Informé, par suite de cet événement, de tout ce qui s'était passé en l'an 7 et en l'an 11 relativement à la métairie de Courcelle, le sieur Mary fait assigner le sieur Parent-Decurby devant le tribunal civil du Mans. Il soutient que l'adjudication de la métairie de Courcelle, du 21 pluviôse an 6, doit être exécutée selon sa forme et teneur, relativement à tous les acquéreurs qui y figurent ou leurs héritiers: en conséquence il invoque la nullité du prétendu acte de révocation du 17 ventôse an 7, fait en son absence ainsi qu'en celle de la demoiselle Rohée, et qui n'a jamais été notifié ni à l'un ni à l'autre. Le sieur Parent-Decurby répond que la demande du sieur Mary à fin d'annulation de l'acte révocatoire du 17 ventôse an 7, et d'exécution du procès verbal d'adjudication du 21 pluviôse an 6, ne peut être portée que devant l'autorité administrative. Il conclut en conséquence à ce que, sur ce point, le tribunal se déclare incompétent. Le 8 février 1808, jugement du tribunal civil du Mans, qui se déclare incompétent pour connaître de la validité ou de la nullité de l'acte de l'Administration centrale du département de la Sarthe, du 17 ventôse an 7. Le tribunal a considéré que, l'acte de révocation de la nomination du sieur Mary et de la demoiselle Rohée étant attaqué de nullité par le sieur Mary, c'est au conseil de préfecture du département de la Sarthe, qui, en vertu de la loi du 28 pluviôse an 8, est seul compétent pour connaître du contentieux des domaines nationaux, qu'il appartient de décider si l’Administration centrale de la Sarthe a pu recevoir l'acte de révocation du ventôse an 7, 17 et de prononcer si cet acte est valable ou s'il est nul, parce que, les pouvoirs administratif et judiciaire étant absolument distincts et séparés, les tribunaux ne peuvent ni confirmer ni annuler un acte administratif. Sur l'appel, ce jugement a été confirmé par arrêt de la Cour d'Angers, du 29 mars 1809. Pourvoi en cassation de la part du sieur Mary. Il fondait a demande sur ce que le tribunal de première instance et la Cour d'appel d'Angers s'étaient mal à propos déclarés incompétens. La contestation, suivant lui, devait être consilérée comme purement judiciaire, par cela seul que l'Etat 'y avait aucun intérêt. M le procureur-général Merlin, qui portait la parole dans a cause, a d'abord écarté le moyen du demandeur: il a dit qu'il n'était pas prouvé que l'Etat fût sans intérêt dans la conestation, et que, dans tous les cas, les tribunaux n'en seaient pas moins incompétens, puisqu'il s'agissait de l'interrétation d'un acte administratif. le M. Merlin a ensuite élevé d'office une question qui n'est pas sans intérêt: c'est celle de savoir si la Cour d'Angers auait dû surseoir au jugement de la question de compétence élevée devant elle, jusqu'à ce qu'il y eût été statué par gouvernement. Ce magistrat s'est prononcé pour la négative. Il a démontré que, lorsque le conflit n'est pas élevé par l'autorité administrative, c'est au juge dont une partie conteste la compétence à décider si, en effet, il est ou non compétent: Prætoris est enim æstimare an sua sit jurisdictio. (Loi 5, ff., de judiciis.) Du 25 octobre 1809, ARRÊT de la Cour de cassation M. Porriquet rapporteur, par lequel : : « LA COUR, - Attendu que, dans l'espèce, il s'agissait réellement de l'interprétation de deux actes émanés des corps administratifs en matière d'aliénation de biens nationaux, - REJETTE, etc. »> Nota. On a long-temps contesté le principe que, tant qu'il n'y a pas de conflit, le tribunal doit prononcer sur sa compétence. Plusieurs fois la Cour suprême a sursis à statuer sur des recours en cassation, jusqu'à ce que le gouvernement ait décidé qui, du pouvoir judiciaire ou de l'autorité administrative, devait connaître des matières sur lesquelles avaient été rendus les jugemens attaqués. Mais cette jurisprudence, contre laquelle M. Merlin s'était élevé sans succès, a été đểTome X. 48 puis ramenée aux vrais principes, qui veulent que tout jugë soit habile à prononcer sur sa compétence, par un avis du conseil d'Etat, du 5 novembre 1811. (Voy. Répert, de Jurispr., v Pouvoir judiciaire, §, no 16.) COUR DE CASSATION. L'art. 780 du Code de procédure civile est-il applicable à l'arrestation provisoire d'un étranger, ordonnée en vertu de l'art. 2 de la loi du 10 septembre 1807 ? (Rés. nég.) "* . En d'autres termes, l'ordonnance du président du tribunal civil qui autorise l'arrestation provisoire de l'étranger doit-elle être signifiée à celui-ci, avec commandement; un jour avant l'arrestation? (Rés. nég.) L'arrestation provisoire de l'étranger peut-elle étre ordonnée, lors même que le titre de créance est attaqué par la voie de l'inscription en faux principal, et qu'il a été sursis en conséquence à faire droit sur la demande ́en condamnation? (Rés. aff.) BEAUMONT-DIXIE, C. Lecourt. Le sieur Lecourt était porteur d'une lettre de change de 60,000 liv., tirée sur les sieurs Perregaux et compagnie, banquiers à Paris, et acceptée par le chevalier BeaumontDixie, Anglais, détenu comme ôtage en France. Le 15 avril 1808, jour de l'échéance de cette traite, le porteur la fit présenter aux sieurs Perregaux et compagnie, qui en refusèrent le paiement. -La traite fut protestée le lendemain 16 avril, et le protêt fut suivi d'une assignation donnée au chevalier Beaumont-Dixie, devant le tribunal de commerce de la Seine, pour se voir condamner au paiement des 60,000 livres qui formaient le montant de cette lettre de change. '. Le chevalier Beaumont-Dixie ne comparut pas sur cette assignation. Il intervint donc un premier jugement par délaut, auquel il se rendit opposant; et prétendant que la traile 'était que de 1,000 liv. tournois, et que, par une addition riminelle du mot soixante, on en avait fait une traite de aixante mille liv., il porta une plainte en faux principal. a Cour spéciale de Metz fut saisie de cette plainte. Dans cet état, le tribunal de commerce de Paris rendit, * 19 juillet 1808, un jugement ainsi conçu Vu la lettre e change dont il s'agit, représentée et à l'instant rendue t attendu que le défendeur 's'inscrit en faux relativement à somme mentionnée en ladite lettre de change; vu l'arcle 427 du Code de procédure civile, le tribunal, avant aire droit, renvoie devant les juges qui doivent connaître u faux argué par le défendeur, dépens réservés. » →→ Ce agement n'a pas été attaqué par le sieur Lecourt. L'instruction criminelle sur la plainte en faux se pouruivait à Metz, lorsque le sieur Lecourt présenta requête au résident du tribunal civil de Thionville; et, se fondant sur art. 2 de la loi du 10 septembre 1807, il demanda l'autoisation de faire arrêter provisoirement le chevalier Beaunont-Dixie, son débiteur. Le 10 septembre 1808, cette equête fut répondue d'une ordonnance portant que cet tranger serait constitué provisoirement prisonnier, sauf 'opposition, et aux risques, périls et fortune du requérant. Le chevalier Beaumont-Dixie, arrêté à Sarre-Louis, le 12 du même mois, déclara en référer au président.qui avait rendu l'ordonnance. Le 13, il comparut à l'audience de référé, et, après une discussion contradictoire, le président renvoya les parties à l'audience, l'ordonnance du 10 provisoirement exécutée. Le chevalier BeaumontDixie fut, en conséquence, écroué le même jour 13 sep tembre. La cause fut portée à l'audience; et, le 21, intervint jugement par lequel le tribunal maintint l'ordonnance de son président, si mieux n'aimait l'opposant consigner la somme répétée, ou donner bonne et suffisante caution. Le chevalier Beaumont-Dixie appela de ce jugement; et, devant la Cour d'appel de Metz, il argua l'emprisonnement de nullité, pour n'avoir pas été précédé du commandement prescrit par l'art. 780 du Code de procédure; il excipa du - sursis contradictoire ordonné par le tribunal de commere de Paris; il chercha, au surplus, à justifier le jugement qui avait prononcé ce sursis; et, pour cela, il cita l'art. 427 du Code de procédure, et les art. 8 et 336 du Code du 3 brumaire an 4. La Cour d'appel de Metz ne s'est arrêtée à aucun de ces griefs. Elle a pensé que les signification et commandement prescrits par l'art. 780 du Code de procédure n'étaient pas nécessaires, lorsqu'il s'agissait de l'arrestation provisoire autorisée par l'art. 2 de la loi du 10 septembre 1807, parce que cette mesure, sortant du droit commun n'est pas soumise à la règle générale, et qu'un commandement fait la veille serait, pour l'étranger débiteur, un avis de s'évader. Et, sur le fond, elle a considéré que le principe suspensif de l'action civile jusque après le jugement sur le faux n'est pas applicable à l'ordonnance qui a autorisé l'arrestation provisoire, cette ordonnance ne prescrivant, pas l'exécution du titre de créance argue de faux; que le chevalier Beaumont-Dixie, nonobstant sa détention, peut poursuivre sa plainte en faux; que, s'il prétendait que celui qui répète le montant de la traite est l'auteur du faux, alors seulement ce serait le cas pour lui d'invoquer les dispositions de la loi qui commandent de surseoir à statuer sur l'action civile jusque après le jugement sur le faux; qu'au surplus, il n'avait pas besoin de recourir à ces dispositions, 'puisque, par le jugement du tribunal de commerce de la Seine, les parties avaient été renvoyées par-devant les juges compétens pour connaître de la plainte en faux, et que, cette opposition n'étant pas jugée, elle suspendait nécessairement l'exécution du jugement par défaut. *En conséquence, la Cour d'appel a, par arrêt du 13 dctobre 1808, dit qu'il avait été bien jugé par le tribunal de première instance. : |