cant. Cette loi, en sus du poinçonnage de garantie, obligea chaque fabricant à marquer d'un poinçon particulier les objets d'or ou d'argent sortant de sa fabrique. Mais cette disposition avait pour but principal d'assurer la garantie du titre, en permettant d'arriver jusqu'au coupable, en cas de fraude. Le 28 thermidor an VII, une pétition de certains fabricants de quincaillerie et de coutellerie fut recommandée par le Conseil des Cinq-Cents au pouvoir exécutif, et l'arrêté du 23 nivôse an IX, qui y fit droit, fut un essai timide dans cette nouvelle voie. Il se borna, en effet, à déclarer que les fabricants de coutellerie et de quincaillerie étaient autorisés à frapper leurs ouvrages d'une marque particulière assez distincte des autres marques pour ne pas être confondue avec elles. Les premières dispositions générales sur les marques se trouvent dans la loi du 22 germinal an XI, relative à la police des manufactures, fabriques et ateliers, dont le titre IV reconnut à tout manufacturier ou artisan le droit d'appliquer une marque particulière sur les objets de sa fabrication, et à s'en assurer l'usage exclusif en en faisant le dépôt au greffe du tribunal de commerce. La contrefaçon donnait lieu à des dommages-intérêts, et aux peines prononcées contre le faux en écritures privées. Vinrent ensuite successivement: 1° le décret du 16 juin 1809, qui chargea les conseils de prud'hommes de veiller à la conservation de la propriété des marques, et les constitua arbitres de la suffisance ou de l'insuffisance des différentes marques proposées ou existantes; 2o le Code pénal, promulgué les 26 et 27 février, 1er et 2 mars 1810, dont l'art 142 punit de la réclusion la contrefaçon des marques d'un établissement de commerce; 3o le décret du 5 septembre 1810, qui frappa d'une peine spéciale la contrefaçon des marques de coutellerie; 4o la loi du 9 février 1810, qui régla les marques particulières dont devaient être revêtus les jeux de cartes; 5o les décrets du 25 juillet 1810 et du 22 décembre 1812, dont le premier autorisa exclusivement les fabricants de la ville de Louviers à mettre à leurs draps une lisière jaune et bleue, et dont le second permit à toutes les manufactures de draps d'obtenir l'autorisation de mettre également à leurs produits une lisière particulière à chacune d'elles; 6° trois décrets des 1er avril 1811, 18 septembre même année, et 22 décembre 1812, relatifs aux marques obligatoires et facultatives des savons; 7° les lois et ordonnances des 28 avril, 8 août 1816, 21 avril et 23 septembre 1818, relatives aux marques obligatoires pour les tissus et étoffes de la nature de ceux dont l'importation est prohibée, ainsi que pour la bonneterie de coton ou de laine et les cotons filés; 8° enfin, la loi générale du 28 juillet 1824, qui, tout en laissant sous le coup de l'art. 142 du Code pénal la contrefaçon proprement dite des marques, punit seulement de la peine correctionnelle édictée par l'art. 423 du même Code le fait d'usurpation du nom d'un fabricant, autre que celui qui a fabriqué, ou d'un lieu autre que celui de la fabrication. SECONDE SECTION. Précis de la législation en vigueur. De l'exposé qui précède il résulte, qu'en dehors des timbres, marques et poinçons employés directement par l'État dans un intérêt public, il existe plusieurs genres de marques destinées à indiquer l'origine des produits fabriqués, et qu'elles se divisent d'abord en deux grandes classes, marques obligatoires et marques facultatives. Nous n'avons pas à nous occuper des premières au point de vue de l'intérêt public, mais en tant seulement qu'elles peuvent constituer une propriété privée. Or, à cet égard, elles sont régies par les mêmes principes que les marques facultatives. Indépendamment, en effet, des peines qu'un fabricant peut encourir pour infraction aux dispositions régle mentaires de la loi, notamment, pour contrefaçon ou fausseté de marque, celui dont la marque particulière a été contrefaite ou usurpée a, en outre, contre l'auteur de cette fraude, une action directe pour le tort personnel que peut lui avoir causé cette atteinte portée à ses droits. Bien plus, on a jugé, et avec raison, que toute personne intéressée et éprouvant un préjudice, même éloigné, de l'usage frauduleux d'une marque collective ou générale, telle que celle qui sert à indiquer un lieu de fabrication, a le droit de poursuivre directement les délinquants devant les tribunaux.-La propriété des marques et les droits qui en découlent sont donc complétement indépendants de la question de savoir si elles sont ou non obligatoires.-La seule classification qui ait une importancè réelle pour l'objet de notre livre est celle qui les divise en marques légales et en marques ordinaires ou vulgaires, parce que les droits et les obligations ne sont pas les mêmes. Nous nous en occuperons donc séparément, dans les deux articles suivants, en remarquant dès à présent que dans la catégorie des marques légales, viennent, entre autres, se ranger toutes les marques spéciales à certaines industries, et que, dans les marques vulgaires, nous comprendrons non-seulement les noms, désignations et étiquettes, mais même les enseignes. - § 1. Dispositions générales. A. Caractères. La marque légale est celle que tout manufacturier ou artisan peut appliquer sur les objets de sa fabrication, et qui y est assez inhérente pour pouvoir servir à constater leur origine et leur identité. Ainsi, à l'égard des liquides, la marque du fabricant, pour être légale, doit être appliquée sur les vases qui les renferment, de telle manière qu'elle ne fasse qu'un seul corps avec eux, et que les liquides ne puissent en être extraits sans la rompre, ou sans détruire son application au vase et au liquide qu'il contient. La loi, d'ailleurs, n'exigeant pas qu'elles soient apparentes, un arrêt de la Cour de cassation du 12 juillet 1845 a jugé que l'on devait considérer comme marque de fabrique, celle que les fabricants de vins de Champagne apposent sur la partie du bouchon qui entre dans la bouteille. La marque que l'on choisit doit être assez distincte des autres pour qu'il ne soit pas possible de les confondre. B. Droit.-Elle constitue une véritable propriété au profit de celui qui l'adopte, et lui donne le droit d'en poursuivre les contrefaçons ou usurpations. C. Dépôt.-Mais, pour cela, elle doit être déposée au greffe du tribunal de commerce du chef-lieu de la manufacture ou de l'atelier, et, en outre, au secrétariat du conseil des prud'hommes, lorsqu'il en existe un, à la juridiction duquel soit soumis le fabricant ou l'artisan.-L'emploi de la marque avant le dépôt ne la fait pas tomber dans le domaine public, mais l'absence ou la tardivité du dépôt rendrait l'action non recevable pour tous les faits antérieurs. Toutefois, la jurisprudence a admis que la marque purement nominale n'a pas besoin d'être déposée, et cela se trouve confirmé par la disposition générale et absolue de la loi de 1824. D. Contestations.- Appréciations. Les conseils de prud'hommes, dans les localités où il en existe, sont arbitres de la suffisance ou de l'insuffisance des différences entre les marques adoptées et celles proposées, ou même entre celles déjà existantes. Si les parties ne peuvent se concilier devant le Conseil des prud'hommes, la contestation est portée au tribunal de commerce, qui prononce après avoir vu l'avis de ce Conseil. E. Cession. La propriété d'une marque de fabrique et le droit exclusif de s'en servir peuvent, à moins d'une disposition spéciale et contraire, être transmis à des héritiers, légataires ou cessionnaires, continuant ou exerçant la même industrie. F. Contrefaçon. Il y a contrefaçon de marque, dans le fait d'usurper, d'altérer et d'imiter frauduleusement la marque distinctive d'autrui. La contrefaçon, dans ce cas, donne ouverture à une double action, civile et criminelle. Si l'emploi d'une marque semblable a été fait de bonne foi, il ne donne lieu qu'à une action civile en revendication et en suppression de la marque. G. Poursuites. Compétence. Le propriétaire d'une marque déposée, ainsi que ses cessionnaires, peuvent, soit porter des plainte, soit faire procéder directement à la saisie préalable marques contrefaites ou des objets qui en sont revêtus, en se faisant autoriser par une ordonnance du président du tribunal civil. La saisie, du reste, n'est pas indispensable, et les faits de contrefaçon ou d'usurpation peuvent être établis par la production des objets vendus sur facture, ou même par témoins. Lorsqu'il y a véritablement contrefaçon d'une marque légale et qu'on a suivi la voie criminelle, la loi de germinal an XI déclarant qu'elle donne lieu à l'application des peines prononcées contre le faux en écritures privées, l'affaire est de la compétence de la Cour d'assises. Mais comme la gravité de la peine a souvent pour effet d'amener l'acquittement, on se borne généralement, dans la pratique, à agir par la voie civile. L'affaire, dans ce cas, est de la compétence des tribunaux de commerce. Lorsque la marque consiste principalement dans le nom du fabricant, on peut, indistinctement, soit agir en suppression du nom et en dommages-intérêts devant la juridiction commerciale, soit agir directement ou par voie de plainte devant la juridiction correctionnelle, en vertu de la loi du 28 juillet 1824. H. Réparations et peines. - Les condamnations civiles consistent dans la suppression du nom ou de la marque contrefaits, dans des dommages-intérêts et dans l'affiche ou l'insertion du jugement dans un ou plusieurs journaux, si le tribunal le juge convenable. Aux termes des articles 142 et 145 du Code pénal, les peines sont : la réclusion, pour la contrefaçon de la |