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dre les objets par extrait. En consé quence, il a réduit à cinq points tout ce qui regarde l'institut des Jésuites, et il les a parcourus avec rapidité; ensuite il a passé à l'examen de la déclaration du 2 août, et a pensé qu'elle liait la compagnie et l'empêchait de statuer définitivement et même provisoirement. Au surplus, il a proposé trois réflexions à ce sujet : La première, que le parlement ne pouvait statuer que pour son ressort, et qu'à peine y trouvait-on un tiers des maisons des Jésuites en France, qu'ainsi c'était une raison pour adopter la déclaration qui tend à mettre le Roi à portée de statuer sur la totalité des maisons de la société. La deuxième, que, puisque l'on a attendu depuis 150 ans, pour statuer, il ne peut pas y avoir d'inconvénient d'attendre encore pendant une année. La troisième enfin portait sur la crainte de compromettre, ce qu'on ferait, en excitant par là un conflit d'autorité. Il a donc proposé l'avis d'enregistrer la déclaration, mais avec des réserves, au nombre de trois. La première sans approbation du greffe du conseil, la deuxième sans approbation de la qualité d'ordre religieux, et la troisième sans approbation du nom même des Jésuites.

M. Formé, conseiller de grand'chambre, a été d'avis d'arrêter des remontrances pour prier le Roi de retirer sa déclaration, et cependant de rendre arrêt pour défendre aux Jésuites de tenir des colléges.

M. Boucher, conseiller de grand'chambre, a ajouté à cet avis de défendre aux jésuites de tenir des congrégations.

M. de Laverdy, de la première des enquêtes, a dit que jamais affaire plus importante n'avait occupé la compagnie, puisqu'il s'agit de la sûreté de la personne des Rois, de la tranquillité de l'état, du maintien de la religion, et de l'éducation de la jeunesse; qu'il examinera cette affaire sous deux points de vue; que le premier consiste à considérer les Jésuites en eux-mêmes, indépendamment de ce qui a pu se passer en France à leur égard; le second à les considérer relativement à ce qui s'est passé en France par rapport à eux.

Dans la première partie, il discute deux questions.

1o L'institut des Jésuites est-il recevable en lui-même ? Il conclut négativement.

2o L'institut des Jésuites peut-il devenir recevable en le réformant?

Il s'explique ainsi :

Plusieurs ordres religieux ont été réformés

en exécution des arrêts de la cour. L'autorité du parlement est constante à cet égard, les gens du Roi l'ont démontré de nouveau.; et c'était sans doute une précaution utile dans le temps d'obscurité où l'esprit d'indépendance fait méconnaître, à beaucoup d'ecclésiastiques, les droits les plus certains de l'autorité royale que nous sommes chargés d'exercer et de conserver au nom du Roi.

Mais quand un ordre religieux peut-il être réformé? c'est lorsqu'il se trouve dans ses constitutions quelques règles ou dangereuses ou contraires à nos maximes, ou lorsque l'ordre entier, ou du moins quelques-uns de ses membres le demandent à juste titre, ou du moins lorsqu'il s'y est introduit quelque abus qu'il s'agit de réformer.

Mais que s'il se présente un ordre religieux dont la nature même de l'institut soit essentiellement vicieuse, dont la mobilité échappe nécessairement à toute réformation, et dont la conduite ne présente qu'une suite d'abus intolérables, il est évident qu'on ne pourrait pas le réformer, à moins de créer un autre institut. Qu'il s'agit donc de voir si l'institut qu'il examine renferme ces trois caractères : >> Nature vicieuse;

>> Mobilité qui échappe à toute réformation; >> Conduite qui ne présente qu'une suite d'abus. »

PREMIER CARACTÈRE.

Nature de l'institut, essentiellement vicieuse.

Que d'abord le vice de l'institut des Jésuites dans sa nature et dans sa substance a été démontré, et vient d'être établi dans le peu qu'il en a dit pour prouver que l'institut était nonrecevable en lui-même, et qu'il passe au second caractère.

DEUXIÈME CARACTÈRE.

Mobilité de l'institut qui échappe à toute réformation.

Qu'il serait difficile de s'aveugler à cet égard que, dès sa naissance, cet institut a obtenu de Paul III, en 1543, ce droit si étonnant (constitutiones ipsas condere et tam hactenus factas, quam in posterùm faciendas constitutiones ipsas juxtà locorum, temporum ac rerum varietatem mutare, alterare, et alias de novo condere possint et valeant), et que ces nouvelles lois, qu'ils pourront à chaque instant détruire, faire ou changer, n'auront plus besoin de passer sous les yeux du père commun des fidèles. Quæ postquam mutatæ, alteratæ vel novo conditæ fuerint eo ipso, apostolica autoritate præfecta confirmatæ censeantur eadem apostolica autoritate de speciali gratia indulgemus. Sur quoi donc opinons-nous? continue M. de Laverdy? ce n'est pas sur les Constitutions des Jésuites, puisqu'il n'en existe aucune, qu'autant qu'ils le veulent bien, et que tout ce qui leur plaît est approuvé d'avance; qu'elles échappent à celui qui croit les tenir; que si donc on les réforme, la société fera le lendemain, suivant le droit qui lui est accordé, de nouvelles constitutions totalement contraires à ce qui aura été réglé lors de la réformation; qu'on les ignorera pendant quelque temps, et que de réforme en réforme, on finira par retrouver la société telle qu'elle était aupa

ravant.

Qu'en vain les deux puissances se réuniraient pour réformer les Jésuites; que cette société rétablira tout dans l'ancien état, sans avoir besoin de nouvelle confirmation; que ce rétablissement, revêtu de la date qu'elle aura voulu choisir, aura de plein droit toute force

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