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capacité, et de dire: Je veux être incapable? Non : l'état, la capacité des citoyens, ne sont soumis qu'à la loi; elle seule peut les en priver; elle seule peut déterminer, elle seule dé termine en effet les causes qui leur en font encourir la priva tion; et ces causes, elle veut que les juges les vérifient avec autant d'exactitude que de solennité, avant d'user du droit redoutable qu'elle leur confère. On ne peut, dit l'art. 6 du Code civil, déroger par des conventions particulières aux Jois qui intéressent l'ordre public. Or quelles lois intéressent plus l'ordre public que celles qui fixent l'état des hommes, qui, en même temps qu'elles enchaînent le mineur dans des liens salutaires, laissent au majeur le plein exercice de sa li berté individuelle! Eh quoi! il ne peut pas même, par con trat de mariage, être dérogé aux droits résultans de la puis sauce maritale sur la personne de la femme et des enfans, qui appartiennent au mari comme chef: l'art. 1388 du Code civil y est formel; et le mari pourrait, par un simple acte passé pendant le mariage, se dessaisir volontairement et irre vocablement entre les mains de sa femme de toute la pus sance dont il est investi! Ce serait, on ne craint pas de le dire, le comble de la déraison. Mais fixons-nous particulière ment sur les art. 490 et 491 du Code. Il en résulte évidem ment que, si un individu, ayant ou un époux ou une épouse, ou des parens connus, venait déclarer à un tribunal qu'il est dans un état d'imbécillité ou de démence, et demander son interdiction, le Ministère public ne pourrait pas, en prenant sa demande pour dénonciation, se permettre la moindre dé marche pour le faire interdire. Et conçoit-on que ce que le Ministère public ne pourrait pas faire, d'après le consente ment donné judiciairement par cet individu, cet individu pourrait le faire lui-même par un acte notarié? Conçoit-on que cet individu pourrait seul, et par l'unique effet de sa vo lonté, parvenir à une interdiction qui lui serait refusée s'it la provoquait par l'organe et avec l'appui du Ministère public? Encore un mot ; il est décisif. Dans le projet du Code civil, il se trouvait un chapitre du Conseil volontaire, dost

les dispositions permettaient à tout individu majeur qui se croirait incapable d'administrer ses biens de demander qu'il lui fût nommé un conseil judiciaire. Ce chapitre ne se trouve pas dans le Code civil; il en a été retranché dans la rédaction définitive de ce Code, et il ne peut l'avoir été que parce que le législateur l'a jugé contraire à ses vues. Ainsi un particulier ne peut pas, sur sa seule demande et de son seul consentement, être placé dans l'état d'un prodigue à qui la justice donne un conseil. Comment Jonc pourrait-il, sur sa seule demande et de son seul consentement, être placé dans un état d'interdiction absolue? S'il est vrai, comme le dit expressément la loi 21, ff., de reg. jur., que dans la permission du plús est renfermée la permission du moins, non debet ei cui plus licet quod minus est non licere, il l'est aussi, et il l'est nécessairement, que la prohibition du plus emporte la prohibition du moins. Benoît Galli avait donc fait un ridicule abus de la liberté qu'il tenait de la nature et de la loi, en consentant à son interdiction par l'acte du 16 octobre 1807. Le tribunal civil de Parme a donc excédé ses pouvoirs en homologuant cet acte, car il y a évidemment excès de pouvoir toutes les fois qu'un tribunal homologue un acte relatif à des objets que la loi a placés hors de la sphère des conventions. C'est ainsi que, par arrêt du 6 pluviôse an 11, la Cour, sur un réquisitoire donné par l'exposant, a cassé, comme renfermant l'excès de pouvoir le plus caractérisé, l'ordonnance d'exequatur que le président du tribunal civil de Saint-Gaudens avait rendue sur un prétendu jugement arbitral par lequel, d'après un compromis signé des époux, un mariage avait été déclaré nul. Eh! peut-on imaginer un excès de pouvoir plns monstrueux que celui qui consiste à dépouiller de son état et de sa liberté un homme qui n'est pas juridiquement prouvé en avoir encouru la privation ?

Du 7 septembre 1808, ARRÊT de la Cour de cassation, section des requêtes, M. Henrion président d'âge, M. Coffinhal rapporteur, par lequel ; //

«

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LA COUR, Vu l'art. 80 de la loi du 27 ventôse an 8, et les art. 490, 491, 492, 493, 494, 496 et 498, du Code civil;-Et attendu qu'on ne peut déroger par des conventions particulières aux lois qui intéressent l'ordre public, et règlent l'état des citoyens ;--CASSE, etc. »>

COUR DE CASSATION.

Le fermier troublé dans une servitude nécessaire à son exploitation peut-il, à cet égard, intenter l'action possessoire? (Rés. nég.) C. de proc. civ., art. 23.,

CARQUILLE, C. Lefèvre.

Lesieur Lefevre est propriétaire d'un terrain traversé par un sentier qui aboutit à un autre héritage, dont jouit le sieur Carquille à titre de fermier. Ce sentier est borné par un fossé que Lefèvre avait fait combler en l'an 11, et qu'il a fait quvrir de nouveau en l'an 13. Le fermier Carquille se prétendit troublé dans l'exercice du droit de passage sur le sentier; et pour faire cesser le trouble, il se pourvut par action possessoire devant le juge de paix du canton de Laon, lequel condamna le sieur Lefèvre à combler le fossé. Celui-ci interjette appel. Son principal moyen consistait dans une fin de non recevoir qu'il faisait résulter de ce que le sieur Carquille n'étant pas propriétaire, mais fermier, il était sans qualité pour intenter une action en complainte.

Le 22 ventôse an 13, jugement du tribunal civil de Laon, qui, attendu qu'en principe un fermier comme un propriétaire a qualité pour intenter l'action en maintenue possessoire, quand il est troublé dans la possession d'un passage pour la facilité ou commodité de son exploitation, ou en réintégrande, quand il a été dépossédé par voie de fait, rejette la fin de non recevoir proposée par Lefèvre.

Pourvoi en cassation pour violation de l'art. 1er du tit. 18 de l'ordonnance de 1667.

M. Lecoutour, substitut du procureur-général, a pensé

que l'art. 1, tit. 18, de l'ordonnance de 1667, et l'art. 25 du' Code de procédure, s'élevaient contre la distinction faite par le tribunal civil de Laon et par le défendeur; que celui-ci, ue possédant qu'à titre précaire, n'avait pu personnellement se plaindre en justice du trouble qu'il pouvait avoir éprouvé dans la jouissance du droit de passage, et qu'il devait se borner à dénoncer ce trouble à son propriétaire, pour que celui-ci eût à le faire cesser.

Du 7 septembre 1808, ARRÊT de la Cour de cassation, section civile, M. Viellart président, M. Boyer rapporteur, MM. Darrieux et Cochu avocats, par lequel:

« LA COUR, Vu l'art. 1er du tit. 18 de l'ordonnauce de 1667; Et attendu, dans l'espèce, qu'il est reconnu que Carquille, demandeur en complainte, n'était pas propriétaire, mais simple fermier du terrain pour l'exploitation duquel il a réclamé un droit de passage sur le terrain de Lefèvre; qu'ainsi il n'avait pas qualité suffisante pour intenter une semblable action, et qu'en l'y déclarant recevable, le jugement attaqué a violé l'art. 1er du tit. 18 de l'ordonnance de 1667;-CASSÉ. »>

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Nota. Un arrêt de la section des requêtes, du 8 juillet 1819, qui sera rapporté à sa date, a décidé que l'intervention du propriétaire dans le cours de l'instance suffisait pour régulariser l'action possessoire formée par le fermier, ce qui vient encore à l'appui de la doctrine que le fermier ne peut valablement intenter seul une action de cette nature.

COUR DE CASSATION.

Les tribunaux ordinaires sont-ils compétens pour connaître des délits commis par des gardes nationaux en activite de service militaire?

Résolu négativement, sur le rapport de M. Rataud, par ARRÊT de la section criminelle, du 8 septembre 1808, dont voici les termes :

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re an 14;

-Vu l'art. 20 du décret du 8 vendémiai

lors

- Vu aussi l'art. 85 de la constitution de l'an 8; Et enfin l'art. 456 du Code des délits et des peines; -Attendu que les individus composant la garde nationale, qu'ils sont en activité de service, sont en tout assimilés aux troupes de ligne ; que cela résulte de la disposition de la loi, et de l'avis du conseil d'Etat, du 3 mars 1807, approuvé par Sa Majesté, le 25 du même mois; Qué dès lors les délits commis par lesdits individus pendant la durée de leur service sont, comme tous les délits militaires, de la compétence exclusive des tribunaux spécialement établis pour les juger;

Qu'ainsi le sieur Bastin, chef de légion de gardes nationales en activité de service, était, en cette qualité, justiciable des conseils de guerre pour tous les faits qui lui étaient imputés, et que les tribunaux ordinaires étaient incompétens pour en connaître; - Par ces motifs, CASSE l'arrêt de la Cour de justice criminelle du département du Nord, etc. »

-

COUR DE CASSATION.

Doit-on, pour la liquidation du droit de mutation par décès, déduire ce qui a été perçu pour les legs particuliers fuits par le défunt? (Rés. aff.)

POURVOI DE LA RÉGIE.

Le sieur Lioud fit en l'an 3 un testament par lequel il instituait Jean-Pierre et Jean-François Lioud ses légataires universels, et légnait à la veuve Butiré et à Marie Boucher 3,300 fr. de rente viagère.

Lors de la présentation de cet acte à l'enregistrement, le receveur, outre le droit fixe de 7 fr., perçut pour chacun des legs un droit proportionnel.

Et lors de la déclaration des forces de la succession exigée par la loi, il perçut, sur l'intégralité de la valeur déclarée, le droit de mutation, sans déduction de ce qui avait déjà été payé pour les legs particuliers.

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