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CHEMIN DE FER, COLIS (PRÉSENTATION DES) DÉLAI.

La disposition de l'arrêté ministériel du 15 avr.1859, qui n'oblige les compagnies de chemins de fer à transporter que les marchandises reçues trois heures avant le départ du train, étant établie uniquement dans l'intérêt des compagnies et pour éviter l'encombrement des gares de départ, il s'ensuit qu'elles peuvent dispenser les expéditeurs de l'observation de ce délai; mais elles n'en restent pas moins soumises à leurs obligations ordinaires à l'égard du transport et de la livraison des marchandises.

Et une compagnie de chemin de fer est censée avoir renoncé au bénéfice de la disposition dont il s'agit par cela seul qu'elle a accepté, sans observations ni réserves, les colis présentés tardivement.

(Chem. de fer de Lyon C. Beaufils.)

Le tribunal de commerce de la Seine l'avait ainsi décidé par un jugement du 2 août 1866 conçu en ces termes:« Attendu que, les 1er, 17 et 26 octobre dernier, le demandeur a remis à la gare de Montereau, pour être expédiées à Paris, 3,787 pièces de volaille, lesquelles devaient régulièrement arriver à Paris le lendemain à quatre heures du matin, et être mises à la disposition du public ou camionnées par la compagnie dans les deux heures qui ont suivi leur arrivée;

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Attendu que la compagnie défenderesse invoque le bénéfice de l'arrêté ministériel du 15 avril 1859 qui ne l'oblige à transporter que les marchandises reçues trois heures avant le départ du train ;— Qu'elle prétend que si elle n'use pas de ce droit et effectue le transport malgré la remise tardive qui lui a été faite, elle ne peut encourir, à son tour, aucune responsabilité pour retards, en délivrant les marchandises en gare à l'heure où serait arrivé le train suivant ; qu'elle ne doit rien au demandeur, qui s'était présenté à la gare de Montereau moins de trois heures avant le départ du train;-Mais attendu que les compagnies de chemins de fer jouissent de priviléges qui les obligent plus étroitement; que ledit arrêté n'a eu en vue que de les soustraire à des responsabilités dans le cas d'un encombrement de colis causé par la négligence des expéditeurs; que du moment, au contraire, où les marchandises ont été chargées, les compagnies ne peuvent plus invoquer le bénéfice d'une stipulation qui ne leur était pas nécessaire et à laquelle elles ont renoncé par le fait ;- Attendu que

les marchandises dont s'agit ont été camionnées aux divers facteurs chargés de les recevoir, avec un retard qui a fait éprouver au demandeur un préjudice dont réparation lui est due, et que le tribunal, avec les éléments d'appréciation qu'il possède, fixe à 20 cent.. par pièce, soit au total 757 fr. 40 c., au paiement de laquelle somme il y a lieu d'obliger la compagnie défenderesse ;-Par ces motifs, etc. >>

Appel par la compagnie du chemin de fer.

ARRÊT.

LA COUR;-Considérant qu'aux termes de l'arrêté ministériel du 15 avril 1859, dont les dispositions sont rappelées dans les récépissés remis au moment de l'expédition, les gares sont, pour la réception et la livraison des marchandises à grande vitesse, du 1er octobre au 31 mars, ouvertes à sept heures du matin et fermées à huit heures du soir;-Que les marchandises sont expédiées par le premier train de voyageurs comprenant des voitures de toutes classes et correspondant avec leur destination, pourvu qu'elles aient été présentées à l'enregistrement trois heures au moins avant l'heure réglementaire du départ de ce train, faute de quoi elles sont remises au départ suivant ; -Qu'en règle générale, les expéditions arrivant de nuit sont mises à la disposition des destinataires, à la gare, deux heures après son ouverture;-Considérant qu'il est dérogé expressément à cette dernière clause à l'égard de la volaille, de la marée et autres denrées destinées à l'approvisionnement des marchés de Paris, lesquelles denrées doivent, aux termes de l'art. 5, être mises à la disposition des destinataires, de nuit commie de jour, deux heures après l'arrivée du train;-Considérant que les paniers de volaille dont il s'agit dans l'espèce ont été remis par Beaufils à la gare de Montereau, le 1er oct. 1865, à onze heures du soir, le 17 octobre, à onze heures vingt, et le 26 octobre, à neuf heures trente minutes, pour être expédiés à grande vitesse; Considérant que la compagnie aurait pu refuser la réception de ces marchandises présentées après la fermeture de la gare,et,quant aux deux premières expéditions, moins de trois heures avant l'heure réglementaire du départ du train le plus prochain comprenant les marchandises de grande vitesse; Considérant que les conditions imposées aux expéditeurs quant au délai de la présentation des colis sont établies en faveur de la compagnie et pour éviter l'encombrement des gares de départ; -Que la compagnie conserve la faculté de dispenser les expéditeurs de l'observation de ce délai, si elle croit y avoir intérêt; mais qu'elle reste soumise à ses obligations ordinaires envers eux à l'égard du transport et de la livraison;-Considérant que la compagnie a accepté, sans observations ni réserves, les colis présentés tardivement par Beaufils, et les a expédiés par le train par

tant de Montereau à une heure quarante-trois minutes du matin et devant arriver à Paris à quatre heures du matin;-Que, sur la foi de cette acceptation et de cette expédition, Beaufils a dù compter que ces marchandises seraient mises à la disposition de Ménard, facteur destinataire, deux heures après l'arrivée du train, et par conséquent en temps utile pour être immédiatement vendues au marché spécial ;-Considérant qu'elles n'ont été délivrées à Paris qu'à huit heures, sept beures quarante-cinq minutes, et neu. heures trente minutes; que la compagnie n'allègue pas que ces retards proviennent d'un cas de force majeure; que, dès lors, elle en est responsable; Adoptant, au surplus, les motifs des premiers juges; - Confirme, etc.

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Du 25 fév. 1867.-C. Paris, 1re ch. -- MM. Devienne, 1er prés.; Péronne et BertrandTaillet, av.

(1) Cette question est généralement résolue en ce sens par la jurisprudence, et telle est aussi l'opinion adoptée par la majorité des auteurs. V. Paris, 10 nov. 1820; Cass. 12 avril 1843 (P. 1843.1.585.-S.1843.1.273), et les renvois. V. encore MM. Malleville, t. 2, sur l'art. 1095; Levasseur, Quot. dispon., n. 63; Duranton, t. 8, n. 184; Poujol, Donat, et test., t. 1, sur l'art. 904, n. 4, et t. 2, sur l'art. 1095, n. 3; Grenier, id., t. 3, n. 461; Coin-Delisle, id., sur l'art. 1096, n. 9; Troplong, id., t. 2, n. 587, et t. 4, n. 2645; Demolombe, id., t. 1, n. 417, et t. 6, n. 462; De Fréminville, Tut. et minor., t. 2, n. 973, et note sur Grenier, loc. cit.; Bonnet, Dispos. par contr. de mar., t. 3, n. 895; Marcadé, sur l'art. 904, n. 1; Colmet de Santerre, Contin. du cours analyt. de Demante, t. 4, n. 276 bis; Massé et Vergé, sur Zachariæ, t. 3, § 522, note 6, p. 335; Aubry et Rau, d'après Zachariæ, t. 5, § 648, p. 427. et t. 6, § 744, p. 289.-V. cependant MM. Delvincourt, t. 2, p. 407, note 9; Vazeille, Donat. et test., sur l'art, 904, n. 2; Saintespès-Lescot, id., t. 1, n. 173.- L'arrêt de Paris précité du 10 nov. 1820 considère même le vice qui entache la donation faite par un époux mineur à son conjoint comme tellement radical qu'il ne serait pas couvert par cette circonstance que le donateur serait décédé en état de majorité. Toutefois la question ne manque pas de difficulté, ainsi que le prouve la lecture du jugement infirmé par l'arrêt que nous recueillons. Sans doute l'art. 1398, C. Nap., qui relève le mineur habile à contracter mariage de l'incapacité de donner qui pèse sur les mineurs en général, ne dispose expressément que pour le cas de donation par contrat de mariage. Sans doute aussi l'art. 1095, qui détermine les limites dans lesquelles l'époux mineur peut donner à son conjoint, ne s'occupe que de la donation par contrat de mariage, enfin l'art. 904, même Code, dit que le mineur (parvenu à l'âge de 16 ans) ne peut disposer que par testament. Et, dès lors, de la combinaison de ces trois articles il paraît naturel de conclure que, hors le cas de contrat de mariage, le mineur, même marié, ne

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taire, Responsabilité, DonATION. 1° L'époux mineur ne peut, pendant le mariage, disposer en faveur de son conjoint par voie de donation entre-vifs (1). (C. Nap., 904 et 1095.) ·

2o Le notaire qui a conseillé aux parties, dont l'une était mineure, de faire une donation entre-vifs au lieu d'un testament, et ce sans s'enquérir de l'âge du donateur, est responsable de la nullité d'un tel acte, alors surtout que les parties étaient illettrées (2). (C. Nap., 1382, 1385.).

a

peut disposer que testamentairement, et dans les limites tracées par ledit art. 904.-Et cependant, lorsque l'on interroge l'esprit de la loi, on peut douter que l'intention du législateur ait été de proscrire les donations de biens à venir que le mineur pourrait, durant le mariage, faire à son conjoint. Les donations ne doivent pas être permises au mineur, disait M. Tronchet, lors de la discussion qui a eu lieu au Conseil d'Etat sur l'art. 904, parce qu'elles le dépouilleraient sans retour...» (Fenet, t. 12, p. 297 et 298). De ces paroles, il semble résulter que le législateur, en refusant au mineur le droit de disposer par donation, n'a eu en vue que les donations entre-vifs, c'est-à-dire celles qui contiennent dépouillement actuel et irrévocable. Or, tel n'est pas le caractère des donations que les époux peuvent se faire, pendant le mariage, des biens que le donateur laissera à son décès. De pareilles donations, qui n'ont de la donation entre-vifs que la forme, et qui, au fond, sont de véritables dispositions testamentaires, ne dépouillent pas le donateur, et elles sont essentiellement révovocables comme le sont les testaments; elles ne présentent donc pas plus de dangers pour les mineurs que les testaments eux-mêmes; et il peut, dès lors, paraître difficile d'admettre que la loi ait voulu les interdire au mineur, en tant que, à l'époque où elles seraient faites, l'époux mineur aurait l'âge requis pour pouvoir tester et en tant aussi qu'elles seraient renfermées dans les limites tracées pour les testaments par l'art. 904. L'opinion contraire ne s'appuie guère que sur la rigueur des textes, sans qu'il soit facile de se rendre bien nettement compte du motif de la prohibition que ces textes consacreraient. Il suffit, toutefois qu'ils existent pour que, comme le dit avec raison M. Duranton, loc. cit., il soit prudent, en pareil cas, de prendre la forme, tout aussi facile, et en dehors de toute critique, du testament.

(2) C'est ce qui a été jugé dans une espèce semblable, par un arrêt de la Cour de Rennes du 27 avr. 1842, rapporté sous l'arrêt de Cass. précité du 12 avr. 1843, qui a rejeté le pourvoi dont le premier avait été frappé. V. aussi M. Eloy, de la Res

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(Cherchouly et Authier C. Chaumette et
Lafaye.)

Un jugement du tribunal de Périgueux, du 4 mai 1865, avait résolu la première question en sens contraire par les motifs suivants :« Attendu que, pour repousser la demande en partage introduite par Chaumette, Cherchouly et Authier contestent la validité de la donation consentie audit Chaumette par sa femme; que, suivant eux, cette donation serait nulle comme émanant d'une donatrice mineure, contrairement aux dispositions combinées des art. 903, 904, 1095, C. Nap.; -Qu'ainsi se pose la question de savoir si, en dérogeant au principe général qui fait considérer le mineur comme incapable des obligations de la vie civile, les art. 903 et 904 combinés ont entendu restreindre sa capacité aux donations par contrat de mariage à son futur conjoint, ou l'étendre à celles qu'il pourrait faire en sa faveur pendant le mariage;-Attendu que si les articles précités avaient eu pour but de ne permettre au mineur que les donations entre-vifs par contrat de mariage au profit de son conjoint, on ne comprendrait guère pourquoi l'exception de l'art. 903 renverrait d'une manière générale au chap. 9, au lieu de renvoyer simplement à l'art. 1095;-Que les termes généraux dans lesquels est conçu le premier de ces articles ne comportent pas une pareille restriction ;-Que le chap. 9, auquel il renvoie, ne traite pas seulement des dispositions entre époux par contrat de mariage; qu'il s'occupe aussi des dispositions par eux faites pendant l'union conjugale; -Qu'en disant que le mineur, âgé de moins de seize ans, ne pourra aucunement disposer, sauf ce qui est réglé au chap. 9, le législateur a entendu sortir du droit commun pour tout ce qui tient aux matières réglées par ce chapitre; que cela est tellement vrai, qu'en autorisant les donations entre conjoints pendant le mariage, l'art. 1094 ne distingue pas si l'époux est majeur ou non; qu'il s'exprime plus largement, n'envisage que la qualité d'époux, et consacre ainsi une généralité dans laquelle le mineur doit nécessairement se trouver compris, soit en qualité d'époux, soit en vertu des termes de l'art. 903 ;-Que cette généralité, faite pour établir la capa

pons. des not., t. 2, n. 654. Ce qui, au point de vue de la responsabilité du notaire, pouvait faire naître un doute, c'est qu'en réalité la question de savoir si l'époux mineur peut disposer pendant le mariage au profit de son conjoint par forme de donation, est sérieusement controversée; or, on sait qu'il est assez généralement admis qu'il n'y a pas lieu à responsabilité, lorsque, les opinions étant partagées sur un point de droit et la jurisprudence étant incertaine, notaire a pu sans imprudence et de bonne foi adopter le système auquel il s'est rangé. V. sur ce point, Montpellier, 7 fév. 1866 (P.

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cité des conjoints, sans distinction du cas de majorité à celui de minorité, constitue elle-même un principe qu'aucune restriction ne saurait modifier, et qui serait nécessairement heurté par la conséquence trop absolue qu'on voudrait faire découler des art. 903 et 904;-Que le chap. 9 ne s'occupe, il est vrai, du mineur que dans l'art. 1095; mais que la rédaction de ce dernier article semblé établir qu'il n'a trait qu'au consentement des personnes dont le mineur est obligé de se faire assister pour la validité des conventions matrimoniales; Que si, d'ailleurs, les donations entre conjoints pendant le mariage ne sont qu'un attribut, un résultat de l'union des époux, et si le législateur n'a pas craint de trop favoriser le lien conjugal en permettant aux futurs de disposer en faveur l'un de l'autre au moment même du mariage, on ne voit réellement pas pour quel motif il lui retirerait sa faveur aussitôt que le mariage est consommé, alors que cependant l'âge plus avancé des époux et la retenue que doit leur inspirer leur position nouvelle peuvent être une garantie de plus de leur sagesse et de leur expérience;

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-Que cette sévérité serait d'autant plus extraordinaire qu'elle aurait pour but d'interdire au mineur une donation essentiellement révocable, tandis qu'on n'a pas craint de l'autoriser à disposer irrévocablement par contrat de mariage ;-Que ces divers arguments s'appliquent à fortiori au mineur parvenu à l'âge de seize ans, comme dans l'espèce, quelle que soit d'ailleurs l'incapacité dont le frappe le droit commun pour faire des donations entre-vils; Qu'il est, en effet, de toute évidence que ce qui est permis au mineur de moins de seize ans ne saurait être interdit à celui qui a atteint ce nombre d'années ;-Que, dès lors, les limites apposées à la capacité de ce dernier par l'art. 904, ne peuvent faire disparaître ni l'exception de l'art. 903, ni la conséquence qu'elle fait naître-Que le système opposé ne se soutiendrait qu'à l'aide d'une fausse interprétation de la loi, puisque l'art. 904, ne rappelant pas l'exception de l'art. 903, serait alors en opposition formelle avec les dispositions de celui-ci, et tendrait à établir contre le mineur de seize ans une prohibition dont se verrait affranchi le mineur non encore par

1866.1258.-S.1866.2.351), et les arrêts cités en note. Il faut, toutefois, observer que si, de deux systèmes opposés, dont l'un est sujet à controverse et l'autre ne présente aucun danger, le notaire, alors que le choix est laissé à son appréciation, se décide pour le premier, il se rend par cela même coupable d'imprudence; ce qui engage sa responsabilité. - V. aussi sur le principe de la responsabilité des notaires à raison de la nullité des actes dont ils sont les rédacteurs, Pau, 5 fév., et Bordeaux, 20 juin 1866 (P.1866. 809 et 1257.-S.1866.1.94 et 351), et les renvois; Lyon, 8 fév. 1867, suprà, p. 581.

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LA COUR;-Attendu qu'il est textuellement écrit dans l'art. 903, C. Nap., que le mineur âgé de moins de seize ans ne peut aucunement disposer, sauf ce qui est réglé au chapitre 9, titre 2 du même Code; Attendu qu'il n'est pas possible d'admettre que cette exception au droit de disposer, introduite par l'art. 903 en faveur du mineur, doive s'étendre à tous les cas réglés par le chapitre 9;-Qu'il est rationnel de la restreindre à la partie qui est relative à la capacité des mineurs ;-Attendu que, dans le chapitre susvisé, l'art. 1095 est le seul qui s'occupe du mineur, qu'il est exclusivement relatif aux libéralités qu'il peut faire dans son contrat de mariage, et qu'il garde le silence sur les donations à faire pendant la durée de l'union conjugale; - Que cette exception, déterminée par la faveur due au mariage, est spéciale à un acte pour lequel le mineur est protégé par les précautions que la loi a prises contre la faiblesse de l'âge et les entraînements de la passion;-Que ces considérations et cette protection n'existent pas pour les donations entre-vifs que le mineur pourrait faire à son conjoint pendant le mariage; -Attendu qu'on ne saurait soutenir la validité des donations entre-vils entre époux en les assimilant aux testaments pour lesquels le mineur puise dans l'art. 904 une capacité relative; - Attendu que les exceptions à la loi générale sont de droit étroit et qu'elles ne peuvent pas être étendues par analogie d'un cas à un autre ;—Qu'au surplus, l'analogie entre les donations entre-vifs que les époux se font entre eux pendant le mariage et les testaments est plus apparente que réelle; Que les dissemblances entre ces deux modes de libéralité sont nombreuses, soit par les principes sur lesquels ils reposent, soit par les effets qu'ils produisent; Attendu, enfin, que si l'exception de l'art. 1095 était étendue aux donations entre-vifs pendant le mariage, comme la faculté attribuée par cet article au mineur est illimitée, il s'ensuivrait que le mineur pourrait disposer en faveur de son conjoint de la totalité de ses biens, contrairement aux prohibitions formelles de l'art. 904, résultat que la loi et la raison repoussent également ;-Attendu, dès lors, que c'est à tort que les premiers juges ont déclaré valable la donation du 13 déc. 1863

En ce qui touche la responsabilité du notaire Lafaye: Attendu que cet officier public reconnaît que les époux Chaumette, en se présentant dans son étude, lui ont demandé de recevoir un testament que la femme Chaumette voulait faire en faveur de son mari, et que c'est lui qui a conseillé aux parties de substituer au testament une donation entre-vifs;-Qu'il importe peu que les époux Chaumette, ainsi que le prétend Me Lafaye, aient donné la préférence à une donation entre-vifs, par le motif qu'un moins grand nombre de témoins, deux au lieu de quatre, étaient nécessaires à la validité de ce dernier acte; que les époux Chaumette, cultivateurs illettrés, étaient incapables de faire un choix éclairé, alors surtout que le notaire n'a pas appelé ar attention sur les dangers d'une donation entre-vifs; Que c'est en vain qu'il invoque pour sa justification l'ignorance dans laquelle l'ont laissé les époux Chaumette de l'état de minorité de l'épouse Chaumette; que c'était au notaire à s'enquérir de l'âge de la personne qui consentait la donation, et qu'il n'apparaît pas qu'il ait adressé à ce sujet aucune interpellation à la femme Chaumette, à son mari, ou aux témoins de l'acte ; Attendu que ces divers faits constituent de la part du notaire Lafaye des imprudences et des négligences professionnelles qui engagent sa responsabilité; Attendu que si les intentions premières des époux Chaumette avaient été suivies et si le notaire avait reçu le testament de l'épouse, cet acte aurait conféré à l'époux des droits dont il se trouve privé par la nullité de la donation entre-vifs; Altendu que Lafaye a ainsi causé à Chaumette un préjudice qu'il est tenu de réparer dans une certaine mesure, etc.;-Infirme, etc.

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Du 18 déc. 1866.-C. Bordeaux, 1re ch.MM. Raoul-Duval, 1er prés. ; Jorant, 1er av. gén.; Moulinier, de Carbonnier-Márzac et Vaucher, av.

LYON 28 juin 1866.

AUTORISATION DE FEMME MARIÉE, COMMERCE, SOCIÉTÉ COMmerciale.

L'autorisation de faire le commerce, donnée à la femme mariée, ne l'habilite pas à contracter une société de commerce, ni, par suite, à emprunter pour les besoins de cette société (1). (C. Nap., 220; C. comm., 4.)

(1) C'est là un point constant en doctrine et en jurisprudence. V. Rouen, 3 déc. 1858 (P. 1859.1158. S. 1859.2.501); Cass. 9 nov. 1859 (P.1860.297.- S.1860.1.74), et le renvoi. Adde MM. de Fréminville, Minorilė, t. 2, n. 1004; Bédarride, des Commerçants, t. 1, n. 125. V. cependant, M. Massé, Droit comm., t. 2, n. 1121. En ce qui concerne l'autorisation de faire le commerce, peut-elle, au refus du mari, être donnée à la femme par la justice? L'affirma

(Clarion C. Riquier.) ARRÊT. LA COUR; Attendu qu'en thèse générale, l'autorisation de faire le commerce donnée par le mari ou par la justice à la femme n'habilite pas cette dernière à contracter une société de commerce; - Que ce principe, admis en jurisprudence et en doctrine, résulte notamment de ce que l'association crée pour la femme, au point de vue pécuniaire, comme au point de vue moral, des obligations et des rapports qui ne peuvent être légitimés que par une autorisation spéciale, et de ce que l'existence de la société paralyserait, pendant sa durée, le droit réservé au mari ou à la justice de retirer au besoin l'autorisation accordée, et rendrait irrévocable une autorisation essentiellement révocable de sa nature; Attendu que, dans l'espèce, la dame Massieux, épouse Riquier, autorisée par son mari, suivant un acte authentique du 1er août 1856, à faire le commerce, à emprunter et à hypothéquer pour les besoins de ce commerce, ne l'était nullement ni à contracter une société de commerce, comme elle l'a fait le 5 sept. 1859, ni, par suite, à emprunter pour les besoins de cette société, comme elle l'a fait encore le 26 juin 1861; — Attendu que c'est donc à bon droit que l'obligation dudit jour 26 juin 1861 a été déclarée sans valeur par rapport à la dame Massieux;

Attendu que vainement on allègue que le prèteur ignorait l'existence de la société etavait dû croire prêter à la dame Massieux pour l'utilité de son commerce dûment autorisé; Que les énonciations mêmes de l'acte obligatoire démontrent le contraire; qu'en effet, etc.; Confirme, etc.

Du 28 juin 1866. C. Lyon, 1re ch. — MM. Barafort, prés.; De Gabrielli, 1er av. gén.; Caillau et Pine-Desgranges, av.

METZ 6 juin 1866.

SERVITUDE, FONDS DOMINANT, JOURS, DESTINATION SPÉCIALE, NON-USAGE, CONTRADICTION, PRESCRIPTION.

La servitude de ne prendre aucuns jours, fenêtres, soupiraux sur un héritage voisin, ne doit pas, bien qu'établie en faveur d'un fonds occupé par un couvent de religieuses, être réputée s'appliquer à une catégorie

tive, qui résulte des motifs de l'arrêt actuel, a été consacrée par un arrêt de la Cour de Grenoble, du 27 janv. 1863 (P.1863.716.—S.1863.2.79), à l'égard de la femme séparée de corps et de biens. Mais la doctrine contraire est enseignée par tous les auteurs. V. les autorités citées en note sous cet arrêt. Adde MM. Cubain, Dr. des femmes, n. 586; Demante, Cours analyt. de C. civ., t. 1, n. 302 bis, III et suiv.; Rivière, Rép. écr. sur le Cod. de comm., p. 35; Mourlon, Rép. écr. sur le Cod. Nap., t. 1, p. 390 et 391; Beslay, des Commerçants, n. 306 et suiv.

déterminée de personnes et être subordonnée à une destination spéciale du fonds dominant; elle constitue, au profit de ce fonds, un droit réel qui suit l'immeuble en quelques mains qu'il passe (1). (C. Nap., 637, 703 et suiv.)

Les servitudes continues qui consistent dans la prohibition pour un fonds d'user de certaines facultés, se conservent par le maintien des lieux dans un état conforme à ces servitudes, sans qu'il soit besoin d'autre manifestation.

Et le droit du fonds dominant ne peut être modifié que par un acte matériel contraire, à la fois apparent et permanent. (C. Nap., 707.)

On ne peut conclure d'une contradiction partielle à l'affranchissement total de l'héritage: ici est applicable la maxime tantùm præscriptum, quantùm possessum.

(Oulif C. Bastien.)

Le sieur Bastien est propriétaire d'une maison qui faisait anciennement partie d'une abbaye de chanoinesses vendue en 1791 comme propriété nationale. De son côté, le sieur Oulif possède une maison bâtie sur un terrain qui dépendait de la même abbaye et qui avait été vendu en 1754, avec la clause suivante : <«<Les adjudicataires, ni leurs successeurs ou ayants cause, ne pourront prendre ni pratiquer aucuns jours, fenêtres, soupiraux, ni autres de quelque espèce que ce soit, sur les paroisses et bâtiments réser vés à ladite abbayc; ne pourront aussi faire tomber les eaux de leurs toitures, ni de quelque autre endroit que ce soit dans ladite abbaye; les lucarnes qu'ils feront pratiquer dans les toitures de leurs maisons ou autres bâtiments, ne pourront être faites que du côté de ladite nouvelle rue, de sorte que lesdits bâtiments ne soient et ne puissent jamais être onéreux ni préjudiciables à ladite abbaye, ni au terrain réservé auxdites dames. » Le sieur Oulif ayant ouvert dans sa maison un grand nombre de jours et de vues directes ou obliques, le sieur Bastien en a demandé la suppression, en se fondant sur le titre de 1754.

15 déc. 1865, jugement du tribunal de Metz qui accueille cette demande par les motifs suivants : << Attendu qu'en présence du titre public des 28 août et 20 sept. 1754, enregistré conformément à la législation en vigueur à cette époque, titre actuellement découvert et produit par Bastien, qui s'en prévaut d'une manière expresse dans ses conclusions, il faut tenir pour certain qu'il a été et qu'il est

(1) Jugé, en ce sens, que la servitude altiùs non tollendi établie en faveur d'un couvent de religieuses, continue de subsister, bien que ce couvent ait été converti en caserne: Dijon, 24 août 1843 (S.1843.2.496). V. aussi comme anal. dans le même sens, Orléans, 1er déc. 1848 (P. 1849.1.164.-S.1849.2.593).

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