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1865 sur la mise en liberté provisoire; en deuxième lieu et plus particulièrement, de ne pas tenir compte de cette circonstance essentielle que la fille Reymondon avait comparu devant le tribunal correctionnel pour demander la remise de la cause; et enfin d'avoir violé les droits de la défense en mettant obstacle au droit qui appartient à tous les inculpés, même détenus, de faire défaut; -Attendu que, sans nier le caractère libéral et les dispositions essentiellement favorables de la loi de juillet 1865, il faut reconnaître qu'elle a entendu rendre plus stricte l'obligation de se représenter à tous les actes de la procédure; Attendu, en effet, qu'une jurisprudence remontant à l'année 1821 (V. ad notam) avait interprété l'ancien article du C. instr. crim. en ce sens que le cautionnement n'était définitivement perdu pour l'individu mis en liberté provisoire que lorsqu'il s'était dérobé à l'exécution du jugement de condamnation; d'où il résultait qu'il pouvait impunément se soustraire à l'obligation de se représenter à tous les actes de la procédure, pourvu qu'il se représentât en définitive pour l'exécution du jugement;-Attendu que cette interprétation de la loi ancienne a été manifestement rejetée par la loi de 1865, qui porte, art. 114, § 2: Le cautionnement garantit: 1o la représentation de l'inculpé à tous les actes de la procédure et pour l'exécution du jugement... »—Art. 122 : « La première partie du cautionnement est acquise à l'Etat, du moment que l'inculpé, sans motif légitime d'excuse, est constitué en défaut de se présenter à quelque acte de la procédure. » Attendu que le nouvel art. 125, pour mieux assurer l'obligation de se représenter, dispose que « si l'inculpé cité ou ajourné ne comparaît pas, le juge d'instruction, le tribunal ou la Cour, selon les cas, pourront décerner contre lui un mandat d'arrêt ou de dépôt, ou une ordonnance de prise de corps»;-Que, de l'ensemble de ces dispositions il résulte que la loi nouvelle a entendu attacher une peine spéciale au défaut de se représenter à tous les actes de la procédure; - Attendu que le pourvoi objecte, il est vrai, que la fille Reymondon a comparu, puisqu'elle s'est présentée à l'audience du tribunal correctionnel pour demander une remise; - Mais attendu que, dans le sens légal du mot, la comparution ne peut s'entendre que d'une comparution ayant pour objet de contredire au débat ; que ce qui prouve que la fille Reymondon n'a pas comparu, c'est qu'elle a été et qu'elle a dû être jugée par défaut; Attendu que le pourvoi objecte encore que la confiscation du cautionnement et le mandat de dépôt décerné contre la fille Reymondon constituent une atteinte portée aux droits de la défense, puisque ces mesures de rigueur font obstacle au droit qui appartient à tous les inculpés, même détenus, de faire défaut;

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Attendu que, sans refuser d'une manière absolue à l'inculpé, mis en liberté provisoire

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sous caution, le droit de faire défaut, droit qui n'a pas été dénié à la fille Reymondon, la loi de 1865 a pu soumettre les individus admis au bénéfice de la liberté provisoire à certaines garanties sans lesquelles l'instruction des procès criminels deviendrait impos sible; que ces garanties ne consistent pas uniquement dans le dépôt et la confiscation possible du cautionnement, mais dans l'en|gagement spécial et personnel de l'inculpé, ce quiest formellementexprimé par l'art. 113, où on lit que l'inculpé sera mis provisoirement en liberté, à la charge par lui de prendre l'engagement de se présenter; Attendu que cet engagement est absolu et général, et qu'il en résulte, en retour des avantages qu'il procure, une restriction nécessaire au droit de faire défaut; que l'inculpé ne saurait garder pour lui le bénéfice de la liberté provisoire, et rejeter les conséquences légales nées de son engagement et les restrictions que le législateur lui a imposées; Que la Cour de Chambéry a donc pu, après avoir constaté que la fille Reymondon n'avait pas tenu l'engagement par elle pris de se représenter et de contredire aux débats de l'audience correctionnelle, lui faire application de l'art. 125 de la loi du 14 juill. 1865;— Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt de la Cour de Chambéry du 16 nov. 1866, etc.

Du 1er fév. 1867.-Ch. crim.-MM. Vaïsse, prés.; Perrot de Chézelles, rapp.; Charrins, av. gén.; Duboy, av.

CASS.-CRIM. 9 mai 1867.

1° Marché, TERRAIN PRIVÉ, Voie publique. 2o POIDS ET MESURES, MARCHÉ, RÈGLE

MENT MUNICIPAL.

1° Doit être considéré comme devenu momentanément voie publique et lieu de marché public, même en l'absence de toute classification administrative, le terrain privé qui, joignant immédiatement le marché communal dont il n'est séparé par aucune clôture, est habituellement, les jours de foire, livré par son propriétaire aux marchands qui y circulent et y déposent leurs marchandises sans distinction entre cet emplacement et celui du marché officiel (1).

2° En conséquence, les règlements pris par l'autorité municipale pour maintenir l'ordre dans le marché et assurer la fidélité du débit des marchandises, spécialement ceux qui défendent d'établir des bureaux de pesage ou d'exercer les fonctions de peseur dans l'enceinte des foires et marchés ou dans toute l'étendue de la voie publique, sont applicables à un tel terrain comme au marché officiel lui-même (2). (L. 15-28 mars 1790, art. 21; Arr. 7 brum. an 9, art. 4 et 5; L. 29 flor. an 10, art. 1er; C. pén., 471, n. 15.)

(1-2) Il est de principe que le ministère des peseurs publics ne peut être rendu obligatoire

(Alivon.)

Le tribunal de simple police de Manosque avait jugé en sens contraire par un jugement du 22 mars 1867, qui relate complétement les faits. Ce jugement est ainsi conçu

«Attendu qu'il résulte du procès-verbal de M. le commissaire de police de Manosque, du 16 fév. 1867, et de l'aveu du contrevenant, qu'Alivon a établi, le jour indiqué, jour du marché, un burcau de pesage pour servir au public et a pesé des porcs sur un terrain joignant immédiatement et sans séparation d'aucun genre le boulevard des Tilleuls, voie publique où se tient légalement le marché de ces animaux;-Attendu que ledit Alivon soutient qu'ayani exercé la profession de peseur sur un terrain privé qu'il détient à titre de bail verbal, qui n'est pas voie publique, et est situé hors de l'enceinte du marché, il ne saurait avoir contrevenu à l'art. 3 de l'arrêté de M. le maire de Manosque du 10 novembre dernier, non plus qu'aux lois sur la matière, et qu'il s'agit de savoir si cette exception est fondée; Attendu, d'un autre côté, que le ministère public, tout en concédant que l'emplacement sur lequel Alivon a assis un bureau de pesage et pesé des porcs, est un terrain privé, ne faisant pas, par conséquent, partie de la voie publique communale, soutient que, les jours de marché, les porcs se tenant indistinctement sur le boulevard communal et sur l'emplace

hors des marchés, halles el ports, que pour le cas de contestation entre le vendeur et l'acheteur. V. Cass. 29 août 1850 (P.1852.1.229.-S.1851. 1.457), 7 nov. 1851 (P.1852.1.229.-S.1852. 1.142), 26 nov. 1852 (P.1854.1.540), et 17 juill. 1855 (P.1856.2.285.-S.1855.1.720). Ainsi, la profession de peseur exercée dans les propriétés privées est parfaitement licite.-L'arrêt que nous recueillons ne conteste pas ce principe seulement il décide que, dans l'espèce, tant à raison de sa situation que de la destination qui lui avait été donnée par le propriétaire, le terrain sur lequel s'exerçait le pesage était devenu une dépendance ou une annexe de la voie publique et du marché officiel; d'où il conclut que le règlement qui prohibait l'établissement de bureaux de pesage, tant dans l'enceinte du marché que sur la voie publique, lui était applicable.-A cet égard, la solution intervenue peut, au premier abord, sembler difficilement conciliable avec l'arrêt précité du 17 juill. 1855, qui, après avoir posé en thèse que l'autorité administrative est seule compétente pour déterminer l'enceinte des marchés où doit s'exercer l'industrie privilégiée du peseur public, décide que les tribunaux ne peuvent interdire à un particulier l'exercice du pesage dans sa maison, sous prétexte que cette maison est dans un lieu tellement rapproché du marché, qu'il doit être réputé en faire partie : « Attendu, porte cet arrêt, qu'en se décidant par un motif tiré de la position de cette maison, sans qu'aucun acte administratif eût classé ladite maison

comme

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ment en question, soit par pure convenance de la part du marchand, soit par la tolérance du propriétaire de ce terrain, soit par tout autre motif, le marché est censé se tenir tant sur le boulevard que sur cette petite place particulière, et qu'alors Alivon ayant établi un bureau de pesage dans cet endroit, même particulier, et y ayant pesé des marchandises, a contrevenu à l'arrêté municipal précité; qu'il s'agit de décider également si l'extension que donne le ministère public à l'enceinte du marché est dans le texte comme dans l'esprit des lois qui régissent la matière, et si Alivon, en s'établissant dans un endroit privé visant sur le boulevard où se tient le marché, et ayant pesé des porcs exposés en vente ou vendus en cet endroit, a commis une contravention;-Attendu que l'art. 21 de la loi des 15-28 mars 1790 a proclamé la liberté de l'industrie du pesage et mesurage des denrées et marchandises dans les maisons ou dans les endroits particuliers ;-Attendu que l'arrêté du 7 brum. an 9, par son art. 4, défend à toute personne autre que les employés ou préposés de l'administration d'exercer les fonctions de peseur, mesureur et jaugeur, mais seulement dans l'enceinte des marchés, halles et ports;-Attendu que l'art. 1 de la loi du 29 flor. an 10 déclare en outre que nul ne sera contraint de recourir au ministère des peseurs, mesureurs et jaugeurs publics, qu'en cas de contestation;Attendu qu'il résulte du rapprochement et de

partie du marché, l'arrêt attaqué a violé, etc. » Mais il importe de remarquer que, dans l'espèce de notre arrêt, à la différence de celle de l'arrêt de 1855, d'une part, le règlement municipal défendait expressément le pesage à la fois dans l'enceinte du marché et dans toute l'étendue de la voie publique de la ville, ce qui faisait de cette voie publique une annexe du marché; et, d'autre part, que le bureau de pesage établi par le prévenu, l'avait été, non dans une maison plus ou moins voisine du marché, mais sur un terrain non clos, joignant immédiatement ce marché, aussi librement accessible à tous que le marché lui-même dont aucun signe apparent ne venait le distinguer, enfin sur un terrain qui, à raison, tant de sa situation que de la destination que lui donnait son propriétaire, se confondait absolument, sans que le public pût y voir la moindre différence, avec le marché et la voie publique. C'est dans cet état des faits que la Cour de cassation a cru devoir considérer le règlement municipal comme applicable au terrain litigieux.

Il n'est pas, au reste, sans intérêt de rappeler qu'une jurisprudence constante a reconnu que tant qu'un terrain contigu à la voie publique est livré à la circulation par son propriétaire, et se confond ainsi avec cette voie, il est soumis aux mesures de police ou de petite voirie applicables à toute voie publique, notamment en ce qui concerne la commodité et la sûreté de la circulation ainsi que la salubrité publique. V. Cass. 5 mars 1863 (P.1864.628.-S.1864.1.150) et le renvoi.

la combinaison des dispositions précitées que, hors de l'enceinte des marchés, halles et ports, et hors le cas de contestation, il n'est pas interdit aux simples citoyens d'exercer la profession de peseur, jaugeur, mesureur, pourvu qu'ils se conforment, quant à la régularité des instruments employés par eux, aux lois et règlements sur les poids et mesures ;-Attendu que, conformément à ces dispositions, M. le maire de Manosque a pris à la date du 10 nov. 1866, un arrêté dûment approuvé qui porte, art. 2, que, a hors des halles, places et marchés, nul ne << sera contraint de recourir au ministère des << peseurs publics, si ce n'est dans le cas de «< contestation, ou lorsque, dans les halles ou << marchés, l'acheteur ou le vendeur voudront « se soumettre au pesage ou au mesurage »>, et défend, en conséquence, par son art. 3, à toute personne autre que le fermier du droit de pesage «< d'établir des bureaux ou maisons « de pesage et d'exercer les fonctions de pe«seur dans l'enceinte des halles, places, foi<< res et marchés, ou soit dans toute l'étendue « de la voie publique de la ville »;-Qu'il résulte des dispositions des art. 2 et 3 de l'arrêté qui précède, que si l'exercice du pesage public appartient exclusivement sur les balles, places, foires et marchés, au fermier adjudicataire, ou lorsque, dans les halles et marchés, l'acheteur ou le vendeur voudront se soumettre au pesage, hors ces deux cas l'industrie des peseurs et mesureurs est libre, et les particuliers peuvent, dans les maisons ou les endroits privés employer tels peseurs ou mesureurs qu'ils jugeront convenable; Attendu que si Alivon a établi un bureau de pesage, et pesé des porcs le jour indiqué par le procès-verbal, sur une cour joignant immédiatement et sans aucune espèce de séparation le boulevard des Tilleuls, voie publique, lieu désigné pour le marché des porcs, il est constant et reconnu, du reste, par le ministère public, que cette cour est un terrain privé, et qu'il n'est pas allégué que les pesages incriminés aient eu lieu dans des cas de contestation entre les vendeurs et acheteurs, ni que ce dernier ait exercé son ministère sur l'emplacement du marché, c'est-à-dire sur le boulevard, voie publique; -Attendu, d'ailleurs, que l'autorité municipale ne peut, hors des cas spécialement prévus par la loi, défendre de peser ou de mesurer par un autre que le peseur public les marchandises qui ont été exposées en vente ou vendues même sur les marchés de la commune, et que l'inobservation d'un pareil règlement ne saurait entraîner l'appplication d'aucune peine; qu'ainsi les vendeurs et acheteurs étant libres, hors le cas de contestation, de faire peser dans les maisons ou endroits particuliers et par qui bon leur semble, les marchandises par eux exposées en vente ou vendues sur les marchés de la commune, ainsi que l'a décidé la Cour de cassation par ses arrêts du 13 avril 1833 (P. chr. — S. 1833.1.713) et 29 août 1850

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(P. 1852.1.229.- S.1851.1.457), ces derniers ont pu, d'un commun accord, faire peser leurs porcs par Alivon, établi en dehors du marché et dans une cour privée;Mais attendu qu'il n'est pas même allégué ni établi par le procès-verbal que les porcs pesés par Alivon eussent été exposés en vente ou vendus sur le marché, c'est-à-dire sur le boulevard, voie publique où il doit se tenir légalement; Attendu que s'il est vrai de reconnaître avec le ministère public que souvent les porcs se tiennent dans la cour privée où Alivon a établi un bureau de pesage et exercé la profession de peseur, soit par pure convenance de la part des marchands, soit par la tolérance du propriétaire de cette cour, soit enfin par la tolérance de l'administration municipale; que des marchés même s'y sont souvent traités et s'y traitent encore, ces diverses circonstances ne sauraient permettre d'assimiler ce lieu privé au marché, de dire qu'il en fait partie intégrante, alors que le marché ne peut légalement se tenir que sur le boulevard ou soit sur la voie publique communale, lieu désigné exclusivement dans ce but par l'administration municipale, et d'étendre ainsi les prohibitions qui sont de droit étroit au delà des dispositions de l'arrêté du 7 brum. an 9, de l'art. 1 de la loi du 29 flor. an 10, et des art. 2 et 3 de l'arrêté même de M. le maire de Manosque;-Qu'étendre au delà du boulevard ou soit de la voie publique communale, et jusque sur un emplacement particulier, reconnu comme tel et non désigné administrativement, le marché des porcs, et, partant, les prohibitions de la profession de peseur public, ce serait se mettre en opposition avec les lois précitées, et violer le principe de la liberté de cette industrie, établie par l'art. 21 de la loi des 15-28 mars 1790;-Qu'en supposant même que l'administration municipale eût pu, en s'entendant avec le propriétaire de cette cour, comprendre ce terrain dans l'enceinte du marché, il faudrait encore que ce lieu eût été désigné administrativement et formellement compris dans l'enceinte du marché, ainsi que cela résulte de la jurisprudence de la Cour suprême, et notamment de ses arrêts des 15 oct. 1840 (P.1841.2.392.-S.1841.1.553), 29 juin 1844 (P. 1844.2.271), 11 mai 1850 et 17 juill. 1855 (P.1856.2.285.-S.1855.1.720);- Qu'on ne représente aucun acte administratif portant que ce terrain particulier a été désigné et formellement compris dans l'enceinte du marché; que l'administration municipale ne peut que s'en prendre à elle si elle laisse les marchands étaler leurs marchandises dans un lieu privé autre que celui désigné par elle, alors qu'elle pourrait les en empêcher sous les peines de la loi; mais que les tiers, les étrangers, ne sauraient souffrir d'un état de choses qu'elle tolère ou qu'elle ne cherche pas à empêcher; Qu'ainsi, en établissant un bureau de pesage sur une propriété privée et non classée par l'administration munici

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pale, quoique visant sur le marché, et en pesant des porcs même exposés en vente ou vendus sur le marché, mais sans qu'il se soit élevé de contestation d'aucun genre entre les vendeurs et acheteurs, Alivon n'a fait qu'user d'un droit légitimé qu'il puise dans la loi, et n'a, par conséquent, commis aucune contravention, etc. >>

POURVOI en cassation par le ministère public.

ARRÊT.CO

LA COUR; Vu l'arrêté municipal du 10 nov. 1866, portant règlement du pesage public dans la ville de Manosque, et l'art. 471, n. 15, C. pén.;-Attendu que l'arrêté susvisé, dúment approuvé par le préfet des Basses-Alpes, défend (art. 3) à fout individu d'établir des bureaux ou maisons de pesage, ou d'exercer les fonctions de peseur dans l'enceinte des halles, places, foires et marchés, ou dans toute l'étendue de la voie publique de la ville;-Attendu que, d'un procès-verbal régulier dressé par le commissaire de police de Manosque, il résulte que, le 16 fév. 1867, jour de marché, le nonimé Alivon a établi, dans cette ville, un bureau de pesage sur le terrain dit « place de la Villette »; Attendu que ce procès-verbal constate en outre, et qu'il est aussi reconnu par le jugement attaqué que si la «< place de la Villette » n'est pas une propriété communale, elle touche immédiatement au boulevard des Tilleuls affecté au marché des cochons, et n'en est séparée par aucune barrière ou clôture quelconque ;-Attendu qu'il est également reconnu et constaté que, depuis un grand nombre d'années, la place de la Villette est, pendant la tenue des marchés, couverte de marchands et de marchandises, sans que le public fasse de distinction entre

(1) Anciennement, les habitants étaient obligés d'éclairer la voie publique. Aujourd'hui l'éclairage a cessé d'être, de droit, une charge im posée aux riverains; mais, comme le décide notre arrêt, il est dans les pouvoirs de l'autorité municipale de prendre des règlements pour les y astreindre et de spécifier l'étendue de l'obligation d'éclairage. V. conf., notamment Cass. 13 juin 1811 et 12 juill. 1838 (P.1839.1.35. S. 1838.1.987). V. aussi M. Féraud-Giraud, Tr. de la grande voirie, n. 886.

(2) La jurisprudence de la Cour de cassation a été assez hésitante sur le point de savoir si les adjudicataires de services municipaux, tels que le balayage, l'enlèvement des immondices, etc., etc., sont passibles de peines de police, comme le seraient les habitants eux-mêmes auxquels ils sont substitués, en cas d'infraction aux règlements relatifs à l'objet de leur entreprise. Divers arrêts ont cherché la raison de décider dans la rédaction des cahiers des charges, faisant dépendre la solution du point de savoir si ces adjudicataires s'étaient ou non soumis à une responsabilité pénale par les clauses de leur adjudication. Mais cette

cette place et l'emplacement officiel du marche; Attendu qu'en l'état des faits susénoncés, les prescriptions de l'autorité municipale chargée par la loi de maintenir l'ordre dans les marchés et de veiller à la fidélité du débit des marchandises, doivent être appliquées aussi bien sur la place de la Villette, devenue momentanément voie publique et lieu de marché public, que sur le boulevard des Tilleuls, et que, dès lors, en refusant d'appliquer à Alivon les dispositions de l'arrêté du 19 nov. 1866, le jugement attaqué a formellement violé l'art. 3 de cet arrêté et l'art. 471, n. 15, C. pén.; Casse, etc.

Du 9 mai 1867.-Ch. crim.MM. le cons. Legagneur, prés.; Lascoux, rapp.; Charrins, av. gén.

CASS.-CRIM. 3 août 1866.

POUVOIR MUNICIPAL, ÉCLAIRAGE, ENTREPRENEUR, MESURE INDIVIDUELLE.

Est légal et obligatoire, comme portant sur un des objets confiés à la vigilance de l'autorité municipale, l'arrêté par lequel un maire prescrit les mesures nécessaires pour assurer la régularité de l'éclairage des rues (1). (L. 16-24 août 1790, tit. 2, art. 3; C. pén., 471, n. .15.)

Et l'arrêté pris à cet égard est applicable, sous les peines de police attachées à son inexécution, même à l'entrepreneur avec lequel le maire, comme représentant la commune, aurait traité pour l'éclairage des voies publiques...; encore bien que le cahier des charges ne soumette expressément cet entrepreneur, pour le cas d'inaccomplissement y déterminé, qu'à des réparations civiles et non à une responsabilité pénale (2).

jurisprudence était en opposition avec le sentiment de certains auteurs (V. notamment MM. Chauveau et Faustin-Hélie, Th. G. pen., t. 6, n. 2524), qui soutenaient que les peines ne peuvent être l'objet d'une convention (V. Rép. gen. Pal. et Supp., v Balayage, n. 45 et suiv.; Table gén. Devill. et Gilb., v° Immondices, n. 2 et suiv. Adde Cass. 31 août 1854 (P.1856.2.370. - S. 1854.1.818), dans les motifs.-D'autres arrêts se sont placés à un point de vue plus net et plus en harmonie, selon nous, avec les vrais principes, en décidant que lorsque le service entrepris par l'adjudicataire était imposé aux habitants par un règlement municipal, cet adjudicataire, comme subrogé à ces habitants, es: personnellement passible des contraventions commises au règlement, alors même que son cahier des charges ne l'y assujettit pas. V. Cass. 23 mars 1848 (P.1848.2.381.-S.1848.1.582); 27 juin 1856 (P.1857.322. S.1856.1.764); 9 nov. 1861 (P.1862.398.-S.1862.1.750). Adde M. Grün, Tr. de la pol. adm., n. 476.-La décision que nous recueillons confirme cette dernière jurisprudence d'une manière fort explicite, dans

Si, en principe, les arrêtés pris en matière de police par l'autorité municipale doivent nécessairement avoir pour objet un intérêt public et général, sans pouvoir statuer exclusivement dans l'intérêt privé, il ne s'ensuit pas que ces arrêtés ne puissent contenir des dispositions spéciales, soit à une seule personne, soit à une seule entreprise, alors qu'ils interviennent dans un intérêt général et que l'objet auquel ils se réfèrent ne comporte par sa nature qu'une mesure spéciale et individuelle (1)... (par exemple, s'il s'agit de l'éclairage des rues par un entrepreneur).

(Fourcassies.)

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LA COUR; Vu l'art. 1er, n° 7, de l'arrêté du maire de Castres, en date du 28 déc. 1865, ainsi conçu : Les dispositions des art. 471, no 15, et suivants du Code pénal, sont applicables aux personnes ci-après désignées: 1... 7° l'entrepreneur d'éclairage, ou le directeur du service d'éclairage de la ville, lorsque l'éclairage ne sera pas exécuté aux heures et suivant les conditions déterminées par le cahier des charges; >>> Attendu qu'un maire peut agir en la double qualité d'agent du pouvoir exécutif et de représentant de la commune; qu'il peut, en la première, prendre des arrê tés sur les objets confiés à sa vigilance et à son autorité; en la seconde, souscrire des marchés pour assurer un service public, et stipuler des clauses pénales en cas d'inexécution des conditions; Que les actes du représentant de la commune ne peuvent jamais paralyser le droit de l'agent du pouvoir de prendre des arrêtés, et que les clauses pénales qu'il a stipulées dans l'intérêt de la commune ne peuvent pas davantage soustraire à l'application de la loi pénale, dans le cas de contraventions, l'entrepreneur avec lequel le marché a été contracté ;-Attendu, dès lors, que Fourcassies, entrepreneur de l'éclairage de la ville de Castres, étant poursuivi pour contraventions à l'arrêté ci-dessus visé, pris par le maire, il s'agit de savoir si l'objet de cet arrêté était de ceux confiés à la vigilance et à l'autorité de ce fonctionnaire ; Attendu que l'éclairage des rues, places et voies publiques, procure aux habitants l'avantage d'en parcourir sûrement tous les quartiers pendant l'obscurité de la nuit ; qu'il

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une espèce d'autant plus remarquable que le service entrepris par l'adjudicataire n'avait encore, lors de l'adjudication, été l'objet d'aucun arrêté municipal, mais était seulement, à raison de sa nature, susceptible d'être réglementé. La Cour ne considère pas que, même en ce cas, le silence du cahier des charges puisse exonérer l'adjudicataire, et elle donne, comme raison de sa décision, ce motif fort judicieux, que « lorsque la matière sur laquelle contracte la commune est, par sa nature, matière de police susceptible d'être régie par des règlements, toute clause spéciale de la part de ANNÉE 1867.-6° LIVR.

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est un des moyens les plus utiles que la police emploie pour prévenir les désordres et les crimes et pour veiller à la sûreté publique ; que, par conséquent, il rentre essentiellement parmi les objets confiés par les lois des 14 déc. 1789, 16-24 août 1790 et 19-22 juill. 1791,à la vigilance et à l'autorité des maires; qu'il est, d'ailleurs, expressément rangé au nombre de ces objets et mis sur la même ligne que le nettoiement de la voie publique par l'article 3 du titre II de la loi des 16-24 août 1790, qui porte que les objets confiés à la vigilance et à l'autorité des corps municipaux sont: 1° tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques, ce qui comprend le nettoiement, l'illumination, l'enlèvement des encombrements, etc... »;- Que cette expression, illumination, désigne nonseulement l'éclairage des lieux publics, tels que les auberges, hôtelleries, etc., et celui des encombrements, mais encore l'éclairage général des rues, places et voies publiques; que c'est en ce sens que cette expression a toujours été entendue, notamment lorsqu'il s'est agi de l'éclairage des villes donné à l'entreprise; qu'on lit, en effet, dans l'art. 1er de l'ordonnance de police concernant l'illumination de la ville et faubourgs de Paris, du 5 nov. 1778: «Enjoignons aux entrepreneurs de l'illumination, leurs commis et préposés, de veiller avec le plus grand soin à ce que les lanternes soient bien nettoyées et le service fait avec toute l'exactitude possible » ;Qu'il suit de là qu'on doit tenir pour légal et obligatoire l'arrêté du 28 déc. 1865 ci-dessus vise; Attendu que la sentence attaquée excipe vainement de ce que l'entrepreneur ne se serait pas soumis par son traité aux peines de police, et de ce que l'arrêté invoqué contre lui, ne s'étendant pas à l'universalité ou à une certaine classe de citoyens, manquerait du caractère essentiel d'un règlement de police; - Attendu, en premier lieu, que, lorsque la matière sur laquelle contracte la commune est, par sa nature, matière de police susceptible d'être régie par des règlements, toute clause spéciale de la part de l'entrepreneur de se soumettre au règlement de police qui pourra intervenir est inutile, puisque, la loi elle-même ayant imprimé à cette matière le caractère qui lui appartient, ce caractère ne peut être modifié par les con

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l'entrepreneur de se soumettre au règlement de police qui pourra intervenir est inutile, puisque la loi elle-même ayant imprimé à cette matière le caractère qui lui appartient, ce caractère ne peut être modifié par les conventions particulières des parties. »

(1) Ce principe, admis par MM. Chauveau et Hélie, Th. C. pén., t. 6, n. 2522, a été plusieurs fois consacré par la jurisprudence. V. entre autres arrêts, Cass. 2 oct. 1824, 8 oct. 1836 (P. 1837.2.50.-S.1837.1.451), et 13 mars 1862

(P.1862.910).

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