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LA COUR Considérant que si, dans une pensée d'humanité et de progrès, s'écartant seulement en cela de l'ancienne législation qui posait en principe que l'enfant naturel n'avait point de famille, le législateur français Ini a accordé, quand il était reconnu, quelques droits soigneusement déterminés sur les biens de ses père et mère, et l'a soumis à l'autorité de la puissance paternelle, il n'a pas entendu pour cela, dans l'intérêt des mœurs publiques, l'assimiler aux enfants issus de l'institution matrimoniale, qui est la base de la société civile ;-Que, notamment, la loi n'a dit nulle part que l'enfant naturel reconnu serait nécessairement et de plein droit, pendant sa minorité, sous la tutelle de son père ou de sa mère ;-Que le silence du législateur, qui s'explique, particulièrement quant à la mère, par une certaine défiance de la faiblesse de son sexe, qui a fait écarter de la tutelle toutes les femmes autres que les ascendantes légitimes, et qui oblige la mère légitime elle-même qui se remarie, à se faire maintenir dans la tutelle, ne peut être suppléé par le magistrat à l'aide d'analogies plus ou moins trompeuses, ou de considérations étrangères, quelque respectables qu'elles soient; Considérant que la discussion de l'art. 390, C. Nap., démontre que ce silence a été volontaire, et qu'au point de vue de la tutelle légale, la loi a voulu réserver sa

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**(1) La jurisprudence aussi bien que les auteurs sont toujours très-partagés sur cette importante question; le dernier arrêt intervenu émane de la Cour de Lyon (8 mars 1859, P.1860.334.

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protection et sa sollicitude pour les enfants légitimes;-Considérant d'ailleurs que l'en.. fant naturel réconnu, outre qu'il est placé sous la puissance paternelle, ne demeure point impourvu et sans défense, quant à l'administration de ses biens, s'il en a, puisqu'il peut lui être nommé un tuteur d'office, à la diligence du juge de paix, sous la surveillance et le patronage du ministère public; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la mère naturelle de l'intimée n'étant pas sa tutrice légale, n'a eu ni droit ni qualité pour consentir à l'appelante le transport d'une créance de 4,000 fr. appartenant à sa fille ;... Par ces motifs, confirme. 95299

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Du 9 janv. 1867.-C. Rennes, 20 ch. MM. Massabiau, prés.; Poulizac, av. gén. ; Ducosquer et Brice, av.

iola NIMES 1" février 1867.7mil

DOT, INSTITUTION CONTRACTUELLE. La femme mariée sous le régime dotal peut disposer de ses biens dotaux par voie d'institution contractuelle au profit de toute personne (2).(C. Nap., 1554, 1082, 1083.)

Il en est ainsi, à fortiori, lorsque le contrat de mariage de cette femme contient des modifications à la dotalité pure et simple; par exemple, lorsqu'il est stipulé que les immou bles dotaux pourront être aliénés sans formalités, sous la seule garantie de l'hypothèque légale sur les biens du mari, le tout suivant le choix et la volonté de la femme, dont le seul consentement suffira toujours pour rendre valables et irrévocables les aliénations qui auront lieu. »00

la position de la mère, la Cour a dit qu'étant son seul parent, son seul appui et son unique protecteur, elle était « par conséquent, sa tutrice légale, il est très-difficile d'admettre qu'elle ait voulu juger par là une question de droit civil qui, d'ailleurs, ne lui était pas soumise. Hor

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S.1860.2.431), et se prononce, comme celui aujourd'hui recueilli, dans le sens de la négative. V sous cet arrêt, l'indication des nombreuses au- (2) La question est très-controversée en juristorités en sens divers. Adde, en sens contraire prudence et en doctrine. V. conf. à l'arrêt que nous à l'arrêt ci-dessus, MM. Aubry et Rau, d'après recueillons, Grenoble, 11 juin 1851 (P.1852.2. Zachariæ, t. 4, § 571, p. 713.- La Cour de cas- 495. S.1852.2.227); Rouen, 18 nov. 1854 sation ne semble pas avoir en encore à se pro- (P.1853.1.379.-S.1855.2.547).-En sens connoticer. On cite, il est vrai, comme ayant résolu traire, Nîmes, 18 fév. 1834 (P. chr.-S.4834.2. la question on sens affirmatif un arrêt de cette 276); Caen, 16 août 1842 P.1843.1.372.Cour du 20lavril 1850m (P. 1852.2.202. S.1843.2.74) et 28 mars 1843 (S.1849.2.703), S. 1850.1.702). Mais il suffit de lire cet arrêt Agen, 28 janv. 1856 (P.1857.463.-S.1856.2. pour se convaincre que, bien qu'appliquant en 201). V. aussi les autorités citées sous ces artermes formels à la mère naturelle la qualification rêts. Adde, dans le même sens, MM. Bonnet, Disde tutrice légale, il n'a pas la portée qu'on lui pos. par contr. de mar., t. 2, n. 331 et 332; Dedonne. Il s'agissait alors, pour la Cour, jugeant molombe, Donat. t. 6, n. 284, et Rev. crit., t. en matière criminelle, de rechercher, au point de 1, p. 415; Zachariæ, édit. Massé et Vergé, vue de l'application de l'art. 350, C. pen., si la 4, § 670, p. 230, note 9; Aubry et Rau, d'a mére naturelle qui a exposé ou délaissé sa fille près Zachariæ, t. 6, n. 739, p. 250. n. 8; Sinmineure, est passible, à raison même de la pro- cholle, de l'Inaliénab; de la dot. n. 188; et dans tection qu'elle lui doit, de l'aggravation de peine le sens de notre arrêt, MM. Cubain, Dr. des que ledit article fait peser sur les tuteurs et tu- femmes, n. 364; Massébet Vergó, op. cit., p. trices. Si, pour déterminer, dans ce cas spécial,281; note 114. Jonolegg Inoltözzor ello up

(Blancard C. Robert.) — ARRÊT.

LA COUR; Attendu que Thérèse-RoseJean, femme de Martin Bernard, assistée et autoriséede son mari, a, le 4 sept. 1841, devant Roche et Gaudois, notaires, dans le contrat de mariage de sa nièce Thérèse Grégoire, femme Robert, fait donation à celle-ci, à cause et en vue de son mariage, du quart de tous les biens qu'elle possédera et délaissera au jour de son décès, déduction faite des detles, et que c'est en vertu de cette donation que la femme Robert a demandé le partage de la succession de la dame Martin Bernard, décédée le 28 déc. 1865; Attendu que Blancard, neveu de la défunte et son légataire universel, aux termes d'un testament reçu Gabriel Roche, notaire à Robions, le 26 déc. 1865, s'est opposé à cette demande en partage et a attaqué la donation contrac tuelle invoquée par là dame Martin Bernard, comme frappée de nullité, les biens objets de cette donation étant détaux et par suite inaliénables, aux termes de l'art. 1554, C. Nap.; Attendu, en droit, qu'il n'est pas contesté et qu'il est, au contraire, hors de doute que le Code Napoléon, en admettant, non sans quelque difficulté, le régime dotal, n'a pas voulu se montrer en matière de dotalité plus rigoureux que le droit écrit luimême; et qu'il résulte de la doctrine des auteurs que, sous l'empire de ce droit, la validité de l'institution contractuelle était admise nonobstant la dotalité; - Attendu, en eftet, que l'aliénation de la dot n'est prohibée que dans l'intérêt de la famille et des enfants issus du mariage; que l'institution contractuelle, qui n'est autre chose qu'un testament irrévocable, ne constitue pas une aliénation proprement dite, puisqu'elle ne peut produire ses effets qu'au décès du donateur, et qu'elle ne lui enlève pas le droit de disposer à titre onéreux, laissant pendant le mariage aux biens dotaux leur affectation quant aux revenus; Que la famille n'a donc rien à redouter et ne peut pas éprouver le moindre préjudice d'une pareille donation, puisque, d'un côté, les choses données restent à sa disposition et qu'elle peut y trouver les mêmes ressources que si la donation n'existait pas, et que, d'autre part, la survenance d'enfants amènerait la révocation de cette donation; Qu'en outre, pour les enfants nés au moment où elle est faite, elle n'offre pas plus de préjudice qu'un testament dont la validité n'est pas douteuse; - D'où il suit qu'en faisant la donation contractuelle dont la nullité est demandée, la femme Martin Bernard n'a pas enfreint la règle de l'inaliénabilité de la dot et violé les dispositions de l'art. 1554, C. Nap.; Attendu, en fait, Attendu, en fait, que des modifications importantes, et dont il faudrait au besoin tenir compte, ont été apportées à la dotalité pure et simple par les mariés Martin Bernard dans leur contrat de mariage du 4 sept. 1841 ; Qu'ils ont, en effet, stipulé dans cet acte, ainsi

que l'ont indiqué les premiers juges, le pouvoir d'aliéner, vendre et échanger, conjointement et sans formalités, les immeubles dotaux, sous la seule garantie de l'hypothèque légale des biens du mari, le tout suivant le choix et la volonté de la femme, dont le seul consentement suffira toujours pour rendre valables et irrévocables les aliénations qui auront lieu, et qu'il résulte du contrat de mariage précité de la dame Robert que la donation contractuelle faite à son profit en faveur de son mariage a été consentie par la femme Bernard Martin, avec l'assistance et l'autorisation de son mari; - D'où il résulte que cette donation a été faite régulièrement, dans les limites et conformément aux conditions du contrat de mariage des époux Martin Bernard; Que, par suite, elle est valable, et que c'est avec raison que le tribunal d'Avignon a refusé d'en prononcer la nullité; Attendu, surabondamment, que la demande en nullité formée par le légataire se trouve condamnée par la volonté même de la donatrice, qui, devenue veuve, n'a pas rétracté l'institution contractuelle et la respectée pendant vingt-quatre ans et jusqu'à son décès, puisque, dans le testament fait deux jours avant sa mort, elle n'a disposé que des biens autres que ceux objet de la donation sur la foi de laquelle a été contracté le mariage des intimés Robert; De sorte que la loi, la morale et les convenances proscrivent l'action du sieur Blancard; Par ces motifs, confirme, etc.

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Du 1er fév. 1867. - C. Nîmes, 3 ch. MM. Teissonnière, prés.; Faudon, subst.; Fargeon et Balmelle, av.

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La servitude d'égout des caux ménagères ou d'évier, ayant besoin, pour être exercée, du fait actuel et incessamment renouvele de l'homme, est une servitude discontinue; dès lors, elle ne peut s'acquérir par prescrip tion (1). (C. Nap., 688, 691.)

(Bauguel C. Adoue.)-ARRÊT.

LA COUR ;-Attendu que Bauguel ne conteste pas à Adoue le droit de faire écouler par le canal pratiqué sous sa maison les eaux pluviales déversées dans le passage commun existant au derrière; mais qu'il lui refuse cette faculté pour les eaux ménagères venant de la maison d'Adoue; que ce dernier n'a pas de titre à l'appui de la servitude qu'il réclame; mais que le jugement dont est appel l'a autorisé à prouver que,

(1) La question est controversée; mais la solution ci-dessus est celle qui prévaut dans la doctrine et la jurisprudence. V. conf., Cass. 19 juin 1865 (P.1865.865.-S.1865.1.337), et la note.

depuis plus de trente ans,

res dont il s'agit, déversées eaux ménagè- contraire, ne peut pas se concevoir sans ce

le passage commun, traversaient la maison de Bauguel pour arriver à la voie publique; Attendu qu'aux termes de l'art. 691, C. Nap., les servitudes discontinues, qu'elles soient ou non apparentes, ne peuvent s'établir que par titres et non par prescription; qu'il importe donc peu, dans l'espèce, que les eaux ména gères d'Adoue fussent déversées dans le passage par un évier apparent, si d'ailleurs l'écoulement de ces eaux par la maison de Bauguel ne pouvait constituer qu'une servitude discontinue; Attendu que, d'après l'art. 688, C. Nap., les servitudes continues sont celles dont l'usage est ou peut être continué sans avoir besoin du fait actuel de l'homme, tandis que les servitudes discontinues sont celles qui ont besoin du fait actuel de l'homme pour être exercées; que si le même article range parmi les premières les conduites d'eau et les égouts, il entend évidemment parler de celles qui produisent leur effet par des causes naturelles, comme, par exemple, lorsqu'il s'agit des eaux provenant d'une source ou de la pluie, dont l'écoulement est absolument indépendant du fait de l'homme; mais qu'il ne peut pas y comprendre les éviers déversant les eaux ménagères, dont l'écoulement ne peut avoir lieu sans le fait actuel de l'homme, ni continuer quand ce fait cesse de s'exercer; Attendu qu'il est impossible de décider autrement, sans prêter au législateur une contradiction manifeste dans le même texte, puisque, après avoir déclaré que le caractère distinctif de la servitude continue est de n'avoir pas besoin, pour être exercée, du fait actuel de l'homme, il en donnerait pour exemple une servitude dont l'exercice, au

(1-2) La jurisprudence at la doctrine sont d'accord aujourd'hui sur ce point que la reconnaissance d'un enfant naturel par testament olographe n'est point valable. V. Rép. gen. Pal. et Supp., v° Enfant naturel, n. 128 et suiv.; Table gén. Devill. et Gilb., eod. verb., n. 88; Table décenn., eod. verb., n. 19. Adde, Aix, 7 juin 1860 (P.1861. 148.-S.1860.2.402); Bordeaux, 30 avril 1861 (P.1864.822 S.1861.2.359); Cass 18 mars 1862 (P.1862.376.-S.1862.1.622). V. aussi Agen, 27 nov. 1866, qui suit.. V. cependant MM. Merlin, Rép., vo Filiation, n. 8; Toullier, t. 2, n. 953; Troplong, Donat. et test., t. 3, n. 1498. Mais quel sera l'effet d'un legs considérable, d'un legs universel, adressé à l'enfant dans le testament olographe où il a été reconnu ? Les Cours impériales et la Cour de cassation semblent d'accord pour reconnaître, avec l'arrêt que nous rapportons, que le legs est réductible dans les limites fixées par l'ant.. 908, C. Nap., s'il apparaît on pareil cas que la libéralité ait eu pour cause unique et déterminante la conviction qu'avait le Stateur de sa paternité naturelle une telle libéra

devant être considérée comme contraire à la loi et aux bonnes mœurs. V. Nimes, 2 mai 1837

fait actuel et incessamment répété; que, dans le sens légal du mot, les égouts done ne comprennent pas les éviers, destinés uniquement à l'écoulement des eaux ménagères; d'où suit que l'écoulement de ces eaux se range dans la classe des servitudes essentiellement discontinues;-Attendu que la preuve autorisée par les premiers juges devient dès lors inutile, puisque, en supposant prouvés les faits sur lesquels elle devrait porter, n'y aurait pas de conséquences juridiques à en tirer pour l'établissement de la servitude qui donne lieu au procès; que cette preuve a donc à tort été ordonnée; tifs, réformant, etc.

il

Par ces mo

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Du 31 août 1866.-C. Bordeaux, 4o ch. MM. Dégrange-Touzin, prés.; Bras-Laffite et Laroze, av.

PARIS 11 août 1866.

ENFANT NATUREL, RECONNAISSANCE, TESTAMENT OLOGRAPHE, LEGS, RÉDUCTION, PERSONNE INTERPOSÉE.

La déclaration de paternité consignée dans un testamentolographe ne constitue pas une reconnaissance légale d'enfant naturel, laquelle ne peut être valablement faite que par acte public (1). (C. Nap., 334.)

Mais s'il résulte des dispositions du lestamant que le legs universel qu'il contient au profit de l'enfant a eu pour cause déterminante et unique la qualité d'enfant naturel attribuée par le testateur au légataire, il y a lieu de réduire ce legs universel à la portion dont les père et mère naturels peuvent gratifier leurs enfants, et de l'annuler pour le surplus (2). (C. Nap., 908.)

(P.1837.2.285.

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S.1837.2.317); Cass. 7 déc. 1840 (P.1841.1.32.-S.1841.1.140). V. dans le même sens, MM. Aubry et Rau, d'après Zachariæ, t. 4, p. 685, § 568 ter, note 14, qui ont rétracté l'opinion contraire par eux d'abord émise. -V. toutefois Nîmes, 1er fév. 1843 (P.1843.1. 299). Cette doctrine reçoit une confirmation sérieuse d'une solution semblable donnée dans l'hypothèse analogue d'une libéralité conférée à une personne que le donateur qualifie de son enfant naturel dans des circonstances telles que la filiation, si elle était prouvée, serait nécessairement incestueuse ou adultérine: une pareille libéralité a toujours été annulée par application combinée de l'art. 6 et de l'art. 908, C.. Nap. V. Cass. 31 juill. 1860 (P.1862.88.- S.1860.1.833) et la note; Amiens, 14 janv. 1864 (P. 1864.329.-S. 1864.2.11).

M. Demolombe, Filiat. et patern., n. 429 et 588, a élevé et maintenu une contradiction contre cette double jurisprudence. Mais il faut bien préciser l'objet de la controverse et l'étendue de la contradiction. Le savant professeur concède que la libéralité serait réductible ou nulle selon qu'elle serait adressée à un enfantnaturel simple ou

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(Fortin C. Dauvillers et Monsaint.) — ARRÊT. LA COUR; En ce qui touche Julienne Dauvillers: Considérant que Pierre-Joseph-Edouard Thierry est décédé le 4 déc. 1863, laissant deux testaments olographes datés, le premier du 25 avril 1836, et le second du 25 janv. 1861; - Que le premier de ces testaments est ainsi conçu: « J'ai une fille inscrite aux registres de l'état civil de Montmartre, à la date du 2 nov. 1855, sous les noms de Julienne Dauvillers; je lui donne tout ce qui m'appartient, meubles et immeubles, laissant à sa mère, Victoire Monsaint, de Trouville, l'usufruit de la moitié de ma succession, l'autre moitié devant être remise à notre enfant à sa majorité ; »—Que le second testament contient la disposition suivante : « J'ai une fille, Julienne Dauvillers; je veux qu'elle hérite de ma fortune. Voici

à un enfant adultérin ou incestueux, s'il était démontré que le donateur n'a pas eu d'autre but que de gratifier son enfant naturel, en tant que son enfant naturel, et que la donation n'a pas eu d'autre cause que la considération de cette paternité dont le donateur se regarde comme investi. Aussi les objections du judicieux jurisconsulte ne portent pas contre la jurisprudence de la Cour de cassation qui, prenant comme un point de fait souverainement constaté par les premiers juges que la qualité donnée dans l'acte au donataire a été la cause unique et déterminante de la libéralité, en conclut que la réduction ou la nullité prononcée n'est pas une violation de la loi. Mais M. Demolombe soutient, en fait, que presque jamais la certitude n'existera que le donateur n'ait pas eu un autre mobile que la considération de sa paternité irrégulière. Dans un seul cas, suivant lui, cela serait certain; dans un seul cas, la réduction ou la nullité pourrait être prononcée, c'est lorsque le disposant aurait positivement déclaré qu'il faisait sa libéralité pour cette cause unique. Au contraire, les arrêts précités, avec une unanimité presque complète, ont toujours rattaché la donation ou le legs à la qualité de son enfant donnée par le donateur au donataire dans le même acte, comme à sa cause unique et à son motif déterminant. On voit que le dissentiment existe plutôt sur une appréciation de fait que sur une question de droit.

sly(1) La décision que nous rapportons pourrait, au point de vue des présomptions légales d'interposition de personne introduites par l'art. 911, C. Nap., être contestée par cette argumentation que le donateur était à même de prévoir que sa libéralité serait réduite; que, dans cette prévision, ila pu vouloir procurer à son enfant naturel ou à celui qu'il regardait comme tel plus qu'il n'était

donc mes dernières volontés: Julienne hérite de tout ce que j'ai; on trouvera les titres chez moi; seulement, on prélèvera sur le tout une somme de 7,000 fr. qui sera remise à mademoiselle Monsaint; » Considérant que la déclaration de paternité consignée par Thierry dans ces deux testaments ne constitue pas une reconnaissance légale de lienne Dauvillers pour sa fille, qu'un testament olographe n'est pas, en effet, un acte authentique, et qu'aux termes de l'art. 334, C. Nap., la reconnaissance d'un enfant naturel ne peut être valablement faite que par acte public;

Mais considérant qu'il résulte des dispositions ci-dessus rapportées que les libéralités faites par Thierry à Julienne Dauvillers 'ont eu pour cause déterminante et unique la conviction qu'avait le testateur que la qualité de sa fille naturelle appartenait à la légátaire universelle qu'il instituait, et à laquelle il donnait expressément cette qualité dans la disposition même qui contenait la libéralité; - Que l'art. 908, C. Nap., ne permet aux enfants naturels de rien recevoir par donation entre-vifs ou par testament au delà de ce qui leur est accordé au titre des successions;-Que toute libéralité excédant cette

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licite de lui donner; que l'art. 911 trouve donc ici sa raison d'être, et que la présomption établie par cet article ne souffre aucune preuve contraire. V. sur ce dernier point, Metz, 10 août 1864 (P. 1865 339.-S.1865.2.64) et les nombreuses autorités citées en note. Il est, en effet, difficile de contester que, si la filiation était légalement constatée, si, par exemple, le testament avait été authentique, le raisonnement de la Cour ne serait pas fondé et que l'art. 911 ne fût applicable. Autrement, il suffirait d'écrire dans le testament un legs universel au profit de l'enfant naturel pour écarter la présomption de l'art. 911 et p mettre à l'enfant de recueillir par personne interposée plus que la quotité fixée par l'art. 908. Mais, dans l'espèce, la solution admise peut être défendue par cette considération, d'abord, qu'il s'agit ici d'une donation nulle, non point pour incapacité, mais comme contraire aux bonnes mœurs, et que l'art. 911 ne se réfère pas à cet ordre d'idées; ensuite, que le disposant avait un moyen si facile d'échapper à la nullité en ne déclarant pas la relation de parenté qu'il croyait exister lui et le donataire, qu'on ne peut admettre qu'il ait prévu la nullité et employé un moyen indirect pour en neutraliser les conséquences. Cons. Nimes, 1er fév. 1843 (P.1843.1.299); observons, toutefois, que l'espèce de cet arrêt différait notablement de l'espèce de l'arrêt ici rapporté, en ce que devant la Cour de Nîmes les liens de parenté n'étaient nullement établis entre l'enfant naturel et la prétendue mère, qui déniait même formellement sa maternité, tandis que, devant la Cour de Paris, aucun doute ne paraît s'être élevé sur la filiation naturelle du légataire universel vis-à-vis de la légataire à titre particulier qu'on présentait comme personne interposée.

entre

quotité doit être annulée comme illicite; Que le legs qui a uniquement pour cause la qualité d'enfant naturel attribuée par le tesLateur au légalaire doit en conséquence être réputé contraire à la loi et aux bonnes moeurs pour la portion dont les père et mère naturels ne sauraient gratifier leurs enfants; -Considérant que Thierry, laissant pour héritiers légitimes un frère et trois sœurs, au nombre desquelles est la femme Fortin, ne pouvait disposer en faveur d'un enfant naturel que de la moitié

testateur; Met les appellations et le jugement dont est appel au néant, en ce qu'il a envoyé la mineure Dauvillers en possession de l'universalité de la succession de Thierry, et condamné les époux Fortin aux dépens envers la mineure Dauvillers;émendant quant à ce, décharge les époux Fortin de ces dispositions;-Statuant au principal, réduit à la moitié le legs universel fait par Thierry au profit de la mineure Julienne Dauvillers, l'autre moitié étant attribuée aux héritiers du

ya donc lieu de réduie sa fortune; qu'il sang; déclare les époux Fortin mal fondés

à cette proportion l'institution universelle faite par lui au profit de Julienne Dauvillers pour la cause et dans les circonstances spécifiées plus haut; ladite institution, devant être annulée pour le surplus comme reposant sur une volonté d'enfreindre la la loi;

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En ce qui touche Victoire Monsaint: Considérant que, par son testament du 25 avril 1856, Thierry avait légué à Victoire Monsaint l'usufruit de la moitié de sa succession; Que, par son second testament du 25 janv. 1861, il lui a donné une somme de 7,000 fr. en toute propriété; Que du rapprochement de cette dernière disposition et de celle relative à Julienne Dauvillers, contenue dans le même acte, résulte la preuve que l'intention de Thierry a été de révoquer la libéralité en usufruit faite primitivement au profit de Victoire Monsaint, pour y substituer le legs de 7,000 fr. en toute propriété;-Que, devant les premiers juges, Victoire Monsaint avait demandé à cumuler les deux legs, mais qu'elle ne reproduit pas cette demande devant la Cour ;-Que la seule question soulevée par les conclusions des appelants est celle de savoir si le legs de 7,000 fr. doit être déclaré nul comme fait par interposition de personne à Julienne Dauvillers, ou du moins être prélevé sur la portion de la suceession attribuée à celle-ci;

Considérant que Thierry a directement institué Julienne Dauvillers sa légataire universelle; qu'il est impossible de supposer que, après avoir déclaré en termes exprès qu'elle hériterait de tout ce qu'il avait, il ait ea la pensée de lui donner indirectement et sous le nom de sa mère une somme de 7,000 francs, puisque cette somme se trouvait implicitement comprise dans le legs universel;

Qu'il a, au contraire, pris le soin d'exprimer que les 7,000 fr. légués à Victoire Monsaint seraient prélevés sur la masse des biens par lui laissés à Julienne Dauvillers; qu'il est donc certain que sa volonté a été de gratifier Victoire Monsaint personnellement, et que cette dernière ne doit pas être réputée, personne interposée mi sb wuod si Jonvab sup

Considérant, d'autre part, que le legs universel fait à Julienne Dauvillers, étant réduit à la quotité déterminée par l'art. 757, C. Nap., ne saurait être grevé de l'acquittement du legs particulier fait au profit de Victoire Monsaint; que ce legs doit être à la charge des héritiers du sang du

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dans leurs conclusions en nullité du legs de 7,000 fr. au profit de Victoire Monsaint; dit que ce legs devra être acquitté par les héritiers du sang de Thierry, etc. an

Du 11 août 1866.-C. Paris, 1 ch.-MM. Casenave, prés.; Laplagne-Barris, av. gén.; Liouville, Limet et Lelasseux, av.

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AGEN 27 novembre 1866.

1 ACTES DE L'ETAT CIVIL, RECTIFICATION, RÉCLAMATION D'ÉTAT. 2o ENFANT NATUREL, POSSESSION D'ÉTAT, RECONNAISSANCE, TESTAMENT OLOGRAPHE.

1° La demande qu'un enfant naturel a formée à l'effet seulement de faire substituer, sur son acte de naissance, au nom de sa mère, sous lequel il est inscrit, un autre nom qu'il dit être celui de son père, mais sans conclure à ce que le tribunal le déclare fils naturel de ce dernier, constitue, non point une réclamation d'état, mais une simple demande en rectification d'acte de l'état civil, qui peut être valablement introduite par requête présentée au président du tribunal (1). (C. Nap., 99; C. proc., 855 et 856.) B2° La disposition de l'art. 320, C. Nap., suivant laquelle, à défaut d'acte de naissance, la possession d'état suffit pour établir

-590 6l arcHUGI DUETIROTE OPD Just s

(1) La solution donnée par notre arrêt sur ce point, conforme à la doctrine professée par MM. Aubry et Rau, d'après Zachariæ, t. 1, § 63, p. 187 et 188, texte et note 6, est contraire à l'opinion la plus généralement adoptée. V. MM. Hutteau d'Origny, Actes de l'état civil, p. 416; Coin-Delisle, id., sur l'art. 99, n. 18; Bertin, Ch. du conseil, n. 157 et suiv.; Marcadé, sur l'art. 99, n. 3; Demolombe, t. 1er, n. 334; Zachariæ, édit. Massé et Vergé, t. 1, § 79, p. 108; Bioche, Dict. de proc., v° Actes de l'état civil, n. 52 et suiv.; Chauveau, Suppl. aux Lois de la proc., q. 2893 ter. Ces auteurs pensent que, toutes les fois que de l'acte rectifié doit résulter pour le réclamant un état autre que celui qu'il possède, la demande en rectification soulève une question préjudicielle qui ne saurait être décidée par la chambre du conseil en pareil cas, en effet, la rectification n'est demandée que par voie de conséquence. Peu importe que les parties intéressées à contester la réclamation aient été appelées par le tribunal; leur présence aux débats ne saurait donner

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