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La durée d'une prevôté était de deux ans; les échevins étaient renouvelés tous les ans par moitié (1).

Nouts avons dit que les jugements du tribunal de la ville avaient leur appel au Parlement. Cette grande et belle institution datait de l'époque où les seigneurs, après s'ètre déclarés indépendants, s'étaient mis à rendre la justice sans suivre d'autre règle que leur volonté. Comme les abus allaient ainsi se multipliant de jour en jour, des plaintes s'élevèrent du fond de toutes les provinces, et quoiqu'elles parvinssent jusqu'aux oreilles des rois, les rois furent long-temps forcés de les entendre sans qu'il fût en leur pouvoir de les faire cesser. Cependant quelques tentatives furent faites par eux, et à

(1) Les électeurs pour la prevòté étaient les échevins, les conseillers de ville, les quartiniers et quelques notables choisis par les quartiniers euxmêmes. Cette élection, à vrai dire, n'était qu'une formalité, car le résultat, du scrutin était toujours fixé à l'avance par une lettre close adressée au bureau de la ville. C'est pour exécuter littéralement la teneur de cette lettre, que l'on convoquait l'assemblée qui était censée élire librement le chef de la municipalité.

Il y avait un peu plus de probité politique dans l'élection des échevins. Tous les ans, le 16 août, le conseil général de la ville s'assemblait dans la grande salle de l'hôtel, pour procéder à l'élection de deux nouveaux échevins, en remplacement de ceux qui avaient fait leur temps. Cette assemblée était composée du bureau de ville, des vingt-six conseilters, des seize quartiniers et des trente-deux notables appelés par les quartiniers.

Après la messe dite par l'aumônier de la ville, dans l'église du SaintEsprit, détruite aujourd'hui, on commençait par élire quatre scrutateurs. Un pour le roi; c'était ordinairement un officier marquant dans la judicature.

Un pour les conseillers, choisi parmi les conseillers.
Un pour les quartiniers, choisi parmi les quartiniers.
Un pour les bourgeois, ehoisi parmi les notables.

Après le serment prêté par eux, ils prenaient place et recevaient les suffrages par écrit de tous les votants. Gela fait, ils procédaient au dépouillement du scrutin, et les deux candidats qui avaient obtenu la majorité des voix étaient nommés et procłamés publiquement échevins.

Le procès-verbal de cette élection était à l'instant rédigé, signé et présenté au roi,

mesure que l'excès d'oppression féodale leur ramenait l'esprit des populations, ils en profitaient pour ressaisir une partie de leur ancienne autorité et restreindre la la tyrannique indépendance des seigneurs.

Le premier pas vers cet important résultat fut marqué par l'établissement des justices royales pour juger certains cas, dont la connaissance semblait appartenir exclusivement au roi; ce fut l'origine des cas royaux. Les nouveaux juges, paraissant au peuple moins suspects de partialité et de corruption que ceux des seigneurs, on eut recours à eux de préférence, et les cas royaux sé fortifièrent de l'adhésion des évêques et des petits vassaux. En peu de temps, la justice des seigneurs se trouva ainsi bornée à des affaires de peu d'importance.

Plus tard, la réunion des grandes provinces à la couronne rendait pénible et coûteux le déplacement des habitants de ces provinces, qui avaient un long voyage à faire pour venir plaider à la cour suprème. Pour obvier à cet inconvénient, les rois érigèrent en plusieurs endroits des cours supérieures, qui rendirent la justice en dernier ressort. Ces cours furent appelées Parlements, nom que portait déjà la cour du roi.

Ces assemblées n'étaient d'abord convoquées qu'une ou deux fois dans l'année, et elles suivaient toujours le roi; Philippe-le-Bel, avant son départ pour la Flandre, ordonna, par un édit du 23 mars 1302, que pour la com modité des sujets et l'expédition des causes (propter commodum subjectorum et expeditionem causarum), il y aurait à Paris un Parlement qui se tiendrait deux fois l'année; ainsi qu'un échiquier à Rouen, des grands jours à Troyes et un Parlement à Toulon (1).

(1) Quoique cette ordonnance eût rendu le Parlement sédentaire à Paris, il est arrivé plus d'une fois qu'il a été transféré ailleurs.

Le même édit avait établi qu'il y aurait au Parlement treize clercs et treize laïques, sans compter deux prélats et deux seigneurs; une ordonnance de Philippe-le-Long, en date du mois d'avril 1320, eut pour objet de déclarer que désormais il n'y aurait aucun prélat député au Parlement, le roi se faisant conscience de eux empescher au gouvernement de leurs chrétientez.

La composition du Parlement varia par la suite, tant sous le rapport du nombre que sous celui de la qualité des personnes. Jusqu'à Philippe de Valois, les laïques, ayant au moins le titre de chevaliers, y formaient la partie prépondérante, et les clercs ou gens de loi n'yavaient que voix consultative; mais sur la fin du règne de ce prince, ceux-ci prirent une part active aux délibérations, et jouirent des mêmes prérogatives que les chevaliers (1).

Il était difficile de croire que les chevaliers, gens à vie aventureuse et agitée, se plieraient long-temps aux formes lentes de la justice et aux exigences d'une discussion que les légistes seuls étaient capables de soutenir. D'ailleurs, il leur en coûtait de se voir ainsi constamment placés dans un degré d'infériorité intellectuelle, et de se réunir sous la présidence d'un homme de loi, eux qui d'abord n'avaient été présidés que par un haut baron. Ils commencèrent donc à se rebuter de leurs fonctions judiciaires, et quand Charles VI eut rendu permanente la résidence du Parlement, cette assiduité leur paraissant

(1) Toutefois, il y eut toujours cette différence, entre les deux classes, que les chevaliers assistaient aux séances l'épée au côté et avec leur manteau, tandis que les gens de loi étaient vêtus d'une robe longue et serrée comme une soutane, ce qui les fit appeler magistrats de robe longue. En outre, les chevaliers étaient qualifiés de messires ou messeigneurs, et ce n'est même qu'à cause de cela que ce dernier titre fut accordé depuis aux autres membres du Parlement qui, à l'époque dont nous parlons, n'étaient désignés que sous celui de maitres.

incompatible avec le soin de leurs affaires domestiques et les devoirs du service militaire, ils cessèrent entièrement de se rendre aux assemblées, qui ne furent plus composées que de gens de robe (1).

Ce serait nous écarter de notre sujet que de pousser plus avant dans l'histoire de ce corps illustre. Il nous suffira d'ajouter qu'il exerçait un haute surveillance sur l'administration de la police; qu'il jugeait en dernier ressort les appels du Châtelet et de l'Hôtel-de-Ville; enfin que ses arrêts avaient force de loi, et qu'ils étaient exécutés comme tous les actes qui servaient à définir et à régler l'action de la police dans le royaume.

Voilà donc l'ensemble des différentes autorités qui, avant l'édit de mars 1667, concouraient à maintenir l'ordre et la sécurité dans la capititale : le prevôt de Paris avec ses deux lieutenants et le Châtelet; le prevôt des marchands avec le bureau de ville; puis les juridictions secondaires du bailliage, de la sénéchaussée, du présidial, de l'officialité etc.; et au centre de cette vaste organisation, un pouvoir calme et modérateur, le Parlement, surveillant le jeu de ces institutions diverses, les soumettant à des formes appropriées aux temps et aux circonstances, et leur donnant à toutes la vie et le mouvement.

Son intervention était souvent nécessaire pour faire cesser la confusion qui régnait alors dans le texte des

(1) Tous les ans le roi donnait aux présidents des robes neuves d'écarlate, fourrées d'hermine, et une toque ou mortier de velours, orné d'un cercle d'or, et aux conseillers, des robes d'écarlate. Quelques écrivains pensent que ce costume du président était une sorte de réminiscence de l'ancien manteau royal; et, en effet, dans un tableau qu'on voyait autrefois dans la grande chambre, Charles VI était représenté vêtu de ce manteau; de plus on lit, dans Monstrelet, au sujet de l'entrée à Paris, de Henri, roi d'Angleterre : • Vint maitre Philippe de Morvilliers, premier président, en habit royal, et tous les seigneurs du parlement, vétus de longs habits de vermeil. »

T. I.

(Peuchet. Police moderne). a

lois, et mettre un terme aux conflits qui s'élevaient entre des autorités rivales, et dont les attributions n'étaient pas toujours nettement définies. C'est ce qui était arrivé plu sieurs fois à l'occasion des différends survenus entre les lieutenants civil et criminel, au Châtelet: tous deux avaient des attributions de police; et comme ces attributions avaient été primitivement confondues dans la même personne, le prevôt de Paris, il n'était pas aisé de tracer la limite dans laquelle devait se renfermer chacun des deux magistrats ses délégués.

" Le Parlement, consulté sur cette question de compétence, avait rendu plusieurs arrêts qui, loin de terminer la contestation, donnèrent lieu à des contestations nouvelles; il fallut donc s'occuper sérieusement des moyens d'y porter remède.

*** C'était l'usage alors, usage qui s'est soutenu jusqu'à la création du lieutenant général de police, que lorsqu'il était question de faire un règlement ou un établissement important sur la police de Paris, le Parlement, sur la demande des magistrats du Châtelet, convoquait, de son plein droit une assemblée, ou conseil de police, qui se tenait, soit au palais, soit dans une des salles du Châtelet. C'est à cette assemblée que fut soumise en définitive la solution des difficultés qui avaient déjà occupé le Parlement. Ses longues et mûres délibérations donnèrent lieu au célèbre édit de 1667, par lequel les attributions de police furent retirées aux deux lieutenants au Châtelet, et confiées à un nouveau magistrat qui, sous le nom de lieutenant de police, devait représenter la juridiction de police que les lois du royaume et les arrêts des cours attribuaient exclusivement au Châtelet de Paris (1).

(1) A cette époque, l'assemblée était composée de la manière suivante : le chancelier Séguier, le maréchal de Villars, MM. Colbert, d'Aligre, de

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