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écoulé avant le Code, il suffit d'observer qu'aucune disposi tion de nos lois ne s'y oppose.

Voici l'espèce qui a donné lieu à ces deux questions.

En l'an 2; le sieur Duval fils part pour l'armée. Il cesse de donner de ses nouvelles en l'an 4..

En l'an 12, ses héritiers présentent une requête tendante à être adinis à prouver son absence sans nouvelles depuis plus de quatre ans. -Jugement du tribunal de Tulle, du 6 fructidor an 12, qui les admet à faire cette preuve.

Enquête; et, le 13 fructidor an 13, jugement qui déclare l'absence de Duval, et envoie en possession de ses biens ceux qui, en l'an 2, étaient ses héritiers présomptifs.

Appel de ces deux jugemens par Duval père; et, le 1er mai 1807, arrêt de la Cour d'appel de Limoges qui dit avoir été bien jugé.

Pourvoi en cassation pour violation des art. 2 et 120 du Code civil, et pour fausse application de l'art. 115 du même Code.

L'art. 120, disait le demandeur, porte que les héritiers présomptifs peuvent, en vertu du jugement définitif qui a déclaré l'absence, demander l'envoi en possession des biens.

Il faut donc deux jugemens, l'un de déclaration d'absence, et l'autre d'envoi en possession. Il faut aussi que celui de déclaration d'absence précède celui d'envoi en possession, puisque ce n'est qu'en vertu du premier que le second peut être rendu, qu'il doit servir de titre pour obtenir celui-ci, Donc ces deux jugemens doivent être distincts et séparés; donc, en les confondant, la Cour de Limoges a violé l'art. 120 du Code civil.

Cette Cour, ajoutait-il, a encore violé l'art. 2, et fausse'ment appliqué l'art. 115 du même Code.

L'art. 2 porte que la loi n'a point d'effet rétroactif, et l'art. 115, que, lorsqu'une personne aura cessé de paraître au lieu de son domicile, et que depuis quatre ans on n'en aura point eu de nouvelles, les parties intéressées pourront se pourvoir en déclaration d'absence. En combinant ensemble ces deux

articles, le dernier ne peut être appliqué qu'autant que la disparition est postérieure, au Code, et qu'il s'est écoulé quatre années depuis que l'absent n'a pas donné de ses nouvelles. Mais si l'absence est antérieure au Code, c'est la loi en vigueur au moment où elle a commencé qu'il faut consulter.' Or, d'après l'ancienne jurisprudence, les héritiers de l'absent ne pouvaient être envoyés en possession que dix ans après la disparition ou les dernières nouvelles.

Il est de fait que l'absence de Duval fils remonte à l'an 4; il est de fait aussi qu'à l'époque où les héritiers se sont pourvus en déclaration d'absence, il ne s'était pas encore écoulé cinq années depuis la publication du Code, puisque leur de mande date de l'an 12. C'était donc d'après la jurisprudence ancienne que les juges auraient dû se déterminer, et non d'après les dispositions du Code; en appliquant à l'espèce l'art. 115, ils en ont donc fait une fausse application, et en même. temps violé l'art. 2.

Du 17 novembre 1808, ARRÊT de la section des requêtes, au rapport de M. Lachèse, par lequel:

« La COUR, --Attendu que, si le Code civil a fixé, art. 119, l'intervalle d'un an entre le jugement qui ordonne l'enquête et le jugement de déclaration d'absence, aucune disposition n'exige d'intervalle entre la déclaration d'absence et l'envoi en possession provisoire; -Attendu que, le même Code, art. 115, n'ayant pas défendu de comprendre dans le délai de quatre ans le nombre des années écoulées avant sa publication, la Cour d'appel n'y a pas commis de contravention en admettant l'action des héritiers de l'absent après un délai de dix ans ou près de dix ans sans nouvelles, quoiqu'il ne s'en fût écoulé qu'environ deux depuis la publication de l'article cité; REJETTE, etc. »

COUR D'APPEL DE RIOM.

Le testament public doit-il, à peine de nullité, contenir mention de la signature du notaire? (Rés. nég.)

LES HÉRITIERS COLLATÉRAUX DE JEAN L'Hoste, Ĉ. la dame

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Le 20 floréal an 11, Jean l'Hosie fait par. acte devant notaire un testament dans lequel il institue Marguerite Raynaud sa femme pour sa légataire générale et universelle.

Les héritiers collatéraux de Jean l'Hoste ont attaqué ce testament par divers moyens. Mais celui sur lequel ils insis taient le plus était le défaut de mention de la signature du

notaire.

Déclarés non receyables et mal fondés en première instan- 4 ce, ils se sont pourvus par appel. Voici leurs moyens:

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Le testament, disaient-ils, a été fait depuis la promulgation de la loi du 25 ventôse an 11, qui, en organisant le notariat, a réglé la forme des actes reçus par les notaires, et par conséquent des testamens. Or l'art. 14 de cette loi est ainsi conçu: « Les actes seront signés par les parties, les témoins et les notaires, qui doivent en faire mention à la fin de l'acte.» Ici l'expression est générale; elle s'applique à tous les actes, et par conséquent aux testamens,aux.donations, comme aux contrats de vente, à tous les actes enfin qui sont du ministère des notaires.

Lê testament dont il s'agit ne contient pas la mention de la signature du notaire : donc il est contraire à la loi. Mais quelle peine entraîne cette violation? La peine de nullité. Elle est prononcée par l'art. 68 de la loi précitée, qui déclare nul tout acte fail en contravention aux dispositions des art. 6, 8, 9, 10, 14, etc., et qui veut seulement que ces actes, lorsqu'ils sont signés par toutes les parties, vaillent comme actes. sous seing prive.

Les expressions des art. 14 et 68 de la loi sont précises, leur combinaison est simple, leurs conséquences paraissent évidentes; cependant les premiers juges les ont méconnues, sous prétexte que la loi du 25 ventôse an 11. ne s'appliquait pas aux testamens, les dispositions testamentaires étant régies par des lois particulières. Mais l'application de cette loi aux

testamens est démontrée par ses termes mêmes, par son es prit, et par l'insuffisance des lois particulières relatives aux testamens

Les termes de la loi. En effet, la loi de ventôse an 11 se sert toujours du mot acte, expression générique qui s'applique à toute espèce d'écrit contenant des dispositions ou des conventions, à tout ce qui sert à prouver et à justifier quelque chose, et qui se prend ordinairement pour les instrumens passes devant notaires ou autres personnes publiques. (Voyez Ferrières, Dictionnaire de droit, au mot Acte.) Cette locution s'applique donc au testament. Le mot acte est le genre; les mots testament, contrat de vente, de prét, etc., sont les espèces ; aussi dans le Code civil même, article 895, le testament est-il défini un acte par lequel le testateur dispose.

L'esprit de la loi. « Cette loi a eu pour but de rassembler dans un petit nombre d'articles les dispositions relatives à la matière, qui se trouvaient éparses dans une multitude de lois, anciennes et nouvelles. » Elle constitue véritablement le notariat; elle trace au notaire la ligne de ses attributions; elle lui présente le tableau de ses devoirs,: et l'on voudrait qu'elle fût étrangère aux testamens, à cette branche si considérable des fonctions du notaire! Ce n'est pas ainsi que l'a pensé le grand-juge, lorsque, consulté sur diverses questions qu'avait fait naître cette loi, relativement aux testamens, il les discuta dans une circulaire en date du 25 vendémiaire an 13. On lit dans sa discussion cette phrase remarquable :

<< Elle (la loi) veut, art. 29, que les notaires tiennent répertoire de tous les actes qu'ils recevront; tous les actes, auciun n'est excepté donc les testamens y sont compris comme les autres. » Ainsi le grand-juge ne regarde même pas comme douteux que les testamens n'aient été, comme les autres actes, l'objet de la loi du 25 ventôse an 11.

Mais une nouvelle preuve de cette vérité se puiserait dans l'insuffisance des lois particulières aux testamens.

Tome IX.

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L'ordonnance de 1735 était muette sur beaucoup de règles observer dans les testamens : par exemple, elle ne s'occupait point des qualités que devaient avoir les témoins; elle ne défendait pas de choisir ces témoins parmi les parens des lé gataires ou des héritiers. institués, ce qui cependant ne se pouvait pas. (Voyez Lacombe, au mot Témoin, no 5.)

Elle ne parlait point de la parenté du notaire avec le te tateur ou le légataire. Enfin, il était beaucoup de points qu'elle ne réglait pas, et pour lesquels il fallait avoir recours à d'autres lois qui n'ont été remplacées que par celle de ve ́tôse an H.

Le Code civil garde aussi le silence sur plusieurs formali tés essentielles des testamens. Il ne parle pas de la mention de la résidence du notaire, essentielle cependant pour savoir si le notaire avait caractère pour recevoir le testament. ne dit rien sur la parenté du notaire, des légataires, des te Inoins, ni sur l'obligation de faire le testament d'un seul contexte, ni sur les renvois, surcharges et apostilles, non ap prouvés. Il se tait même sur la date du lieu, du jour, l'année où le testament est fait. Toutes ces dispositions și in portantes, omises dans la loi du 13 floréal an 11, ne se trou vent que dans celle du 25 ventôse précédent. Et cependant, qui osera dire qu'on peut les négliger impunément? Qui osera soutenir qu'un testament sans date doit être exécuté, tandis que la date est indispensable, soit pour reconnaitre sous l'empire de quelle loi le testament a été fait, soit pour savoir lequel de plusieurs testamens doit avoir la préférence.

La loi du 25 ventôse an 11 doit donc être aussi observe dans la rédaction des testamens, et, par conséquent, le tes tament de Jean l'Hoste est nul.

*Avant l'ordonnance de 1735, a-t-on dit pour l'intimée, la question pouvait paraître douteuse; les opinions étaient cou troversées, et la jurisprudence des arrêts avait varié. (V.R card, des Donations, part. ire, sect. 7, 11° 1528; le Journal des Audiences, tom. 1er, liv. 7, chap. 5; Denisart, au mot Testament, 7 et suiv.)

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