fut, en effet, respectée tant qu'il s'agit de guerres où l'Empereur n'était pas engagé; mais, dès qu'il convint à ce puissant frère du Grand-Duc d'engager la Toscane dans la guerre, les ministres Manfredini et Fossombroni eurent beau conseiller à leur maître d'observer plus que jamais cette « institution fondamentale et perpétuelle de l'État, Grand-Duc céda aux sollicitations du ministre autri le chien Thugut; les Anglais, alliés de l'Autriche, occupèrent la ville de Livourne dont la neutralité avait été respectée constamment du temps des Médicis, au grand avantage du commerce toscan; la Toscane fut occupée par les troupes françaises sans être aucunement défendue par les armées du puissant frère de son souverain, et celui-ci se réfugia à Vienne. L'histoire de la Toscane, pendant les guerres qui marquèrent la fin du siècle dernier, suffirait à elle seule pour faire juger de quelle façon la maison d'Autriche comprend l'indépendance de ce petit État. Après avoir été entraîné par ses rapports de famille à violer la neutralité, le Grand-Duc de Toscane ne fut point secouru par son frère, qui l'avait exposé aux attaques des Français. La Toscane, livrée d'abord à l'occupation française, puis à l'anarchie provoquée par des réactionnaires aveugles qui brûlaient les juifs aux cris de: Vive l'Autriche ! vive le Grand-Duc! fut envahie, en 1799, par des troupes autrichiennes dont elle avait dû entretenir une portion pendant le siége de Gènes, en dépensant au delà de deux millions de livres. Dès que les troupes autrichiennes eurent occupé la Toscane, le Grand-Duc y institua une régence chargée de gouverner en son nom, en ayant soin de dire dans le décret qu'il la nommait « de concert avec l'Empereur son frère; » et enfin celui-ci ne se fit point de scrupule de céder la Toscane à la France par le traité de Lunéville, comme si elle eût été une province de son Empire, et sans qu'il y fùt question du Grand-Duc ni d'un représentant de cet État, que tant de traités avaient déclaré indépendant. V. A la suite des succès de la coalition contre l'Empereur Napoléon Is, le maréchal de Bellegarde ayant envahi l'Italie à la tête des armées autrichiennes en 1814, adressa aux Italiens une proclamation où il parlait tout ensemble de la Lombardie et de la Toscane, comme s'il se fût agi de deux pays également sujets de la maison d'Autriche : et la Toscane fut, en effet, traitée comme une province de l'Empire par les généraux Stahremberg et Nugent, que 'e maréchal envoya successivement dans cet État indépendant. Le général Stahremberg ordonna la dissolution de la garde nationale quoique le Grand-Duc l'eût déclarée « institution permanente de l'État, » et que de l'aveu même de ce général elle eût rendu d'éminents services pour le maintien de l'ordre. Quelques mois plus tard, le général Nugent, par sa proclamation du 6 avril 1815, alla jusqu'à placer sous ses ordres l'armée toscane, qu'il entraîna hors du territoire du Grand-Duché pour la faire combattre contre les soldats italiens de Murat. Cette guerre fratricide, qui fut faite dans le seul intérêt de la maison d'Autriche, sans que la Toscane y fût obligée par aucun traité, et malgré les vives oppositions des ministres du Grand-Duc, entraîna de lourdes charges pour le trésor, outre le malheur d'avoir scellé l'oppression de l'Italie entière. VI. Les traités de Vienne ayant consacré le principe déjà admis précédemment pour la Toscane, que tous les États de l'Italie, en dehors du territoire adjugé à l'Empire d'Autriche, seraient indépendants, il était évident que le Grand-Duc Ferdinand III, rétabli par ce traité sur le trône de Toscane, en redevenait souverain libre et indépendant. Ce n'est dès lors qu'aux liens de famille qu'il faut attribuer l'empressement avec lequel trois jours seulement après la signature de l'acte final du congrès de Vienne qui reconnaissait cette indépendance à laquelle tous les ministres toscans avaient attaché jusque-là un si grand prix, le prince Néri Corsini signa ce funeste traité du 12 juin 1815, véritable attentat aux |