Images de page
PDF
ePub

lans, la demoiselle Rey était attaquée d'une maladie qui la menaçait d'une mort prochaine; que le sieur Broisin son m decin avait tant d'empire sur elle, qu'il l'avait portée à se faire donner la totalité de sa fortune; mais que le Code civil s'y opposait, et que c'est pour l'éluder que le mariage a été

contracté.

Mais qui ne sent pas que, si les époux ont eu intention d'éluder la disposition de l'art. 909, ils ont par-là même eu celle de se marier, et cette intention se manifeste ostensiblement par l'exécution fidèle de toutes les formalités requises pour célébrer le mariage. Il est d'ailleurs des moyens légitimes d'éluder la loi, ou plutôt il est des cas où il n'est pas permis de pénétrer dans les consciences des parties. C'est ainsi que les père et mère d'un enfant naturel légalement reconnu, qui ne peuvent pas lui donner même indirectement au delà de ce que la loi lui accorde, peuvent, s'ils se marient, luitransmettre tous leurs biens. Mais, lors même que le sieur Broisin et la demoiselle Rey n'auraient pas eu intention de s'épouser, et quand il n'y aurait pas ce qu'on appelle consentement respectif, eux seuls peuvent invoquer ce moyen de nullité. L'art. 180 du Code lé refuse à tout autre.

Vainement opposerait-on les lois du Digeste, 3, de ritu nupt:; 5, de repud.;-et 3, de divort. Les célibataires romains, pour éluder les lois qui les privaient d'une partie des droits de citoyen, vivaient avec des concubines et se faisaient passer pour des gens mariés. Ce sont ces prétendus mariages qu'on déclarait simulés. Mais lorsque des mariages avaient été contractés légalement, ils étaient inattaquables. Il faut dire la même chose des divorces : les apparens pouvaient être frappés de nullité, et nullement ceux qui étaient réels.,

Vainement opposerait-on encore que l'ancienne jurisprudence présente un grand nombre de mariages faits pendant la dernière maladie de l'un des époux, qui furent déclarés nuls et simulés: ce serait faire revivre la déclaration abolie. de 1639, prohibitive des mariages in extremis.

Plus vainement enfiu opposerait-on l'arrêt de la Cour de

sation du ret messidor an 11 (1). Cet arrêt n'a point jugé in divorce prononcé légalement pouvait être attaqué par tiers comme simulé, mais seulement, ce qui est bien difnt, qu'il ne pouvait être opposé à des créanciers, lorsI n'avait pas été suivi de l'observation de certaines formarigoureusement prescrites.

uelies funestes conséquences sont attachées au système appelans! Si, après avoir épousé la demoiselle Rey, et it son décès, le sieur Broisin eût contracté un second iage, il aurait donc pu opposer au vengeur public qui rait poursuivi comme bigame le moyen frivole qu'on oppose, et dire : « Mon premier mariage était simulé. me demandez-vous? Je suis hors l'atteinte de la loi. » on aurait pu répondre aux enfans de cette union qui, s la mort de leur mère, seraient venus en réclamer l'ensuccession : « Le mariage était simulé, vous êtes illégi s, vous n'avez droit qu'à une faible part du bien de vonère. » La morale et la raison réprouvent également un il système.

par

ar arrêt de la Cour d'appel de Lyon, du 18 août ', le jugement de première instance fut confirmé, atu que le mariage de Broisin avec la demoiselle Rey avait contracté suivant toutes les formes voulues Ja loi; que e civil constate que le futur et la future s'était transporla mairie pour faire rédiger leur acte de célébration de iage; que, d'un autre côté et antérieurement à l'acte ciil y avait eu entre Broisin et la demoiselle Rey contrat int notaires, pour régler les conventions matrimoniales; dès lors un tel mariage ne peut, aux yeux de la loi, étre ecté de simulation.

ir le pourvoi en cassation, l'affaire a changé de face. Les tiers de la demoiselle Rey n'ont plus reproduit le moyeniimulation du mariage. Ils se sont bornés à soutenir que êt attaqué violait tout à la fois et l'art. 909 du Code civil loi du 24 août 1790:

Voy. ce recucil, tom. 2, pag. 543.
Tome IX.

54

[ocr errors]

L'art. 909 du Code civil, en ce qu'il avait validé le fait à un incapable;

La loi de 1790, en ce que la question de capacité n'a pas même été posée ni par conséquent résolue par la C d'appel.

Du 30 août 1808, ARRÊT de la Cour de cassation, sec des requêtes, M. Muraire premier président, M. Borel porteur, M. Cabanès avocat, par lequel :

l'

« LA COUR,—Sur les conclusions de M. Daniels, subst du procureur-général;- Attendu que le Code civil, par 1094, laisse aux époux la faculté de s'avantager réciproq ment, dans les limites y énoncées, de tout ce dont ils peuv disposer en faveur d'un étranger; que l'art. 212 impose époux les devoirs mutuels de fidélité, secours et assistan d'où résulte que ce n'est pas pour les époux qu'a été établi prohibition générale contenue dans l'art. 909; Atter d'ailleurs que rien ne constate que les demandeurs aient quis précisément, devant la Cour d'appel, l'application ladite prohibition, et que cette Cour ait dû poser une qu tion à cet égard; qu'ainsi il n'a été fait aucune contrav tion par l'arrêt attaqué, soit à l'art. 9og du Code civil, à l'article 15 du titre 5 de la loi du 24 août 1799, -1 JETTE, etc. »

[ocr errors]

Nota. Si, sur la seconde question, la seule que l'arrêt ait gée, nous n'avons pas donné plus d'étendue aux moyens demandeurs, c'est qu'elle doit se représenter plusieurs 1 dans le cours de cet ouvrage, notamment dans les volumes 1817 et de 1820, où elle recevra tous les développemens d elle est susceptible. Au reste, les arrêts dont nous auron rendre compte par la suite. l'ont décidée de la même r nière que celui qui précède.

[ocr errors]

COUR DE CASSATION.

Une Cour d'appel peut-elle annuler des jugemens de p mière instance que des tiers ont attaqués par la voie

l'appel ou de la tierce apposition, comme étant le résul tat de la fraude concertée entre les parties, sans déclarer préalablement que l'appel ou la tierce opposition sont récevables? (Rés. nég.)

LA DAME MEYER, C. LES CRÉANCIERS DE SON MARI.

La solution négative de cette question est un des points les plus constans de la jurisprudence. Elle est implicitement prononcée par l'ordonnance de 1667 et par le Code de procédure civile, qui ouvrent plusieurs voies pour se pourvoir contre les jugemens, telles que l'opposition, l'appel, la tierce opposition, la requête civile, et ne permettent de les annuler que lorsqu'ils sont régulièrement attaqués, en temps utile, par l'une des voies indiquées. La même solution. résulte encore de la manière la moins équivoque de plusieurs arrêts de la Cour de cassation et d'un avis du conseil d'Etat, du 25 octobre 1806, approuvé par le chef du gouvernement, le 12,novembre même année, et qui se trouve au numéro 126 du Bulletin des Lois. D'où il suit que la Cour d'appel qui, sans admettre l'appel ou toute autre voie légale, annulle des jugemens de première instance, par le motif qu'ils sont l'ouvrage de la fraude, excède ses pouvoirs. C'est encore ce qui a été jugé de nouveau dans l'espèce que voici.

Demande en séparation de biens par la dame Meyer, à cause du dérangement des affaires de son mari.

Jugement du 16 germinal an io qui la prononce, et autorise la demanderesse à reprendre ses apports matrimoniaux. Second jugement, du 14 nivôse an 12, qui fixe ses reprises à 56,355 fr.

Les biens du sieur Meyer étant insuffisans pour acquitter cette somme, son épouse attaqua plusieurs particuliers qui avaient acquis de lui des immeubles. Elle prétendait qu'ils étaient affectés à la sûreté de sa créance, et qu'ils devaient, dans le cas actuel de l'insolvabilité de son mari, être vendus après le mode prescrit par la loi du 11 brumaire an 7, si

[ocr errors]

mieux n'aimaient les acquéreurs lui payer le montant de reprises.

Ceux-ci ont contesté la validité de l'hypothèque et de l' scription; mais un jugement du 17 thermidor an 13 décla l'une et l'autre valables.

Les acquéreurs appelèrent de ce jugement, et se ren rent ensuite tiers opposans à ceux des 16 germinal an et 14 nivôse an 12. C'est de cette tierce opposition qu s'agit.

[ocr errors]

La dame Meyer proposa diverses fins de non recevoir lativement à la tierce opposition; mais, le 28 novemb 1806, la Cour d'appel de Colmar, a Sans s'arrêter, en ta que de besoin, aux fins de non recevoir, ni aux jugemens séparation et de liquidation des 16 germinal an 10 et 14 1 vôse an 12, lesquels en ce qui concerne les acquéreurs elle déclarés nuls, comme effet de collusion et de fraude conce tées entre l'intimée et son mari; Dit qu'il avait été m jugé; et attendu que les jugemens de séparation et de liqu dation obtenus par l'intimée formaient les titres sur le for dement desquels elle avait basé son action hypothécaire fo mée en première instance; que dès lors il suffisait qu'elle e opposé ces jugemens aux appelans, tiers détenteurs, par el attaqués et menacés d'éviction, pour que ceux-ci fussent droit de les quereller de nullité, pour les faire écarter, sa avoir besoin de les impugner, ni par la voie d'appel, ní p celle de la tierce opposition; qu'ainsi c'est le cas, en tant qi de besoin, de ne pas s'arrêter aux fins de non recevoir, et vérifier, pour ce qui concerne les appelans, si ces jug mens sont le fruit de la collusion et de la frande concert entre l'intimée et son mari ». (Ils ont été déclarés fraudi leux.)

Pourvoi en cassation.

Et, le 30 août 1808, ARRÊT de la section civile, M. Vie lart président, M. Audier-Massillon rapporteur, MM. G rardin et Cabanès avocats, par lequel :

« PrécédentContinuer »