France contre des étrangers, ne pouvaient pas être exécutés dans la souveraineté à laquelle appartenaient ceux-ci, et qu'en devenant Français depuis que ces jugements avaient été rendus, ils n'avaient pas perdu l'exception qui leur avait été acquise ab initio contre l'exécution de ces jugements dans leur domicile. Mais son exception fut rejetée par le motif que les étrangers, dont le pays avait été réuni à la France, ne pouvaient invoquer une exception dont ils ne jouissaient pas avant cette réunion, puisque, avant cette réunion, les jugements rendus en France étaient exécutoires dans toute l'étendue de son territoire (S. 1re série des Lois annotées, p. 719).—«Si, par cet avis,

dit M. Merlin (Rép., v° Souveraineté, § 6), le • Conseil d'Etat reconnaît qu'en thèse générale, ⚫ les jugements rendus en France contre des étran⚫gers sont sans force dans leur domicile, il re⚫ connaît aussi nécessairement que les jugements ⚫ rendus en pays étrangers contre des Français ⚫ ne peuvent pas, en thèse générale, être exécu⚫tés en France; il reconnaît aussi nécessairement que le principe proclamé par l'art. 121 de l'ordonnance de 1669, n'est abrogé ni par le Code C'est ⚫ de procédure, ni par le Code civil. donc un principe incontestable que les jugements rendus à l'étranger ne sont pas exécutoires en France, qu'ils y sont sans force, sans aucune puissance. C'est en vertu de ce principe que, le 27 nov. 1828, vous avez jugé que l'aggravation de peine prononcée par l'art. 56, C. pén., en cas de récidive, ne doit pas être appliquée lorsque la première condamnation est émanée d'un tribunal étranger; attendu, avez-vous dit, que les dis

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positions de l'art. 56, C. pén., pour l'aggrava• tion des peines en cas de récidive, quelque gé⚫nérales et absolues qu'elles soient, ne peuvent s'appliquer qu'aux jugements et arrêts rendus par les Cours et tribunaux français, par la con« sidération que les limites du territoire sont les limites de la souveraineté et que ce serait don⚫ner, contre tous les principes du droit public, • une exécution en France à un jugement rendu par un tribunal étranger, que de lui imprimer une force active par l'application des peines de la récidive. » - Il suit de là que les jugements rendus à l'étranger ne sont pas susceptibles d'avoir, en France, l'autorité de la chose jugée, et qu'ils ne peuvent y donner lieu à l'application de la maxime Non bis in idem, qui s'oppose à ce qu'un inculpé soit jugé deux fois pour le même fait, car ce serait faire produire effet à ces jugements, ce serait leur accorder une force, une puissance qui leur sont péremptoirement refusées. La chose jugée est un bienfait, une institution de la loi qui ne tire sa force que de l'autorité dont les juges sont revêtus par la loi du pays où le jugement a été rendu. Elle ne peut, par conséquent, étendre son effet au delà des limites du territoire sur lequel s'exerce la souveraineté de qui elle émane. Dès lors, l'étranger qui a été jugé par les tribunaux de son pays, pour un crime commis par lui en France, ne peut, si, à son retour sur le territoire de l'empire, il est de nouveau poursuivi pour le même fait, opposer l'autorité de la

chose jugée en son pays et invoquer la maxime Non bis in idem.-C'est en vain qu'on voudrait opposer au principe de la souveraineté territoriale, que notre droit public fait prévaloir sur cette maxime les anciens art. 5, 6 et 7, C. inst. crim., ainsi que les mêmes articles modifiés par la loi du 27 juin 1866. Loin de le contredire, ces articles n'en sont, au contraire, que la confirmation.-Si, en effet, les anciens art. 5 et 6, C. instr. crim., permettent de poursuivre en France, soit le Français, soit l'étranger arrêté en France, qui se sont rendus coupables, hors des frontières, de crimes attentatoires à la sûreté de l'Etat, de contrefaçon du sceau de l'Etat, de monnaies nationales ayant cours, de papiers nationaux et de billets de banque autorisés par la loi, c'est parce que ces crimes se continuent, produisent tous leurs effets, et se consomment sur le territoire de la souveraineté française, par le préjudice qu'ils y causent au crédit et à la tranquillité publics. C'est donc toujours en vertu du principe de la souveraineté territoriale que s'exerce la poursuite. Quant à l'art. 7, il a été puisé dans notre ancienne législation. La souveraineté française n'exerçait pas seulement une juridiction territoriale sur tous ceux qui habitaient le territoire, elle en exerçait une autre personnelle sur tous les nationaux, que cette juridiction suivait à l'étranger. Le législateur avait fait de la loi pénale une sorte de statut personnel, comme il avait fait autrefois un statut personnel de la loi sur l'étar et la capacité des personnes. Partout où il allait, la loi pénale s'attachait au Français, et, à son retour en France, elle lui demandait compte des crimes qu'il avait pu commettre à l'étranger. C'est ce qu'attestent tous les anciens criminalistes, notamment Jousse (t. 1, p. 428) et le nouveau Denizart (v° Délit). Le premier de ces jurisconsultes en donnait pour raison « qu'il est intéres<< sant pour la République de purger la province « des citoyens qui la déshonorent par leurs cri⚫ mes, ou du moins de les punir de quelques peines exemplaires, de peur que, ces mêmes ⚫ crimes demeurant impunis, ceux qui les ont ⚫ commis ne se portassent à en commettre encore de plus grands, et que leur exemple ne <vint à corrompre les autres citoyens. D Ce droit ne fut point rappelé dans le Code pénal de 1791, mais il fut de nouveau proclamé par l'art. 11, C. 3 brum. an 4, lequel portait: Tout Français qui s'est rendu coupable, hors du ter⚫ritoire de la République, d'un délit auquel les ⚫ lois françaises infligent une peine afflictive ou <infamante, est jugé et puni en France, lors

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qu'il y est arrêté. »-Après une vive opposition de MM. Treilhard et Bérenger, qui soutenaient que la loi pénale était essentiellement territoriale, le même droit fut maintenu dans le Code d'instruction criminelle. Toutefois, il ne le fut qu'avec cette double restriction que le Français n'aurait pas été poursuivi et jugé en pays étranger, et que le Français offensé rendrait plainte contre lui, ce que ne disait pas le Code de l'an 4.-La première de ces restrictions est un hommage rendu au principe de la souveraineté territoriale. Le statut personnel ne sera appliqué qu'autant que le Français se sera soustrait à

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ne le pouvait autrefois, par suite des facilités
nouvelles de circulation, il ajoute : Les Etats
se refusant à livrer leurs régnicoles, l'unique
moyen d'empêcher l'impunité, et avec elle les
progrès du crime, c'était de proclamer l'empire
de la loi du pays d'origine, la compétence des
⚫tribunaux de ce pays; et c'est ce qu'ont fait
« résolument les législateurs modernes. On a dit
• aux criminels: La loi nationale vous suivra
partout, elle vous commandera partout; n'es-
pérez pas éviter le châtiment parce que votre
⚫adresse vous aura soustraits à la justice étran-
gère; au retour, vous vous retrouverez en pré-
sence de la loi, de la justice de votre pays!-
"Le grand mérite de cette combinaison, c'est de
respecter un principe dont les nations sont si
jalouses, celui de la souveraineté de chaque
Etat, et de suppléer cette souveraineté dans sa
⚫ défaillance. Nous disons que le droit du sou-
verain est sauvegardé; car l'Etat du domicile
n'a pas la prétention de dessaisir l'Etat sur le
a sol duquel le délit a eu lieu. Le moment où le
national tombe sous la juridiction des tribunaux

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⚫ de son pays est celui du retour dans sa patrie, c'est-à-dire le moment où la justice étrangère, l'ayant laissé fuir, n'est plus en possession que • d'une impuissante autorité(P. Lois, décrets, etc., p. 74, 2o col.-S. Lois annolées, p. 42, 3 col.).

Ainsi, le législateur de 1866, qui, comme le législateur de 1808, veut respecter à l'étranger le principe de la souveraineté territoriale, entend évidemment le faire respecter en France, de sorte qu'il est toujours vrai de dire, ainsi que vous l'avez dit par vos arrêts de 1862, que l'art. 7

l'application de la loi pénale territoriale qu'il aura violée. Or, le législateur français, qui reconnaît à une souveraineté étrangère le droit de juger un Français qui a commis un crime sur le territoire étranger, entend évidemment faire respecter en France le principe de la souveraineté territoriale qu'il ne méconnaît pas chez les autres. Donc, l'étranger qui a commis un crime en France, ne peut invoquer la chose jugée dans son pays. D'un autre côté, l'art. 7 n'admet la chose jugée que quand il s'agit d'exercer la juridiction personnelle. C'est là une exception au principe de droit public que les jugements rendus à l'étranger ne sont pas exécutoires en France; elle doit donc être strictement restreinte au cas prévu par la loi, et ne peut être étendue au cas où il s'agit de l'exercice de la juridiction territoriale. Cette doctrine que le principe de la souveraineté territoriale n'accorde aucune valeur légale aux jugements rendus à l'étranger, et que l'étranger, jugé dans son pays pour un crime ou délit commis en France, n'est pas fondé à exciper, à son retour en France, de la chose jugée par les tribunaux criminels de son pays sur les mêmes faits, a été consacrée par deux arrêts de la Cour de cassation, rendus le même jour, 21 mars 1862, l'un au rapport de M. Faustin Hélie, l'autre au rapport de M. Le Sérurier (V. à la note).-La loi du 27 juin 1866 ne paraît pas avoir porté aucune atteinte à la doctrine consacrée par ces arrêts. Elle ne touche en rien, en effet, à la juridiction territoriale, elle étend seulement la juridiction personnelle, par suite de l'extension qu'elle donne au caractère de statut personnel, déjà attribué à la loi pénale. Le Français n'était justiciable des tribunaux de son pays que pour les crimes dont il s'était rendu coupable à l'étranger; il le sera désormais pour les délits comme pour les crimes. La victime devait être un Français; peu importera à l'avenir sa qualité de Français ou d'étran-et jugé en pays étranger, bien loin de reposer ger. Ce n'est encore qu'au cas de l'exercice de la juridiction personnelle, et non au cas de l'exercice de la juridictionb territoriale, que, d'après l'art. 5, C. instr. crim., modifié par la loi de 1866, l'exception de l'autorité de la chose jugée pourra être invoquée. Le législateur n'accorde en core la faveur de cette exception qu'au Français pour les crimes et les délits par lui commis à l'étranger; il n'en fait pas bénéficier l'étranger pour les crimes qu'il a perpétrés en France. Il la lui refuse, même dans les cas prévus par l'art. 7 modifié, où l'étranger s'est rendu coupable, hors du territoire de la France, de l'un des crimes énoncés en cet article, car on n'y retrouve pas la même disposition que dans l'art. 6 sur l'exception de la chose jugée. Cependant, si le législateur de 1866 eût entendu restreindre, en quoi que ce soit, le principe si ancien et toujours si respecté de la souveraineté territoriale, il s'en fût trèscertainement expliqué, tandis qu'au contraire, it a expressément manifesté la volonté de le maintenir. Voulant, en effet, justifier la consécration, nouvelle dans nos lois pénales, du statut personnel pénal et son extension, après avoir fait le tableau de la fréquence des délits née de la multiplicité des rapporist internationaux et dit combien un coupable peut fuir, beaucoup plus aisément qu'il

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(ancien), C. instr. crim., qui n'autorise la poursuites en France des crimes commis à l'étran⚫ger par un Français contre un Français, que dans le cas où ce crime n'a pas été poursuivi

« sur la maxime Non bis in idem et sur la reconnaissance de l'exceptions de la chose jugée, se fonde, au contraire, sur le principe de la souveraineté territoriale; qu'en effet, le législateur français, qui reconnaît à une souveraineté ⚫étrangère le droit de juger un Français qui a C commis un crime sur le territoire étranger, entend évidemment faire respecter chez lui le

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principe de la souveraineté territoriale qu'il ne ⚫méconnaît pas chez les autres. Les nations sont tellement jalouses, comme le dit l'exposé des motifs, du prineipe de la souveraineté de l'Etat, que toutes celles du continent européen, qui font de la loi pénale un statut personnel, n'admettent l'exception de la chose jugée à l'étranger que pour les crimes et délits commis par le régnicole hors des frontières de son pays, et non pour ceux. dont l'étranger s'est rendu coupable dans l'intérieur de l'Etat. La réciprocité est complète ventre la France et ces nations. Nulle d'entre elles n'ens tend abdiquer son droit de souveraineté territo riale; parce qu'il n'appartient qu'à cette souve raineté de faire respecter les blois du pays, de maintenir sur le territoire la sûreté et lastran quillité publiques, et parte que si, en temps de paix, on peut jusqu'à un certain point, espérer une bonne et impartiale justice de la part des juges

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