Sur l'appel incident: Attendu que par acte sous seing privé des 4 et 10 décembre 1901 enregistré, Auguste Mallet, déclaré en faillite avec report au 28 septembre 1901, a consenti au profit de Louis et Victorine Carpentier, en garantie d'une somme de 10.000 fr. restant due sur un capital plus important, la délégation de trois polices d'assurances, savoir: 10 Une assurance de 10.000 fr. sur la vie, par lui souscrite à la Nationale les 17 et 21 mars 1876, payable à son décès, à sa femme et, en cas de prédécès de celle-ci, à ses héritiers ou à son ordre, police dont le capital a été réduit, faute de versements de primes, à 1.114 fr. ; 20 Une assurance de 10.000 fr. souscrite aux Assurances générales le 15 mai 1876, payable lors de son décès à sa femme ou à ses enfants, nés ou à naître ; 3o Une assurance de 10.000 fr. souscrite à la Nationale les 24 et 26 octobre 1877, payable lors de son décès à sa femme, ou à ses héritiers ou à son ordre ; Attendu qu'Auguste Mallet étant décédé le 9 février 1902, les sieurs et demoiselle Carpentier ont, en vertu de cette délégation, touché des Compagnies ci-dessus, les 27 mai, 4 et 7 juin 1902, une somme de 13.817 fr. 40; qu'il s'agit de savoir si le syndic, ainsi qu'il le soutient, est fondé à obtenir, en vertu des articles 446 et 447 du Code de commerce, le rapport des 13.817 fr. 40 reçus du failli postérieurement à la date de la cessation des paiements; Attendu que l'assurance sur la vie au profit d'une personne déterminée constitue une stipulation pour autrui régie par l'article 1121 du Code civil, que le stipulant peut révoquer ou transférer à un tiers autre que le bénéficiaire primitif tant que celui-ci ne l'a pas acceptée; Attendu, en fait, que jamais les libéralités résultant pour la dame Auguste Mallet des contrats sus-énoncés n'ont été, à aucun moment et avant le transport des 10 et 11 décembre 1901, l'objet, de la part de cette dernière, d'une acceptation expresse ou tacite ; que le transport a été consenti par Auguste Mallet seul, en dehors de toute participation de sa femme; que cette dation en nantissement, dans les conditions où elle se produisait, à l'heure où, réunissant dans un suprême effort tous les capitaux dont il pouvait disposer afin d'arrêter des poursuites en déclaration de faillite, témoigne de sa volonté d'appliquer au paiement de ses dettes et à son intérêt exclusif les capitaux à provenir des assurances contractées, et, partant, de révoquer la stipulation primitivement faite au profit de sa femme, et d'ailleurs non encore acceptée par cette dernière ; que, pour apprécier s'il y a eu révocation de la part du stipulant, c'est moins la nature de l'acte consenti que la pensée et la volonté de celui qui l'a passé qu'il faut envisager; qu'en les remettant en nantissement, Auguste Mallet n'a fait qu'user de la faculté que lui laissaient les contrats d'assurances, d'en disposer personnellement à son profit; Attendu que la signature donnée par la dame Mallet les 27 mai, 4 et 7 juin 1902, au bas de la quittance, et postérieure de plus de dix-sept mois au transport des 10 et 11 décembre 1901, ne peut être considérée que comme une mesure de prudence exigée par les Compagnies ; Par ces motifs, statuant sur les appels respectifs, dit qu'il a été bien jugé en ce que le jugement entrepris a condamné Carpentier à rapporter la somme de 5.000 fr. avec intérêts judiciaires; réformant pour le surplus, le condamne en outre à rapporter la somme de 13.817 fr. 40 avec intérêts, etc. Du 25 novembre 1903. 1re Chamb. civ. Prés., M. Paul, 1er prés.; Minist. publ., M. Bossu, avoc.-gén.; Avoc., Mes Dubron et Devimeux; Avou., Mes Delajus et Druelle. Douai. 1r Chamb. civ., 7 décembre 1903 1° ACCIDENTS DU TRAVAIL.-RENTE ALLOUÉE.- CAPITAL DE LA RENTE. DEMANDE DU VERSEMENT DU QUART EN ESPÈCES. PROCÉDURE A SUIVRE.-JURIDICTION GRACIEUSE. CONTRADICTEUR LÉGITIME. MINISTÈRE PUBLIC. PATRON. HORS DE CAUSE. MISE CAISSE NATIONALE DES RETRAITES. DÉPENS A LA CHARGE DE L'OUVRIER. PRÉLÈVEMENT SUR LE CAPITAL ALLOUÉ. 2o APPEL.-DÉFAUT DE CONCLUSIONS EN PREMIÈRE INSTANCE. IRRECEVABILITÉ. 1o La loi n'a pas déterminé la procédure à suivre pour instruire la demande que forme l'ouvrier bénéficiaire d'une rente viagère pour incapacité permanente, après expiration des délais de révision, en vue de se faire attribuer le quart en espèces du capital nécessaire à l'établissement de la rente; mais il résulte des travaux préparatoires que la Chambre du Conseil doit être saisie par une simple requête, sur laquelle il peut être stalué dans les deux ou trois jours, sans autre contradicteur que le ministère public; les décisions en pareille matière sont des actes de juridiction gracieuse, et il n'y a lieu de mettre en cause, ni le patron, ni la Caisse nationale des retraites. (Art. 9, loi du 9 avril 1898). L'ouvrier doit supporter les dépens d'une instance de ce genre, introduite exclusivement dans son intérêt, et ces dépens sont à prélever sur le capital alloué, qui n'a point le caractère alimentaire de la rente. 2. On ne peut interjeter appel à l'encontre d'une partie contre laquelle on n'a pas conclu en première instance; dès lors, si deux défendeurs se sont bornés, devant les premiers juges, à résister à la demande d'une tierce partie, l'appel formé par l'un de ces plaideurs contre l'autre doit être déclaré irrecevable. (Caisse nationale des retraites C. Gay et Delattre frères) A la date du 21 juillet 1899, Charles Gay, ouvrier tulliste chez MM. Delattre frères, fabricants de tulles à Calais, était victime d'un accident du travail qui eut pour conséquence une incapacité permanente partielle de travail. Il actionna ses patrons en paiement de la rente prévue par la loi du 9 avril 1898, et obtint leur condamnation au paiement d'une rente annuelle de 500 fr. Une fois écoulés les délais de révision, l'ouvrier blessé usa du droit que lui conférait l'article 9 de la loi du 9 avril 1898, et demanda que le quart du capital nécessaire à l'établissement de sa rente, soit 2.101 fr. 25, lui fût remis en espèces, la rente devant continuer à s'exercer, mais pour un arrérage réduit aux trois quarts de l'arrérage primitif, soit 375 fr. par an. L'ouvrier forma son action devant le Tribunal civil de Boulogne, contre ses patrons MM. Delattre frères, et contre la Caisse des Dépôts et consignations, qui avait reçu, le 9 avril 1903, pour la Caisse nationale des retraites, l'entier capital assurant le service de la rente. MM. Delattre frères et la Caisse nationale demandèrent leur mise hors de cause; le Tribunal, par jugement du 3 juillet 1903, mit hors d'instance MM. Delattre frères, mais maintint en cause la Caisse des Dépôts et consignations. Le dispositif de ce jugement était libellé ainsi qu'il suit : JUGEMENT (par extrait) LE TRIBUNAL; - Joint les causes inscrites; statuant au fond, met les sieurs Delattre frères hors de cause, sous la réserve de ce qui sera dit ci-dessous quant aux frais; dit que dans la huitaine de la signification du présent jugement, la Caisse des Dépôts et consignations sera tenue de faire verser au sieur Gay, par M. le Receveur des finances de l'arrondissement de Boulogne-sur-Mer, son préposé, la somme de 2.101 fr. 25, représentant le quart du capital versé le 9 avril 1903 à la Caisse nationale des retraites pour la constitution de la rente viagère de 500 fr. dont ledit sieur Gay est le titulaire; dit que le versement ordonné sera fait 10 sur la production d'une expédition du présent jugement, et 20 sur la remise du titre de 500 fr. actuellement entre les mains du demandeur; dit qu'il lui sera remis en échange un nouveau titre de 375 fr. de rente, avec TOME LXI 2 arrérages du 9 avril 1903, sous réserve de retenues sur les 2.101 fr. 25 dont s'agit pour la Caisse nationale des retraites, de la différence entre les arrérages correspondants à la rente primitive et ceux de la rente déduite courus depuis la date préindiquée jusqu'au dernier paiement fait sur le pied de la rente de 500 fr.; fait masse des dépens; dit que pour les motifs prérappelés, ceux-ci demeureront à concurrence d'un tiers à la charge de Delattre frères; que le surplus sera supporté par le demandeur, dans l'intérêt exclusif de qui ils ont été exposés. Du 3 juillet 1903. Trib. civ. de Boulogne. Prés., M. Debs. Sur appel de la Caisse nationale des retraites, la Cour, réformant partiellement le jugement entrepris, statua dans les termes suivants : ARRÊT LA COUR;-Attendu que la Caisse nationale des retraites pour la vieillesse, poursuites et diligences du directeur général de la Caisse des Dépôts et consignations, a interjeté appel d'un jugement du Tribunal civil de Boulogne-sur-Mer, en date du 3 juillet 1903, qui s'est refusé à la mettre hors de cause et a décidé qu'elle a été valablement appelée à intervenir dans l'instance engagée par l'ouvrier Gay à l'effet d'obtenir, conformément à la loi du 9 avril 1898, la délivrance du quart du capital nécessaire à l'établissement de la rente à lui allouée en suite de l'accident dont il a été victime le 21 juillet 1899, au cours de son travail chez Delattre frères, ses patrons; Sur l'appel contre Delattre frères : Attendu qu'en première instance, Delattre frères et la Caisse des retraites. se sont bornés à résister à la demande de l'ouvrier Gay, et n'ont pas pris de conclusions l'un contre l'autre ; Attendu que l'on ne peut interjeter appel contre une partie contre laquelle on n'a pas conclu en première instance; que l'appel de la Caisse des retraites contre Delattre frères doit être déclaré irrecevable; |