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ces, soit des personnes contractantes, soit des actes insérés au contrat, rendent invraisemblable la réalité de l'emprunt en question, et le font supposer extorqué par dol ou par surprise: car, d'une part, il n'est point. probable que la demoiselle Garrone, octogénaire, et pourvue d'un revenu net et considérable, qui à peine savait écrire son nom, se soit librement disposée à emprunter, sans aucune nécessité apparente, la somme de 2,200 fr., et à passer ledit écrit; et, d'autre part, il est encore moins probable que Greggio, qui n'est qu'un simple revendeur, et dont la fortune est très-bornée, ait fait le prêt de la somme susdite, payable après le délai de 30 mois, avec les inté rêts au taux légal, à les payer également à l'échéance dudit délai;-Considérant, en ce qui concerne la première desdites exceptions, que l'art. 1326 du Code civil, en ordonnant que le billet ou la promesse sous seing privé par lequel une partie s'engage envers l'autre à lui payer une somme d'argent doit être écrit en entier de la main de celui qui le souscrit, ou du moins il faut qu'outre sa signature il ait écrit de sa main un bon ou un approuve portant en toutes lettres la somme, n'a cependant pas, dans le cas d'omission de ces formes, privé le créancier de toute action ni de tout droit à sa créance. La loi n'a fait qu'ordonner des précautions pour prévenir des surprises; mais elle n'a point libéré le débiteur de son obligation, dans le cas qu'elle soit autrement justifiée. Le créancier qui a omis ces précautions et ces formes ne pourra point jouir des 'droits que l'art. 1322 a accordés aux écrits sous seing privé; mais la loi ne lui prohibe pas de faire valoir ses droits en justice toutes les fois qu'il s'est nanti d'un principe de preuve par écrit, qui, aux termes de l'art. 1347, le met à même de justifier par témoins sa créance;-Considérant que tel est dans l'espèce le cas dans lequel se trouve le demandeur: car s'il n'est point nanti d'un écrit qui puisse sortir par lui-même l'effet d'un acte authentique, on ne peut lui contester qu'il soit du moins nanti d'un écrit valable à établir un commencement de preuve de sa demande. En effet, l'art. 1347 regarde comme un commencement de preu

ve tout acte par écrit qui est émané de celui contre lequel la demande est formée, ou de celui qu'il représente, et qui rend vraisemblable le fait allégué, Or la signature de la demoiselle Garrone fut apposée à un acte émané d'elle; cette signature rend vraisemblable le fait allégué : elle doit donc être reconnue comme suffisante à établir le commencement de preuve voulu par la loi pour faire lieu à la preuve testimoniale. Si l'emprunt dont il s'agit n'eût été fait que verbale ment, et que la demoiselle Garrone eût ensuite reconnu sa dette, par le moyen d'une lettre écrite de son ordre et signée d'elle, il n'y a point de doute que la preuve de la vérité de çette signature suffirait pour établir le commencement de preuve voulu par la loi ; mais comment ne pas reconnaître dans la signature dont il s'agit, faite en présence des témoins, un écrit de beaucoup plus valable qu'une lettre, et plus digne de rendre vraisemblable le fait allégué par Greggio?

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« Considérant que le motif du rejet, mis en avant par le sieur Garrone, et tiré de ce que les témoins qui seront présentés pour vérifier la signature déposeront aussi sur la véri té de l'emprunt, ce motif, disons-nous, manque entièrement de base, puisque l'enquête qui aura lien pour le premier ob jet ne peut et ne doit être dirigée qu'à cette fin, et n'est qu'un moyen préparatoire à une enquête sur la vérité du fait;-Considérant, sur la seconde desdites exceptions, qu'en l'état de la demande faite par l'intimé, et tendante à la seule vérification de l'écrit, cette exception ne peut être envisagée que comme prématurée, comme celle qui est relative au fond de la question; MET l'appellation au néant; ordonne que ce dont est appel sortira son plein et entier effet, etc. »

COUR DE CASSATION.

En matière de simple police, le défaut de présence et de conclusions du Ministère public opère-t-il la nullité radicale du jugement? (Rés. aff.).

caractérisait qu'une simple escroquerie, digne d'une peint correctionnelle; que le faux proprement dit résultait exclusi vement d'altération ou fabrication de pièces; que l'escroquerie était un abus de la crédulité; que, dans l'espèce, or ne pouvait lui reprocher que d'avoir abusé de la facilité trop confiante des commissaires des guerres et inspecteurs aux re vues, qui, avec plus de circonspection et de connaissance de leurs devoirs, n'eussent dû lui délivrer des feuilles de route, des livrets, des mandats, en qualité de lieutenant e de capitaine, qu'après s'être assurés, par l'inspection de son brevet, du grade qu'il disait occuper. Au surplus, il ne leur en a imposé que par de simples allégations qu'ils devaient e pouvaient vérifier; il n'a ni fabriqué ni altéré aucune pièce il n'en a ni présenté, ni imité, ni supposé, de propres à trom per les fonctionnaires qu'il a induits en erreur. D'où le demandeur concluait que l'arrêt de compétence de la Cour spéciale de Metz contenait un excès de pouvoir.

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Le 21 avril 1808, ARRÊT de la Cour de cassation, section criminelle, M. Barris président, M. Vergès rapporteur, par lequel:

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« LA COUR,-Sur les conclusions de M. Pons, substitut du procureur-général;--Considérant que le réclamant est prévenu d'avoir commis le crime de faux en écritures authentiques, mé chamment et à dessein de nuire à autrui ;-Qu'il est prévenu d'avoir commis ce faux en prenant par écrit les fausses qua lités de lieutenant et de capitaine des chasseurs de la garde impériale; qu'il est prévenu d'avoir signé en ces fausses qualités les feuilles de route et les quittances par lui données au bas des mandats qu'il est parvenu à se faire délivrer par des inspecteurs aux revues, et d'avoir, à l'aide de ce faux, commis par écrit, joui des avantages attachés à ces deux grades; Qu'il est prévenu d'avoir, à l'aide de ce faux, reçu pendant trois mois les appointemens de capitaine; Qu'il est prévenu en outre d'avoir aussi méchamment, et pour parvenir au même but, commis de crime de faux en écriture privée;-Que ce délit, ainsi caractérisé, n'est pas par con

séquent de la compétence des tribunaux de police correctionnelle, mais bien de la compétence d'une des Cours de justice criminelle spéciale; REJETTE le moyen. »

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COUR D'APPEL DE BRUXELLES.

Peut-on, sous l'empire du Code civil, proposer la captation et la suggestion, accompagnées de dol', comme moyens de nullité des testamens ? (Rés. aff.)

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LES HÉRITIERS GILLION, C. LE SIEUR BOULARD.

Cette question a été résolue dans le même sens par la Cour d'appel de Paris, le 31 janvier 1814, et par celle de Toulouse, le 18 août 1820; mais la jurisprudence de la Cour de cassation n'est pas conforme à celle des Cours d'appel, et elle a cassé, le 22 janvier 1810, un arrêt de la Cour de Rennes, qui consacrait la même doctrine que les précédens, par le motif que cette Cour avait créé une nullité la loi ne que prononçait pas, et commis un excès de pouvoirs. Nous nous abstiendrons de toutes réflexions sur cette contrariété de jurisprudence: il nous suffira de rapporter ces divers arrêts dans l'ordre de leur date.

La dame Gillion fit, le 1er germinal de l'an 13, son testament, par lequel elle léguait les trois quarts de ses biens à un sieur Boulard, curé à Saint-Vaast. Après sa mort, ses héritiers naturels demandèrent la nullité de cet acte, pour cause de suggestion et de captation. Ils les faisaient résulter de l'influence que le légataire avait été dans le cas d'exercer, par le caractère dont il était revêtu, sur la volonté de la testatrice; de ses anciennes habitudes, et notamment des menées et artifices qu'il avait employés pour s'emparer de l'esprit de cette dernière, et du succès de ses manoeuvres, dont le résultat avait été l'éloignement des parens de la défunte, auxquels l'accès de sa maison avait été interdit; enfin, de l'ensemble des circonstances qui avaient précédé, accompagné et suivi, l'acte attaqué, d'après la maxime Cumulata juvant, quæ

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singula non prosunt. Ces moyens ne réussirent pas en première instance, où le testament fut confirmé par jugement Ju tribunal de Charleroy, en date du 13 mars 1807.

Sur l'appel qui én fut interjeté par les héritiers Gillion, et le 21 avril 1808, ARRÊT de la Cour de Bruxelles, MM. Tarie et Truffart avocats, par lequel :

« LA COUR, Sur les conclusions contraires de M. Buchet, substitut du procureur-général; — Attendu qu'il est prouvé au procès qu'antérieurement aux troubles de la révolution, l'intimé, alors vicaire à Binch (lieu du domicile de la testatrice), avait entendu la confession de ladite testatrice; -- Qu'il est également prouvé que, durant la clandestinité du culte à raison, du serment exigé des prêtres, la testatrice a assisté aux cérémonies religieuses pratiquées dans la retraite que l'intimé (insoumis) avait choisi à cette fin; Que la dame Stilman, amie et souvent commensale de l'intimé, et assidue au culte clandestin exercé par icelui, était la confidente intime de la veuve Gillion; Que, par l'intermédiaire de la dame veuve Stilman, .l'intimé s'est insinué chez la veuve Gillion, qu'il qualifiait de cousine;-Que, jusqu'au moment de sa dernière maladie, la testatrice était en bonne intelligence avec ses parens, entre lesquels des cousines ger'maines, dont une ex-religieuse; -- Que, le jeudi précédant la mort de la testatrice, l'intimé a été averti de l'état de la maladie par trois messages: l'un de la part du médecin traitant, dont la fille a obtenu un legs; l'autre de la part de la veuve Stilman, et le troisième de la part de la femme Thomas, accoucheuse, chez laquelle l'intimé logeait habituellement à Binch; Que l'intimé s'est rendu le même jour à Binch, directement chez le sieur Coquiart, médecin traitant; que l'intimé a voulu cacher son arrivée à Binch, en feignant de se transporter dans un autre endroit;- Qu'aucun des parens, quoique les plus proches habitassent à Binch, n'ont été avertis de la maladie de la testatrice; Que l'intimé, s'étant rendu chez la testatrice, a eu, ce jour et le lendemain, des entrevues secrètes et de longue durée avec icelle; -Que,

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