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une stipulation particulière, l'acheteur se fût réservé une faculté de dégustation ou de vérification qui laissât la chose aux risques du vendeur.

Cependant un arrêt de la Cour de cassation, du 5 décembre 1842 (1), a jugé le contraire, en rejetant le pourvoi formé contre un jugement qui avait décidé qu'un acheteur avait pu arbitrairement refuser, parce qu'il ne les agréait pas, des vins qui lui avaient été expédiés sur sa demande. « Attendu, porte cet arrêt, qu'il ne résulte du jugement attaqué aucune convention, aucun usage qui ait dérogé au texte littéral et formel de l'article 1587. » Dans ce système, le fait de l'exécution de la vente au moyen de l'expédition et de la livraison ne suffirait pas pour écarter l'application de l'article 1587; il faudrait, de plus, une convention textuelle, comme si l'exécution d'une vente qui a pour objet des marchandises qu'on est dans l'usage de goûter et d'agréer n'était pas la dérogation la plus expresse et la plus manifeste à l'article 1587, qui porte qu'il n'y a pas vente tant que la marchandise n'a été ni goûtée ni agréée. Cet arrêt est donc en contradiction évidente avec la vérité des choses et les principes du droit sur la livraison et ses conséquences (2).

Il y a plus, je crois que la renonciation à la dégustation, qui résulte de l'expédition faite sur demande de choses qu'on est dans l'usage de goûter, a lieu non-seulement quand il s'agit d'une vente commerciale, c'est-à-dire d'un achat fait dans la vue d'une revente, mais encore quand il s'agit d'une vente civile, c'est-à-dire quand l'achat est fait par un consommateur. La position de l'acheteur est dans les deux cas la même, relativement au vendeur; quel que soit le but de l'achat, l'acheteur peut renoncer à la dégustation, et il est réputé y renoncer lorsqu'il charge le vendeur, qui n'a pas à s'enquérir de la destination future de la chose expédiée, de lui expédier la marchandise, et qu'il lui donne l'ordre de s'en dessaisir par le fait d'une livraison qui entraîne avec elle la responsabilité du risque.

(1) Dev., 43. 1. 89.

(2) Cet arrêt de rejet est de la Chambre civile; la Chambre des requêtes vait admis le pourvoi sur le rapport de M. Troplong.

1626. A plus forte raison, la chose vendue, bien qu'elle, soit de celles qui se goûtent, est-elle mise aux risques de l'acheteur, par l'expédition qui en consomme la tradition, si elle a été vendue sur échantillons, c'est-à-dire si l'acheteur, après avoir goûté et agréé les échantillons, a demandé expédition de marchandises. semblables aux échantillons qui sont restés en sa possession; la vente est alors parfaite, sous la condition résolutoire que les marchandises expédiées seront conformes à l'échantillon.

1627. Du reste, il faut encore appliquer ici une observation que j'ai déjà faite en parlant des effets de l'expédition sous le rapport des risques (1): c'est qu'il est permis aux parties de déroger à la règle générale qui met les risques à la charge de l'acheteur. On peut se reporter à cet égard aux explications que j'ai déjà données sur l'article 100 du Code de commerce (2).

1628. Si dans l'exposition des règles qui précèdent, j'ai pris habituellement des exemples dans le contrat de vente, c'est que de tous les contrats intéressés ou à titre onéreux, c'est celui dans lequel se retrouvent à un degré plus éminent et d'une manière plus apparente les caractères et les effets que le Code attribue aux contrats en général, en ce qui touche la transmission de la propriété et les conséquences légales de cette transmission. Il est d'autres contrats qui, bien qu'ayant beaucoup de rapports avec la vente, n'en produisent pas tous les effets sous le point de vue particulier de la transmission de la propriété et des risques. Telle est la dation en payement. Dans cette espèce de contrat, le risque, ainsi que le font très-bien observer MM. Delamarre et Lepoitvin, n'est déplacé que par la tradition effectuée ou régulièrement offerte, puisqu'on ne peut être payé avant d'avoir reçu la chose, et que jusque-là la propriété de la chose et conséquemment le risque continuent de reposer sur la tête du débiteur (3). 1629. Remarquons encore, qu'en règle générale, celui qui supporte la perte, supporte la simple détérioration; et que celui qui est chargé du risque profite de l'accroissement ou de l'augment de la chose due.

(1) Voy. sup., n. 1623,

(2) Voy. sup., n. 1599.

(3) T. III, p. 300.

1630. Il y a en matière de risque des règles particulières aux obligations alternatives (1).

Il en est aussi de particulières aux obligations contractées sous une condition suspensive, et spécialement à la vente à l'essai, qui, aux termes de l'article 1588 du Code Napoléon, est toujours réputée faite sous une condition suspensive (2). Je les examinerai en traitant des diverses espèces d'obligations.

1631. Je passe maintenant à ce qui concerne les effets de la demeure sur les risques de la chose due. La demeure produit également des effets particuliers en ce qui touche la résolution. des conventions, et les dommages-intérêts résultant de l'inexécution de l'obligation; mais ce sont là des points de vue particuliers auxquels nous ne nous plaçons pas encore (3).

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SOMMAIRE.

1632. Ce que c'est qu'être en demeure. Le créancier peut être en demeure aussi bien que le débiteur. Différence entre les effets de la mise en demeure du débiteur et de la mise en demeure du créancier. 1633. La demeure ne déplace que les risques postérieurs à la demeure. 1634. Effets de la demeure sur le risque qui consiste dans l'abaissement du prix. Hypothèses diverses. 1635. Comment a lieu la mise en demeure: ex persond; ex contractu; ex lege. 1636. Les moyens sont les mêmes, soit qu'il s'agisse du débiteur, soit qu'il s'agisse du créancier. — 1637. De la mise en demeure ex persond. Interpellation, sommation ou autre acte équivalent. Acte privé. Correspondance. 1638. Interpellation verbale; preuve par témoins ou par présomptions. 1640. L'interpellation ne constitue le débiteur en demeure qu'autant qu'il ne s'exécute pas de suite ou dans un bref délai. 1641. Mise en demeure ex contractu, par l'échéance du terme fixé par la convention. 1642. Il faut que le terme soit certain, et qu'il ne dépende pas de la volonté du créancier. 1643. L'échéance du terme ne met le débiteur en demeure que lorsque le retard n'est pas du fait du créancier. 1644. Mise en demeure ex lege par l'échéance du terme fixé par la loi. Exemple pris du prêt à usage. 1645. De la purge de la demeure.

1639. Serment.

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1632. Nous avons vu que, aux termes de l'article 1138 du Code Napoléon, l'obligation de livrer une chose rend le créancier propriétaire de cette chose, et la met à ses risques, encore que

(1) Voy. inf., ch. iv, sect. 3.

(2) Voy. inf., ch. iv, sect. 1, § 2.

3) Voy. inf., sect. 3 et 4.

III.

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la tradition n'en ait point été faite, à moins que le débiteur ne soit en demeure de la livrer; auquel cas la chose reste aux risques de ce dernier.

Être en demeure, c'est être en retard de faire une chose. L'effet dece retard, quant aux risques, est de les mettre à la charge du retardataire qui, avant d'être mis en demeure, n'en était pas chargé; et bien que l'article 1138 ne s'occupe que du cas où c'est le débiteur qui est en demeure de livrer la chose, en transportant sur la tête de ce dernier les risques de la chose qui, avant la demeure, pesaient sur le créancier, il n'est pas moins certain que, dans le cas où une circonstance particulière met, avant la demeure, les risques à la charge du débiteur, la demeure dans laquelle le créancier se trouverait constitué de remplir une condition, dont l'effet serait de le charger des risques, en décharge le débiteur. C'est ce qui a lieu lorsqu'une vente a été faite sous une condition qui laisse les risques à la charge du vendeur, par exemple, avec stipulation qu'il restera chargé de la marchandise jusqu'à la livraison : le retard de l'acheteur pour prendre livraison, fait passer sur sa tête les risques qui auparavant reposaient sur celle du vendeur.

Toutefois, il y a une différence entre les effets du déplacement du risque qui passe de l'acheteur au vendeur, et les effets de ce déplacement quand le risque passe du vendeur à l'acheteur. Dans le premier cas, le vendeur ou le débiteur qui, par suite de la demeure, se trouve chargé des risques, et conséquemment du cas fortuit, peut se décharger de ce cas fortuit en prouvant que la chose eût également péri chez le créancier si elle lui eût été livrée ; et on présume alors qu'elle n'eût pas péri chez le créancier, si c'est un marchand qui achète pour revendre (1). Dans le second cas, l'acheteur ou le créancier qui, étant en retard de prendre livraison, se trouve chargé des risques, ne pourrait se décharger du cas fortuit en prouvant que la chose eût également péri si la livraison lui avait été faite, puisque le créancier qui est en retard de prendre livraison ne peut être dans une position meilleure que celui qui a pris livraison, et

(1) Rogue, Jurispr. consul., t. 1, p. 287.

puisque celui qui aurait pris livraison ne pourrait évidemment pas rejeter les risques quels qu'ils fussent, sur le débiteur qui se serait libéré (1).

1633. En règle générale, la demeure, en déplaçant les risques, ne transporte de l'un à l'autre des contractants que les risques postérieurs à la demeure. Si donc, avant la demeure, la chose a déjà subi une détérioration, et qu'après la demeure elle en subisse une nouvelle ou vienne à se perdre, celui des contractants qui est en demeure, ne supporte la détérioration ou la perte, que sous la déduction de la détérioration antérieure. Il en est ainsi, soit que la demeure du vendeur fasse passer sur sa tête les risques qui pesaient antérieurement sur l'acheteur; soit que le retard de l'acheteur attire sur lui la responsabilité des risques que le contrat mettait à la charge du vendeur.

1634. Mais en est-il ainsi lorsque le risque consiste, non dans une détérioration matérielle, mais dans un abaissement du prix courant qui diminue la valeur vénale de la chose?

Il faut remarquer d'abord que l'abaissement de valeur ne peut constituer un risque à la charge du vendeur, qu'autant qu'il est en demeure de livrer; la convention expresse ou tacite qui laisserait les risques à sa charge jusqu'à la livraison ne peut avoir pour effet de le charger du risque immatériel, résultant d'un abaissement de valeur, et de changer ainsi le prix de vente irrévocablement fixé au moment du contrat. L'acheteur avait le droit de prendre livraison; la livraison prise, la moins -value était à sa charge; il ne peut dès lors, en reculant devant l'exercice de son droit, modifier les bases de la convention. Il suit de là que si l'acheteur vient à être constitué en demeure de prendre livraison, et conséquemment à être chargé des risques qui, originairement, regardaient le vendeur, il supporte non-seulement la moins-value postérieure à la demeure, mais encore la moinsvalue antérieure. C'est là une dérogation à la règle générale qui ne fait supporter au retardataire que les risques postérieurs au retard.

Les variations de prix, en cas de déplacement du risque, peuvent donner lieu à d'autres questions.

(1) C. Nap., 1302.

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