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droits de l'hypothèque dont cette maison était grevée dans le principe, c'est-à-dire avant le partage.

Mais ces biens, les syndics les avaient déjà fait vendre au profit de la masse, et la veuve Simon dirigeait son attaque contre les acquéreurs, qui s'opposèrent dès lors à ses poursuites et en demandèrent la nullité.

Ils s'appuyaient sur ce que, pour avoir droit de suivre des immeubles entre les mains d'un tiers acquéreur, il fallait avoir inscription. Or la veuve Simon ne produisait que celle qui avait été prise le 21 nivôse an 7 sur la maison indivise et faisant, depuis le partage, partie du lot du cohéritier de son débiteur: elle n'en avait donc pas sur les immeubles échus en partage au débiteur ou à ses créanciers.

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La dame Simon convenait du fait; mais elle observait que l'inscription du 21 nivôse an 7 s'était replacée sur les immeubles dévolus par le partage à son débiteur, et qui formaient l'équivalent de sa part dans la maison hypothéquée en l'an 7; que la Cour l'avait ainsi formellement décidé par son arrêt du 3 septembre 1807, en ces termes, que l'hypothèque est transférée DE PLEIN DROIT sur le lot échu aux syndics de la faillite.

Que l'hypothèque soit transférée sur le lot du débiteur, cela peut être, répondaient les acquéreurs: nous n'attaquons pas les principes consacrés par l'arrêt. Mais, outre que cette dé cision n'a pas été rendue contradictoirement avec nous qu'elle est à notre égard res inter alios judicata, et que par conséquent on n'est pas recevable à nous l'opposer, nous disons que la veuve Simon en porte l'effet trop loin, et que la Cour n'a voulu juger autre chose, sinon que le partage fixe l'hypothèque de chacun des héritiers sur leur lot, mais posi tis ponendis, en sous-entendant la condition que le créancier remplirait les formalités requises par la loi pour opérer le transport de son hypothèque sur les biens auxquels son débiteur succède, c'est-à-dire sous la condition de rigueur qu'il prendrait sur ces biens une inscription sans laquelle l'hypothèque ne produit aucun effet à l'égard des tiers.

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Ces moyens ont prévalu en première instance et sur l'appel, Du 15 décembre 1808, ARRÊT de la Cour d'appel de Bruxelles, deuxième chambre, par lequel:

« LA COUR, -- Attendu que le titre de l'appelante ne lui confère d'hypothèque qu'à charge d'inscription : « L'hypo«thèque ne prend rang et les priviléges sur les immeubles a n'ont d'effet que par leur inscription dans les registres pu« blics à ce destinés; l'hypothèque existe, mais à la charge « de l'inscription pour une créance consentie par acte nota« rié (art. 2 et 3 de la loi du 11 brumaire an 7). »;· Qu'en outre, suivant l'art. 4 de la même loi, toute stipula- * tion volontaire d'hypothèque doit indiquer la nature et la situation des immeubles hypothéqués; — Que la créance de l'appelante n'a pas été inscrite sur les maisons acquises par les intimés au principal; partant, que le commandement et poursuites en expropriation forcée sont absolument nuls; - DÉCLARE nuls les commandemens et les poursuites en expropriation forcée, éte. »

Nota. La question serait aujourd'hui résolue dans le même sens d'après les art. 883, et 2166 du Code civil. Voir aù surplus le Traité des Hypothèques de M. Grenier, tom. 1er, pag. 332.

COUR D'APPEL DE ROUEN.

Le pacie résolutoire inséré dans un contrat de vente d'immeubles peut-il, indépendamment de toute inscription, étre opposé par le vendeur aux créanciers de l'acquéreur inscrits sur l'immeuble vendu, et autoriser la revendication à leur préjudice? (Rés. aff. )

LA DAME BRICE, C. LE SIEUR HERMEL,

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Le 1er floréal an 9, contrat par lequel la dame Brice vend au sieur Jean-Romain Brice son frère les trois quarts d'une maison située à Rouen, et dont ce dernier avait l'autre quart. La venderesse stipule qu'à défaut de paiement du prix au Tome IX. 46

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terme convénu, le contrat sera résilié, et qu'elle rentrera en propriété et jouissance de la partie de maison dont il s'agit.

Le sieur Brice ne paie point: au contraire, ses affaires se dérangent, et l'expropriation de ses biens est poursuivie par un sieur Hermel, créancier inscrit notamment sur la maison en question, qui par conséquent est comprise dans les biens à exproprier. Lors de l'adjudication au tribunal de l'arrondissement de Rouen, la dáme Brice, autorisée par le sieur Plaidieux (devenu depuis son mari), demande, en vertu du contrat de vente du 1er floréal, la distraction des objets par elle vendus à son frère. Elle est déboutée de sa demande, sauf à elle à se faire colloquer dans l'ordre du prix, suivant ses droits.

La dame Brice et le sieur Plaidieux son mari interjettent appel. On disait dans leur intérêt : Le contrat de vente du ier floréal est indivisible d'où il suit que, le pacte résolutoire qu'il renferme étant un de ses élémens essentiels, une condition sans laquelle la vente n'aurait pas eu lien, les créanciers de l'acheteur, qui ne peuvent avoir des droits plus étendus que lui-même, sont non recevables à quereller cette clause irritante, et mal fondés à prétendre se soustraire à son empire. Dans l'économie des art. 1655 et 1656 du Code civil, la résolution de la vente doit être prononcée de suite, si le vendeur est en danger de perdre la chose et le prix; et ces articles ne disent pas que la résolution ne peut pas être demandée contre les créanciers de l'acheteur aussi-bien que contre lui-même : au contraire, par ces mots, si l'acheteur est en danger de perdre la chose et le prix, l'art. 1655 indique assez que c'est précisément pour empêcher que l'immeuble devienne la proie des créanciers de l'acheteur, au préjudice des droits du vendeur, que la résolution doit être ordonnée de suite.

L'argument que puise l'intimé dans l'art. 19 de la loi du 11 brumaire, sur les hypothèques, tient à une confusion d'idées qui disparaît à la lueur d'une observation fort simple. Car il faut bien distinguer l'action hypothécaire ou l'action

en paiement du prix d'une chose, de l'action en revendication de cette même chose. Sans doute si le vendeur, après. avoir souffert l'expropriation de l'immeuble, se présentait à l'ordre et prétendait se faire colloquer à raison de son prix, par préférence aux autres créanciers inscrits de l'acheteur, il est évident que ceux-ci seraient fondés à lui dire « « Vous n'avez pas veillé à la transcription de votre contrat ; au défaut de l'inscription d'office qu'aurait dû faire le conservateur, vous n'avez pas suppléé par une inscription directe, que vous pouviez prendre vous-même : donc vous n'avez pas conservé votre privilége de vendeur; donc vous ne pouvez venir dans l'ordre qu'après les créanciers hypothécaires régulièrement inscrits. » Mais telle n'est pas l'hypothèse actuelle; ce n'est point l'action en paiement de son prix qu'exerce le vendeur : c'est la résolution du contrat qu'il poursuit ; il la poursuit, cette résolution, et en vertu du pacte commissoire inséré dans l'acle du 1er floréal, et en vertu de l'art. 1655 du Code civil, qui, même indépendamment de cette clause irritante, veut que la résolution de la vente soit prononcée de suite toutes les fois que le vendeur court le risque de perdre la chose et le prix ; et ce risque, à l'égard des sieurs et dame Plaidieux, est bien imminent, puisque l'effet principal de l'expropriation serait de les dépouiller de tous droits et sur la maison et sur son prix.

En définitive, si les vendeurs se présentaient comme simples créanciers de leur prix, pas de doute que, pour la conservation de leur privilége, ils eussent dû prendre inscription sur l'immeuble dont il s'agit; mais cette formalité leur est inutile lorsqu'ils revendiquent un droit de propriété qu'ils n'ont jamais perdu, ne l'ayant aliéné que sous une condition qui n'a pas été remplie. A défaut de paiement au temps convenu, le pacte commissoire opère de plein droit la résolution du contrat, et fait, comme le pacte de rachat, rentrer l'immeuble dans les mains du propriétaire, franc et quitte de toutes charges. Donc le tribunal de Rouen, en ju

geant contre ces principes, a commis une erreur évidente, que la Cour s'empressera sans doute de réparer.

L'intimé répliquait : Le contrat du 1er floréal est parfait, puisque l'on y trouve les trois conditions requises par la loi, res, pretium et consensus. Donc la propriété a été transmise dès l'instant même à l'acquéreur; donc l'acquéreur devenu propriétaire a pu utilement hypothéquer l'immeuble aux engagemens contractés avec les tiers auxquels les charges particulières du contrat sont absolument étrangères, parce que c'est, à letir égard, res inter alios acta. Tout le raisonnement des adversaires vient de la confusion qu'ils font des principes sur la nullité de la vente avec ceux touchant la résolution du contrat de vente. Si, par exemple, le contrat est nul pour défaut de consentement, de capacité, ou pour toute autre cause, alors l'immeuble rentre indemne dans les mains du vendeur, parce que, dans ce cas, le vice radical dont le contrat était infecté dès l'origine fait que véritablement il n'y a pas eu de vente; mais la résolution du contrat, pour l'inexécution de l'une ou de plusieurs des conditions y exprimées, n'empêche pas que le contrat n'ait été parfait dès le principe, que la propriété n'ait été transmise à l'acheteur : en sorte que celui-ci, dans l'intervalle de la tradition à la résolution, a bien réellement eu le droit de l'hypothéquer à ses créanciers personnels, au prejudice même du vendeur. Peut-être sous l'ancienne jurisprudence aurait-on pu taxer ce raisonnement d'exagération, et lui opposer, comme font les adversaires, la doctrine contraire professée par Pothier. Mais cette doctrine scientifique vient échouer contre les dispositions toutes simples de la loi du 11 brumaire, qui, mettant dans une harmonie parfaite et les droits des vendeurs et les intérêts des tiers, ont assujetti les uns et les autres à diverses formalités conservatrices.

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S'agit-il du vendeur, à qui tout ou partie du prix reste dû, ou certaines prestations qui en tiennent lieu? Alors, pour conserver son privilége sur l'immeuble, l'art. 29 l'oblige soit

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