à des tiers comme elles le font par l'hypothèque, mais seulement qu'il ne peut en résulter contr'eux des condamnations onéreuses; un exemple développera entièrement notre idée. Un locataire est poursuivi en délaissement de la maison louée: il défend à cette action comme s'il étoit propriétaire; puis les parties se rapprochent et nomment des arbitres qui jugent en faveur du locataire, et le déclarent propriétaire de la maison. Se présente ensuite le véritable propriétaire; il demande et le paiement des loyers, et le délaissement de la maison; pourra-t-on lui opposer la décision arbitrale? Non c'est véritablement pour lui qu'elle est res inter alios acta, elle ne sauroit donc lui nuire ni lui être en aucune manière opposée, et c'est là le cas de notre article 1022. : XIII. Les jugemens rendus en pays étrangers ne sauroient seuls produire hypothèque, et la raison en est, que l'autorité des jugemens ne s'étend jamais audelà du territoire sur lequel ils sont prononcés. Cependant avouons qu'on paroît en quelque sorte s'être départi de la rigueur de cette règle, en reconnoissant que les jugemens originairement insuffisans pour engendrer hypothèque, peuvent acquérir cet effet dès qu'ils sont déclarés exécutoires par un tribunal français. XIV. Le mode pour parvenir à rendre exécutoires ces jugemens, paroît présenter des difficultés. On a demandé si c'étoit en connoissance de cause que les tribunaux français devoient les déclarer exécutoires, ou s'ils devoient se borner à rendre une ordonnance d'exécution, sans examiner si les condamnations qu'ils portoient étoient bien ou mal fondées ? L'article 121 de l'ordonnance de 1629 porte: « Les » jugemens rendus, contrats ou obligations, reçus » ès-royaumes, souverainetés étrangères, pour quel» que cause que ce soit, n'auront aucune hypothèque >> ni exécution en notre royaume; mais tiendront, les » contrats, lieu de simples promesses; et nonobstant » les jugemens, nos sujets contre lesquels ils ont été » rendus, pourront de nouveau débattre les droits comme >> entiers pardevant nos officiers. >> D'après cet article, qu'on peut naturellement regarder comme le commentaire de celui du Code Napoléon que nous expliquons, il est facile de juger de la force d'un jugement rendu en pays étrangers, entre Français et étrangers; il est évident qu'ils n'emportent hypothèque que lorsqu'ils ont été de nouveau discutés en France; les mots de l'article 121, pourront de nouveau débattre les droits comme entiers, ne laissent aucun doute à ce sujet. Aussi la cour d'appel de Poitiers et la cour de cassation l'ont-elles ainsi décidé. Leurs arrêts sont rapportés dans la Collection des Arrêts et jugemens an 14, art. 27. L'arrêt de la cour de cassation est sur-tout remarquable par le rejet d'une distinction qu'on cherchoit à établir. On avoit prétendu que si l'article 121, déjà cité, établissoit la nécessité d'une nouvelle discussion, ce n'étoit que pour les affaires purement civiles, et non pour les affaires de commerce. Mais voici comment la Cour détruisit cette nouvelle prétention : « Vn l'article 121, etc., considérant que » les expressions générales de cet article ne souffrent » aucune exception, soit relativement à la nature de » l'affaire qui a été portée devant un tribunal étranger, » soit relativement à la qualité en laquelle un Français » a été partie ; qu'ainsi on ne peut, pour l'application » dudit article, admettre de distinction, soit entre le » cas où l'affaire sur laquelle est intervenu un juge» ment étranger, est commerciale ou purement civile, » soit que le Français y ait été demandeur, défendeur » ou partie intervenante; mais que la loi refuse indis» tinctement toute force exécutoire en France aux ju» gemens étrangers.... >> Ces raisons, puisées dans l'article 121 de l'ordonnance de 1629, sont absolument applicables dans la nouvelle législation; et le Code Napoléon ne distingue pas non plus entre les jugemens de commerce et ceux purement civils; on doit donc tenir que dans l'un et l'autre cas ils u'ont de force en France qu'après vérification. XV. Quant aux jugemens rendus entre étrangers, par des tribunaux également étrangers, il y a plus de difficulté pour les soumettre à une révision. Comme les parties ne sont pas justiciables des tribunaux français, il semble qu'on doive se borner, pour les rendre exécutoires en France, à une simple ordonnance obtenue sans nouvelle discussion. C'est ce que pensoit M. Séguier, avocat-général : « On distingue, disoit-il, dans les ju» gemens étrangers, entre ceux qui sont rendus contre » un Français en faveur d'un étranger, et ceux » qui sont rendus entre deux étrangers. Les pre» miers n'ont pas d'exécution en France, le Français » peut de nouveau discuter l'affaire, et la soumettre à ›› ses juges nationaux ; mais les jugemens rendus en » pays étrangers, entre deux étrangers, peuvent être » mis à exécution en France, avec la simple permission » du juge, parce que l'ordonnance qui défend l'exécu» tion des jugemens étrangers en en France, n'a en # » tendu établir le privilége qu'en faveur des Français. » Henrion, dans son Recueil de Jurisprudence française, après avoir rapporté plusieurs arrêts, dit : « Les » jugemens des cours étrangères rendus contre des » étrangers, s'exécutent en France sans nouvel exa» men, et sur simples pareatis. Mais veut - on se préva»loir d'un pareil jugement contre un naturel Fran» çais? A l'instant son autorité s'évanouit; il n'y a » plus de jugement, et le Français peut demander » que la question soit de nouveau discutée devant ses »juges naturels. » Ainsi il nous semble qu'on peut adopter sans difficulté la distinction que faisoient les auteurs que nous venons de citer, et que s'il s'agit d'un jugement rendu entre Français et étrangers, il ne produira hypothèque en France qu'après une nouvelle discussion; tandis que s'il ne concerne que des étrangers, il sera exécutoire et pourra faire la base d'une inscription dès qu'il sera revêtu d'une simple ordonnance obtenue sans révision. XVI. De plus, nous observons que ce que nous venons de dire sur les jugemens rendus entre étrangers doit s'entendre même des jugemens révocables et qui ne seroient pas encore passés pas encore passés en force de chose jugée. Car, quoique M. l'avocat-général Séguier pense que cette sorte de jugement ne pouvoit être exécutée en France que lorsque les délais de l'opposition, de l'appel, etc. étoient échus, il nous semble que cette règle, en supposant qu'elle soit exacte, ne doit pas s'appliquer à l'hypothèque, parce qu'autrement ce seroit nuire sans nul motif à l'étranger qui auroit obtenu la condamnation. D'ailleurs, il y auroit une grande raison pour adopter notre opinion. L'hypothèque n'existe plus du jour de la prononciation du jugement; et l'arrêt confirmatif qu'une Cour étrangère auroit rendu, ne sauroit faire remonter l'hypothèque à cette époque s'il n'y avoit eu inscription: donc, par suite du nouveau systême, et pour donner à celui qui a obtenu le jugement le même droit que ceux qu'on lui accordoit autrefois, il faudroit lui permettre de prendre inscription, quoique ce jugement ne fût pas encore passé en force de chose jugée. XVII. La dernière partie de notre article 2123 établit néanmoins deux cas où les jugemens rendus en pays étrangers produisent en France hypothèque, sans avoir été préalablement rendus exécutoires; c'est, 1o. lorsque, par les traités entre les deux nations, on leur a réciproquement donné cette force ; 2°. que, par un motif politique, le gouvernement français a jugé avantageux de leur faire produire cet effet ; c'est ce que signifient ces mots de notre article, dans les Lois politiques, etc. XVIII. Mais en supposant que la France fût, à l'égard d'un autre royaume, dans les termes du droit commun ; qu'il n'y cût eu, entre les deux puissances, aucune espèce de convention relative à l'hypothèque ; que seulement le gouvernement étranger regardât chez lui, comme ayant l'autorité de la chose jugée, les jugemens rendus en France, penseroit-on que par une réciprocité légale nous dussions accorder la même force aux jugemens rendus dans ce royaume? Nous ne le croyons pas, et en cela nous nous conformons à la décision que rendit le Parlement de Paris dans l'affaire de la princesse Carignan. Dhéricourt plaidoit contre |