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9. Mais quelquefois les spéculateurs agissent eux-mêmes sans l'intermédiaire des agents de change; on leur donne alors le nom de coulissiers, du nom de la coulisse ou couloir situé près du parquet des agents de change et où ces spéculateurs s'assemblent. V. Agent de change, n. 123 et suiv.

10. Les jeux de bourse sur les effets publics, non seulement compromettent les fortunes particulières, mais encore ils sont funestes au crédit public, puisque leur effet habituel est d'opérer des variations considérables et imprévues dans le cours de la bourse, et qu'il importe, d'une part, que ce cours soit réel et établi par des opérations sérieuses, et que, de l'autre, il ne soit soumis qu'à l'empire des événements qui exercent une influence directe sur la prospérité de l'Etat. Courcelle-Seneuil, Tr. théor. et prat. d'économie politique, t. 2, p. 277. Comp. Courtois, op. cit., p. 157 et suiv.; Badon-Pascal, Marchés à terme, p. 12.

Les jeux de bourse sur les marchandises dénaturent les transactions commerciales, multiplient les chances de ruine et de banqueroute, et ne blessent pas moins les véritables intérêts du commerce que ceux de la morale publique.

Aussi, sous l'ancien comme sous le nouveau régime, des lois nombreuses et sévères ont-elles été publiées pour arrêter et punir les jeux de bourse et l'agiotage, qui en est la conséquence.

11. Le premier monument de législation sur cette matière est l'arrêt du Conseil d'Etat du roi, du 24 septembre 1724, rendu après la banqueroute de Law, et destiné à empêcher le retour des spéculations inouïes qui eurent lieu à cette époque. Cet arrêt prohibait d'une manière absolue tout marché à terme. 12. Environ soixante ans après, Louis XVI rendit, le 7 août 1785, un arrêt du Conseil, qui déclara nuls les marchés d'effets royaux et autres quelconques qui se feraient à terme et sans la livraison desdits effets, ou sans le dépôt réel d'iceux au momen. même de la signature de l'engagement. Art. 7.

Cette prohibition s'appliquait même aux marchés à terme qui contiendraient au profit de l'acheteur réserve de pouvoir exiger la livraison avant l'échéance moyennant l'escompte. Formule remplacée aujourd'hui par les mots de style dans les marchés à terme, livrables plus tôt à volonté. V. Préamb.

Arr. 1785. - V. inf., n. 25.

13. Le 2 octobre de la même année, un nouvel arrêt fut rendu pour faire exécuter les dispositions de celui du mois. d'août et opérer la liquidation des compromis qui lui étaient antérieurs.

14. Ces défenses n'ayant pas obtenu un résultat immédiat un nouvel arrêt du Conseil intervint le 22 septembre 1786, lequel, tout en maintenant les dispositions des arrêts de 1785,

ajouta une nouvelle prohibition, celle de faire, à peine de nullité, les marchés à terme autorisés moyennant le dépôt réel des effets vendus, avec stipulation d'un délai excédant deux mois et sans que le marché fait fût signé par l'agent de change qui avait signé la négociation.

15. Les contrevenants, passibles d'une amende de 24,000 livres, furent soumis à la juridiction d'une commission particulière jusqu'au 14 juillet 1787, époque à laquelle un autre arrêt du Conseil, confirmatif des précédents en ce qui concerne les prohibitions des marchés à terme, rendit la juridiction ordinaire compétente pour statuer sur les contestations relatives aux marchés illicites.

16. Les lois nouvelles maintinrent les prohibitions portées dans les arrêts que nous venons de citer. LL. 8 mai 1791; 13 fruct. an 3, art. 2.

17. La loi du 28 vendémiaire an 4 fit plus, elle proscrivit positivement les marchés à terme, dans lesquels le vendeur ne prouverait pas qu'il possédât actuellement l'effet qu'il s'engagerait à livrer ou qui ne déposerait pas les titres de propriété, et elle convertit en lois les anciens réglements qui, n'ayant pas subi la formalité de l'enregistrement, n'avaient pas, sous l'ancien régime, acquis le caractère extérieur ni l'autorité des lois, de telle sorte que les réglements de 1724, 1785 et 1786 font partie intégrante de la législation actuelle sur cette matière. LL. 20 niv. et 2 vent. an 4; Merlin, Quest. de Droit, v° Effets publics, § 1; Cass., 26 août 1791; 23 floréal an 9; 27 nov. 1811; Courtois, Opér. de bourse, p. 192 et 193.

18. Enfin le Code pénal, art. 422, a déterminé les conditions qui donnent aux jeux de bourse le caractère de délit, sans toutefois modifier la valeur législative des arrêts de 1785 et 1786. — V. inf., n. 90 et suiv.

19. Il y a présomption qu'un marché à terme constitue un jeu de bourse, lorsque le dépôt des effets ou des titres de propriété n'a pas eu lieu dans les mains de l'agent intermédiaire. Paris, 18 fév. et 26 août 1823; Cass., 11 août 1824; Paris, 17 fév. 1842 (S. 42. 2. 255. — P. 42. 1. 434. D. 42. 2. 231); 5 janv. 1877 (J. trib. com., 77. 186); Bozérian, De la bourse, n. 242; Mollot, Bourses de com., n. 159; Buchère, Opér. de bourse, n. 325.

20. Si l'agent de change n'établit pas que, à l'époque de la vente, il y avait dépôt effectif, le marché doit être annulé. Cass., 22 mai 1827.

21. Toutefois, l'acheteur n'est pas obligé de consigner le montant des effets par lui achetés. Paris, 9 juin 1836 (S. 37. 2. 83). V. Agent de change, n. 151.

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22. Le marché devra certainement être annulé s'il n'est pas établi que le vendeur put livrer les titres vendus, et que l'ache

teur pût payer le prix. Seine, 13 oct. 1852 (J. trib. com., t. 2.
15); Metz, 23 juin 1857 (ibid., t. 7. 243); Paris, 27 janv. 1859
(ibid., t. 8. 340); 1er fév. 1859 (ibid., t. 8. 343); 4 avril 1859 (ibid.,
t. 8. 419); 29 nov. 1860 (ibid., t. 10. 79); 15 déc. 1862 (ibid.,
t. 12. 110); 2 juill. 1868 (ibid., t. 18. 189); Limoges, 12 déc. 1868
(ibid., t. 18. 241); Colmar, 26 janv. 1869 (ibid., t. 18. 338);
Paris, 12 juill. 1871 (ibid., t. 20. 378); 14 août 1876 (ibid., 77.
266); 5 janv. 1877 (ibid., 77. 186); Martin Le Neuf de Neuf-
Ville, p. 388.

Alors surtout que les marchés portent sur des marchandises étrangères au commerce de l'acheteur. Paris, 29 nov. 1860 (J. trib. com., t. 10. 79); Buchère, n. 360.

23. Jugé, dans le même ordre d'idées, que l'achat et la revente, à bref délai, de valeurs de bourse dont l'importance n'est pas en rapport avec la fortune de celui qui opère constituent un jeu, alors surtout que la fréquence, la précipitation des opérations, leur règlement en simples différences, l'usage des reports attestent l'impossibilité de payer ou de livrer les effets. Trib. civ. Lyon, 24 janv. 1874 (Monit. judic., 19 fév.); Paris, 5 juill. 1876 (J. trib. com., 77. 161).

24. D'ailleurs, la circonstance que les parties, qui ont eu l'intention de jouer, sont en mesure de payer le prix stipulé ou de livrer les titres et sont même d'une solvabilité reconnue ne peut influer sur le caractère de l'opération. Paris, 11 mars 1851 (S. 51. 2. 145); 13 mai 1873 (S. 73. 2. 102. - P. 73. 458); Buchère, n. 501; Martin Le Neuf de Neuf-Ville, p. 389. V. toutefois Paris, 21 févr. 1879 (Gaz., 5 mars).

25. Bien qu'il soit dit dans les bordereaux des agents de change que les effets achetés à terme sont livrables à volonté, il n'y en a pas moins jeux prohibés s'il n'y a pas eu livraison et paiement des effets achetés ou dépôt des valeurs. Orléans, Contrà, Paris, 13 fruct. 30 nov. 1825; Cass., 25 janv. 1827. an 13.-V. sup., n. 12.

26. Néanmoins la présomption qu'il y a jeu de bourse, lorsque l'opération a été faite sans dépôt, cesse s'il est justifié que le marché a été réel et sérieux ; que le vendeur avait, au moment de la convention, les objets vendus; ou qu'il les tenait à la disposition de l'acheteur; et que celui-ci avait la possibilité et l'intention d'en acquitter le prix. Paris, 29 mars 1832 (S. 32. 2. 293. P. chr. D. 32. 2. 150); 9 juin 1836 (S. 37. 2. 85.P. chr. D. 36. 2. 126); Cass., 30 nov. 1842 (S. 43. 1. 897.P. 43. 2. 628. D. 43. 1. 421); Paris, 27 mars 1878 (Gaz., 12 avril); 21 févr. 1879 (Gaz., 5 mars); Mollot, n. 319; Martin Le Neuf de Neuf-Ville, p. 389.

27. La preuve du caractère aléatoire ou sérieux d'un marché à terme résulte de l'ensemble des circonstances dans lesquelles

il a été conclu. L'appréciation des faits qui doivent amener à décider si les acheteurs et vendeurs ont traité sérieusement, ou s'ils n'ont fait qu'une spéculation, est dans le domaine exclusif des tribunaux qui statuent sur ce point en dernier resort. Cass., 11 août 1824; 30 nov. 1826; Paris, 29 mars 1833, 11 juin 1834 (Gaz., 2 juill. 1834); 1er août 1839 (Droit, 2 août 1839); 27 août 1844 (Droit, 13 oct. 1844); Seine, 8 août 1842 (Gaz., 11 août 1842); Cass., 1er avril 1856 (J. trib. com., t. 5, 354); 26 août 1868 (S. 69. 1. 20. P. 69. 30.-D. 68. 1. 439); Rennes, 8 mars 1870 (J. trib. com., t. 19, 520); Cass., 15 juin 1874 (S. 75. 1. 303. P. 75. 729. D. 75. 1. 158); Paris, 24 avril 1877 (J. trib. com., 77. 390); Cass., 21 et 24 janv. 1878 (Droit, 15 mars. --J. trib. com., 78. 416); Buchère, n. 497; Mollot, n. 319; Vincens, t. 1, p. 617; Martin Le Neuf de Neuf-ville, p. 389. — V. Marché à terme.

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28. Ainsi, une vente d'effets publics dont le prix n'a pas été payé et dont la livraison ne s'est pas effectuée d'une bourse à l'autre peut être considérée comme réelle et sincère, lorsqu'il est justifié que la livraison a été provoquée par l'acheteur et exécutée par le vendeur, pour la majeure partie, et qu'elle n'a été arrêtée pour le surplus que par la faute notoire de l'acheteur. Paris, 29 mai 1810.

29. Il n'y a pas ouverture à cassation contre un arrêt qui a rejeté l'exception de nullité proposée contre une vente d'effets publics par le motif qu'il est reconnu en fait qu'ils ont été livrés, encore que le billet qui contient l'obligation de l'acheteur porte qu'elle provient d'une différence. Cass., 15 nov. 1813.

D'un autre côté, il a été décidé que le traité par lequel l'un des contractants a livré à l'autre un capital remboursable au décès du premier, moyennant une prestation annuelle, et s'est engagé à lui transférer à la même époque une rente sur l'Etat, a pu être considéré par les juges du fond comme constituant un marché à terme d'effets publics, frappé de nullité, sans qu'une telle décision, fondée sur l'appréciation de la cause, donnât ouverture à cassation. Cass., 20 nov. 1839 (D. 40. 1.66).

50. Les bordereaux des courtiers, quoique revêtus de leurs formalités extrinsèques, ne suffisent pas pour constater la réalité et la sincérité de la convention; mais la simulation étant un dol, c'est à celui qui l'allègue à la prouver. Seine, 24 mars 1841 (Droit, 21 juill. 1841); Montpellier, 29 déc. 1827; Cass., 29 nov. 1836 (S. 37. 1. 455. P. 37. 1. 242. D. 37. 1. 70). V. inf., n. 44.

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La décision qui intervient en pareil cas ne peut être cassée, les juges ayant eu le droit, d'après les circonstances, de décider si l'opération était réelle, ou non. Cass., 29 nov. 1836 (S. 37. 1.

455. P. 37. 1. 242. — D. 37. 1. 70). V. aussi Cass., 15 juin 1874 (D. 75. 1. 158); 21 janv. 1878 (Droit, 15 mars).

31. Il existe une autre espèce de jeux de bourse auxquels se livrent les spéculateurs, afin de produire une hausse ou une baisse momentanée, favorable à leurs intérêts. Ainsi un négociant ou un banquier fait acheter des quantités peu considérables avec une hausse progressive, dans le but d'établir un prix courant à l'aide duquel il revend des quantités considérables de marchandises ou de lettres de change qu'il avait achetées par spéculation: même il vend à des prix qui annoncent un mouvement de hausse fort prononcé; mais la vente n'est que simulée, c'est-à-dire qu'elle est faite à un acheteur apparent et que le spéculateur reste propriétaire de la chose; et se tient prêt à profiter de la hausse factice qu'il a essayé de produire, pour vendre ou faire vendre réellement les marchandises ou effets sur lesquels il a spéculé.

32. Une autre opération faite dans le même but est celle que l'on connaît sous le nom d'accaparement.

L'accapareur fait acheter successivement pour son compte, par beaucoup de commissionnaires différents, la totalité de ce qui existe en vente d'une certaine marchandise, des actions de compagnies ou des titres négociables dus par des établissements publics; mais en même temps il a soin d'en acheter à terme une très forte quantité. A l'échéance de ces marchés à terme il est en réalité, et quoique cela se trouve dissimulé par de nombreux prête-noms, le maître absolu du cours de la marchandise ou des actions qu'il a accaparées, et quand ceux de qui il a acheté veulent acheter à leur tour pour livrer ce qu'ils ont vendu sans le posséder, c'est l'accapareur lui-même qui, par ses agents, le leur vend à un prix bien supérieur à celui auquel ils ont vendu. Frémery, loc cit. V. aussi Paris, 14 août 1876 (J. trib. com., 77. 266).

Ces manœuvres sont défendues et punies par la loi. — V. inf., n. 90 et suiv.

Elles ne peuvent donner d'action en justice.

33. Dans le même ordre d'idées, serait également nulle la convention qui aurait pour but de soutenir à la Bourse le cours de promesses d'actions d'une société, par des opérations fictives. Seine, 8 nov. 1854 (J. trib. com., t. 4. 118).

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54. Tout marché fictif constituant un jeu de bourse doit être déclaré nul, soit qu'il porte sur des effets publics français ou étrangers; Merlin, Rép., vo Marché à terme, n. 8; Quest. de dr., v Effets publics, § 3; Paris, 26 août 1833 (S. 34. 2. 616); 11 juin 1834 (D. 34. 2. 227); 2 juill. 1834 (P. chr.); 14 mars 1842

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