nellement de ce bois sacré à une multitude de personnes. Voici ce qu'il écrivoit à ce sujet, vers l'an 350, à l'empereur Constance, fils de Constantin : « Sous l'empire de Constantin, >> votre père, d'heureuse mémoire, et très-chéri >> de Dieu, le bois salutaire de la Croix fut >> trouvé à Jérusalem; et la bonté divine a donné » à ce religieux empereur la consolation de dé>> couvrir les lieux saints, auparavant cachés » (sous les monumens de l'impiété). » Le même saint, dans plusieurs de ses Catéchèses, parle du bois sacré de la Croix qui se voit à Jérusalem, et que la piété des fidèles a déjà répandu dans le monde entier. A des témoignages si nombreux et si respectables, qu'oppose-t-on? Quelques différences entre les auteurs sur les circonstances du fait dont il s'agit; mais surtout le silence d'Eusèbe, dans la Vie de l'empereur Constantin (1). Il est vrai que les auteurs qui rapportent en détail l'histoire de l'Invention de la sainte Croix, ne s'accordent pas entièrement sur quelques (1) Cette difficulté, proposée avec beaucoup de confiance dans les Centuries de Magdebourg (IVe Centurie, chap. xIII), est solidement résolue par Gretser, de Cruce, lib. I, cap. LXIII. Bened. XIV, de Festis, lib. I, cap. xiv, n. 10, 11, 12. — Acta Sanctorum, de sancta Helena, 18 Aug. § 8. Tillemont, ubi suprà, pag. 639. circonstances de ce fait. Les uns disent que la Croix de Jésus-Christ fut manifestée par son titre; les autres, par la guérison miraculeuse d'une personne malade; d'autres enfin, par la résurrection d'un mort. Mais rien n'est si commun que de voir les historiens, même les plus exacts, s'accorder sur la substance d'un fait, dont ils racontent diversement les circonstances, soit qu'ils ne s'appliquent pas tous également à les connoître et à les exposer, soit que les diverses relations d'après lesquelles ils écrivent en aient obscurci quelques – unes. Aussi est-il généralement reconnu qu'un fait important, sur lequel tous les historiens s'accordent, ne laisse pas d'être certain, malgré les différences qu'on remarque entre eux sur les détails et les circonstances de ce fait. Le silence d'Eusèbe a fourni à quelques auteurs protestans la matière d'une difficulté plus sérieuse. Ces auteurs ont prétendu qu'Eusèbe, dans la Vie de Constantin, où il parle du voyage de sainte Hélène en Palestine, et même de la découverte du saint Sépulcre, ne disoit rien de la Croix trouvée avec le saint Sépulcre (1). Mais cette difficulté paroîtra bien foible, si on l'examine de près; car, 1o il n'est point constant (1) Euseb. Vita Constantini, lib. III, cap. xxv, etc. qu'Eusèbe ait entièrement passé sous silence la découverte de la sainte Croix. Ce fait est clairement énoncé dans un passage de sa Chronique, dont la supposition, quoiqu'elle ait paru probable à quelques savans, n'est cependant pas démontrée; car il est certain qu'on lit ce passage dans plusieurs manuscrits et anciennes éditions, selon la remarque de Benoît XIV (1). 2o Il est très-vraisemblable qu'Eusèbe fait mention de la découverte de la sainte Croix dans la Vie de l'empereur Constantin. En effet il y rapporte une lettre de cet empereur à saint Macaire, évêque de Jérusalem, où il se réjouit de ce que Dieu a fait éclater de son temps le monument qui nous fait connoître la Passion du Sauveur, et qui avoit été si long-temps caché sous la terre. Ces expressions conviennent très-bien à la Croix de Jésus-Christ; car le saint Sépulcre étoit plutôt le monument de la Résurrection que de la Passion du Sauveur. Si cette interprétation n'est pas absolument incontestable, elle est du moins assez plausible, et assez généralement admise par les critiques, pour qu'on ne puisse nous opposer avec confiance le silence d'Eusèbe. 3o Enfin, quand on admettroit que cet auteur n'a rien dit du (1) Bened. XIV, de Festis, ubi suprà. fait en question, son silence pourroit-il seul contrebalancer le témoignage positif de tant d'autres? II. Le témoignage positif des auteurs que nous avons cités est d'ailleurs confirmé par la tradition constante des siècles postérieurs. Avant le règne de l'empereur Constantin, on ne voit pas que personne soit jamais venu à Jérusalem pour adorer la Croix du Sauveur; depuis Constantin, rien n'est plus commun dans l'Église que ce pieux pélerinage (1). On voit l'église du saint Sépulcre de Jérusalem, célèbre en Orient et par toute la chrétienté, comme ayant été élevée sur le lieu même où le Sauveur avoit été enseveli, et où sainte Hélène avoit trouvé sa Croix. On voit les principales églises du monde chrétien, en particulier celles de Rome, de Jérusalem et de Constantinople, se glorifier de posséder des portions considérables de la sainte Croix trouvée à Jérusalem, par les soins de sainte Hélène. On voit enfin la cérémonie de l'adoration de la Croix établie à la même époque, en mémoire de cette précieuse découverte, et des Fêtes instituées vers le même temps, pour en perpétuer le souvenir (1). (1) Gretser, de Cruce, tom. I, lib. I, cap. LXXIII et LXXVI. On trouvera dans la question suivante de plus amples détails sur les faits que nous nous bornons ici à indiquer en peu de mots. III. Enfin le suffrage des plus habiles critiques du dernier siècle achève de dissiper tous les doutes qu'on pourroit élever sur ce fait. Nous avons déjà nommé Baronius, les auteurs des Acta Sanctorum, le P. Pétau, Fleury, Baillet, Tillemont, Le Beau, Benoît XIV, etc. auxquels il seroit aisé d'ajouter une infinité d'autres savans, même parmi les plus connus pour la sévérité de leur critique. Il nous suffira de rapporter ici le témoignage de Bossuet, qui, non content de rappeler le fait en peu de mots dans son Histoire universelle (2), y insiste particulièrement dans son magnifique Sermon sur la (1) Il paroît que, dans le principe, la fête de l'Invention de la sainte Croix n'étoit pas distinguée de l'Exaltation, établie en mémoire de la dédicace de l'église du Saint-Sépulcre de Jérusalem, et de l'apparition miraculeusee de la Croix de Jésus-Christ à l'empereur Constantin. Ce n'est guère qu'au sixième siècle que fut instituée en Occident la fête particulière que nous célébrons aujourd'hui le 3 mại, en mémoire de l'Invention de la sainte Croix. Les Grecs et les Orientaux joignent encore aujourd'hui la fête de l'Invention à celle de l'Exaltation, le 14 septembre. On trouvera de plus amples détails sur l'origine et les vicissitudes de ces deux fêtes dans les Actes des Saints, sous les dates du 3 mai et du 14 septembre. Voyez aussi Baillet et Benoît XIV, ibid. - Gretser, de Cruce, tom. I, lib. I, cap. LXIV, etc. (2) Discours sur l'Hist. univ. Ire partie, 11o époque. |