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4o Dans le concours de deux navires, le plus petit doit céder le pas au plus gros, si les circonstances du temps et du lieu ne s'y opposent;

5o Le capitaine du vaisseau qui est en rade, et qui veut faire voile pendant la nuit, est tenu, dès le jour qui précède le départ, de se mettre en lieu propre pour sortir sans aborder;

6o Le vaisseau qui court à voiles déployées doit éviter celui qui est à la cape et qui ne peut se mettre à l'écart;

7° Chaque navire doit garder la place qui lui est assignée dans le port;

8o Il doit laisser le passage libre ;

9° Il doit être bien amarré;

10° Il doit avoir un gardien;

11° Il ne doit pas laisser les ancres sans gaviteaux (1).

La faute est donc censée venir, à moins de preuve contraire, du capitaine qui a violé l'une de ces règles.

Voici un cas qui paraît nouveau.

Le 12 mars 1825, le capitaine Doussinague, français, commandant le brick le Mentor, fait assigner, devant le tribunal de commerce, le capitaine Allberg, commandant le brick suédois le Pénélope. Il le signale comme l'auteur de l'abordage qui avait eu lieu, le 12 février précédent, à dix heures du soir, à 4 lieues de Pomégue, et des dommages qui en avaient eté la suite. Il prétend que le capitaine

(1) Voir Émérigon et Yalin.

Alhberg n'a pas fait la manœuvre que l'usage prescrivait, en pareil cas. Enfin, il demande condamnation pour le montant du dommage souffert.

Il s'agissait donc de savoir quelle est la manœuvre qui doit être faite par deux navires qui se rencon

trent en mer.

qui

JUGEMENT.

« Attendu que, en règle générale, deux navires se rencontrent en mer, doivent venir tous les deux sur stribord; que, par cette manœuvre, tout abordage devient impossible;

» Attendu que le capitaine Doussinague avait ses amures à stribord, serrant le plus près du vent; qu'il ne pouvait, par conséquent, venir davantage sur stribord; tandis que le capitaine Alhberg, qui avait ses amures à babord, pouvait facilement et devait venir sur stribord ou s'y amurer, et il est évident qu'il n'a pas fait cette manœuvre, puisque l'abordage a eu lieu sur le côté de babord du capitaine Doussinague; que l'abordage n'a donc eu lieu que par une fausse manoeuvre du capitaine Alhberg et que les dommages qui en sont le résultat doivent, dès-lors, être payés par lui;

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LE TRIBUNAL condamne le capitaine Alhberg au paiement de la somme de 877 fr., montaut des dommages éprouvés par le brick le Mentor, etc.

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Du 16 mars 1825. Prés. M. LUCE. Plaid. MM. ARNAUD, pour le capitaine Doussinague; URTIS, pour le capitaine Alhberg.

Jugement arbitral. — Ordonnance d'exécution.

Amiables compositeurs.

Compétence.

Le président du tribunal de commerce est-il compétent pour ordonner l'exécution d'un jugement arbitrol intervenu entre associés, mais rendu par des arbitres investis de la qualité d'amiables compositeurs? (Rés. aff.)

(Guyot contre Casteras.)

LE 30 décembre 1824, le sieur Guyot et le sieur Casteras nomment des arbitres et les chargent de liquider la société qui avait existé entre eux pour les remplacemens militaires des classes de 1818 à 1823.

L'article 4 du compromis est ainsi conçu :

« MM. les arbitres, et, le cas échéant, le troisième arbitre, sont dispensés de l'accomplissement de » toutes formes judiciaires, soit dans l'instruction » de l'affaire, soit dans le jugement: ils sont auto» risés à statuer comme amiables compositeurs : leur » décision sera souveraine et en dernier ressort, les parties renonçant à tout appel, requête civile et pourvoi en cassation ».

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Le 29 mars 1825, les arbitres rédigent une pièce, à double original, que le sieur Casteras qualifie de jugement arbitral et que le sieur Guyot qualifie de simple note.

Ce jugement arbitral ou cette note est déposé au greffe du tribunal de commerce de Marseille, et, le 12 avril, il est homologué par le président de ce tribunal, qui en ordonne l'exécution

-Le 4 mai, le sieur Casteras fait signifier le jugement arbitral ou note au sieur Guyot et il l'assigne devant le tribunal de commerce à l'effet de faire nommer un liquidateur pour les affaires de la société

non encore terminées.

Le sieur Guyot forme opposition envers l'ordonnance du président du tribunal de commerce portant homologation de la note qualifiée jugement arbitral: il demande que cette ordonnance soit rétractée et annulée, comme incompétemment rendue, et que, par suite, les parties soient renvoyées à se pourvoir devant qui de droit.

La loi, dit-il, reconnaît deux espèces d'arbitrages, l'un volontaire, l'autre forcé.

L'arbitrage volontaire, qui embrasse tous les objets ei toutes les contestations sur lesquels il est permis de compromettre, est régi par les dispositions du code de procédure civile, dispositions qui forment le droit commun.

le

L'arbitrage force, uniquement introduit pour jugement des contestations relatives aux sociétés commerciales, est régi par le code de commerce, qui contient, à cet égard, des dispositions spéciales, dispositions qui forment un droit exceptionnel.

Nul doute que le jugement émané d'arbitres volontaires ne doive être déposé au greffe du tribunal civil et que le président de ce tribunal ne doive décerner l'ordonnance d'exécution.

Nul doute aussi que le jugement émané d'arbitres forcés ne doive être déposé au greffe du tribunal de commerce et que le président de ce tribunal ne soit compétent pour le rendre exécutoire (1).

(1) Voir DENEVERS, tom. 9, 2o partie, pag. 88, et SIREY, tome 12, 2° part., pag. 1321.

Mais si les associés donnent à leurs arbitres des pouvoirs plus étendus que ceux qui leur sont attribués par la loi, s'ils les instituent arbitrateurs, amiables compositeurs, ils dénaturent par là l'arbitrage forcé, ils lui enlèvent son caractère propre, en un mot, ils le convertissent en arbitrage volontaire.

Dès-lors, ces associés cessent d'être placés sous l'influence de la loi commerciale: ils tombent sous l'empire de la loi civile et du droit commun.

Dès-lors, par suite, le greffe du tribunal civil doit recevoir et le président de ce tribunal doit rendre exécutoire la sentence qui est rendue par des arbitres ainsi institués.

La conversion de l'arbitrage forcé en arbitrage volontaire a paru d'abord problématique; mais aujourd'hui ce probleme est résolu par une jurisprudence constante et qui ne permet plus le moindre doute (1).

Certainement les associés qui confèrent à leurs arbitres la qualité d'amiables compositeurs n'altèrent ni ne changent point, par là, la nature de la contestation; mais on ne peut nier qu'ils altèrent et qu'ils changent la nature de l'arbitrage, puisque, de forcé qu'il était, ils le convertissent en volontaire et que, dès-lors, la qualité de conciliateurs déférée aux arbitres remplace celle de juges.

Certainement encore l'ordonnance d'exequatur est de pure forme: personne ne le conteste; mais cela ne veut pas dire qu'elle puisse être apposée par un président incompétent.

On objecte que l'existence d'une contestation entre associés suffit, dans tous les cas, pour déterminer la compétence du tribunal de commerce et pour l'autoriser à décerner l'ordonnance d'exécution.

(1) Voir ce Recueil, tome 2, 2° part., pag. 96, et tome 4, 2o part., pag. 29

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