<< ne donne en effet pour elle et son fils que la somme «<< de 50,000 francs ci-dessus fixée, lors de l'établisse<«<ment; » que ces termes expriment clairement l'intention du testateur de révoquer la substitution jointe à la disposition, dans le cas où elle ne pourrait avoir lieu, et de laisser alors subsister sa disposition sans aucune charge; que, le cas prévu ayant eu lieu, la disposition doit être considérée comme existante seule, non seulement relativement au legs fait à l'enfant de la femme Dest..... mais aussi relativement aux autres legs faits de la même manière, et notamment à celui fait au profit de la demoiselle Hermel, puisqu'il doit, aux termes du testament, se régler en tout et pour tout sur ce premier legs, qui sert de modèle aux aut res.-En ce qui touche la demande subsidiaire de la ve uve Bourguignon, tendante à ce que lesdits legs soient déclarés cadncs, sur le motif que les biens de la succession seront absorbés par ses reprises et par les dettes; attendu que l'insuffisance de la succession du feu sieur Bourguignon pour acquitter les reprises. de sa veuve et les dettes, ne rendrait pas nuls en droit, mais seulement inutiles en fait, les différens legs portés au testament dont il s'agit; que, d'ailleurs, cette insuffisance ne pourrait être établie que par une liquidation régulièrement faite, et qu'il n'a pas encore été procédé à cette liquidation; le tribunal, sans s'arrêter nt avoir égard aux moyens et demandes de la veuve Bourguignon, dont elle est déboutée, déclare valable le legs fait à la demoiselle Hermel. » Appel de la part de la veuve Bourguignon. La disposition faite au profit de la demoiselle Hermel, a-t-elle dit, renferme une véritable substitution; c'est ce que les premiers juges, tout en validant le legs, n'ont pu s'empêcher de reconnaître; et un léger examen des termes dans lesquels cette disposition est conçue suffit, d'ailleurs, pour dissiper tous les doutes qui pourraient s'élever sur ce point. En effet, par son testament, le sieur Bourguignon donne à la demoiselle Hermel une somme de 12,000 francs, sous la condition que, si elle décède sans postérité, cette somme restera, ou, pour mieux dire, retournera aux héritiers du testatéur. Assurément une telle disposition présente, d'une manière non équivoque, la charge de conserver et de rendre, et la vocation successive, qui forment le caractère essentiel et distinctif des substitutions. Vainement prétendrait-on que, le legs étant éventuel et ne devant peut-être jamais recevoir son accomplissement, il y aurait une excessive rigueur à en prononcer la nullité; il importe peu que le legs soit soumis à une condition qui peut ne pas se réaliser; il suffit qu'il puisse devenir la base d'une substitution fidéicommissaire, pour qu'il soit oumis à la prohibition portée par l'art. 896. Aussi la Cour de cassation a-t-elle décidé, par son arrêt du 8 juin 1812 (1), que les substitutions conditionnelles étaient prohibées aussi bien que les substitutions (1) Voyez ce Recueil, vol. de 1812, p. 477. pures et simples; et la Cour royale de Bruxelles, ayant à statuer sur le point de savoir si une institution d'héritier faite à la charge de rappel des héritiers légitimes, dans le cas où l'héritier testamentaire décéderait sans postérité, constituait une substitution fidéicommissaire, n'a pas hésité à prononcer l'affirmative par son arrêt du 26 avril 1806 (1). d'Auvergne, prohibitive des substitutions, Chabrol, Un auteur qui écrivait sous l'empire de la coutume prétend, à la vérité, dans son Commentaire, tom. 2, pag. 127, qu'une telle disposition, malgré la clause de retour qui s'y trouve, ne renferme qu'une condition éventuelle autorisée par cette coutume; mais tous les auteurs qui ont écrit depuis le Code civil, et particulièrement MM. Toullier, Droit civil français, tom. 5, pag. 71, no 48; Grenier, Traité des donations, tom. 1° prohibées, pag. 333 et suivantes, professent une opipag. 119, et Rolland-de-Villargues, des Substitutions nion contraire. er Après avoir établi l'existence d'une substitution prohibée dans le legs fait à la demoiselle Hermel, la veuve Bourguignon faisait remarquer que ces expressions, comme il est dit des autres parts en tout et pour tout, qui avaient déterminé le tribunal de première instance à maintenir la disposition principale, étaient trop vagues pour qu'il fût possible d'en induire que le testateur eût entendu révoquer la substitution dans le cas où elle serait arguée de nullité, et prescrire l'exécution pure et simple du legs; qu'il faudrait à cet égard une clause précise, et que, cette clause n'existant pas, la nullité de la substitution devait, conformément à la loi, entraîner celle de la disposition elle-même. L'appelante ajoutait enfin qu'alors même que le legs ne serait pas entaché d'un vice radical, il devrait être déclaré caduc par suite du mauvais état de la succession; qu'en effet il était constaté, par inventaire dressé après la mort du testateur, que le passif excédait l'actif de 30,000 francs; ce qui devait dispenser de faire procéder à la liquidation dispendieuse et frustratoire ordonnée par les premiers juges. L'intimée répondait que le legs ne présentait pas une substitution, mais simplement une clause alternative; et, sur le surplus, elle se référait aux motifs du jugement qui a été confirmé par l'arrêt suivant: ARRÊT. LA COUR, CONSIDÉRANT que, par la clause finale du legs fait à la fille Hermel, et le renvoi en tout et pour tout aux dispositions précédentes, le testateur a exprimé l'intention de disposer au profit de la fille Hermel et de supprimer la clause de retour, en tant qu'elle pourrait, contre sa volonté, être entendue comme contenant substitution; Sur le chef d'appel subsidiaire, adoptant les motifs des premiers (1) Voyez ce Recueil, vol. de 1806, pag. 145, suppl. Le sieur Lecoq est décédé, laissant un testament en date du 3 juillet 1814, par lequel il a nommé à ses enfans deux tuteurs, le sieur Rigoleau, tuteur honoraire, et le sieur Despont, tuteur onéraire, ce dernier avec une rétribution annuelle de 1,000 francs. Le 13 juillet 1818, délibération du conseil de famille qui destitue le sieur Despont. Postérieurement, autre délibération rendue à la majorité de six voix contre une (celle du sieur Charbonneau), qui, nonobstant l'offre du sieur Rigoleau, tuteur honoraire, de se charger sans rétribution de l'administration des biens, nomme le sieur Reveillère en remplacement du tuteur destitué. . Cette délibération ayant été attaquée par le sieur Charbonneau, membre opposant, de tribunal civil de Beaupréau a rendu, le 28 août 1818, un jugement conçu en ces termes : « Considérant que les circons tances qui avaient pu déterminer le testateur à pourvoir ses enfans d'un toteur onéraire ne sont plus les mêmes; que la maison commerciale du sieur Lecoq n'existe plus; que les marchandises ont été vendues, la succession liquidée et le partage effectué; que les affaires des mineurs ne présentent plus de gestion difficile; que la preuve de ce fait se trouve dans les offres du tuteur honoraire de s'en charger sans rétribution; que, si quelques avantages résultent pour eux de la nomination d'un nouveau tuteur onéraire, ces avantages ne seraient nullement en proportion des inconvéniens qui y seraient attachés et du préjudice que leur causerait un traitement annuel de 1,000 fr. En ce qui touche Ja nomination d'un nouveau tuteur onéraire, le tri -- bunal réforme la délibération du conseil de famille, autorise Rigoleau à gérer, suivant ses offres, les biens et revenus des mineurs, aux charges de droit. » Le sieur Reveillère, nommé tuteur onéraire, et le sieur Turpault, membre désigné par le conseil de famille pour défendre la délibération, ont interjeté appel de ce jugement. Ils ont prétendu que toute délibération du conseil de famille régulièrement prise, ne pouvait être altaquée que dans les cas prévus par la loi, et qu'aucun texte ne donnant au membre, contre l'avis duquel la nomination d'un tuteur serait faite, le droit de s'en plaindre (hors le cas prévu par l'art. 440), il s'ensuivait que le tribunal avait excédé ses pouvoirs en réformant la nomination du sieur Reveillère aux fonctions de tuteur onéraire; que cela résultait, d'ailleurs, soit de ce que la délibération qui nomme un tuleur est affranchie de la formalité de l'homologation, soit de ce que ce serait, dans la réalité, enlever au conseil de famille le ehoix libre d'un tuteur, que de soumettre sa délibération à la censure d'un tribunal. Au fond, ils ont soutenu que la nomination qui avait eu lieu était nécessaire dans l'intérêt bien entendu des enfans, et qu'elle était, d'ailleurs, conforme à la volonté exprimée par le testateur de donner deux tuteurs à ses enfans. L'intimé s'est borné à faire remarquer que la dispo sition de l'art. 883 du Code de procédure était générale, et qu'elle conférait à tout membre, contre l'avis de quel une délibération aurait été prise, le droit d'en demander la réformation. Il citait à son appui l'opinion de M. Delvincourt, tom. 1°, pag. 115. ARRÊT. que er LA COUR, - CONSIDÉRANT que l'intention des testateurs doit être religieusement observée, mais que ce serait y contrevenir que de l'exécuter littéralement dans des circonstances qui sont devenues différentes; que c'est en suivant ce principe que le conseil de famille a sagement décidé la maison de commerce du sieur Lecoq ne devait pas être continuée; que les procès qu'il avait laissés à son décès sont terminés, que ses enfans mineurs ne sont plus dans le même étal relativement à leur fortune; que le tuteur onéraire nommé par leur père ne peut plus régir de la même manière que le testateur lui avait désignée; qu'if pouvait être personnellement dépositaire d'une confiance particulière qui ne peut lui être conservée; que les lois nouvelles ont changé la législation sur les telles; que la loi ne reconnaît qu'un tuteur responsable de son administration, excepté le cas préva par l'article 417 du Code civil; qu'un tuteur ne peut être forcé à employer des agens dont il resterait responsable contre son gré, et lorsque l'emploi de ces agens n'est pas jugé nécessaire; que les délibérations da conseil de famille qui nomnient un tuteur n'ont pas besoin, pour être exécutées, d'être homologuées; mais que, lorsque des oppositions sont formées contre leur exécution, il est indispensable de les porter devant les tribunaux pour y être jugées, et que, par une constquence nécessaire, les tribunaux peuvent réformer Le 8 juillet suivant, le sieur Dietz a constitué un avoué chez lequel il a élu domicile. Depuis, il s'est écoulé un intervalle assez considérable pendant lequel l'avoué constitué a réclamé plusieurs fois les pieces confiées à l'huissier Baur, qui tout-à-coup a disparu avec elles.. Alors le sieur Dietz, dans la vue de continuer ses poursuites, assigne les sieurs Werner et consorts pour être présens à la délivrance qui doit lui être faite d'une seconde grosse de son titre, en vertu d'une ordonnance du président. Le 3 août 1818, opposition à cette délivrance de la part des sieurs Werner et consorts. Ils prétendent qu'ils se sont libérés, le 3 décembre 1817, en remettant à l'huissier Baur des lettres de change pour le montant de l'obligation, ainsi que cela résulte, soit de la quittance notariée qui leur a été donnée par ce dernier, soit de la remise de la grosse de l'obligation. Une contestation s'étant élevée sur la validité de ce paiement, entre les sieurs Werner et consorts et les héritiers du sieur Dietz, alors décédé, jugement du tribunal civil de Colmar, du 29 juin 1819, qui, sans s'arrêter à la quittance du 3 décembre 1817, qui est déclarée nulle et de nul effet, a débouté les défendeurs de leur opposition à la délivrance d'une se conde grosse de l'obligation et de leur opposition au commandement, a ordonné la réintégration des inscriptions hypothécaires, et les a condamnés aux dépens. Les motifs de ce jugement sont ainsi conçus: « Attendu que le mandat conféré par la loi à l'huissier porteur des pièces, de toucher et recevoir le montant des titres pour lesquels il est chargé de poursuivre, nc s'étend pas au-delà du moment où il instrumente en vertu des titres; que, pour toucher et recevoir hors de l'exercice de ses fonctions, il a besoin d'un mandat spécial pour libérer le débiteur, lors surtout que, comme dans l'espèce, le créancier faisait, pour les poursuites mêmes, une élection de domicile chez une autre personne (l'avoué) que chez l'huissier qu'il avait chargé de poursuivre; ce qui annonçait aux débiteurs que le créancier constituait un autre mandataire; qu'au moment de la quittance passée devant Nachbaur, notaire, non seulement l'huissier Baur ne poursuivait pas les débiteurs, mais qu'il ne pouvait même pas les poursuivre, puisque l'exécution du titre était suspendue par l'opposition qu'ils avaient formée le 30 juin 1817 précédent, par laquelle ils avaient saisi le tribunal d'une demande en sursis, sur laquelle il n'avait pas encore été prononcé ; que, dès-lors, la remise d'effets de commerce constatée par la quittance, en l'admettant comme constante, n'est plus qu'un dépôt volontaire de la part des débiteurs entre les mains de l'huissier, lequel était placé pour leur propre compte, et dont ils pouvaient assurer l'emploi en passant les effets, non pas au nom de l'huissier, mais au nom de leur créancier direct; qu'il y a également lieu à faire droit sur les conclusions du 3 août 1818, laquelle n'étant que moratoire, ne des demandeurs, tendantes au débouté de l'opposition peut empêcher l'exécution du titre.» Appel de la part des sieur Werner et consorts. Aux termes de l'art. 1283 du Code civil, ont-ils dit, «la remise volontaire de la grosse du titre fait présumer la remise de la dette ou le paiement, sans préjudice de la preuve contraire. » Dans l'espèce, nul doute sur la réalité du paiement; la quittance notariée de l'huissier Baur et la remise de la grosse l'établissent de la manière la plus expresse, Ce serait donc aux héritiers Dietz à prouver que, dans les six mois qui se sont écoulés depuis le paiement fait à l'huissier jusqu'à sa disparition, ils n'ont pas reçu les lettres de change donuées à ce dernier; mais alors même que les héritiers Dietz seraient en état de fournir cette preuve, il résulte implicitement des art. 556 du Code de procédure, et 2060, no 7, du Code civil, que l'huissier avait capacité pour recevoir le paiement; qu'ainsi la libération des appelans a été opérée, et que les intimés doivent s'imputer à eux-mêmes d'avoir fait choix d'un mandataire infidèle. Il n'est, d'ailleurs, pas exact de dire que l'huissier n'a droit de recevoir le montant des titres qu'il est chargé de mettre à exécution, qu'au moment où il instrumente il suffit, en effet, qu'il soit porteur de pièces et qu'il soit dirigé des poursuites contre le débiteur, pour qu'en faveur de la libération on doive : déclarer valable le paiement fait à l'huissier à une époque quelconque, à moins toutefois que le débiteur n'ait été légalement averti qu'il ne pouvait plus se libérer entre ses mains. Or, des poursuites existaient, puisqu'elles n'étaient suspendues que par l'opposition des appelans, opposition à laquelle ils étaient toujours les maîtres de renoncer; aucune notification de ne pas payer à l'huissier ne leur avait été faite; car on ne peut regarder comme telle la constitution pure et simple d'un avoué que l'instance qui se préparait avait rendue nécessaire, et qui même, après la décision de la cause, aurait eu besoin d'un mandat exprès pour recevoir le paiement. (Voyez M. Toullier, Droit civil français, tom. 7, pag. 25 et 26.) Les premiers juges ont donc méconnu les règles qui déterminent l'étendue du mandat donné à l'huissier pour suivre le recouvrement d'une créance. Les intimés, après avoir reproduit les motifs du jugement qu'ils avaient obtenn, ont ajouté que, tout en admettant que l'huissier Baur ait eu mandat pour recevoir le paiement, cela devait s'entendre d'un paiement en espèces, et qu'il n'avait pas eu le droit de recevoir des lettres de change, c'est-à-dre d'opé rer la novation de la dette. · LA COUR, juges, CONFIRME. s'était opérée dans la personne du domaine, par suite de la confiscation des biens du duc d'Orléans et du marquis de Lagrange, avait éteint la dette des intérêts réclamés; l'autre, de ce que le sursis accordé aux émigrés, qui avaient recouvré la propriété de leurs biens invendus, pour le paiement de leurs dettes, ayant été prorogé jusqu'en 1820, la demande formée par les héritiers de Lagrange était prématurée, et ne pouvait être accueillie quant à présent. Le 9 mai 1818, jugement du tribunal civil de la Seine qui, sans avoir égard à ces deux fins de non recevoir, condamne les héritiers du duc d'Orléans à payer aux demandeurs, 1°. La somme à laquelle s'élèvent les intérêts du principal de 400,000 livres, énoncé dans l'acte du 2 mars 1790, depuis le 1. juillet 1793, jusqu'au 1er juillet 1816, sauf les réductions et retenues légales, 2o. Les intérêts desdits intérêts, à partir de jour de la demande. Les héritiers d'Orléans ont interjeté appel de cette dernière disposition du jugement. L'ancienne jurisprudence, a-t-on dit pour eux, proscrivait sévèrement l'anatocisme, com me contraire à l'esprit des ordonnances et à la morale publique. Le Code civil, en disposant, art. 1154, que les inté rêts échus sont susceptibles de produire d'autres inté rêts, a introduit, à la vérité, sur ce point, un droit adoptant les motifs des premiers nouveau; mais il ne peut régir que les actes passés. ARRÊT. sous son empire, et les premiers juges lui ont évidem ment donné un effet rétroactif, lorsqu'ils l'ont appli Du 25 janvier 1820.- Cour royale de COLMAR.- qué à la cause où il s'agit d'une obligation qui a pris MM. Antonin et Baumlin, avocats. naissance avant qu'il ait été promulgué. En second lieu, et dans l'hypothèse même où l'art. 1154 serait applicable, il faut observer que c'est à titre de dommages-intérêts, et comme une conséquence de l'inexécution des engagemens du débiteur, que les intérêts des intérêts sont accordés. Il est dès-lors évident que la condamnation de les payer ne peut atteindre l'héritier bénéficiaire, qui n'est pas débiteur personnel, et dont la seule obligation consiste à rendre compte confiée à ses soins. Cette condamnation ne peut être aux créanciers et aux légataires de l'administration, prononcée non plus contre la succession, parce qu'elle rejaillirait infailliblement sur la masse des créanciers, et qu'il serait d'autant plus injuste de les (Les héritiers du duc D'ORLEANS C. les héritiers du marquis rendre passibles de l'inexécution des engagemens du DE LAGRANGE.) Dans le courant de l'année 1817, les héritiers du marquis de Lagrange ont assigné le duc et mademoiselle d'Orléans, comme héritiers bénéficiaires du feu duc d'Orléans, leur père, en paiement d'une somme de 406,674 fr. montant tant du capital que des intérêts d'une obligation souscrite par ce dernier, au marquis de Lagrange, le 2 mars 1790. Ils ont demandé, en outre, qu'on leur payât les intérêts des intérêts, à partir du jour de la demande, conformément à la disposition de l'art. 1154 du Code civil. Les héritiers d'Orléans ont opposé à cette demande deux fins de non-recevoir, prises, l'une, de ce que la confusion des qualités de débiteur et de créancier qui défunt, qu'ils éprouvent tous le même dommage. Il est d'ailleurs de principe que les droits des créanciers d'une succession bénéficiaire sont irrévocablement fixés à l'époque de l'ouverture de la succession; car, aux termes de l'art. 2146 du Code civil, aucun d'eux ne peut, dès cette époque, prendre inscription au préjudice des autres. Enfin, toute succession bénéficiaire, et particulièrement celle dont il s'agit, suppose un déficit dans son actif. Or, s'il était permis à chaque créancier de se faire adjuger des intérêts d'intérêts, l'augmentation qui s'opérerait dans le passif de la succession ne serait pour eux d'aucune utilité, puisque l'actif resterait toujours le même. Ainsi, saus tous les rapports, la prétention des héritiers de La grange est dénuée de fondement. Il existe une différence essentielle, a-t-on répondu pour les intimés, entre l'anatocisme ou l'usure, et la juste indemnité qui est due à un créancier pour le préjudice qu'il a souffert, par suite du retard de son débiteur. L'anatocisme consiste à réunir des intérêts non encore échus avec le capital pour en former une somme totale à laquelle on fait produire d'autres intérêts, et l'on conçoit que la loi n'ait pu s'armer de trop de sévérité pour proscrire ce contrat ruineux. Mais tel n'est pas le cas qui se présente ici; il s'agit dansl'espèce, d'intérêts considérables, échus depuis long-temps, et dont l'agglomération successive a formé un capital qui, aux termes de l'art. 1154 du Code civil, a dû nécessairement produire intérêt du jour de la demande. Quant au reproche qui a été fait aux premiers juges d'avoir donné à cet article un effet rétroactif, il est aisé de démontrer qu'il n'a rien de fondé. En effet, les intérêts des intérêts sont échus depuis le Code civil, c'est sous l'empire de ce Code qu'ils ont été réclamés. Il est donc évident que la condamnation de les payer, à partir du jour de la demande, n'a rien de rétroactif; car, ce n'est pas en vertu du contrat, que les héritiers de Lagrange exercent leur action, c'est en vertu de la loi seule, et les intérêts adjugés forment une dette nouvelle, parfaitement distincte de la dette principalé contractée dans l'acte du 2 mars. 1790. Mais le principe porté dans l'art. 1154 du Code civil est-il applicable à une succession bénéficiaire? telle est la seule question que présente cette cause. A ne consulter que le bon sens et la raison, ils nous répondent que le décès du débiteur et l'accep-tation de son hérédité sous bénéfice d'inventaire sont des circonstances indifférentes qui ne peuvent nuire aux droits du créancier; que ces droits sont indépendans de la qualité prise par l'héritier; qu'il serait étrange que la loi eût accordé à ce dernier tous les avantages qui résultent du bénéfice d'inventaire, et qu'en même temps elle eût sacrifié les intérêts du créancier, en lui refusant les moyens de conserver ses droits contre la succession. On prétend, il est vrai, que l'intérêt des créanciers exige qu'il en soit ainsi; que leurs droits se trouvant fixés au moment de l'ouverture de la succession, nul d'entre eux ne peut en acquérir au préjudice des autres. Mais remarquons bien que ce principe n'est écrit nulle part; c'est une généralité qui ne s'appuie ni sur la loi ni sur la raison; et s'il existe des motifs pour défendre qu'un créancier puisse acquérir, contre une succession bénéficiaire, des droits qui lui conféreraient un privilége sur les autres créanciers, il n'en existe aucun pour le priver de l'exercice d'une faculté commune à tous. L'art. 2146 du Code civil, sur lequel on fonde ce singulier système, n'offre rien, ni dans son texte ni dans son esprit, qui puisse justifier l'induction qui en a été tirée. Cet article déclare nulle l'inscription prise sur une succession. bénéficiaire, mais il ne dit rien de plus; c'est une . le principe d'après lequel les appelans soutiennent que toute succession doit demeurer dans l'état où elle se trouve au moment de son ouverture, était exact, il n'eût pas été besoin d'une disposition spéciale pour défendre qu'il fût pris des inscriptions sur une succession bénéficiaire; l'art. 2146 devenait complétement inutile. Ce n'est pas avec plus de raison qu'il a été avancé, dans l'intérêt des appelans, que toute succession, acceptée bénéficiairement, supposait toujours un déficit dans son actif; l'expérience de tous les jours démontre trop bien l'inexactitude de cette assertion pour qu'elle ait besoin d'une réfutation sérieuse. ARRÊT. LA COUR,-faisant droit sur l'appel interjeté par monseigneur le duc et mademoiselle d'Orléans, de la senteuce rendue par le tribunal civil de Paris le 9 mai 1818; CONSIDERANT que la condamnation des intérêts d'intérêts échus est une véritable condamnation de dommages-intérêts et réputée telle par la loi; que le débiteur ne peut devenir passible de dommages-intérêts qu'autant qu'il est en demeure de remplir son obligation; que l'héritier bénéficiaire n'est pas personnellement débiteur; qu'il n'est responsable que des fautes graves qu'il peut commettre dans l'administration qui lui est confiée par la loi, et n'est obligé, vis-à-vis des créanciers, qu'à leur rendre compte de son administration; que la demande de la veuve de Lagrange n'est basée ni sur faute grave ni sur retard de rendre compte ; A Mis et MET l'appellation et ce dont est appel au néant; émendant, d charge le duc et mademoiselle d'Orléans des condamnations contre eux prononcées; au principal, deboute la veuve de Lagrange de sa demande, et la condamne aux dépens. Du 14 mai 1819.- Cour royale de PARIS. MM. Dupin et Tripier, avocats. La disposition de l'article 726 du Code de procédure civile, qui veut que l'appel du jugement en vertu duquel il est procédé à une saisie immobilière, soit interjeté trois jours au moins avant la mise du cahier des charges au greffe, qu'il soit dénoncé au greffier et visé par lui, est-elle tellement générale, qu'on doive l'appliquer aux mineurs émancipés, alors même que le jugement dont est appel n'a pas été notifié à leur subrogé tuteur, ainsi que le prescrit l'art. 444 de ce Code? Rés. aff. (1). (1) Voyez dans ce Recueil, vol. de 1818, pag. 17, supplé exception qu'il a apportée à la règle générale; et si i ment, un arrêt de la Cour royale de Metz, en date du 15 mai |