recours qu'entre ceux qui ont payé, et non de la part de ceux qui ont payé un dividende contre ceux qui n'en ont pas payé. Cette distinction, qui résulte clairement des termes de l'article 543 combinés avec ceux de l'article 542 qui le précède, est . d'ailleurs fondée sur la nature des choses. On sait eneffet que, d'après l'art. 542, le porteur d'engagements souscrits, endossés ou garantis solidairement par le failli et d'autres coobligés solidaires qui sont en état de faillite, participe aux distributions dans toutes les masses, et y figure pour la valeur nominale de son titre jusqu'à parfait payement; et qu'ainsi le créancier qui a deux codébiteurs solidaires tombés en faillite, dont l'un donne à ses créanciers 25 p. 100, et l'autre 75, peut se présenter dans les deux masses, prendre dans l'une 25, dans l'autre 75, et de cette manière se trouver payé en totalité. C'est à cette hypothèse que s'applique l'article 543, qui n'a pas voulu que la masse qui avait payé 75 pût exercer un recours contre celle qui n'avait payé que 25, parce qu'on ne pourrait admettre un recours contre une masse, à raison d'une créance pour laquelle elle a payé un dividende qui en est la représentation, sans faire ainsi figurer deux fois la même créance dans la même masse, et forcer cette masse à acquitter deux fois la même dette. La disposition prohibitive du recours des coobligés les uns contre les autres, à raison des dividendes que tous ont payé pour la même créance, repose donc sur ce principe que le dividende représente la totalité de la créance pour laquelle il est alloué; de telle sorte que celui qui a payé ce dividende est libéré, et qu'il ne doit plus rien ni à ses codébiteurs solidaires qui ont payé un dividende plus considérable, ni à ses cautions qui ont payé un dividende à sa décharge. De là il suit que cette disposition ne saurait être applicable au cas où celui qui a payé un dividende exerce un recours contre son coobligé ou son garant, failli ou non failli, peu importe, qui · n'a encore rien payé ; car si le porteur d'une lettre de change, par exemple, usant du droit qui lui appartient de s'adresser à l'un des coobligés plutôt qu'à un autre, se fait payer par l'un de ceux qui ont d'autres coobligés pour garants, on ne voit pas pourquoi celui qui a payé ne pourrait pas recourir contre ses coobligés ou garants en faillite, alors que ceux-ci n'ont encore rien payé au créancier qui ne s'est pas présenté pour figurer à leur masse. L'article 543 ne fait aucun obstacle à ce recours, parce qu'il n'a eu et n'a pu avoir pour but que de proscrire un recours entre ceux qui, ayant payé, sont dans une position égale, et non de la part de ceux qui ont payé contre ceux qui n'ont pas payé. A plus forte raison, les coobligés faillis ou non faillis, qui ont payé, ont-ils un recours contre la faillite de leur coobligé ou de leur garant, lorsque, d'après la nature du contrat, le créancier n'avait lui-même aucune action contre ce coobligé. C'est ce qui a lieu, par exemple, dans le cas où le porteur d'une lettre de change s'étant présenté dans la faillite du tireur pour compte et de l'accepteur, ses codébiteurs solidaires, ceux-ci prétendent à un recours contre le donneur d'ordre. Le porteur, n'ayant aucune action directe contre le donneur d'ordre, a dû nécessairement agir contre l'accepteur et le tireur, qui n'ont été tenus de payer qu'en qualité de représentants et de mandataires du donneur d'ordre, lequel doit les relever des dépenses qu'ils ont été obligés de faire pour l'exécution du mandat qui leur a été donné. La faillite des uns ou des autres ne change rien à cet état de choses. 2060. Il y a encore lieu au recours des coobligés faillis les uns contre les autres, lorsque la réunion des dividendes que donnent ces faillites excède le montant total de la créance en principal et accessoires. 2061. S'il s'agit de codébiteurs soumis à la solidarité ordinaire et proprement dite, entre lesquels se divise la dette, cet excédant, de même que ce qui pourrait être dû par un coobligé non failli qui n'aurait rien payé au créancier, se divise entre eux tous, comme la créance elle-même se fût divisée si, payée par l'un d'eux, ils eussent été soumis à son recours : ils prennent part au partage de la somme à laquelle tous ont un droit égal dans la proportion où ils auraient contribué à rembourser celui d'entre eux qui aurait payé la totalité (1). (1) M. Renouard, t. II, p. 182 et 183, 2e édit. 2062. Si, au contraire, il s'agit de coobligés solidaires qui sont garants successifs les uns des autres, comme en matière d'obligations à ordre, la question se complique. Dans ce cas, aux termes de l'article 543, l'excédant est dévolu, suivant l'ordre des engagements, à ceux des coobligés qui auraient les autres pour garants. Ceci demande quelques explications. Il y a plusieurs ordres de coobligés parmi ceux qui sont tenus au payement d'une lettre de change: le tireur qui est obligé, sans avoir recours contre personne, à moins qu'il n'y ait un donneur d'ordre, auquel cas il y a un recours contre le donneur d'ordre et contre l'accepteur qui s'est rendu débiteur direct de la lettre à l'égard de tous les intéressés ; l'accepteur qui, lorsqu'il n'a pas de provision, a un recours contre le tireur, ou quand c'est un tireur pour compte, contre le donneur d'ordre; enfin, les endosseurs qui ont un recours à la fois contre le tireur et contre l'accepteur, et en même temps contre tous les endosseurs qui les précèdent. De là il suit que, si l'excédant se trouve dans la faillite du tireur, ou de l'accepteur, ou d'un endosseur, le dernier des endosseurs, qui a tous les autres pour garants, profite de cet excédant; que si les endosseurs sont restés en dehors et si l'excédant se trouve dans la faillite du tireur, cet excédant revient à l'accepteur qui n'avait pas provision; et que si l'excédant se trouve dans la faillite de l'accepteur qui avait provision, cet excédant appartient au tireur (1). Mais il y a plus de difficulté pour régler le recours des faillites du tireur pour compte et de l'accepteur contre le donneur d'ordre. Quand le tireur pour compte seul a payé, il a un recours nécessaire contre le donneur d'ordre, dont il est le mandataire, et qui n'a rien payé au porteur, lequel n'avait contre lui aucune action directe (2). Quand l'accepteur seul a payé, sans avoir provision, il a un recours contre le donneur d'ordre qui était tenu de faire la pro (1) M. Renouard, t. II, p. 182, nouvelle édition; M. Lainné, p. 352. (2) Voy. sup., n. 2059. vision et qui doit le garantir des suites de son acceptation. Mais quand le tireur pour compte et l'accepteur ont l'un et l'autre payé un dividende, ont-ils tous les deux un recours contre la faillite du donneur d'ordre? La Cour de cassation a jugé (1) que le tireur et l'accepteur d'une lettre de change pour compte d'autrui doivent, lorsqu'ils ont concouru l'un et l'autre au payement de la lettre de change, être admis concurremment et au prorata de ce qu'ils ont payé dans la faillite de celui par l'ordre et pour le compte duquel la lettre a été tirée. M. Pardessus (2) pense, au contraire, que le tireur pour compte a seul le droit d'être remboursé par le donneur d'ordre, et que l'accepteur n'a rien à prétendre. Cet auteur se fonde sur ce que l'acceptation suppose la provision, non-seulement vis-à-vis des endosseurs, mais encore à l'égard du tireur pour compte, qui est assimilé à un endosseur, et envers lequel l'accepteur est tenu à la garantie du payement de la lettre; d'où il suit qu'il ne peut y avoir aucune concurrence entre le tireur pour compte et l'accepteur qui est son débiteur. C'est cette dernière opinion qui me paraît devoir être préférée. 2063. Tels sont les principaux effets de la solidarité respectivement aux codébiteurs ou coobligés. Leur exposition complète les développements un peu étendus qu'exigeait la matière si difficile et cependant si usuelle de la solidarité, et termine le chapitre des diverses espèces d'obligations. (1) Arrêts des 27 août 1832, Dev., 32. 1. 561; et 23 décembre 1834, ibid., 35. 1. 198. (2) Droit commercial, n. 1255. FIN DU TOME TROISIÈME. TABLE DES MATIÈRES. Le chiffre indique la page. LIVRE V. DU DROIT CIVIL DANS SES RAPPORTS AVEC LES OBLIGATIONS COM- 1 SECTION Ire. Définition et division des contrats.. SECTION II. Des lois qui président à la formation de contrats SECTION II. De la capacité des parties contractantes..... SECTION III. De l'objet et de la matière des contrats........ |