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Picot; en droit, que, depuis la publication de cette loi de prumaire, nul n'a pu être contraint à reconnaître un enfant naturel qu'il ne jugeait pas à propos d'avouer, et que toutes poursuites tendantes à la recherche de la paternité ont été llégales et nulles; Qu'il suit de là qu'en souscrivant la reconnaissance dont il s'agit, Léon-François Picot a fait un acte auquel il pouvait se refuser, malgré les poursuites dirigées contre lui, et, par une conséquence nécessaire, qu'il est présumé avoir agi librement; Considérant que toute. discussion sur l'esprit d'une loi est inutile, lorsque son texte est clair; qu'il est évident que l'art. 337 du Code civil ne parle que des reconnaissances d'enfans naturels faites pendant le mariage; que c'est uniquement ces reconnaissances faites pendant le mariage qui, dans les cas prévus par l'article 357, ne peuvent opérer d'effet en faveur des enfans naturels; — Que la reconnaissance dont il s'agit n'a pas été faite pendant le mariage de Léon-François Picot, mais bien après la mort dé son épouse, et par conséquent après la dissolution du mariage; - D'où il suit que l'art. 337 n'est pas textuellement applicable à l'espèce; — REJETTE, etc. »

COUR D'APPEL DE BRUXELLES.

L'acquéreur, en cas d'éviction, peut-il negliger l'action en garantie contre son vendeur immediat, et s'adresser di rectement aux vendeurs précédens? (Rés. nég.)

LES SIEUR ET DAME HEMS, C. LES HÉRITIERS DESMET.

En 1769, les sieur et dame Hems avaient acquis de la veuve Bruyneel divers immeubles dont ils furent évincés en 1807, par la dame Valastein, qui avait formé sa demande en revendication dès l'année 1779.

La dame Bruyneel avait acheté ces biens, en 1749, des héritiers d'Albert Delinge, lequel les avait lui-même acquis, 1742, d'Anne-Caroline Desmet.

Tome IX.

Les sieur et dame Hems, au lieu d'attaquer en garantie la veuve Bruyneel, qui leur présentait peu de solvabilité, s'adressent immédiatement au sieur Kervin et consorts, comme héritiers de Caroline Desmet, première venderesse. ·

Un jugement contradictoire du tribunal civil de Gand, du 9 juillet 1807, les a déclarés non recevables et mal fondés dans leur demande, pár la raison qu'en principe, l'action de garantie, toute personnelle, ne peut s'exercer que contre le vendeur immédiat, ses héritiers, ou autre successeurs universels; et qu'en point de fait, les défendeurs ne sont pas les vendeurs immédiats des sieurs et dame Hems.

Sur l'appel, ceux-ci disaient : Quoiqu'en thèse générale, les contrats ne produisent d'obligation qu'entre les parties contractantes, suivant la règle tirée des lois romaines, qu'on ne peut stipuler ni promettre que pour soi, néanmoins, des interprétations successivement données au principe il résulte que c'est stipuler ou promettre pour nousmêmes, et non pour autrui, lorsque nous stipulons et promettons pour nos héritiers, qui sont la continuation de nousmêmes ; que nous le faisons encore pour nous-mêmes quand c'est pour nos successeurs à titre singulier, compris sous le nom générique d'ayans cause, usité dans les actes.

soit

Il y a plus : l'absence d'une stipulation formelle pour nos héritiers ou ayans cause est toujours sous-entendue, que la convention ait pour objet la chose ou la personne, rem aut personam. D'où il suit que l'action de garantie résultante du contrat d'acquisition d'un héritage passe de droit et sans stipulation au second acquéreur, quoique représentant du premier à titre singulier, lorsqu'il n'y a pas cet égard de réserves expresses, et de même du second au troisième, de celui-ci au quatrième, etc.

à

'Cette transmission légale est une conséquence naturelle de l'obligation que contracte chaque vendeur de livrer la chose vendue, et d'en assurer la possession paisible, la libre disposition, à l'acheteur. S'il doit le faire jouir, s'il est à son égard

débiteur de la chose qui fait l'objet de la vente, s'il n'en est libéré que par une tradition irrévocable et sans trouble de la part des tiers, il est clair qu'il l'a nécessairement subrogé dans toutes les actions qu'il avait, soit pour conserver la propriété aliénée, soit, en cas d'éviction, pour en recouvrer le prix, même l'indemnité que la spoliation a dû produire.

Telle est l'opinion de Pothier (Traité du Contrat de vente, nos 147 et 148). Lorsque je vends, dit-il, une chose « à quelqu'un, je suis censé lui vendre et transporter tous « les droits et actions qui tendent à faire avoir cette chose « et par conséquent l'action ex empto. »

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Cette manière de voir dérive de la loi exceptio 3, in princip., ff., de except. rei vendit.

Telle est aussi la doctrine de Joui, annotateur de Domat, livre premier, titre 2, section 10, du Contrat de vente, édition de 1777.

Quoique la loi citée n'ait disposé que dans le cas de l'exception, son texte ne s'applique pas moins à l'action, puisqu'elle suppose la garantie première d'un droit transmissible d'un acquéreur à l'autre, quel qu'en soit le nombre : ce que décide encore la loi 28, Cod., de evict.: Emptori etiam venditoris jura prodesse non ambigitur.

On oppose et l'opinion de Voët, ad Pand., qui décide. que, dans le cas de plusieurs reventes, l'action de garantie doit s'exercer graduellement, en remontant du dernier vendeur au premier ; et la loi 59, ff., de evict.

Mais cette loi, qui suppose un legs fait par le dernier acquéreur de l'immeuble objet de son acquisition, et qui n'accorde au légataire attaqué en revendication le droit de recourir contre le vendeur qu'autant qu'il serait aux actions du testateur, nisi cessæ ei fuerint actiones, vel quodam casu hypothecas habeat; cette loi, disons-nous, n'a aucun rapport à l'espèce présente. Elle ne s'applique qu'en matière de legs.

C'est un principe fondé sur le droit romain, qui sort de

l'ensemble de ses dispositions, quoiqu'il ne soit généralisé textuellement dans aucune, qu'on est fondé à exercer par soi-même l'action d'autrui toutes les fois qu'on peut le contraindre à la céder contre un tiers, ou que l'équité ne permet pas au tiers de se dispenser de remplir une condition acceptée : ce qu'on appelle actio utilis, dont l'objet est d'éviter des circuits de procédure, pour toucher le but plus promptement et à moins de frais.

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Cette action fut créée pour l'acquéreur d'une succession qui avait auparavant besoin d'un mandat ou d'une cession pour agir contre les débiteurs du défunt; et elle a été étendue à tous les cas où il s'agissait d'éviter une gradation progressive d'actions récursoires que semblait prescrire la subtilité du droit : d'où l'on a défini l'action utile, ea quæ contra subtilitatem juris, utilitate ita exigente, ex sola æquitate concedebatur; d'où encore s'est formée cette maxime si raisonnable, que celui qui peut contraindre quelqu'un à céder son action peut l'exerecr en son nom immédiatement contre le tiers qui en est passible.

Il est constant en droit que l'acquéreur a la faculté d'exiger de son vendeur la cession d'actions, relativement à l'héritage acheté : la preuve de cette proposition, est littéralement consignée dans la loi 35, § 4, ff., de contrah, empt. L'induction forcée est que les appelans ont pu régulièrement diriger leur garantie contre l'un des vendeurs médiats, contre lequel leur propre vendeur ou son devancier aurait eu le jus cedendu

rum actionит.

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Qu'est-il besoin au reste de recourir à des lois si lointaines, lorsque nous en avons de françaises applicables à la cause, dans le Code civil, conforme (art. 1166) à l'ancienne jurisprudence, qui permet au créancier d'exercer tous les droits et actions de son débiteur, à l'exception de ceux exclusivement attachés à la personne?

Ici, le vendeur n'est-il pas, envers l'acquéreur qui a soldé son prix, débiteur de la restitution de ce prix et des dom

مع

mages et intérêts résultans de l'éviction, en un mot, de la garantie formant la base de l'action ex empto? Les sieur et dame Hems ont donc pu exercer la propre action en garantie de la veuve Bruyneel contre les représentans Delinge, et celle-ci ayant la faculté, comme cessionnaire légale des héritiers Delinge, d'agir contre les successeurs de la dome Desmet, nul doute qu'ils ont régulièrement attaqué ces derniers omisso medio.

Il est possible, à la vérité, que les contrats intermédiaires contiennent des modifications sur la garantie et en resserrent l'étendue'; mais cette considération, qui ne serait de quelque importance qu'autant qu'elle serait fondée sur des actes produits au procès, formerait seulement une exception pour le défendeur, maître d'exiger la représentation ou la communication de tous les contrats de vente jusqu'à lui; elle ne saurait être un obstacle à l'action en elle-même, toujours indépendante de cette exception et fondée sur la garantic légale, dont les modalités conventionnelles doivent être justifiées par écrit, sans pouvoir être présumées.

La défense des intimés se réduisait à opposer l'opinion de Voët, celle de Pothier, dans ses Pandecies, et de la loi 59, ff., de evict., précédemment discutée; puis ils ajoutaient : L'action de garantie est purement personnelle, et s'arrête à celui qui s'y est soumis; elle ne saurait passer les bornes du contrat d'où elle dérive: ainsi, chaque vendeur ne peut être attaqué en garantie que par celui auquel il a immédiatement vendu et avec lequel il a traité; la raison en est que chaque acquéreur n'a fondé sa sûreté que sur la confiance que lui inspirait la personne dont il achetait.

D'ailleurs, la garantie en matière de vente est susceptible d'être modifiée, même effacée par des conventions (1). Il est possible que dans les contrats intermédiaires il y ait des clauses qui arrêtent les suites de l'éviction, avant qu'elles

(1) Cod. civ., art. 1627, 1628 et 1629.

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