le lieutenant civil pourra ordonner que les parties comparaîtront le jour même dans son hôtel, pour y être entendues et être par lui ordonné par provision ce qu'il esCortimera juste. Cet édit n'a fait que confirmer ou régulariser un usage introduit bien antérieurement, usage que nous retrouvons encore dans cette assignation verbale, appelée clameur de haro, à laquelle les habitans de l'ancienne Normandie obéissaient avec une respectueuse soumission. Les règles des référés sont simples et faciles. D'après l'article 806 du Code de procédure civile, on ne doit prendre cette voie que dans les cas d'urgence, ou lorsqu'il s'agit de statuer provisoirement sur des difficultés relatives à l'exécution d'un titre exécutoire ou d'un jugement, Si, pour introduire un référé, il n'était pas nécessaire d'obtenir préalablement la permission du juge, on pourrait, sous cette dénomination, porter à l'hôtel du président ou à l'audience des référés dcs contestations qui devraient être portées à l'audience ordinaire du tribunal. Il n'est donc pas douteux que toute personne qui veut former un référé doit présenter requête au président pour en obtenir la permission, et qu'en vertu de cette permission, assignation en la forme ordinaire, et non par acte d'avoué à avoué, doit être donnée à la partie contre laquelle le référé s'introduit. C'est ce qui s'évince des art. 72 et 808 du Code de procédure civile. (Voy. Pigeau, Procedure civile, t. 1, p. 110.) Voici l'espèce dans laquelle ces principes ont été appliqués. Par arrêt rendu en la deuxième chambre de la Cour d'appel de Paris, entre le sieur Lucet et la dame veuve de Grammont, le 1er avril 1806, le sieur Lucet avait été condamné aux quatre cinquièmes des dépens de la contestation qui s'était élevée entre eux. Le coût de l'arrêt était en totalité à la charge du sieur Lucet. Ce dernier étant décédé, la dame de Grammont a fait procéder à la liquidation des dépens, contradictoirement avec la dame veuve Lucet, comme tutrice de ses enfans mineurs. Le 31 décembre 1807, la Cour a délivré, au profit de la dame de Grammont, contre la dame Lucet, comme tutrice de ses enfans mineurs, un exécutoire de 2,061 fr., lequel a été signifié à cette dernière, par exploit du 8 janvier 1808, avec commandement d'en payer le montant. Par autre exploit du 25 juillet suivant, la dame de Grammont a fait faire itératif commandement à la dame Lucet, en sa qualité de tutrice, de lui payer le montant de l'exécutoire susdaté, si mieux elle n'aimait lui justifier 1° de l'acceptation légale, et sous bénéfice d'inventaire qu'elle avait dû faire, en conformité de l'art. 461 du Code civil, pour ses enfans mineurs, de la succession de leur père; 2o de lui présenter préalablement le compte de bénéfice d'inventaire que ses enfans mineurs doivent aux créanciers de la succession, et par suite le compte de tutelle qu'elle doit à ses enfans, dont les créanciers exercent les droits, comme dépositaire et administratrice de l'actif mobilier ct immobilier de ladite succession bénéficiaire; 3° de lui communiquer toutes les pièces justificatives desdits comptes, avec déclaration que, faute de le faire dans la huitaine, la dame Lucet serait contrainte au paiement dudit exécutoire sur ses biens personnels, conformément à l'art. 803 du Code civil. La veuve Lucet ne déférant point à ce commandement, la dame de Grammont en fit faire un nouveau, qui bientôt fut suivi d'une saisie-exécution, à laquelle la veuve Lucet forma opposition. La dame de Grammont provoqua ensuite un référé pour faire ordonner la continuation de ses poursuites. De son côté, la dame Lucet en provoqua un autre pour faire déclarer nulle la saisie-exécution formée contre elle; mais au lieu d'obtenir, avant tout, la permission du juge, et d'assigner personnellement la dame de Grammont, comme celle-ci avait fait à son égard, elle la fit citer devant le président tenant les référés, par une simple requête d'avoué à avoué. La dame de Grammont soutint que ce référé était irrégulièrement introduit, et que par conséquent il y avait seulement lieu de statuer sur le sien. Le 7 juin 1809, ARRÊT de la Cour d'appel de Paris deuxième chambre, MM. Louis et Moléon avocats, par lequel : ↑ « LA COUR, Sur les conclusions de M. Agier, conseiller-auditeur, pour le procureur-général, Considérant que le référé dont il s'agit a été introduit sans permission du juge et sans assignation, - DECLARE la procédure nulle, et condamne la partie de Louis (veuve Lucet) aux dépens. » COURS D'APPEL DE ROUEN ET DE COLMAR. Les notaires sont-ils responsables des nullité's qu'ils commettent dans leurs actes? C. civ., art. 1382 et 1383. Cette question a été résolue négativement par la Cour d'appel de Rouen, et affirmativement par celle de Colmar. - Elle est non moins délicate qu'importante; elle a fait l'objet d'une controverse sérieuse, non seulement devant les Cours dont la jurisprudence n'est point uniforme à cet égard, mais encore parmi les jurisconsultes. Quelques arrêts ont jugé que les notaires n'étaient responsables que de leur dol, de leur fraude, ou des fautes équipollentes au dol; d'autres ont décidé qu'ils étaient généralement soumis aux dommages et intérêts résultans de la nullité de leurs actes. La même différence existe dans l'opinion des auteurs qui ont traité cette question. Mais un arrêt de la Cour de cassation, du 14 mai 1822, est venu répandre une grande lumière sur la difficulté qu'elle faisait naître, en décidant que « l'article 68 de la loi du 25 ventôse an II n'attachait pas au seul cas de dol et de fraude les dommages et intérêts dont les notaires peuvent être tenus vis-à-vis des parties pour lesquelles ils rédigent des actes, mais qu'il les fait encore dépendre de l'omission de certaines formalités, préjudiciable à leurs cliens; et que ces mots, s'il y a lieu, employés dans, cet article, laissent aux tribunaux le pouvoir discrétiommaire de déclarer des dommages et intérêts doivent être accordés ou refusés. >> – Voyez cet arrêt, qui est rapporté au tom. 2 de 1823, p. 180, et les observations dont il est précédé. PREMIÈRE ESPÈCE. LE SIEUR P...., C. LE SIEUR AUBRY. Le 12 frimaire an 13, la dame Thyrou fit son testament, par lequel elle institua le sieur Aubry son légataire universel. Le notaire rédacteur omit d'y énoncer la mențion expresse de la lecture en présence des témoins: cette circoustance devint pour les héritiers de la testatrice un motif de provoquer la nullité de l'acte. Le légataire universel, assigué à cet effet devant le tribunal civil de Neufchâtel, mit le notaire en cause, et conclut contre cet officier à la garantie; il articula et offrit même de prouver qu'il avait été présenté au notaire un modèle ou formule d'acte que celui-ci n'avait pas voulu suivre, en disant que chacun devait faire son mé tier, et que si le testament n'était pas régulier, ce serait lui qui deviendrait garant. Le 21 janvier 1808, jugement du tribunal de Neufchâtel, qui déclare le testament nul pour défaut de la mention susdite, et prononce sur la demande en garantie dans les termes suivans: — « Considérant qu'en principe général, celui qui, par sa faute ou son imprudence, cause un préjudice à autrui, est tenů de le réparer; Considérant qu'aucune loi n'a affranchi les notaires de cette obligation; que celle du notariat les y soumet expressément dans plusieurs circonstan ces; que le Code de procédure, par une disposition générale, y assujettit également tous les officiers ministériels, ce qui comprend les notaires comme les avoués et les huissiers; Considérant que les expressions employées dans ces diverses lois, s'il y a lieu, suivant l'exigence, autorisent les juges à décider, d'après la nature des circonstances, si la faute est assez grave pour qu'il y ait lieu à responsabilité et à condam nation de dommages et intérêts, ou si la faute est tellement légère qu'on doive la rejeter sur la faiblesse et l'imperfection de la nature humaine; Considérant, dans l'espèce parti ulière, que le vice de rédaction qui rend le testament nul ourrait être réputé faute légère si l'on se bornait à ne voir que le testament; mais que cette faute serait grave s'il était rai qu'on eût présenté au notaire un modèle ou formule de édaction qu'il aurait refusé d'examiner et de suivre; qu'en onséquence la décision à intervenir dépend de la vérificájon de ce point de fait, dont la preuve doit être ordonnée ; - Considérant qu'on ne peut admettre le sieur Aubry à la preuve testimoniale du second fait articulé, que le notaire urait garanti la validité du testament, parce que ce serait admettre la preuve par témoins d'une obligation de valeur udéterminée et mauifestement supérieure à 150 fr.; - Le tribunal, avant faire droit, appointe ledit Aubry à prouver qu'un modèle ou formule de rédaction a été présenté audit Me P.... avant la confection du testament, et qu'il a refusé de s'y conformer, etc. » Sur l'appel, la cause a reçu de nouveaux développemens, Le notaire disait : Sous l'ancien régime, les lois, les ordonnances, ne contenaient aucune disposition pénale contre le notaire qui laissait glisser quelques irrégularités dans les actes de son ministère, parce qu'elles appartiennent à la fragilité de l'intelligence humaine, et que l'officier le plus insiruit n'est pas exempt de commettre des fautes, des inadvertances. L'ancienne jurisprudence n'était pas sur ce point plus. sévère que la loi; elle n'admettait la responsabilité des noLaires que dans le cas où l'erreur était si grossière, la faute tellement grave, qu'elles pouvaient être assimilées au dol ; on pourrait citer une foule d'arrêts rapportés parles auteurs, qui ont unanimement consacré ce point de jurisprudence, cette règle d'équité. Notre nouvelle législation n'est pas plus défavorable aux notaires : la loi du 25 ventôse an 11 prescrit à la vérité quelques formes essentielles, à l'inobservation desquelles elle attache la peine de nullité. Mais cette loi, qui d'ailleurs garde un silence absolu sur la responsabilité des notaires, cette loi n'a pas entendu parler des formalités propres aux testamens et prescrites par l'art. 972 du Code civil, puisque |