mandement du 4o bataillon du régiment de Tomsk, soutenu par les Cosaques, refoula de nouveau les Turcs vers leurs barques, et passa au fil de la baïonnette une partie d'entre eux à qui la retraite vers la rive avait été coupée. Le rapport ajoute que les Turcs, ayant reçu des renforts, se maintenaient avec opiniâtreté, quand le lieutenant-général Soümonoff lança contre eux une colonne d'attaque. A midi, il ne restait plus un Turc devant Jourja. Les tentatives contre Slobodzeï et Maloude-Joss ne furent pas moins infructueuses. Le 10 février, il ya eu une rencontre sanglante à Oltenitza, près du bâtiment de la Quarantaine. Les Turcs se sont retirés dans l'île. La Gazette de Cronstadt, qui annonce ce fait, dit en outre que le 9 et le 10 on s'est aussi battu à Braïla. Enfin on écrit de lassy que les régiments du corps d'Osten-Sacken, qui avaient établi leurs quartiers d'hiver er dans la Moldavie, se sont mis en marche pour le Danube. Les démonstrations d'enthousiasme patriotique ne se ralentissent pas à Saint-Pétersbourg. D'après ce qu'on mande à la Bærsenhalle, les familles les plus riches de cette capitale ont offert à l'empereur d'organiser chacune, à ses frais, un régiment d'infanterie. Il va sans dire que l'autorisation a été accordée : les donateurs jouiront de la faculté de nommer les officiers. Un ukase impérial vient de rappeler tous les soldats de marine qui étaient en congé. DERNIÈRES NOUVELLES. Le traité, annoncé d'avance, entre la Porte ottomane, la France et l'Angleterre, vient d'être signé. 100 millions de piastres (20 millions de franes) ont été avancés au gouvernement turc par le Scheik-ul-Islam. On annonce aussi que des commandements actifs sont donnés dans l'armée du Danube à des officiers anglais et français, et que le général Guyon, dont l'activité et la prudence ont seules réparé les échecs des Turcs en Asie, est nommé chef d'état-major du génie dans l'armée arménienne. Jusqu'ici les étrangers ne pouvaient obtenir de grades en Turquie sans abjurer la foi chrétienne. Des dépêches importantes sont publiées par le Times. On va voir que le mouvement grec prend une extension alarmante : Vienne, le 26 février. Les insurgés ont pris la citadelle d'Arta. On dit que Prevesa a été pris aussi par eux. Une insurrection a éclaté à Grybos, dans le Négrepont; elle a été aussi sérieuse que celle d'Albanie. Deux généraux grecs et plusieurs officiers d'état-major ont rejoint les insurgés. Le gouvernement grec redoute une grande désertion dans l'armée. Il a été adopté des mesures de précaution. Saint-Pétersbourg, le 15 février. Le prince Paskéwitsch est nommé au commandement en chef de l'armée 1 du Danube. L'ordre a été envoyé à l'escadre russe de ne rechercher ni d'éviter une collision avec les escadres alliées. On a reçu, par la voie de Malte, un document qui se rapporte au mouvement insurrectionnel des populations grecques de l'Albanie. Ce document a une importance qui sera comprise aisément; aussi devons-nous le citer, en prévision des événements dont il est le prélude : Proclamation. Nous soussignés, habitants de Radovitz, province d'Artas, opprimés par les énormes impôts qui pèsent sur nous, indignés des outrages faits aux jeunes filles de notre pays par les musulmans, nos conquérants sauvages et incapables de toute civilisation, nous reprenons la guerre de la liberté que nous avons faite en commun en 1821, jurant, au nom du Très-Haut et de notre sainte patrie, que nous ne déposerons point les armes pour quelque motif que ce soit avant d'avoir reconquis notre liberté. En commençant cette guerre, nous espérons exciter en notre faveur la sympathie de tous les Grecs libres, nos frères, et la sympathie de ceux qui gémissent sous le joug ottoman; nous espérons qu'ils prendront comme nous les armes pour continuer la défense de notre cause commune, combattre pour la foi et pour la patrie, et recouvrer nos droits imprescriptibles. Notre guerre est sacrée, elle est juste; personne, en considérant l'énor mité du joug qui pèse sur nous, et en reconnaissant le droit des nations, ne pourra nous blâmer ni élever la voix en faveur de notre cruel tyran et du croissant qu'on a placé sur nos temples sacrés. Hatez-vous donc, frères, de prendre part à cette œuvre commune; secouez le joug de la tyrannie, et proclamez avec nous, devant Dieu et devant le monde entier, que nous combattons pour la patrie, et que Dieu protége les chrétiens! (Suivent les signatures.) 15 janvier 1854. Serment.-Je jure sur le saint Evangile, sur la Trinité et sur le crucifix que ces armes, que je prends aujourd'hui, je ne les poserai pas avant d'avoir chassé du pays de mes pères les Tures mes tyrans, et d'avoir rendu la li berté à ma patrie. Je jure encore devant le Très-Haut de défendre le drapeau de ma génération et de verser pour mes compagnons, s'il le faut, la dernière goutte de mon sang! La Compagnie anglo-continentale nous apprend, par une dépêche particulière, qu'une manifestation russe, bientôt réprimée par le gouvernement, a eu lieu à Athènes. Par suite, le préfet de police a été destitué. On avait cru devoir renforcer les troupes de la frontière. Plusieurs navires de guerre anglais ont reçu l'ordre de se rendre de Malte au Pyrée où ils resteront en station. Ce qui prouve combien cette nouvelle phase du conflit oriental préoccupe les gouvernements européens, ce sont les lignes suivantes de la Correspondanve autrichienne : Les plus récentes nouvelles ne laissent pas de doute que l'insurrection se propage sur les frontières de Grèce. Cela est déplorable et vient ajouter aux complications de la question d'Orient. L'insurrection grecque, si elle n'est pas réprimée à temps, peut devenir dangereuse pour les intérêts conservateurs de l'Europe. Lorsque l'organe officiel du gouvernement français condamne les mouvements insurrectionnels en général, et en particulier celui de Grèce, il a la complète approbation de l'Autriche. Les sentiments exprimés dans le Moniteur s'appliquent à toutes les éventualités et à toutes les phases par lesquelles peut passer cette question d'Orient, chargée de mauvais présages. Voici d'autres dépêches publiées par la télégraphie privée (Havas): Constantinople, 15 février. Un convoi portant 10,000 hommes de l'armée turque est prêt à partir pour Batoun. Le froid, qui a augmenté, a ralenti partout les hostilités. Les Russes cherchent à conclure un traité d'alliance avec les Afghans contre l'Angleterre; Khiva résiste. Toulon, 27 février. On prépare des bateaux à vapeur pour transporter plusieurs régiments de cavalerie. On travaille à l'arsenal nuit et jour. De ce qu'on vient de lire il faut tirer la conséquence que la nouvelle de la prise de Khiva était prématurée. Cependant, ce matin encore l'Indépendance belge la confirme, d'après une lettre de Constantinople du 15 février, et ajoute que le khan de Khiva et ses vizirs se sont retirés à Boukhara. Lord Raglan, dit le Morning-Post, accompagné de sir Baldwin Walker et de lord de Ross, a quitté Londres dimanche soir et est en ce moment à Paris. L'objet de son voyage serait de s'entendre avec les ministres français sur le meilleur plan de campagne à adopter en Turquie pour les forces combinées. Les autorités anglaises ne négligent rien pour assurer la cordialité entre les troupes françaises et le contingent que l'Angleterre envoie en Orient. Ainsi, l'un des vétérans de l'armée britannique, sir Harry Smith, vient d'adresser au 93 régiment d'highlanders, au moment de son embarquement à Plymouth, des paroles qui doivent être recueillies : « Il est surtout, a-t-il dit, un point que je tiens à vous recommander, c'est d'être bons camarades pour nos braves alliés les Français. Je dis braves et avec connaissance de cause, car nous les avons eus jadis pour adversaires. Maintenant, vous allez combattre à leurs côtés, et mieux vaut les avoir pour auxiliaires que tous les autres soldats du monde, car ils ne vous abandonneront jamais! « J'ai encore une recommandation à vous faire. Nous autres soldats, nous sommes bien pourvus de tout par notre pays, mais les malheureux habitants des contrées où l'on fait la guerre sont toujours dans un état de détresse; que pas un d'entre vous ne lève le bras contre les gens du pays, protégez au contraire les faibles contre les forts. » Alfred DES ESSARTS. DES AUMONIERS DE LA FLOTTE ET DE L'ARMÉE Sous ce titre, nous lisons dans la Gazette de Lyon un article dont nous reproduisons les principaux passages en associant vivement nos vœux à ceux que cette excellente feuille exprime. Charles de RIANCEY. La guerre est imminente; les armées de la France vont prendre de nouveau le chemin de l'Orient, où tant de glorieux combats ont déjà signalé leur passage. Il y a un an bientôt que la flotte les a devancées. Nos marins sont partis avec le généreux espoir de soutenir l'honneur du pavillon national, et de disputer à l'Angleterre la réputation d'avoir les meilleurs vaisseaux du monde. Mais, de plus, ils sont partis avec l'espoir consolant de ne pas mourir comme des enfants déshérités de la fille aînée de l'Eglise, et de rendre leur dernier soupir, si la patrie exigeait d'eux ce sacrifice, entre les bras du prêtre qui ajouta à leur titre de Français le titre de chrétiens. Des aumoniers ont été établis à bord de nos vaisseaux, et tout récemment l'aumônier général de la flotte a rendu compte, dans un rapport que nous avons publié, des fruits heureux que leur mission avait produits. Mais nos régiments partent sans que des prêtres les accompagnent. Pourquoi donc cette différence entre les troupes de marine et les troupes de terre? Pourquoi nos matelots auraient-ils le privilége exclusif de recevoir à leurs derniers moments les secours de la religion? Longtemps il n'y eut pour notre armée d'Afrique d'autre culte que celui de l'honneur et du drapeau. Il a bien fallu pourtant finir par y joindre le culte de Dieu, et donner des aumôniers à nos colonnes expéditionnaires. Ceux qui tombaient sous le fer des Arabes ou les rigueurs du climat, mouraient avec trop de regrets, et les Bédouins avaient trop de mépris pour des gens qui vivaient sans aucune apparence de pratique religieuse. Les Russes affectent d'entreprendre aujourd'hui une guerre sainte, et il n'est sorte de démonstrations religieuses que le peuple et les soldats ne fassent avec une bonne foi qui ne saurait être mise en doute; les régiments anglais emmènent leurs chapelains avec eux; les corps réguliers et les rédifs musulmans se prosternent dans les mosquées avant de se mettre en campagne; et les troupes françaises seules iraient braver la mort comme la bravent les hommes qui ne croient absolument à rien !... Ce serait d'un effet aussi fâcheux sur nos amis que sur nos ennemis; ce serait cruellement démentir les actes de la France pour soutenir sa prépondérance en Orient, et donner une triste idée au monde des sentiments de foi d'une nation qui a réclamé si souvent l'héritage des croisés. Mais on ne veut pas d'une pratique officielle du culte; on ne veut plus mener les régiments ni à confesse ni à la messe. Soit. Mais ce n'est pas une raison pour priver des consolations du prêtre ceux qui les réclament et veulent mourir en chrétiens. La France doit les leur procurer avec autant de sollicitude que la nourriture et le vêtement. Elle le doit pour eux et pour leurs familles qui éprouveraient un chagrin doublement cruel, si elles apprenaient qu'ils fussent morts sans que la main d'un prêtre les eût bénis. Eh quoi! dans les armées que la question d'Orient met aux prises, ( l'erreur a ses ministres, et seule la vérité orthodoxe n'aurait pas les siens ?... Que le gouvernement fasse donc pour nos régiments ce qu'il a cru devoir faire pour nos équipages de ligne! Qu'il adresse un appel à nos évêques et leur demande des volontaires qui s'enrôlent pour suivre nos troupes dans ces contrées où nous avons combattu les vaillants combats de la Foi, et où nous reparaîtrions pour protéger le croissant de Mahomet, sans qu'aucun signe de notre religion indiquât la nature de nos croyances! A cet appel, il accourra des prêtres pleins de zèle et de dévouement, qui s'estimeront aussi heureux d'aller exposer leur vie pour nos soldats que ceux-ci peuvent s'estimer heureux de l'exposer pour la France, et qui n'auront pas besoin de la discipline et des règlements militaires pour se faire aimer et respecter dans les camps. Th. Mayery. LETTRE PASTORALE SUR L'ENSEIGNEMENT PAROISSIAL ET MANDEMENT DE Mgr L'ARCHEVÊQUE DE PARIS POUR LE CARÊME DE 1854. L'une des préoccupations les plus constantes de Mgr l'Archevêque de Paris depuis qu'il a été appelé à gouverner ce grand diocèse, est d'étendre et d'améliorer l'enseignement religieux. Pénétré de la pensée que, s'il y a eu des siècles plus incrédules que le nôtre, il n'y en a pas eu où l'ignorance de la Religion fût plus étendue, plus universelle, le vénérable Prélat consacre tous les efforts de sa sollicitude pastorale à guérir un mal dont il voit les ravages s'étendre dans le centre même du pays le plus fier de sa civilisation et de ses lumières. C'est à ce but que se rapportent l'extension donnée à la maison des Carmes, fondée par Mgr Affre, de sainte et héroïque mémoire, l'institution des conférences du cas de conscience, l'examen annuel des jeunes prêtres, la communauté des chapelains de Sainte-Geneviève, etc. Il est évident, en effet, que le remède de l'ignorance en matière de Religion est dans les mains du Prêtre et dans le zèle de ceux qui ont charge d'âmes et mission pour enseigner; et, par conséquent, le moyen le plus prompt et le plus efficace de guérir ce mal, principe de tous les autres, est de former et de préparer aux peuples des prédicateurs pleins de zèle et de science. La Lettre pastorale et le Mandement de Mgr l'Archevêque complètent les mesures qu'il a prises jusqu'à ce jour pour améliorer l'enseignement religieux dans les paroisses de Paris. En vertu de ce Mandement, quatre nouvelles conférences sur la Religion seront ajoutées aux conférences de Notre-Dame qui existent déjà. Deux de ces conférences seront faites dans les églises de Saint-Sulpice et de Saint-Eustache; les deux autres, spécialement destinées aux faubourgs, seront faites, l'une à l'église Sainte-Marguerite pour le faubourg Saint-Antoine, et l'au |