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DES

LOIS ET DES ARRÊTS,

EN MATIÈRE CIVILE, CRIMINELLE, ADMINISTRATIVE ET DE DROIT PUBLIC;

FONDÉ PAR J.-B. SIREY,

RÉDIGÉ, DEPUIS 1831,

PAR L.-M. DEVILLENEUVE

(JUSQU'EN 1859),

A.-A. CARETTE, DOCTEUR EN DROIT,

ANCIEN AVOCAT AU CONSEIL D'ÉTAT ET A LA COUR DE CASSATION, CHEVALIER DE LA LÉGION D'HONNEUR,

ET

P. GILBERT, L'UN DES AUTEURS DE LA JURISPRUDENCE DU XIX SIÈCLE,
Membre correspondant de l'Académie de législation de Toulouse,

Avec le concours de MM.
NACHET,

Conseiller à la Cour de cassation, Chevalier de la Légion d'honneur,

PAUL PONT,

G. MASSE,

Conseiller à la Cour impériale de Paris, Chevalier de la Légion d'honneur. Conseiller à la Cour impériale de Paris, Chevalier de la Légion d'honneur.

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RENVOIS AU RECUEIL.

T. désigne les tomes de la période chronologique de 1791 à 1830. Ainsi: t. 3.1.324, signifie tome 3, 1re partie, page 324. Ainsi vol. 1838.2.258, signifie volume de 1838, 2o partie, page 258. ►

Vol. désigne les volumes annuels de 1831 à 1860.

L 3203

FEB I 9 1931

DES LOIS ET DES ARRÊTS.

Ire PARTIE

JURISPRUDENCE DE LA COUR DE CASSATION.

TESTAMENT, EXCLUSION, LEGS, USUFRUIT, Nue propriété, SUC- | de faire considérer la succession comme étant en déshérence par CESSION EN DÉSHÉRENCE.

La disposition testamentaire par laquelle le testateur, tout en déclarant exclure de sa succession tous ses parents indistinctement, n'a légué à des étrangers que l'usufruit de ses biens, sans manifester la volonté d'en attribuer à personne la nue propriété, | mais au contraire en instituant un gérant perpétuel de sa succession, uniquement chargé de l'administrer, n'a point pour effet

(1) Il nous semble évident qu'en présence des constatations de fait de l'arrêt attaqué, il était impossible d'arriver à un résultat autre que celui qui a été consacré par la Cour de cassation. La Cour, en effet, s'appuyant sur ces constatations, déclare que, par le testament dont il s'agit, le testatear avait exclu de sa succession tous ses successeurs, quels qu'ils fussent, réguliers ou irréguliers, pour mettre cette succession hors du commerce entre les mains d'un gérant perpétue!, qui, investi du pouvoir d'adminis trer, était dépourvu du pouvoir d'aliéner, et qui n'avait sur les biens héréditaires aucuns droits de propriété. Or, il est incontestable que cette clause, contraire à l'ordre public qui ne permet pas de frapper des biens d'inaliénabilité absolue, était radicalement nulle; que la nullité frappait la disposition tout entière, puisque les successeurs n'étaient exclus qu'au profit d'une gérance impossible et illégale ; qu'enfin, cette nullité profitait à tous les successeurs, par conséquent aux successeurs réguliers ou aux héritiers du sang; et, par suite, que l'Etat se trouvant en présence d'héritiers au degré successible, ne pouvait prétendre à aucuns droits sur la succession, de laquelle d'ailleurs il avait été exclu, comme les parents, et à laquelle le testateur n'avait dès lors voulu, en aucun cas, l'appeler par préférence à eux.

rapport à cette nuc propriété, et, par suite, de la transmettre à l'Etat. L'exclusion qui, dans ces circonstances, atteint à la fois les parents et l'Etat, doit être considérée comme nulle; et la nue propriété des biens du testateur constitue dès lors une succession ab intestat, dévolue à ses héritiers dans l'ordre déterminé par la loi (1). (C. Nap., 539, 713, 723, 731, 768, 895 et 967.)

dégré inférieur. Mais pour qu'il en soit ainsi, il faut que l'exclusion d'un héritier n'ait pas une autre cause que l'intention den instituer un autre, et que l'institution implicite ne soit pas contredite par les termes mêraes de l'exclusion. Or, c'est évidemment ce qui a lieu quand, à côté de l'exclusion d'un héritier, se trouve corrélativement l'institution d'un légataire ou d'un héritier étranger appelé à recueillir la succession au lieu et place de l'héritier légitime. Si institution vient à être annulée, soit pour vice de forme, soit pour vice de fund, l'exclusion qui n'était qu'un moyen d'arriver à l'institution et de la consolider,.tombe avec elle, et l'héritier exclu reprend tous ses droits, qui ne peuvent lui être contestés par des héritiers plus éloignés en degré, ni à plus forte raison par des successeurs irréguliers, en présence d'une disposition qui n'a pas été faite dans leur intérêt et dans le but de les appeler à profiter de l'exclusion prononcée.

Il y a peut-être plus de difficulté quand on se trouve en présence d'une disposition qui comprend généralement tous les successeurs. Il nous semble d'abord qu'une pareille disposition ne pourrait être considérée comme pleinement valable. On ne peut concevoir des biens n'appartepant et ne pouvant appartenir à personne; el c'est là cependant le but impossible à atteindre que se proposerait une disposition qui exclurait d'une succession tous ceux qui, à un degré ou à un titre quelconque, pourraient être appelés à la recueillir. La question ainsi posée n'est donc susceptible que de deux solutions; ou la disposition devra être considérée comme nulle pour le tout, et par suite, n'ayant aucune existence légale, l'ordre naturel de successibilité reprendra ou conservera son empire; ou elle ne devra être considérée comme nulle que pour partie, de sorte que l'exclusion ne sera maintenue que pour certains successeurs et réputée non écrite pour certains autres, qui recueilleront la succession dont les premiers sont exclus.

Nous croyons même qu'il eût dû en être ainsi, encore bien qu'il ne serait pas résulté du testament que le de cujus avait entendu exclure ses successeurs irréguliers, de la même manière que ses successeurs réguliers. Sans doute, une disposition testamentaire peut avoir lieu non-seulement par voie d'institution, mais aussi par voie d'exclusion (V. MM. Massé et Vergé, sur Zachariæ, t. 3, § 416, p. 22, note 13, et Aubry et Rau, d'après Zachariæ, t. 5, § 647, p. 421); et c'est avec raison qu'il a été jugé, en ce sens, que l'exclusion prononcée par un testament contre quelques-uns seulement des parents du testateur peut emporter institution au profit de ses autres parents au degré successible, et par exemple, que l'exclusion des parents dans une ligne peut par elle-même emporter institution des parents de l'autre ligne (V. Colmar, 22 juin 1834, vol. 1832.2.51, et Cass. 7 juin 1832, vol. 1832.1.542); comme aussi, que l'exclusion de tous parents collatéraux peut emporter institution des autres parents, tels que les ascendants (V. Bordeaux, 26 août 1850, vol. 1850.2.599). Et par la même raison, nous pensons que l'exclusion prononcée de tous parents au degré successible peut valoir comme institution des successeurs irréguliers, et par conséquent de l'Etat. En général, on doit supposer que le testateur ayant des héritiers de divers degrés, qui exclut ceux d'un degré plus proche, a l'intention de gratifier ceux d'un n'appartenant à personne (C. Nap., 539). Mais à cela on répondrait vic

Ecartons d'abord cette seconde solution, qui ne saurait être admise en présence de la volonté exprimée du testateur d'exclure tous ses successeurs réguliers ou irréguliers. Sur quoi se fonder pour distinguer dans l'exclusion générale qu'il a prononcée ? Sur quoi se fonder pour préférer les premiers exclus aux derniers, ou les derniers exclus aux premiers? On pourrait dire, sans doute, à l'appui des prétentions qu'élèverait l'Etat, que l'exclusion universelle prononcée par le testateur a pour résultat de faire que les biens héréditaires sont vacants et sans maître, et que, dès lors, c'est à l'Etat de les recueillir, non à titre de déshérence, mais comme choses

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