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Fauffe nouvelle on vous a fait entendre:

A plus gros bénéfice on ne m'a point nommé.
Pauvre j'étois, pauvre je fuis encore :

De ma fortune, ami, la foible aurore
N'offre à mes yeux qu'un jour bien incertain ;
Peu de pitance appaise-t-il la faim ?

Le Prélat que je fers, fans viser au pécule,
Charles (a) qu'en tout prudence & fageffe conduit,
S'imaginant qu'un trop grand éclat nuit
A ceux qu'on fait fortir d'une obfcure cellule,
Pour ménager ma vue a mis un crépuscule,
Qui fait qu'il n'est ni jour ni nuit.
Rayez donc fur votre registre,
S'il faut en croire votre Epître,
Ces mille écus dont je jouis;
Je n'ai fait que changer mon titre

De Saint Marcel en Saint Louis;
J'étois dans le Fauxbourg & je passe à la Ville.
Ce changement eût rempli mon éspoir,
Si dans ce nouveau domicile
A l'agréable on avoit joint l'utile;

Mais fuis-je fait pour tout avoir ?

Eh! comptai-je pour rien d'occuper une Stale,
Dans ce Temple où de toutes parts,
Le célèbre Germain (b) `étale

(a) M. de Vintimille.

(b) M. Germain fameux Orphévre a été chargé par le Roi de faire bâtir l'Eglife de S. Louis d'après fes deffeins, & l'a embellie de morceaux de Sculpture qu'on admire.

Ces pompeux ornemens qui frappent mes re

gards!

N'eft-ce pas là que fe fignale

L'Industrie employée au triomphe des Arts ?
D'un prochain avenir perçant le foible voile,
Il me femble déja voir refpirer la toile
Sous les doigts de Reftout (c), de Pierre (d),
de Coypel (e);

Galoche (f) impatient réchauffe fon génie,
Par fes débiles mains fa palette est garnie,
Et les derniers efforts vont décorer l'Autel.
A mes defirs Vanlo (g) propice,
Commence déja fon ésquisse;

Et j'apperçois dans le lointain
Les Graces conduire fa main:

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C'est le Peintre de la Nature.
Déja de Madelaine il façonne les traits ;
Et par une heureuse imposture,
L'excès du repentir qu'exprime fa peinture,

(c) Il a fait le Baptême de J. C. pour la Chapelle des Fonts.

(d) Le Tableau du Martyre de S. Thomas qui eft dans la Chapelle de M. Germain, eft de lui. (e) Les Tableaux du Chœur de S. Louis font de Coypel, premier Peintre du Roi.

(f) M. Galoche déja très-vieux a fait le Ta

bleau de S. Nicolas.

(g) Il a fait le beau Tableau de la Madelaine qui eft dans la Chapelle de la Pénitence faite en Stuc par Clivici, Stucateur du Roi.

Dans mon âme touchée éxcite des regrets, Pour avoir trop aimé le monde & fes attraits. Si le Ciel prolonge mon âge,

Le Moine, je verrai ce magnifique (h) Ouvrage,
Dont le modéle annonce la beauté:

A ton docte cifeau donne l'activité ;
Sois fenfible aux voeux de la France:
Elle pleure Fleuri; par toi cette Eminence
Attend le prix de l'Immortalité,

Que fes foins pour l'Etat ont fi bien mérité.
Tes fublimes talens t'ont déja fait connoître;
Paris (i), Rennes (k), Bordeaux (1), admirent
tes fuccès:

Malgré ces monumens qui vivront à jamais,
La gloire peut encore ajouter à ton Etre:
A ton marbre ébauché donne les coups de
Maître.

Tout s'anime où je fuis, & mon goût est flatté.
Pourrois-je regretter le lieu que j'ai quitté ?
De ce féjour voifin du Louvre,

D'où mon œil enchanté découvre

Le Parnaffe (m) François, où jeune nourriffon,

(h) Le Maufo lée du Cardinal de Fleuri.

(i) Dans l'Eglife. de S. Louis le Tableau de P'Annonciation en marbre coloré morceau unique en France.

t.

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(k) La Statue Pédeftre de LOUIS XV.
(1) La Statue Equeftre du même Prince.
(m) L'Académie Françoife..

Je reçus un laurier de la main d'Apollon.

Je vois les Nymphes de la Seine

Qui d'un lit refferré quittant la molle aréne Aux Jardins de nos Rois (n) par cent fecret'

canaux

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Portent fans murmurer ces liquidés cristaux, Dont les jets écumeux, plus prompts qu'une

fusée,

Vont rafraîchir la nue & tombent en rofée.
Cher Briffonnet, à tous ces agrémens,
Qu'offre à mes yeux mon nouveau bénéfice,
Si vous joigniez des coeurs fans artifice,
Un is entr'eux, des Chanoines charmans,
Dont j'éprouve déja les tendres. fentimens,
De mes plaisirs encor vous n'auriez que l'éf
quiffe.

Leur mérite m'étoit connu :

L'objet de mes defirs eft enfin obtenu ;·
Un fort propice avec eux m'associe ;·
Leur amitié m'a prévenu :

Dieu fçait combien je l'apprécie !
Plaifir du cœur vaut mieux que revenu.

(R) Les Tuileries & le Palais Royal.

Par M. L. G....

STANCES A ROSETTE.

LYCAS, viens joindre à mon pipeau
Ta douce & charmante mufette,
Et chanter fur un air nouveau,
Les brillans attraits de Rofette.

Admire fes divins appas,

Son Port, fes Grâces, fa Jeuneffe,
Son Air fin, fes Traits délicats;
En elle tout nous intéresse.

Que d'éclat & de majefté,
L'on voit briller fur fon visage!
Rien n'est égal à sa beauté ;
Elle eft fans fard & fans nuage.

Plus féduifante que l'Amour
Dont elle est la parfaite image,
Tous les Bergers vont tour-à-tour
A-fes genoux lui rendre hommage.

Amyntas & le beau Daphnis ;
Si célébres dans la Contrée,
Ont tracé ces mots fur un lys:
(Nous l'avons toujours adorée !)

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