COUR DE CASSATION. * Les notaires peuvent-ils donner sur PAPIER LIBRE des extraits, signés d'eux des minutes de leurs actes? (Rés. nég.) Est-il permis aux tribunaux de modérer l'amende encourue pour cette contravention, sous prétexte que le notaire contrevenant aurait pu délivrer l'extrait sur papier de moindre dimension, et qu'il n'a pas eu l'intention de frauder le droit de timbre? (Rés. nég.) Loi du 3 brumaire an 7, art. 12 et 19. LA RÉGIE DE L'ENREGISTREMENT, C. LE SIEUR BARTHÉLEMY. Le sieur Barthélemy, notaire à Albertroff, avait délivré sur papier libre un extrait contenant état de la valeur estimative des meubles et effets d'une succession, d'après l'inventaire qu'il en avait dressé. La Régie de l'enregistrement fait constater la contravention, et cité le notaire devant le tribunal de Vic, en paiement de 75 cent. pour droit de timbre et de l'amende de 50 fr., conformément aux art. 19 et 26 de la loi du 5 brumaire an 7. Mais, le 7 novembre 1806, jugement qui ne condamne le sieur Barthélemy qu'à 25 cent. pour droit de timbre, et à 10 fr. d'amende, par les motifs que,« s'agissant, non d'une expédition, mais d'un simple extrait, il pouvait être délivré sur papier de moindre dimension; et que, le sieur Barthélemy n'ayant pas eu l'intention de frauder, parce que sa note était destinée à être mise immédiatement sous les yeux du receveur, la loi ne défendait paş de mitiger l'amende qu'il avait encourue », La Régie se pourvut en cassation de ce jugement, pour contravention aux articles cités et pour excès de pouvoir. Le 25 mai 1808, ARRÊT de la Cour de cassation, section civile, M. Brillat Savarin rapporteur, par lequel: « LA COUR, Sur les conclusions de M. Thuriot, subştitut du procureur-général; - Vu les art. 12 et 19 de la loi du 3 brumaire an 7, ainsi conçus : « Art. 12. Sont assujettis.. " - « aux droits de timbre établis en raison de la dimension, « 1o les actes des notaires et les extraits, copies et expéditious qui seront délivrés; Art. 19. Les notaires, greffiers, arbitres, et secrétaires des administrations, ne pourront employer pour les expéditions qu'ils délivreront de papier « timbré d'un format inférieur à celui appelé moyen papier, « et dont le prix est fixé à 75 cent. la feuille. »; Le § 4 de l'art. 26, qui prononce une amende de 50 fr. pour coutravention à l'art. 19 de la part des officiers et fonctionnaires publics y dénommés; -Et attendu que le jugement attaqué, en prononçant seulement une amende de 10 fr. contre le notaire Barthélemy dans le cas ci-dessus, a violé ces diverses dispositions de la loi, CASSE et ANNULLE le jugement du tribubunal civil de l'arrondissement de Vic, du 7 novembre 1806, etc. »> COUR DE CASSATION. Peut-on regarder comme un qvantage indirect, prohibe' par le Code civil, la convention matrimoniale qui, indépen damment d'une part d'enfant, confère au survivant des époux la totalité de la communauté mobilière, lorsque l'époux prédécédé a laissé des enfans d'un premier mariage? (Rés. aff.) Cod. civ., art. 1098, 1099, 1525 et 1527. LA VEUVE RICHARD, C. LES ENFANS RICHARD. La loi hac edictali, Cod., de secundis nuptiis, l'édit des secondes noces, de 1560, et le Code civil, ne permettent à l'homme ou à la femme qui, ayant des enfans d'une précédente union, en contracte une autre, de donner au nouvel époux qu'une part d'enfant le moins prenant; avec cette dif`férence, que la loi romaine et l'édit de 1560 ne prononçaient pas, comme le Code civil, que la part d'enfant ne pourrait excéder le quart des biens. Tous les auteurs ont déclaré réductibles à cette part d'enfant les donations, les conventions de mariage, les règlemens de communauté, dont il pouvait sortir un avantage au profit du survivant: tel est l'avis de Ricard et de Lebrun, dans leurs Traités des DonaD tions et Successions; de Renussson, Traité de la Communauté; de Vaslin, sur l'art. 46 de la Coutume de la Rochelle; de Pothier, Traité du Contrat de Mariage, no 544 et suiv.; de La d'Aguesseau, dans son quarante et unième plaidoyer, et d'une foule d'autres. Il n'y a donc pas de convention, pas de stipulation, pas de combinaison quelconque, contre lesquelles on ne puisse s'élever, si elles tendent à conférer à l'un des époux au delà d'une part d'enfant. Voici les circonstances qui ont fait naître la question. En rfrimaire de l'an 4, le sieur Richard et la dame Frémicourt, veufs avec enfans, se marient en secondes noces. Leur contrat de mariage contient cette clause : « Au cas de dissolution sans qu'il y ait enfans du prédécédé, le survivant sera propriétaire de toute la communaute' mobilière, à la charge d'en payer les dettes. Les conquêts seront communs; le survivant en sera propriétaire de moitié, et usufruitier de l'autre ; il aura aussi l'usufruit de tous les autres biens du prédécédé: le tout sans charge de donner caution. Dans le cas où, à la dissolution de la communauté, il y aurait des enfans du prédécédé, les avantages ci-dessus demeureront restreints aux termes des Elois. Et néanmoins, il a été convenu que l'usufruit que le survivant aura en ce cas cessera sur les biens propres du prédécédé, en faveur de chacun des enfans, lorsqu'ils auront atteint l'âge de majorité, ou pris état de mariage. » Le sieur Richard est décédé en 1806. Les enfans de son premier mariage lui ont survécu. La veuve réclama la totalité de la communauté mobilière, distraction faite des apports du sieur Richard, et le quart des biens qu'il avait délaissés, portion à laquelle se trouvaient réduits, d'après l'art. 1098 du Code civil, les avantages réciproquement faits par le contrat de mariage. Les enfans du premier lit du défunt contestèrent cette réclamation: ils prétendaient que leur belle-mère ne pouvait J faire concourir l'intégralité de cette communauté avec la part d'enfant dont leur père l'avait gratifiée. Jugement qui accueille la demande de la veuve Richard, Sur l'appel, arrêt confirmatif de la Cour de Douai, « attendu qu'aux termes des art. 1525 et 1527 du Code civil, la stipulation par laquelle deux époux conviennent, comme dans l'espèce, que le survivant restera propriétaire de la communauté, n'est point réputée donation; qu'à l'époque du contrat qui contient cette stipulation, comme aujourd'hui, ce n'était qu'un simple règlement de communauté, une simple convention de mariage entre associés, dont l'effet est éventuel et incertain, et qui n'est pas réputée donation; que le Code civil, en s'exprimant ainsi, n'a pas introduit un droit nouveau; qu'il fait ici la loi des parties, par la circonstance qu'il était promulgué à l'époque de la dissolution de la communauté dont il s'agit; que les expressions au futur, sous lesquelles cette stipulation est conçue, manifestent la volonté des contractans de se faire, en cas d'enfans, les mêmes avantages qu'au cas de non enfans; qu'ils n'ont admis d'exception que celle que l'avenir rendrait insurmontable, c'està-dire la loi existante au moment du prédécès de l'un d'eux; qu'en effet il résulte du contrat de mariage que le droit de l'époux survivant avec enfans du prédécédé n'a dû se régler qu'à la dissolution de la communauté; que par suite c'est par les dispositions du Code civil, promulgué à l'époque de cette dissolution, que ledit droit doit être réglé, et qu'ainsi la stipulation dont il s'agit doit emporter son plein et entier effet, conformément aux art. 1525 et 1527 du Code. » Pourvoi en cassation. Les demandeurs faisaient valoir les moyens adoptés par la Cour régulatrice, et la veuve Richard ceux dont nous venons de rendre compte. Du 24 mai 1808, ARRÊT de la Cour de cassation, section civile, M. Viellart président, M. Boyer rapporteur, MM. Dupont et Duprat avocats par lequel: « LA COUR, - Sur les conclusions conformes de M. Pons, 1 substitut du procureur-général; — Après un délibéré en la chambre du conseil; - Vu les art. 1098, 1099, 1525 et 1527, du Code civil; Considérant que les art. 1098 et 1099 déterminent et limitent d'une manière positive l'avantage qu'un époux veuf avec enfans d'un premier lit, qui passe à de secondes noces, peut faire à son second époux, et que la réduction de tout ce qui tend directement ou indirectement à excéder cet avantage est également ordonnée d'une manière expresse au profit des enfans d'un premier lit; - Considérant que, si l'art. 1525 permet, en général, aux époux de stipuler que la totalité de la communauté appartiendra au survivant d'entre eux, l'effet de cette disposition générale ne peut s'étendre au cas particulier de l'existence d'enfans d'un premier lit: ce qui résulte clairement de l'art. 1527, où le législateur excepte formellement de la liberté presque illimitée des conventions matrimoniales établies par divers articles précédens, toute convention qui tendrait à porter atteinte à la réserve légale dévolue aux enfans d'un premier lit; Considérant enfin que les dernières expressions du même art. 1527 ne peuvent avoir évidemment pour objet que d'autoriser le partage égal des bénéfices de communauté dans lesquels des mises inégales ont eu lieu, sans que ce partage égal puisse être réputé avantage au profit de celui des époux dont la mise a été moindre que celle de l'autre époux; mais qu'on ne peut l'étendre à une stipulation qui appellerait l'époux survivant à la propriété de la totalité de ces mêmes bénéfices; qu'il suit de là qu'en décidant que la stipulation du contrat de mariage des sieur et dame Richard, qui appelait le survivant d'eux à la propriété de toute la communauté mobilière, nonobstant l'existence d'enfans du premier lit du sieur Richard devait avoir son effet, indépendamment de la part d'enfant que ce même contrat assurait à la dame Richard, sur les biens propres du sieur Richard; et qu'en refusant aux enfans de ce dernier l'exercice de l'action en retranchement sur le tout, l'arrêt de la Cour d'appel de Douai a faussement appliqué les art. 1525 et |