magistrats, par cela qu'il les a nommés honoraires, et sans doute on ne contestera pas qu'il ait eu le pouvoir de leur accorder une telle dispense. ARRÊT. LA COUR, sur les conclusions conformes de M. Jourde, avocat général, et après qu'il en a été délibéré en la chambre du conseil; Vu les art. 3 du décret du 2 octobre 1807, et 77 du décret du 6 juillet 1810; ATTENDU que de la combinaison de ces deux articles, il résulte qu'il y a deux classes de magistrats honoraires, les uns qui conservent simplement leur titre, leur rang et leurs prérogatives honorifiques, et n'exercent aucune fonction; les autres qui, outre ces prérogatives, ont droit d'assister avec voix délibérative aux assemblées des chambres et aux audiences solennelles; qu'aucune condition n'est exigée pour obtenir d'être placé dans la première de ces deux classes, mais qu'il n'en est pas ainsi pour l'être dans la seconde; que l'article cité du décret du 6 juillet 1810 veut que les droits qu'il énonce soient conférés aux magistrats par des lettres qui les expriment; ATTENDU que les magistrats honoraires qui ont concouru à l'arrêt attaqué n'avaient point obtenu ces lettres et n'avaient droit qu'aux prérogatives honorifiques dont parle l'art. 3 du décret du 2 octobre 1807; d'où il suit qu'ils étaient sans caractère au susdit arrêt; - Par ces motifs, CASSE, etc. - Du 10 janvier 1821. Section civile. M. le conseiller Trinquelague, rapporteur. avocats. pour concourir M. Brisson, président.- CONSEIL.-TÉMOIN.-NULLITÉ. Lorsque le conseil de l'accusé est appelé comme témoin aux débats, doit-il, à peine de nullité, étre remplacé pour tout le temps pendant lequel cette fonction de témoin l'empêche d'exercer celle de défenseur? Rés, aff. (Code d'instruction criminelle, art. 294 et 519.) (Paul FOLLACCI C. le MINISTÈRE PUBLIC.) Ainsi jugé sur le pourvoi de Paul Follacci contre un arrêt de la Cour de justice criminelle du département de la Corse, en date du 30 octobre 1820, qui le condamnait à la peine de mort comme coupable d'homicide. ARRÊT. LA COUR,- sur les conclusious de M. Hua, avocat général; Vu les art. 294 et 319 du Code d'instruction criminelle;-CONSIDÉRANT que l'avocat Gaffori, conseil choisi par l'accusé, aux termes dudit article 294, a été appelé comme témoin par le ministère public et entendu en cette qualité aux débats; que, pendant l'audition de ce témoin, il n'a pas été fait choix par l'accusé d'un autre conseil, et qu'à défaut de ce choix, il ne lui en a pas été nommé un d'office par le président; que, pour une partie des débats, il n'y a donc eu pour l'accusé ni choix d'un conseil de sa part, ni nomination pour lui par le président; qu'ainsi l'accusé a été privé, pendant cette époque des débats, sans son fait, et sans le fait du conseil par lui antérieurement choisi, de l'assistance d'un conseil; que conséquemment il n'a pu jouir des moyens de défense que l'art. 319 précité l'autorisait à faire valoir par son conseil comme par lui-même, contre la déposition de chaque témoin; qu'il y a donc eu infraction à la disposition dudit article 294, prescrite à peine de nullité; - D'après ces motifs, faisant droit au pourvoi de Paul Follacci, CASSE et ANNULLE les débats, et, par suite, l'arrêt de condamnation rendu contre lui par la Cour de justice criminelle de la Corse, le 3 octobre 1820; - RENVOIE, etc. Du 4 janvier 1821. Section criminelle. M. le baron Barris, président. M. le conseiller Busschop, rapporteur. M. Nicod, avocat. CONTRIBUTIONS INDIRECTES.-ACQUIT-A-CAUTION.- CERTIFICAT DE DÉCHARGE.-DOUBLE DROIT. Celui qui, ayant pris un acquit-à caution, ne rapporte pas le certificat de décharge dans les formes et dans les délais prescrits par la loi du 22 août 1791, est-il passible du double droit ? Rés. aff. (Loi du 22 août 1791, art. 12 et 14 du titre 3.) (La DIRECTION GÉNÉRALE DES CONTRIBUTIONS INDIRECTES C. le sieur TORT.) Ainsi jugé par l'arrêt suivant, portant cassation d'un jugement du tribunal civil de Carcassonne, rendu le 5 février 1818, en faveur du sieur Tort, distillateur. ARRÊT. LA COUR, sur les conclusions conformes de M. Cahier, avocat général; Vu les art. 12 et 14 du titre 3 de la loi du 22 août 1791, des acquits-à-caution; ATTENDU que le prétendu certificat de décharge, remis par le sieur Tort, ne constate que l'arrivée à Castres, déclaré simple lieu de passage, des eaux-de-vie dont Alby était la destination; que cet acte ne présente aucune des formalités expressément exigées par les art. 4, 6, 10, 12 et 14 de la loi de 1791, précisément dans la vue de prévenir la soustraction des droits, dont l'acquit-à-caution tend à assurer le paiement; qu'il ne s'agit pas ici d'un simple retard, puisque l'acquit-à-caution qui aurait dû être remis avant le 15 février 1816, ou, au plus tard, dans les six mois suivans, ne l'a été que postérieurement au 21 septembre 1817, époque où aucune réclamation ne pouvait être admise; qu'on ne saurait non plus accuser de négligence les employés, puisqu'il a été mis en fait et non contredit que c'est le sieur Tort qui a fait la remise dudit acte, dont il paraît qu'il était resté détenteur; -ATTENDU enfin que, bien loin qu'il soit justifié de l'acquittement du droit dû sur les eaux-de-vie, il résulte, au contraire, de la défense des parties elles-mêmes, qu'aucune d'elles ne prétend même l'avoir acquitté, puisque, d'une part, le vendeur soutient que l'on doit s'adresser à l'acheteur, et que celui-ci déclare qu'il ne les a achetées qu'après que le sieur Tort s'est mis en règle pour la décharge de l'acquit-à-caution; - Par ces motifs, la Cour donne défaut contre le sieur Tort, et pour le profit, CASSE. Section civile. - M. Brisson, président. - Du 20 décembre 1820. N° III.-Année 1821. 18 LÉGATAIRE PARTICULIER.-ÉTRANGER. DETTES DE LA SUCCESSION. -MOBILIER (VENTE DU).—BÉNÉFICE D'INVENTaire. La vente du mobilier d'une succession acceptée sous bénéfice d'inventaire, doit-elle être faite par le ministère d'un officier public et aux enchères, sans qu'on puisse y substituer un autre mode, et, par exemple, l'option laissée à l'héritier bénéficiaire de conserver les meubles pour le prix de l'estimation ou de les faire vendre? Rés. aff. (Code civil, art. 805.) Lorsque, par un arrêt passé en force de chose jugée, il a été décidé qu'un légataire à titre particulier ne pourrait, à cause de sa qualité d'étranger et d'Anglais, demander le paiement de son legs que sur le mobilier de la succession, peut-on lui faire supporter une partie des dettes, sous le prétexte qu'en affectant exclusivement les immeubles à l'acquittement de ces dettes, il exercerait, dans la réalité, son legs sur les immeubles? Rés. nég. (Code civil, art. 871 et 1024.) (La dame LAYTON, née GAMBY, C. le comte DE VAUban.) Le 1 mai 1815, M. de Vauban a fait un testament olographe par lequel il a institué pour son héritier le comte de Vauban, son frère, et par lequel il a fait un legs particulier de la somme de 80,000 fr. à la dame Layton, née Gamby, Anglaise d'origine, et non naturalisée en France. Le testateur est décédé au mois d'avril 1816. Le comte de Vauban, légataire universel, a accepté sa succession sous bénéfice d'inventaire, et a fait procéder en conséquence à un inventaire estimatif des objets qui la composaient. La dame Layton a formé une demande en délivrance de son legs, et cette demande a été accueillie par jugement du tribunal civil de Charolles; mais, sur l'appel du comte de Vauban, ce jugement a été infirmé par arrêt de la Cour royale de Dijon, du 9 avril 1818, qui n'a envoyé la dame Layton en possession de son legs que sur les facultés mobilières de la succession. La Cour royale de Dijon s'est fondée sur ce qu'aux termes de l'art. 11 du Code civil, les étrangers ne pouvaient succéder en France que dans les cas où les Français eux-mêmes étaient admis à succéder; et, sur ce que les Français ne succédant point aux immeubles en Angleterre, les Anglais ne devaient réciproquement pas avoir le droit de recueillir des immeubles en France, ni, ce qui, suivant la Cour royale, reviendrait au même, pouvoir faire vendre ces immeubles pour obtenir sur le prix le remboursement d'un legs d'une somme d'argent. Cet arrêt, que nous croyons complétement erroné, n'a point été déféré à la censure de la Cour suprême, et a acquis l'autorité de la chose jugée. Depuis, la dame Layton a demandé que le comte de Vauban fût déclaré déchu du bénéfice d'inventaire, soit pour cause d'omissions consi dérables dans l'inventaire, soit parce que le mobilier de la succession avait été estimé beaucoup au-dessous de sa valeur. Le tribunal civil de Charolles a statué sur cette demande par jugement du 1o juillet 1819, de la manière suivante: Après s'être convaincu que les meubles n'avaient pas été estimés à leur valeur, il a fixé cette valeur à une moitié en sus de l'estimation portée dans l'inventaire; il a ordonné ensuite que la dame Layton ferait la preuve des omissions qu'elle avait relevées. Puis, considerant que les dettes et les charges de la succession ne devaient pas être supportées par le mobilier, et que la dame Layton, comme légataire à titre particulier, ne pouvait en aucune manière en être tenue, il a déclaré qu'il était inutile de s'occuper de la demande de cette dame, tendante à faire déclarer le comte de Vauban déchu du bénéfice d'inventaire. Enfin, le tribunal a donné l'option au comte de Vauban de conserver le mobilier pour le prix fixé par le jugement, ou de le faire vendre aux enchères. Les deux parties ont respectivement appelé de ce jugement. Par arrêt du 29 juillet 1819, la Cour royale de Dijon a mis au néant l'appel de la dame Layton ; et, faisant droit sur celui du comte de Vauban, elle a maintenu la disposition du jugement de première instance qui lui avait donné l'option de conserver le mobilier au prix de l'estimation, ou de le faire vendre aux enchères, l'a renvoyé de la demande en déchéance du bénéfice d'inventaire, et enfin a ordonné que les dettes et charges de la succession seraient supportées par les successions mobilière et immobilière dans la proportion de leur valeur respective. Voici les motifs de cet arrêt, quant à ses dispositions relatives, 1o à l'option laissée à l'héritier bénéficiaire de conserver ou faire vendre le mobilier, 2o à l'affectation du mobilier de la succession au paiement des dettes, dispositions qui seules ont fixé l'attention de la Cour régulatrice, et qui seules dès-lors doivent nous occuper dans cet article. « Considérant que le tribunal, en augmentant d'ane moitié l'estimation donnée par les experts du mobilier, a fait reste de droit à la dame Layton; qu'aller au delà serait commettre une vexation envers le comte de Vauban, pour qui ce mobilier peut avoir une valeur d'affection, attendu qu'il vient de son frère; que, d'ailleurs, la dame Layton ne peut avoir aucun intérêt à sa demande, attendu que les frais de vente et droits d'enregistrement qui se percevraient sur le prix de la vente, seraient une perte pour elle; considérant que, s'il est vrai, en principe, qu'un légataire à titre particulier n'est pas tenu des dettes de la succession, il n'est pas moins vrai que l'arrêt du 9 avril 1818 a eu pour effet de placer la dame Layton dans une position toute particulière, puisqu'elle ne peut recueillir son legs sur la partie mobilière de la succession, et qu'elle ne peut, en aucun cas, en obtenir aucune partie sur les forces immobilières. Or, si, pour payer une plus forte portion du legs de la dame Layton, on laissait toutes les dettes à la charge de la force immobilière de la succession, ce serait faire indirectement ce qu'a proscrit l'arrêt de la Cour; et que la dame Layton, retournant l'argunent, ne dise pas que c'est lui faire supporter indirectement une partie des dettes de la succession, car il est de principe qu'il n'existe de biens qu'après la défalcation des dettes; que toutes les parties quelconques de la force de la succession sont affectées au paiement des dettes, et qu'il n'existe pas plus de raison d'en rejeter le paiement sur la partie immobilière seule, qu'il n'y en aurait à les faire supporter par la partie mobilière seule; d'où suit la nécessité, en réformant, d'ordonner qu'il sera composé deux états des forces mobilières et immobilières de cette succession, et qu'elles supporteront les dettes, chacune dans la proportion de leur valeur. >> Entre autres moyens de cassation que la dame Layton a proposés contre cet arrêt, elle a soutenu que la Cour royale de Dijon avait violé les articles 805, 871 et 1024 du Code civil; savoir, l'art. 805, en ce qu'au lieu d'ordonner que le mobilier serait vendu par un officier public et aux enchères, conformément à la disposition de cet article, elle avait donné au comte de Vauban, héritier bénéficiaire, l'option de conserver ce mobilier pour le prix de l'estimation portée dans le jugement de première instance, ou de le faire vendre; et les art. 871 et 1024, en ce que, quoique la dame Layton ne fût que simple légataire à titre particulier, la Cour royale avait jugé que le mobilier qui était son gage serait grevé du paiement des dettes et charges de la succession, en proportion de sa valeur comparée à celle des immeubles; ce qui était évidemment faire supporter une partie des dettes par un légataire particulier contre le texte formel des articles cités. Le défendeur à la cassation répondait à ces moyens par le développement des motifs de l'arrêt attaqué. L'arrêt que nous rapportons présente une analyse lumineuse de la discussion qui l'a précédé. ARRÊT. - LA COUR, -sur les conclusions de M. Cahier, avocat général, et après qu'il en a été délibéré en la chambre du conseil; Vu les art. 8o5, 871 et 1024 du Code civil; ATTENDU qu'aux termes dudit article 805, lorsque la vente du mobilier doit avoir lieu, elle ne peut être faite que par le ministère d'un officier public, aux enchères et d'après les publications et affiches accoutumées; que cependant la Cour royale de Dijon, en même temps qu'elle reconnaissait la nécessité de vendre le mobilier dont il s'agit, a introduit un nouveau mode de vente, en laissant l'option au défendeur de se le conserver pour le prix de l'estimation, ou de le faire vendre; ce qu'elle n'a pu faire sans violer ouvertement les dispositions dudit article; - et ATTENDU qu'il résulte des art. 871 et 1024 que le légataire. à titre particulier n'est tenu de contribuer, en aucune manière, au paiement des dettes et charges de la succession, et que la demanderesse n'est légataire du comte de Vauban qu'à titre particulier; que néanmoins l'arrêt dénoncé a jugé qu'elle devait contribuer au paiement des dettes et charges de la succession; que la Cour royale s'est appuyée, pour le juger ainsi, sur la chose jugée par l'arrêt du 9 avril 1818; mais que cet arrêt n'a enlevé ni pu enlever à la demanderesse sa qualité de légataire à titre particulier; qu'il a simplement jugé qu'elle ne pourrait être payée du montant de son legs que sur les facultés mobilières de la succession, sans rien prononcer directement ni indirectement sur l'acquittement des dettes et charges; que plus vainement encore la Cour royale a observé que |