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le détenteur : il est vrai encore que ce principe s'applique à la dette d'un immeuble comme à celle d'un meuble; mais un immeuble n'est pas détruit par la perte des choses qui y étaient unies pour son usage: l'obligation de l'usufruitier qui doit conserver et rendre le fonds, n'est donc pas éteinte par la perte des accessoires, puisque son objet principal reste toujours, quoique cet objet soit plus ou moins dégradé par la privation des choses qui y avaient été incorporées : c'est donc un immeuble qui est dégradé, et non pas des meubles qui sont détruits. Reste seulement la question de savoir si les réparations nécessitées par cette espèce de dégradation survenue dans l'immeuble, tombent à la charge de l'usufruitier, ou si elles sont pour le compte du propriétaire; or l'usufruitier doit entretenir le fonds dans l'état de valeur où il l'a reçu; il doit donc réparer la perte des accessoires, comme il serait tenu de réparer une brèche survenue dans le couvert d'un bâtiment, ou dans un mur de clôture.

La loi charge le propriétaire des grosses réparations : elle les détermine avec précision : elle en exprime et circonscrit les espèces, et ces espèces sont absolument étrangères à celles dont il s'agit ici (606): elle a donc voulu comprendre tout ce qui a rapport à la subrogation et au remplacement des accessoires, dans les divers genres de réparations qui concernent l'entretien dont elle charge indéfiniment l'usufruitier.

1159. 3. L'obligation de l'usufruitier doit être la même que celle du grevé de substitution, parce

que

l'un est de même que l'autre chargé de con

server et de rendre : or, dans le cas de la substitution, s'il y a des bestiaux et ustensiles servant à faire valoir les terres substituées, le grevé est tenu de les faire priser et estimer pour en rendre une égale valeur lors de la restitution du fidéicommis (1064); pourquoi en serait-il autrement à l'égard de l'usufruitier?

par

1160. 4. Si d'un côté, la charge de remplacer les accessoires du fonds paraît onéreuse pour l'usufruitier, il faut considérer d'autre part qu'elle est compensée par le produit de l'immeuble dont le revenu est d'autant plus considérable qu'il se trouve mieux assorti de tous ses moyens d'exploitation; que s'il n'avait pas été garni de ses accessoires lorsqu'il a été livré à l'usufruitier, celui-ci se serait vu forcé de le louer à bas prix, ou obligé de se fournir d'autres meubles ou ustensiles qui auraient pu périr également pour lui et les mêmes accidens; que ce n'est pas par la rigueur accidentelle qui peut, en certain cas, se trouver dans l'exécution d'une obligation, qu'on doit se déterminer pour prononcer sur son existence et en admettre ou en rejeter le principe; qu'il ne peut y avoir plus d'injustice à faire peser les cas fortuits sur l'usufruitier que sur l'héritier, pour la perte des accessoires dont il s'agit; parce que les accidens de ce genre sont, pour l'un comme pour l'autre, audessus de la prévoyance humaine, et que dans tous les cas il est au moins certain qu'aucune faute ne peut être reprochée à l'héritier, tandis qu'il est difficile que cela soit toujours également démontré à l'égard de l'usufruitier.

Concluons donc que l'usufruitier d'un domaine est responsable des animaux attachés à la culture, et des meubles aratoires qui sont les accessoires du fonds;

Que l'usufruitier d'une usine est également responsable des ustensiles et agrès qui y ont été placés pour servir à son roulement, et qu'il en est de même des autres genres d'immeubles par accession, dont il serait trop long de faire ici l'énumération;

Que lorsqu'un animal, attaché à la culture du fonds, périt ou devient caduc, l'usufruitier est tenu de le remplacer par un autre; qu'il est également obligé de substituer des ustensiles neufs au lieu et place de ceux qui ont cessé d'être de bon usage, parce qu'il doit entretenir l'immeuble dans toutes ses parties; que même il serait tenu de regarnir entièrement le domaine ou l'usine, par des objets égaux en valeur à ceux qu'il a trouvés lors de son entrée en jouissance, si, par un accident extraordinaire, tous les accessoires de l'immeuble étaient péris ou enlevés, parce que ce remplacement ne serait toujours, à l'égard du fonds qui continuerait à subsister, qu'une réparation immobilière; réparation qui ne peut être classée que dans le genre de celles qui concernent l'entretien dont la loi charge généralement l'usufruitier.

1161. Qu'enfin lors de l'ouverture de l'usufruit, comme lors de celle du fideicommis, on doit avoir soin de faire un inventaire estimatif des divers objets qui sont immeubles par accession, pour constater la valeur des objets qui restent

à la charge de l'usufruitier comme à celle du grevé, puisqu'il y a même raison dans les deux cas; et comme il y a ici subrogation d'un objet à l'autre, mais subrogation par équivalent, il faut que cet inventaire soit tel que quand on en fera le récolement, à la fin de l'usufruit, on puisse facilement vérifier si les objets trouvés en remplacement de ceux qui existaient dans le principe, sont d'égal service et d'une valeur suffisante pour l'indemnité du propriétaire du fonds (1).

CHAPITRE XXVII.

Des Droits de l'usufruitier sur les bois et forêts.

1162. ON

N distingue plusieurs espèces de bois sur lesquels l'usufruitier d'une forêt a des droits très-différens; pour quoi il convient de les indiquer d'abord, par forme de notion préliminaire à tout ce qui sera dit dans ce chapitre.

Les arbres des forêts reçoivent une foule de dénominations, soit d'après leur âge et leurs qualités diverses, soit selon les divers usages auxquels ils sont employés ou destinés; mais pour l'intelligence de ce qui sera dit ci-après, nous devons nous contenter de signaler ce qu'on entend les bois taillis, les baliveaux, les modernes, les futaies, les chablis, et les bois de mésus.

par

(1) Voy. encore d'autres développemens à cet égard, plus bas au chap. 51, sect. 1, §. 11, sous les n. 2510 et suiv.

On appelle taillis, le bois qui peuple, en massif, une certaine étendue de forêt, et qu'on coupe péréodiquement aux plus courtes époques déterminées par la loi ou par l'usage de lieux.

On appelle baliveaux, les pieds d'arbres chênes, hêtres, ormes, tilleuls, charmes, frênes et autres bois forestiers de la meilleure essence, qui sont de l'âge du taillis quand on le coupe, et qui doivent être laissés soit pour être un jour au rang des futaies, soit pour servir au semis et repeuplement de la forêt.

On les appelle baliveaux sur taillis, lorsqu'ils n'ont encore été réservés que sur la dernière coupe; et ils prennent le nom de modernes ou de baliveaux modernes, par opposition aux futaies proprement dites, lorsqu'ils ont déjà été réservés sur deux coupes de taillis.

Le nom de futaies n'est donné qu'à ceux des arbres qui ont été réservés successivement sur trois coupes du taillis, faites de vingt-cinq ans en vingt-cinq ans ; en sorte que ce n'est qu'à l'âge de soixante et quinze ans que les arbres ainsi réservés commencent à prendre la dénomination de futaies; et encore ne sont-ils que des futaies modernes; car il faut au moins la révolution d'une période de plus, pour qu'on puisse les appeler hautes futaies (1).

Les chablis sont les arbres qui se trouvent

(1) Voy. sur ces distinctions, l'art. 12, tit. 15; les articles 3 des titres 24 et 25, et l'art. 1, titre 26 de l'ordonnance de 1669.

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