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Dire que cette surenchère est un moyen de droit,`
est une objection qui satisfait peu, parce que, si l'on entend
par ces mots qu'elle est la conséquence, naturelle d'une acqui-
sition, on peut dire qu'il n'en est pas toujours ainsi, et que
la réquisition d'une mise aux enchères n'a pas toujours lieu,
lors même qu'il y a des créanciers inscrits. Si l'on entend
au contraire que c'est la loi qui accorde cette faculté sans le
concours de la volonté du vendeur, l'on peut répondre que
la mise aux enchères ne diffère en rien des autres moyens
'd'éviction, qui doivent, pour réussir, être fondés sur un
droit positif, et qu'on exerce toujours indépendamment de
la volonté et du consentement du vendeur. C'est ce qui a
été jugé par l'arrêt dont nous allons rendre compte, et dont
la décision est d'autant plus faite pour être remarquée, qu'elle
a rejeté l'opinion contraire, quoique adoptée par le tribunal
de première instance, et consacrée par un arrêt de la Cour
d'appel de Paris.

Au mois de brumaire de l'an 4, les sieur et dame Capon
se rendent adjudicataires, en l'étude d'un notaire, d'une mai-
son située à Paris, avec clause de garantie de tous troubles,
évictions et autres empéchemens généralement quelconques.
Par une antre clause de l'adjudication, il était dit que ces
derniers seraient tenus de prendre des lettres de ratification
`dans le délai de quatre mois, et que si au sceau il survenait
des oppositions du fait du vendeur ou de ses auteurs, celui-
ci serait tenu d'en apporter mainlevée. Au lieu de se confor-
mer à cette clause, les sieur et dame Capon se sont bornés à
faire transcrire, le 17 germinal an 8, leur contrat, et ont
fait les dénonciations requises par la loi aux créanciers in-.
scrits. Alors le sieur Clement de Givry, l'un d'eux, fait une
surenchère, et poursuit la revente de la maison. Recours
des adjudicataires contre le sieur Mottard, vendeur, tendant
à ce qu'il eût à faire cesser cette demande, ou à leur payer
les dommages et intérêts résultans de l'éviction.

Celui-ci oppose que la garantic promise dans le contrat

L

ne s'étend point à l'éviction opérée par suite d'une surenchère, qui est un moyen de droit.

Cette défense est accueillie par les premiers juges (1), et, sur l'appel, par un arrêt de la Cour de Paris, en date du 8 mai 1806. Ses motifs, indépendamment de ceux du tribunal de première instance, qu'elle a adoptés, sont 1° que, par le contrat de vente dont il s'agit, l'acquéreur s'était soumis à prendre des lettres de ratification dans le délai de quatre mois, ce qui prouv@qu'il présumait lui-même dès lors qu'il pourrait survenir une surenchère; 2° que le contrat ne portait pas stipulation de garantie, à cet égard, à la charge dú vendeur, et que la garantie stipulée en cas de trouble et d'évietion ne pouvait s'étendre au cas de surenchère.

Les sieur et dame Capon se sont pourvus en cassation de cet arrêt pour violation des art. 1626, 1629, 1630 et 1633, du Code civil. L'enchère, disaient les demandeurs, est un moyen de dépossession contre l'acquéreur; elle résout le contrat que le vendeurs'était obligé à maintenir; elle a un effet si fatal, qu'elle annihile tous les droits de l'acquéreur à la propriété de la : chose vendue, lors même qu'il voudrait désintéresser le créancier enchérisseur. Cette précaution serait impuissante, s'il ne désintéressait également tous les autres. C'est le vœu de l'art. 2190 du Code civil. C'est donc au vendeur qui veut se mettre à l'abri de tout recours en garantie à prévoir, s'il a des créanciers, la possibilité d'une éviction par l'effet d'une surenchère, avec d'autant plus de raison que cette faculté est un moyen de droit dont peuvent user tous ceux qui, par teur inscription, ont un droit réel à la chose vendue. Nulle différence donc entre ce genre d'éviction et tous ceux qu'on peut supposer capables d'opérer le délaissement de cette même chose. Il en est de l'usage de cette faculté comme

(1) Ils se sont déterminés principalement par la considération la *que surenchère est un droit qui appartient à tout créancier, et qui n'est ja mais garantie par le yendeur, à moins qu'il n'y ait une clause particu-. lière et positive, clause qui n'existe pas dans l'espèce.

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autrefois du droit qu'avait tout créancier hypothécaire d'intenter son action en déclaration d'hypothèque contre le tiers acquéreur, à l'effet de le contraindre à payer ou à délaisser, à moins que celui-ci n'eût purgé son acquisition, par des lettres de ratification, où par le laps de temps nécessaire pour acquérir la prescription. Dans ce cas, sans doute, le tiers acquéreur souffrait une éviction proprement dite, qui donnait ouverture à l'exercice de l'action récursoire de sa part contre le vendeur; dans ce cas, le créancier hypothécaire exerçait un moyen de droit fondé et autorisé sur la loi, un moyen que tout acquéreur pouvait facilement prévoir, et même supposer. Si néanmoins le droit de former une demande en garantie contre le vendeur était consacré dans cette catégorie, comment pourrait-on le refuser, aujourd'hui où l'inseription d'une créance hypothécaire remplace les demandes en déclaration d'hypothèque, lorsqu'une inscription procède du fait du vendeur lui-même, lorsque surtout, bien loin d'avoir stipule la non-garantie, en cas de trouble, le sieur Mottard s'est soumis à indemniser les demandeurs des évictions et autres empêchemens généralement quelconques?

L'arrêt attaqué ést donc en opposition manifeste avec la loi et avec les conventions des parties contractantes: Avec la loi, puisque ses dispositions interprètent le șilence sur ce point comme une obligation précise que se serait imposée le vendeur; Avec les conventions des parties, parce qu'il répugne à la raison de donner à une clause conçue en termes généraux et illimités la force d'une convention restrictive, ou, pour mieux dire, l'autorité d'une clause d'exception. Qu'importe donc à la question de savoir que les demandeurs s'étaient soumis à prendre des lettres de ratification? Cette circonstance n'était point essentiellement indicative d'éviction; tous les jours il y a des ventes sans qu'elles soient pour cela productives de surenchère. La prévoyance, en ce cas, même de la part de l'acquéreur, n'exclut point la stipulation, de garantie: le silence, au contraire, la fait plutôt présumer, et pour que cette présomption

cesse, il faut une stipulation contraire. Tel a été toujours, tel est encore le vœu de la loi.-Ainsi les motifs de l'arrêt ne sont que spécieux; la surenchère est une éviction qui donne incontestablement lieu à l'action en garantie, soit qu'on la considère en soi, ou bien relativement à ses effets principaux. Il y a donc lieu à prononcer la cassation demandée.

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De son côté, le sieur Mottard reproduisait les argumens propres à mettre l'opinion consignée dans le jugement et l'arrêt attaqué sous le jour le plus avantageux ; il a même cru devoir la fortifier de l'autorité de Pothier, dans son Traite du Contrat de vente, part. 2, chap. 1er, section 2, no 87. — Il a raisonné dans l'hypothèse d'un contrat de vente qui, en cas de retrait, ne donnait point anciennement ouverture à la garantie, quoiqu'elle eût été convenue entre les parties; et la raison, c'est que le retrait était, comme la surenchère, un moyen de droit introduit par la loi, contre la volonté du vendeur, et sans qu'il y eût aucune part (1). Il ajoutait enfin que, la Cour ayant jugé en point de fait que les parties avaient entendu exclure de la garantie stipulée le cas de surenchère, cette décision ne présentait réellement qu'une simple interprétation de la clause d'un acte, et ne constituait qu'un bien ou mal jugé, enfin une opinion qui ne pouvait être frappée par la censure de la Cour.

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Le 4 mai 1808, ARRÊT de la Cour de cassation, section civile, M., Vieillart président, M. Schwendt rapporteur, MM. Saladin et Champion avocats, par lequel:

« LA COUR, — Après un délibéré à la chambre du conseil; Vu les articles 1626 et 1630 du Code civil; Considérant que des dispositions de ces articles combinés avec celles

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(1) Il y a cette distinction essentielle entre le retrait et la surenchère, que le premier est une cause entièrement étrangère au vendeur, tandis que celle-ci procède de son fait. Dans le premier cas il ne pouvait l'empêcher 5 dans le second, c'est la créance qu'il avait contractée à l'insçu de l'acquéreur, qui était la cause de l'éviction: la différence est donc sensible entre ces deux cas.

des articles 1633 et 2191, lesquelles ne sont toutes que déclaratives des anciens principes et des anciennes lois sur la garantie en cas d'éviction, il résulte que la surenchère est une OX cause d'éviction; et qu'aux termes de l'art. 1630, la garantie est due, si l'acquéreur est évincé, soit, qu'elle ait été ou n'ait pas été stipulée, à moins que, conformément à l'art. 1627, il n'ait été convenu que le vendeur n'y sera pas soumis; - CASSE, etc.»

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Nota, Cet arrêt est d'autant plus important à connaître, qu'il rectifie la jurisprudence admise par deux Cours d'appel du royaume, sur les questions qu'il décide. Celle de Paris avait jugé, par arrêt du 25 prairial an 12, que l'éviction opérée par l'effet d'une surenchère ne donnait lieu à la garantie contre le vendeur qu'autant qu'elle avait été formellement stipulée dans le contrat (1), La Cour de Metz jugea plus tard, le 31 mars 1821, d'une manière absolue, que l'éviction résultante de la surenchère ne donnait ture à la garantie. Ces deux arrêts ne fourt pas une juste application des principes. Nous rapporterous le second sous sa date.

COUR D'APPEL DE BRUXELLES.

pas ouver

Les actes respectueux exigés, par la loi, de l'enfant qui n'a pas pu obtenir le consentement de ses père et mère à son mariage, doivent-ils étre signifies a L'UN ET A L'AUTRE de ces derniers, à peine de nullite? (Rés. aff.) C. civ., art, 151 et 152.

LA DEMOISELLE FRUYT, C. LES SIEUR ET DAME FRUYT. La demoiselle Fruyt n'ayant pu obtenir le consentement de ses père et mère à son mariage, fit signifier un premier acte respectueux à sa mère seulement; le second et le troisième ne furent notifiés qu'à son père. Les bans étaient déjà publiés, et le mariage était sur le point de se célébrer, lorsque le sieur et la dame Fruyt y formèrent opposition, sur le fondement que les actes respectueux étaient nuls pour n'avoir

(1) Voir tome 4 de ce recueil, page 567.

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