Images de page
PDF
ePub

« dans lequel sa croix fut plantée (1). » Ce témoignage d'Anseau est conforme à celui de quelques auteurs beaucoup plus anciens (2), qui supposent, comme une chose constante, que la Croix de Jésus-Christ se composoit de plusieurs sortes de bois. C'est ce qu'on lit en particulier dans l'Explication de l'ouvrage des six jours, par Anastase le Sinaïte, qui écrivoit au milieu du sixième siècle (3), c'est-à-dire, dans un temps assez peu éloigné de celui où l'on avoit découvert la sainte Croix, dans le pays même où cette découverte avoit eu lieu, et où il avoit eu la facilité d'examiner à loisir une partie très-considérable du bois sacré. Cet auteur dit expressément que « Jésus-Christ s'est couché et s'est >> endormi sur une Croix composée du bois de >> trois sortes d'arbres. » On trouve la même chose dans une Homélie sur l'adoration de la Croix, placée parmi les OŒuvres de saint JeanChrysostome (4), et dans un recueil d'opuscules insérés parmi les OŒuvres du vénérable

(1) Gallia Christ. ubi suprà, Pièces justif. pag. 45. -N. II des Pièces placées à la suite de cette Notice.

(2) On trouve ces témoignages réunis dans Gretser, de Cruce, lib. I, cap. v.

(3) Anast. Sin. in Hexaèmeron, lib. V; apud Biblioth. Patr. tom. IX, pag. 879.

(4) S. Chrysost. Op. tom. III, inter spuria, pag. 823.

Bède (1). Nous n'ignorons pas que l'authenticité de ces deux derniers témoignages est contestée; mais il est du moins certain qu'ils sont fort anciens, et d'une époque assez voisine de celle où vivoient les auteurs auxquels ces écrits ont été long-temps attribués.

Faute d'avoir connu ce témoignage, et principalement ceux d'Anseau et d'Anastase le Sinaïte, quelques savans (2) ont avancé, du moins comme une chose assez vraisemblable, que la Croix de Jésus-Christ se composoit d'un seul bois, qui étoit le chêne. Il résulte clairement des témoignages que nous avons cités, non-seulement que l'opinion de ces auteurs est tout-à-fait gratuite, mais qu'elle est combattue par des autorités d'un très-grand poids, comme Gretser l'a démontré avant nous dans son savant ouvrage sur la Croix de Jésus-Christ (1).

(1) Beda, in Collectaneis. Oper. tom. III, pag. 495, édit. Colon. 1612. On doit remarquer que tous les auteurs que nous venons de citer s'accordent à supposer, comme une chose reconnue de leur temps, que la Croix de Jésus-Christ se composoit de plusieurs sortes de bois. Ils ne s'accordent pas également sur la nature des différens bois dont se composoit la croix du Sauveur; soit qu'ils ne les eussent pas assez examinés, ou que la nature de ces différens bois soit assez difficile à déterminer à cause des altérations que le temps a dû leur faire subir. Il est également à remarquer que, parmi les auteurs dont il s'agit, les uns parlent de quatre sortes de bois, et les autres de trois. Ces derniers auteurs ne parlent sans doute que de la Croix proprement dite, c'est-à-dire, séparée

du Titre.

(2) Voyez entre autres Juste Lipse, de Cruce, lib. III, сар. XIII. Sandini, Hist. sacræ Famil. part. I, cap. xv, n. 9. - Serry, Exercit. hist. de Christo. Exercit. LV, n. 1. Les témoignages que nous avons cités montrent combien ce dernier auteur est peu fondé à prétendre que l'opinion qui suppose différentes espèces de bois dans la Croix de notre Seigneur, a été imaginée dans ces derniers temps, et qu'elle n'a d'autre fondement que le texte attribué au véné

rable Bede.

En 1793, lorsque la municipalité de Paris eut fait enlever les objets précieux qui se conservoient dans le trésor de l'église métropolitaine, M. Guyot de Sainte-Hélène, alors commissaire de la section de la Cité, obtint du comité révolutionnaire la permission de garder la Croix d'Anseau, qu'il partagea avec M. l'abbé Duflost, gardien du trésor de Notre-Dame. De la partie qu'il s'étoit réservée, M. Guyot de Sainte-Hélène forma depuis quatre Croix différentes, dont trois seulement ont été rendues jusqu'ici à l'église métropolitaine. Avant cette restitution, M. Guyot de Sainte-Hélène eut la précaution de faire reconnoître les débris de l'ancienne Croix d'Anseau par plusieurs anciens chanoines et dignitaires de la métropole, et spécialement par un ancien trésorier du chapitre, qui avoit une

(1) Gretserus, de Cruce: tom. I, lib. I, cap. IV, V, VI.

connoissance exacte de la sainte Relique et de toutes les circonstances qui pouvoient servir à en attester la conservation. Ce ne fut qu'après ces précautions que Mgr le cardinal de Belloy, archevêque de Paris, reconnut lui-même, en 1803, l'authenticité des trois Croix rendues à la métropole, et permit de les exposer de nouveau à la vénération des fidèles. On trouvera, à la suite de cette Notice (no III), les pièces authentiques d'où nous avons tiré ces détails. Les originaux de ces pièces sont jointes aux saintes Reliques, dont nous croyons devoir donner ici une description exacte.

La première des trois Croix dont nous venons de parler, a, dans sa plus grande longueur, dix-neuf lignes et demie, sur une largeur d'environ deux lignes et demie; sa traverse est d'environ douze lignes et demie; elle est enchâssée dans une Croix de vermeil, haute d'environ deux pieds, que le célébrant a coutume de porter à l'autel pour la messe des fêtes solennelles.

La seconde Croix a, dans sa plus grande longueur, environ deux pouces, sur une largeur de quatre lignes; et sa traverse est d'environ un pouce et demi. Elle est enchâssée dans une Croix de cuivre argenté, haute d'un pied et demi, que le célébrant a coutume de porter à

l'autel pour la messe des simples dimanches et fêtes doubles.

La troisième Croix a, dans sa plus grande longueur, trente-deux lignes, sur une largeur de six lignes, et une ligne et demie d'épaisseur; sa traverse est de dix-huit lignes. Cette dernière Croix seule est d'un bois blanc, assez semblable à du sapin. Les deux autres sont d'un bois noir, de la couleur de l'ébène; cependant on y remarque aussi quelques parcelles du bois blanc qui étoit autrefois incrusté dans le bois noir. Pour consolider la vraie Croix de bois blanc, on l'a collée sur un morceau de bois commun qui a les mêmes dimensions, et on a enfermé le tout dans une monture de cuivre, attachée à une grande Croix de bois doré, dont on a coutume de se servir le Vendredisaint, pour la cérémonie de l'Adoration de la Croix..

§ II. Du morceau de la vraie Croix provenant de la SainteChapelle.

Parmi les différentes portions de la vraie Croix qui se conservent aujourd'hui dans le trésor de l'église métropolitaine, la plus considérable provient de la riche collection des Reliques de la Passion de notre Seigneur, qu'on voyoit autrefois à la Sainte-Chapelle de Paris.

« PrécédentContinuer »