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d'action en première instance, il s'exerce par voie d'appel dans les Cours. C'est dans cette hiérarchie que la loi trouve sa sauvegarde et la garantie de sa conservation. Or, on l'a déjà dit, le droit d'agir contient nécessairement celui defaire subsister intact le titre fondamental de l'action.

Les sieurs D. et G. soutenaient le procureur général non recevable.

La loi, disaient-ils, refuse au Ministère public la voie d'action. Il n'a que celle de réquisition. Où s'arrêterait le Ministère public? Dans quel temps, dans quelle situation, les familles seraient-elles à l'abri de ses recherches, si, sur le *prétexte du bien public et de l'intérêt des mœurs, il lui était

loisible de scruter la conduite privée des citoyens et de juger s'ils ont le droit de faire tel ou tel acte civil? Car, dans l'espèce; le système du procureur-général ne tend à rien moins qu'à se constituer l'arbitre de l'aptitude ou de l'incapacité des personnes pour contracter mariage. Ce n'est point là le vœu de la loi. Lorsque, par l'art. 184, le procureur du roi est autorisé à attaquer certains mariages, l'article ne parle évidemment que des mariages contractés. Jusque là tout reste dans les termes d'un simple projet, dont l'exécution est incértaine; et il n'est pas permis d'admettre un ministère inquisitorial dans les secrets des familles. La loi n'agit que quand la contravention existe, et c'est alors, mais alors seulement, qu'elle arme de son autorité le Ministère public, son défenseur naturel. Il est d'ailleurs de règle élémentaire, en procédure, que l'appel est irrévocablement fermé à celui qui n'a pas été partie dans la cause jugée en première instance; et comme la loi n'a point fait d'exception, cette règle s'applique à M. le procureur - général comme à tout autre.

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Du 1er août 1808, ARRÊT de la Cour d'appel de Bruxelles, première et troisième chambres réunies, sur les conclusions de M. Mérex, substitut du procureur-général, par quel :

« LA COUR,

le

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donne au Ministère public action pour attaquer tout mariage contracté en contravention à l'art. 162, et que l'art. 190 impose au procureur du Roi le devoir d'en demander la nullité du vivant des époux; - Attendu que le pouvoir de demander la nullité d'un mariage fait en contravention à l'art. 162 contient celui d'agir en conservation du titre à l'absence duquel la loi pourrait être violée dans ses rapports avec l'intérêt politique et les mœurs;-Attendu que l'action de la loi dans le Ministère public est une, et appartient tant au.procureur du Roi qu'au procureur-général, chacun en droit soi, et suivant la nature et l'état de l'affaire qui en provoque l'exercice; et attendu que le jugement du 11 août 1807 avait déclaré nul et de nul effet le mariage du sieur G... avec la fille aînée du sieur D...; que ce jugement, rendu par défaut contre le sieur G..., de l'avis du substitut, s'exécutait déjà, en suite de l'adhésion formelle du procureur du roi près le tribunal de première instance, par les publications d'un autre mariage du sieur G... avec la seconde fille du sieur D..., et par la transcription de ce jugement dans le re'gistre de l'état civil, en marge du premier mariage; en sorte que, pour conserver l'action de la loi, et empêcher le scandale de la violation de l'art. 162 par un moyen qui aurait dû l'en préserver, il ne restait plus dans l'espèce de la cause d'autre remède que l'appel à la requête du procureur-général ;-Attendu que les art. 184 et 190 du Gode civil, en plaçant dans les attributions du Ministère public la vindicte de la loi quant aux mariages qu'ils réprouvent, ont dérogé à l'art. 2, tit. 8, de la loi du 24 août 1790, pour le cas où l'exception devient nécessaire; Attendu que l'objet de l'appel est de faire réformer le jugement du i 1,août 1807, en tant qu'il aurait été mal jugé dans l'intérêt de la loi en détruisant dans tous ses effets le mariage du sieur G... avec la fille du sieur D..., et que le procureur-général prétend devoir subsister, du moins quant à l'affinité; -Qu'il suit de ces motifs que le procureurgénéral a eu intérêt et qualité pour appeler du jugement du 11 août 1807; — Et attendu que le procureur-général a dé

veloppé ses griefs et conclu au fond; - ORDONNE aux intimés d'y répondre et de conclure au fond.»-Les avoués des intimés s'étant retirés, et le procureur-général ayant requis défaut, et, pour le profit, l'adjudication de ses fins et conclusions:« Accorde le défaut requis; et, disposant sur le profit demandé, infirme le jugement dont est appel, dans l'intérêt de la loi néanmoins, et notamment quant aux liens d'affinité résultans entre le sieur G..... et la famille de feu Marie-ThérèseJoséphine D..., du chef du mariage contracté entre ledit G... et Marie-Thérèse-Joséphine D..., par-devant la municipalité de Bruxelles, le 5 floréal an 12; - Ordonne qu'à la điligence du procureur-général le présent arrêt sera transcrit aux registres de l'état civil, en marge du jugement du 8 août 1817, y annoté, etc. »>

Noia. La jurisprudence des Cours royales est en opposi=tion directe avec celle de la Cour suprême sur cette question importante. Trois arrêts, l'un de la Cour de Pau, du 28 jan-, vier 1809, l'autre de la Cour d'Agen, du 14 janvier 1818, et le dernier de la Cour de Grenoble, du 28 juillet de la même année, ont jugé que le Ministère public pouvait agir par voie d'action, pour faire maintenir un mariage régulier, C comme il en a le pouvoir pour faire annuler un mariage, contracté au mépris de la loi, ou sans les formalités qu'elle prescrit. Le motif qui semble avoir dicté ces arrêts, c'est la grande analogie qui existe entre les deux hypothèses; 'c'est surtout cette considération que l'ordre public n'est pas moins compromis par l'annulation d'un mariage régulier que par le maintien de celui qui a été fait en contravention aux lois. La Cour de cassation, au contraire, a jugé, par arrêts des 1er août 1820 et 5 mars 1821, que le droit d'agir d'office en nullité du mariage procédait d'une attribution exceptionnelle et spéciale qui n'est pas susceptible d'extension, et qu'aucune loi n'autorisant le procureur-général à agir d'office pour faire maintenir un mariage, son action devait être déclarée non recevable.

Nos lecteurs apprécieront les motifs qui nous empêchent de donner notre opinion au milieu d'autorités si imposantes.

COUR D'APPEL DE BRUXELLES.

• Un tuteur non parent peut-il provoquer l'interdiction du pa rent de son pupille? (Rés. aff.) C. civ., art. 450.

LÉON DESMET, C. LA DAME VANOVERVELT.

Une action aussi importante, disait-on pour la négative, et qui intéresse autant l'état des citoyens, toujours respectable et cependant toujours exposé aux atteintes de la mauvaise foi, ne doit pas être accordée à un individu étranger à la famille de l'infortuné que l'on veut faire interdire. Aussi le Code civil ne défère-t-il le droit de provoquer l'interdiction qu'à l'époux, aux parens, et au Ministère public dans le cas de fureur, ou lorsqu'il n'y a ni époux ni parens connus. Il est refusé au tuteur étranger, qui pourrait en abuser pour servir ses passions personnelles, et engager témérairement des mineurs dans un procès scandaleux.. La loi détermine toutes ses attributions; elle désigne celles qu'il ne peut exercer qu'avec l'autoritation du conseil de famille, avec le con cours du subroge tuteur, et celles qu'il peut exercer proprio motu; et au nombre de toutes ces attributións ne se trouve point compris le pouvoir de provoquer l'interdiction du parent du pupille. Il est trop important pour pouvoir se suppléer. Le silence de la loi à cet égard n'est point un oubli : c'est un effet de sa prévoyance qui n'accordé que ce qui peut être utile pour l'intérêt des mineurs, refuse, ou, ce qui est la même chose, se tait sur ce qui peut avoir des résultats dangereux, soit pour eux, soit pour d'autres.

On opposait pour l'affirmative l'art. 450 du Code civil (1), et on en concluait que, le tuteur représentant son pupille, pa

(1) « Le tuteur prendra soin de la personne du mineur, et le représen «terà dans tous les actes civils.» (Cod. civ., art. 450.).

rent de la personne que l'on voulait faire interdire, c'était le pupille qui provoquait l'interdiction par l'entremise de son tuteur, et que d'ailleurs il y avait beaucoup de raisons pour accorder à celui-ci l'exercice de ce droit, et aucune pour le lui refuser.

Ce dernier système a été consacré dans l'espèce..

Le sieur Léon Desmet, tuteur des enfans de Vandenkerkoye, provoque, au nom de ses mineurs, l'interdiction de la dame Dorothée Vanovervelt leur grand'-tante, pour cause d'imbécillité. Cette derniere oppose aú sieur Léon Desmet un défaut de qualité, pris de ce qu'il n'est pas son parent. Le tuteur répond qu'à la vérité il n'est point parent, mais qu'il agit pour ses pupilles, qui le sont, et dont il est le représentant; que, si la dame Dorothée Vanovervelt a d'autres parens que ses pupilles, leur silence ou leur inaction, qui peut être l'effet de la négligence ou de l'intérêt, n'établit point pour lui une fin de non recevoir.

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Du 3 août 1808, ARRÊT de la Cour d'appel de Bruxelles, e chambre, MM. Honorez et Beyens avocats, par lequel: « LA COUR, Sur les conclusions conformes de M. Merex, substitut du procureur général, DÉCLARE Léon Desmet recevable, en sa qualité de tuteur, à provoquer l'interdiction de la dame Vanovervelt, attendu qu'il représente les mineurs parens de cette dernière. »

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Les communes peuvent-elles encore aujourd'hui exercer la faculté que leur accordaient les anciennes lois, de racheter leurs biens communaux aliénés en temps de détresse? (Rés. aff.)

La Commune D'IvVRI, C LA DAME DE LA BROUTIÈRE. Cette question, négativement résolue par deux arrêts de la Cour de cassation, l'un du 8 messidor an 5, et l'autre du 27 nivôse an 6, et tous les deux rapportés tome 1er, p. 194, de ce recueil, s'est présentée de nouveau dans l'espèce sui

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