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Les pertes et dommages volontairement soufferts pour éviter un abordage doivent-ils être considérés comme avarie commune? (Rés. aff, )

En est-il de même des pertes et dommages résultant d'un échouement, si cet échouement est la suite d'un sacrifice volontairement fait pour le salut commun? (Rés aff.)

La nourriture et le loyer des matelots, pendant les réparations faites au navire, par suite d'une avarie commune, sont-ils avarie commune, quoique le navire eût été affrété au voyage? (Rés. aff. ) (Le capitaine Duiff contre l'Administration de la marine.)

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E 11 novembre 1823, le capitaine Duiff, commandant la galiote hollandaise Hersteller, part de Memel, en destination pour Toulon, avec un chargement de bois de mâture pour l'administration de la marine royale de France.

Le 16 décembre, la galiote Hersteller mouille à Elseneur sur une ancre de poste. A sept heures du soir, l'équipage voit au clair de la lune un brick venant de la mer baltique, qui se dirigeait sur la galiote, ayant son grand hunier et sa brigantine. La crainte que le brick ne tombât sur la galiote force à filer du câble; mais le brick dérive sur l'avant de la galiote: on est obligé de couper le câble, ainsi que les cordages de la civadière, afin que les deux navires s'écartent.

Cette mesure, qui était nécessitée par l'abordage,

occasione la perte de l'ancre pesant environ 400 kilogrammes, d'un câble de douze pouces d'épaisseur, des cordages de la civadière, du bâton de foc et du minois.

La galiote Hersteller dérive de quelques encablures et alors on mouille.

Vers les neuf heures du soir, le capitaine Duiff descend à terre pour acheter une ancre, un câble, pour remplacer les autres objets qu'il avait perdus,. et encore pour réclamer les dommages occasionés par le brick: il se présente d'abord au magistrat et il lui fait la déclaration de ses avaries.

Le 18 décembre, jugement du tribunal d'Elseneur qui, sur la requête du capitaine Duiff, nomme des experts chargés de constater et d'estimer le dommage.

Le 17 décembre, pendant que le capitaine était à terre, le navire fatiguait beaucoup sur son ancre, à cause du mauvais temps. A dix heures du soir, un ouragan survient : le navire chasse sur son ancre: l'équipage craint qu'il ne tombe sur un autre bâtiment: il décide, pour le salut commun, de couper le câble et de mettre la voile d'étai dehors, afin de s'éloigner: il mouille une troisième ancre avec un greling de 80 brasses. Le navire dérive encore: on ne peut parvenir à l'éloigner de la côte : il échoue et il fatigue beaucoup en talonnant toute la nuit.

Le 18, le capitaine Duiff fait une nouvelle déclaration au magistrat du lieu.

Le 19,

on décide unanimement de prendre des chaloupes et des marins pour mettre le navire à

flot.

Le 12 janvier 1824, après les plus grands efforts, il commence à flotter.

On délibère d'aller à Copenhague pour faire

examiner le navire et pour le faire réparer on y arrive le 13 janvier.

Le même jour, le capitaine Duiff fait, devant le magistrat, la déclaration des avaries que son navire avait éprouvées : des experts sont nommés pour les constater et les apprécier.

Le même jour encore, le tribunal d'Elseneur, qui avait été investi de la demande du capitaine Duiff contre le capitaine du brick suédois, à raison de l'abordage, décide qu'il n'y a eu ni négligence, de la part du capitaine suédois, ni conduite blåmable, de la part du capitaine Duiff. En conséquence, il ordonne que le dommage sera supporté par moitié entre les deux navires.

Le capitaine Duiff contracte un emprunt à la grosse de la somme de 28,308 fr. 20 c.es, compris le change maritime.

Il part ensuite de Copenhague et il arrive à Toulon, Le 22 avril, il fait son consulat.

Le 28 avril, il assigne l'administration de la marine devant le tribunal de commerce: il demande le réglement des avaries communes souffertes pendant le cours de son voyage.

Le 29 avril, jugement du tribunal qui nomme des experts, avec mission de faire rapport des avaries,

Le 19 mai, ce rapport est clôturé : il en résulte que les avaries communes éprouvées par la galiote Hersteller s'élèvent à la somme de 17,725 fr., non compris le change maritime dû à raison de l'emprunt à la grosse.

Cette masse d'avaries communes était composée des pertes et dommages relatifs à l'abordage et à F'échouement et les experts y avaient fait entrer la nourriture et le loyer des matelots, pendant les réparations du navire,

Le capitaine Duiff s'adresse au tribuual et il demande la répartition des avaries.

L'administration de la marine soutient qu'il n'y a pas de répartition à faire, parce que toutes les avaries souffertes sont particulières.

La déclaration du capitaine Duiff, dit-elle, prouve que l'abordage de la galiote Hersteller avec le brick suédois est un événement purement fortuit. Cette circonstance suffirait pour faire déclarer particulières les avaries qui ont été la suite de cet abordage.

Mais il n'est pas même nécessaire de rechercher la cause de l'abordage; car, le jugement rendu à Elseneur contradictoirement avec le capitaine Duiff atteste que cet abordage provenait de la faute réciproque des deux capitaines: aussi ont-ils été condamnés à supporter chacun la moitié des avaries.

Bien plus l'art. 407 du code de commerce contient des dispositious spéciales qui règlent tout ce qui a rapport à l'abordage et suivant lesquelles les avaries qui en résultent doivent, dans tous les cas, être supportées par les navires.

L'échouement de la galiote est une suite des fautes qui ont occasioné l'abordage: on peut encore l'attribuer à l'imprudence de l'équipage et surtout à l'absence du capitaine, qui se trouvait à terre lorsqu'il est survenu.

D'ailleurs cet échouement n'a pas été volontaire: il a été produit, d'après les termes même de la déclaration du capitaine, par la puissance de la tempête et la rapidité des courants: d'où il suit que les dommages qu'il a pu causer sont avaries particulières.

Dans tous les cas, la nourriture et le loyer des matelots, pendant les réparations du navire, ne sauraient être classés en avarie commune. En eflet, le navire était affrété au voyage, et, suivant la

disposition formelle de l'art. 403, §. 4 du code de commerce, ces dépenses, en tel cas, sont avarie particulière,

commune,

JUGEMENT.

> Considérant qu'il faut reconnaître pour avarie suivant le vœu de la loi et les auteurs, toute perte, tout dommage, tout préjudice éprouvés par le fait et la volonté de l'homme pour en éviter de plus grands;

Qu'en appliquant ce principe aux faits et préjudices éprouvés par le navire Hersteller, le soir du 16 septembre 1823, on voit par les consulats ou soit par les déclarations faites, soit à Elseneur, soit à Copenhague, soit à Toulon, lesquelles sont les seuls actes auxquels on puisse ajouter confiance que c'est volontairement et pour éviter de plus grands malheurs qu'on coupa le câble, ainsi que les cordages de la civadière, ce qui fit perdre encore le bâton de foc et le minois, et ce qui constitue bien le caractère de l'avarie commune;

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Que l'avarie ne pourrait être considérée comme particulière, dans l'espèce, que si le câble avait été rompu, ainsi que les cordages de la civadière, par un événement de mer indépendant et sans participation de la volonté de l'homme;

Qu'on ne peut pas dire ici que l'abordage du brick suédois a rompu le câble et les cordages; mais qu'il a été seulement l'occasion ou la cause qu'on a été forcé de les couper pour éviter le malheur plus considérable du choc des deux navires ;

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Que le jugement rendu, le 13 février, à Elseneur, établit d'une manière bien formelle qu'il n'y a eu, dans le fait, ni négligence, de la part du capitaine suédois, ni conduite blamable, de la part du capitaine Duiff; que ce fut parce que le fait avait été indépen

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