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Le 8 avril 1814, à 6 heures du soir, on entendit au même endroit retentir le cri, mille fois répété, et poussé par le même peuple, de « Vive le Roi! vive Louis XVIII! » lorsque la figure de Napoléon toucha le sol.

Enfin, pour compléter l'histoire des vicissitudes de la statue de la colonne Vendôme, depuis 1814 jusqu'à nos jours, ajoutons que le monument fut réédifié en 1875 dans tous ses détails originaux, gràce à de nouveaux moulages faits sur les formes primitives conservées depuis le premier Empire. Il fut d'abord ques

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LE NAPOLÉON DE LA COLONNE VENDOME PAR CHAUDET. - LE NAPOLÉON DE LA COLONNE VENDÔME PAR SEURRE.

tion de remplacer la figure de l'Empereur par celle de la France; mais cette résolution, bien que formulée par décret, ne tarda pas à être abandonnée, et la statue de Dumont, relevée de son lit de fumier, reprit sa place au sommet de la spirale glorieuse.

Pour épuiser cet intéressant sujet, voici quelques détails techniques peu connus et que nous empruntons en partie à la monographie de M. Ambroise Tardieu.

Les plaques de bronze dont la colonne est revêtue sont au nombre de 425 et pèsent, avec la statue et les divers ornements, 180 000 kilogrammes. Tous ces objets ont été coulés avec l'airain de l'artillerie conquise sur l'ennemi à Ulm et à Vienne. 1120 agrafes de même métal et scellées dans le noyau de pierre du monument servent à y fixer ces plaques. L'ajustage en est aussi simple que

solide. Dans cet ajustage on avait à prévoir l'effet de la dilatation et du resserrement du métal selon les variations de l'atmosphère. On a paré à tout inconvénient en faisant rejoindre les plaques en biseau contrarié, et en perçant les sabots et les agrafes par où le goujon passe, les uns d'un trou ovale, les autres d'un trou rond. Ce procédé a tellement bien réussi, que dans aucune saison de l'année on ne peut apercevoir le moindre intervalle entre le jointement des pièces.

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Le fùt de la colonne est enveloppé dans toute sa [hauteur par un bas-relief qui se déroule en spirale sur une longueur de 840 pieds environ, et qui présente une suite de tableaux où sont inscrits, presque jour par jour, les faits mémorables de la campagne.

C'est sur les programmes dictés par Denon que M. Bergeret, qui venait de débuter avec éclat dans la peinture, sut écrire d'une manière aussi exacte que pittoresque, et dans une suite de dessins de près de mille pieds d'étendue, le journal historique de la campagne de 1805. Ses croquis ont, à la vérité, servi de guide plutôt que de modèle aux sculpteurs'; mais, il faut le dire à la louange du

1. Voici les noms des sculpteurs qui ont exécuté les tableaux qui couvrent le fût de la colonne. Bartholini, Beauvallet, Boiseliot, Baquet, Bosio, Bouillet, Bridou, Callamart, Carvelli, Mlle Charpen

dessinateur, les bas-reliefs les plus remarquables sont ceux qui s'écartent le moins des compositions originales.

On peut voir, reproduites dans cet ouvrage, deux planches réprésentant trois des bas-reliefs de la colonne, le bas-relief no 13, le bas-relief n° 14 et le basrelief no 32. Nous les avons choisis de préférence, la figure de l'Empereur nous paraissant indiquée avec plus de soin dans ces trois compositions que dans les autres suites.

Le bas-relief n° 13 nous fait voir l'Empereur au moment où l'électeur de Bade vient le recevoir à Ethlingen. L'artiste a choisi l'instant où les deux cor

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tèges se rencontrent. L'Empereur a mis pied à terre et reçoit les compliments de l'électeur, qui le considère en ce moment comme son libérateur.

Dans le bas-relief n° 14, nous assistons à la réception de l'Empereur, à Louisbourg, par l'électeur de Wurtemberg.

Le sujet, comme on le voit, est à peu près analogue au sujet précédent. Ici l'électeur s'incline devant Napoléon en signe de respect et de reconnaissance. La pose et l'attitude de Napoléon le font aisément reconnaître.

Le bas-relief no 33, un des plus remarquables, représente le feld-maréchal Mack et dix-huit généraux remettant leur épée en présence de l'Empereur, après la capitulation d'Ulm. Le mouvement oratoire du principal personnage explique l'entretien assez long que Napoléon eut en ce moment avec les vaincus : « Mestier, Clodion, Corbert, Delaistre, Deseine, Dumont, Dupasquier, Fortin, Foucou, Franin, Gaule, Gérard, Gois fils, Lorto, Lucas, Moutini, Petitot, Picard, Renaud, Rutxhiel, Stouff et Taunay. Tous les ornements de sculpture ont été exécutés par Gelée. Les aigles du piédestal sont dues au ciseau de Canlers. Le bas-relief de la façade où se trouve la porte d'entrée, ainsi que les deux Renommées qui soutiennent le cartouche de l'inscription, ont été dessinés par M. Mazois, architecte, et sculptés par M. Gérard. Les bas-reliefs des trois autres côtés du piédestal ont été exécutés en commun par MM. Beauvallet et Renaud, d'après les dessins de Zix. Enfin la fonte de toutes les pièces de la colonne a été commencée par M. Delaunay et achevée par M. Canlers, dans les ateliers construits dans l'enceinte de la foire Saint-Laurent. La ciselure fut confiée à M Raymond

sieurs, leur dit-il entre autres choses, votre maître me fait une guerre injuste. Je vous le dis avec franchise, je ne sais pas pourquoi je me bats, j'ignore ce qu'on veut de moi. » Puis il ajouta : « Je donne encore un conseil à mon frère

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Napoléon reçu par l'électeur de Bade à Ethlingen. L'Empereur reçu par l'électeur de Wurtemberg à Louisbourg.

l'empereur d'Allemagne : qu'il se hâte de faire la paix. C'est le moment de se rappeler que tous les empires ont un terme; l'idée que la fin de la dynastie de la maison de Lorraine serait arrivée doit l'effrayer. Je ne veux rien sur le continent ce sont des vaisseaux, des colonies, du commerce que je veux, et cela vous est avantageux comme à nous. » Le général Mack répondit à Napoléon que son maître n'avait pas voulu la guerre, mais qu'il y avait été forcé par la Russie. « En ce cas, répondit l'Empereur, vous n'êtes donc plus une puissance. >>

Tel est le tameux colloque souvent reproduit avec assez d'habileté dans cette

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Le feld-maréchal Mack et dix-huit généraux remettant leur épée en présence de Napoléon.

composition où l'Empereur est représenté sur une petite éminence, en avant de son état-major, pendant qu'un de ses aides de camp reçoit les épées des officiers autrichiens.

Voici deux documents puisés à la source officielle des papiers de l'Empire et qui établissent avec d'intéressants détails le prix total de la colonne Vendôme.

L'un est une lettre-rapport du secrétaire perpétuel de la classe des Beaux

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Arts à M. Denon, membre de l'Institut, et directeur général des musées; l'autre est une lettre de Denon à l'Empereur.

Mon cher Confrère,

8 mars 1806.

Je m'empresse de vous adresser les réponses et solutions données hier au soir par la commission de la classe des Beaux-Arts sur les questions que vous aviez faites relativement à la colonne de la place Vendôme.

Première question. Quelle est la proportion convenable?

La proportion de la colonne Trajane a été unanimement préférée.
Deuxième question. Faudra-t-il adopter le noyau plein ou l'escalier?

Le diamètre permettant de pratiquer un escalier sans nuire à la solidité, on a pensé unanimement qu'il serait utile et agréable.

Troisième question. Le piédestal doit-il être en marbre, granit ou bronze?

On croit que le premier socle doit être en granit et le reste du piédestal de la même matière que la colonne.

Quatrième question. Quel sera le montant des dépenses nécessitées par le travail?
La dépense a été calculée dans tous les détails suivants :

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