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le devoir est même de le réprimer. Si le mari a des droits, la nature, et l'équité, toujours d'accord, y attachent des devoirs non moins étendus et non moins absolus, qui sont pour la femme des droits qu'elle. peut toujours faire valoir avec succès, quand il les oublie. Il y a donc à cet égard entre les époux réciprocité de droits et de devoirs. Le mari peut, il est vrai, exiger que la compagne de sa vie le suive partout où il juge à propos de fixer son habitation, lui obéisse, lui donne ses soins, soulage ses besoins; mais il doit aussi secours et assistance à celle-ci; il est tenu de la recevoir auprès de lui, et de fournir à ses besoins d'une manière convenable à son état et à sa fortune. Ainsi, en abandonnant la dame Vestraëten sans ressource dans un domicile qu'il lui a fixé, et où il refuse de se rendre, le sieur d'Aubremé a violé les premiers principes de la morale et du droit civil. La suite de l'affaire détermine la vérité de ce fait, que d'ailleurs la Cour de cassation doit supposer constant, d'après les juges d'appel, dont il lui est interdit d'apprécier à cet égard la conviction.

Les offres qu'a faites le sieur d'Aubremé de recevoir son épouse ne paraissent qu'un subterfuge. Pouvait-on, au reste, obliger cette malheureuee femme à courir après un mari qui la fuyait, qui lui avait marqué la résolution inébranlable de ne pas habiter avec elle, lorsqu'il lui refusait l'argent nécessaire pour un voyage et payer les loyers de la maison où il l'avait reléguée? Que serait-il arivé si la justice eût accueilli de telles offres? Chaque nouvel asile désigné lui eût présenté la même solitude, et le chapitre inépuisable des affaires eût été pour le mari un prétexte de s'en éloigner. C'est pourquoi il a conclu au rejet.

Le 12 janvier 1808, ARRÊT de la Cour de cassation, section des requêtes, M. Henrion, doyen d'âge, président, M. Cochard rapporteur, M. Guichard avocat, par lequel:

« LA COUR, - Attendu que, la Cour d'appel de Bruxelles n'ayant prononcé que sur des faits, ayant d'ailleurs fait une juste application de l'art, 214 du Code civil, on ne peut

pas dire qu'elle soit contrevenue au texte formel et précis d'aucune loi; - REJETTE, étc. »

COUR D'APPEL DE BESANÇON.

L'enfant peut-il étre affranchi de l'obligation de fournir des alimens à son ascendant, en offrant de le recevoir chez lui? (Rés. nég.) C. civ., art. 205 et 210.

LE SIEUR BELOTTE, C. LA VEUVE Belotte.

La veuve Belotte, se trouvant dans le besoin, fit citer son fils en condamnation au paiement d'une pension annuelle de 100 fr. à titre d'alimens.-Jugement conforme.-Appel de la part de Belotte. Il offre de fournir chez lui les alimens demandés par sa mère.

Le 14 janvier 1808, ARRÊT de la Cour de Besançon, par lequel:

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« LA COUR,- - Considérant que les enfans. ne peuvent forcer leurs pères et mères à venir recevoir des alimens chez eux ;-Mais que la pension de roo fr., accordée à l'intimée, 'excède évidemment les facultés de l'appelant ;-CONDAMNE celui-ci à payer à sa mère une pension annuelle et viagère de 36 fr., et aux dépens.

Nota. La Cour de Colmar a résolu la même question dans le même sens, par arrêt du 23 février 1813.

COUR DE CASSATION.

Le dépôt volontaire d'une somme excédant 150 fr. peut-il étre prouvé par témoins devant les tribunaux correctionnels? (Rés. nég.)

Le mandataire qui a détourne à son profit les deniers qu'il a

reçus pour sonmandant peut-ilétre assimilé au dépositaire,

et, comme tel, étre poursuivi par voie de police correctionnelle? (Rés. nég.) C. civ., art. 1917, 1923 et 1986. Sur une poursuite criminelle à la requête de la partie publique, peut-il étre prononcé une réparation civile en faveur de la partie lésée qui n'est ni plaignante ni intervenante? (Rés. nég.)

LE SIEUR STEVENS, C. LE SIEUR XENOMONT.

Le sieur Stevens, comme mandataire salarié du sieur Xenomont, avait reçu du nommé Thibaut, en deux parties, l'une de 7,246 fr., l'autre de 11,991, un capital dont il avait donné quittance.

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Ayant employé cette double somme à ses besoins personnels, le sieur Xenomont exigea de lui une reconnaissance portant qu'il l'avait détournée à son avantage pour payer ses créanciers, et une promesse de la rendre dans six mois.

Le mandataire s'obligeait en outre à loger et nourrir jusqu'au remboursement effectif le sieur Xenomont, pour lui tenir lieu des intérêts de sa créance.

Stevens paya 1,000 florins à compte, et le surplus de la 'dette par un bilan qu'il déposa, et où le sieur Xenomont figurait au nombre de ses créanciers.

Celui-ci dénonça, dans un mémoire imprimé, son débi-teur à l'opinion publique; il l'accusa d'avoir violé la foi du dépôt, en ce que, n'ayant point où serrer sûrement la somme de 11,991 fr., que Stevens lui remit après l'avoir touchée du sieur Thibaut, il la lui avait rendue, en le priant de la lui garder et de la tenir à sa disposition.

Le magistrat desûreté, prenant le mémoire pour dénonciation, décerna un mandat de dépôt contre Stevens, et remit l'affaire au directeur du jury, qui la renvoya à la police correctionnelle.

Stevens, interrogé, se retrancha dans sa qualité de nandataire salarié, avec dénégation d'avoir été un seul instant constitué dépositaire; il soutint cette assertion, justifiée par, la déclaration que Xenomont avait exigée de lui, et par l'ab

Tome IX.

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sence d'une décharge de la part de ce dernier de la somm de 11,996 fr., qui, d'après sa version, aurait dû être souscri et rendue.

Malgré l'éclat que le sieur Xenomont avait fait, il ne jug convenable ni de se rendre partie plaignante ni d'interveni Néamoins le tribunal correctionnel, à la requête du M nistère public, attendu qu'il résultait des interrogatoires o Stevens, de sa déclaration écrite, et de la déposition des t moins, qu'il avait perdu sa qualité de mandataire, à raiso des 11,991 fr. en question, en les remettant au pouvoir d Xenomont, et qu'il en était devenu simple dépositaire e recevant depuis la même somme à ce titre et à charge de représenter, le condamna, par application de l'art. 12 de l loi du 25 frimaire an 8, aux peines y portées, et en outre à l restitution, même par corps, envers Xenomont, des 11,99 fr. dont il s'agit.

Sur l'appel, arrêt de la Cour de justice criminelle du département de la Dyle, du 23 novembre 1807, qui confirma le jugement correctionnel, en ajoutant à ses motifs que le faits déclarés constans par les premiers juges étaient également résultés des débats sur l'appel, et que d'ailleurs le man dat, comme le dépót, étant de sa nature un contrat à titr gratuit, il importait peu sous quelle qualité Stevens fût considéré, puisque sous l'un et sous l'autre, rapports, dès

qu'il

avait fait tourner la somme à son avantage, il n'en devait pas moins être passible des peines prononcées par l'art. 12 de la loi du 25 frimaire an 8.

J

Sur le pourvoi du sieur Stevens, et le 16 janvier 1808, ARRÊT de la Cour de cassation, section criminelle, M. Barris président, M. Carnot rapporteur, par lequel :

« LA COUR,~Vu l'art. 12 de la loi du 25 frimaire an 8, les art. 1917, 1923 et 1986, du Code civil, et l'art. 154 du Code des délits et des peines; et attendu 1o que l'arrêt attaqué a reconnu et déclaré constant un dépôt volontaire audessus de 150 fr., quoique ce prétendu dépôt ne fût pas constaté par écrit, qu'il fût formellement dénié par la partie in

téressée, et qu'il n'y eût pas eu même au procès le plus léger commencement de preuve par écrit de son existence, ce qui a été une violation manifeste de l'art. 1923 du Code civil;– Attendu 2o qu'en déclarant en point de droit que le contrat de mandat, comme celui de dépôt, est essentiellement gratuit, pour en tirer la conséquence que le mandataire, comme le dépositaire, qui abuse de son mandat, en détournant à son profit les sommes appartenantes à son commettant, est passible des peines prononcées par l'art. 12 de la loi du 25 frimaire an 8, contre ceux qui détournent à leur profit des effets qui leur ont été confiés gratuitement, à charge de les représenter, et qu'en le déclarant ainsi, l'arrêt attaqué a ouvertement violé et fait une fausse application de l'art. 1986 du Code civil, qui déclare susceptible de conditions.onéreuses le contrat du mandat, tandis que, par l'art. 1917, le Code venait de déclarer essentiellement gratuit le dépôt proprement dit, ce qui ne permet d'assimiler ni de confondre ces deux contrats;-Et attendu qu'en fait, il est acquis au procès que ce fut en qualité d'agent d'affaires, et moyennant salaire, que Stevens fut chargé, et qu'il accepta la procuration du sieur Xenomont; ce qui constituait entre les parties un contrat à titre onéreux, et qui ne pouvait être assimilé au dépôt proprement dit, qui est essentiellement gratuit, et ce qui tirait nécessairement l'affaire de l'art. 12 de la loi du 25 frimaire an 8, qui n'a pour objet que le détournement fait de sommes confiées gratuitement, à charge de les représenter;-Attenda 5° que l'art 154 du Code du 3 brumaire an 4 ne permet au tribunal saisi de l'instruction et du jugement des affaires de police de prononcer des condamnations civiles que dans le cas où la citation est donnée à la requête de la partie intéressée, ou bien celui où cette partie est intervenue sur la poursuite du Ministère public, ce qui est la conséquence naturelle des principes posés aux art. 6 et 8 du même Code;Et attendu que le sieur Xenomont, au profit duquel l'arrêt attaqué a prononcé par corps la restitution de la somme de 11,991 fr., ne s'était pas rendu partie poursuivante ni jointe

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