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- Par ces motifs; - Confirme le jugement entrepris, etc.

Du 23 nov. 1910. - C. Pau. MM. le cons. Maury, prés.; Gachis, subst.; de Cardaillac et Simonnet (ce dernier du barreau de Bayonne), av.

BOURGES 5 décembre 1910. RESPONSABILITÉ CIVILE OU PÉNALE, AUTOMOBILE, ACCIDENT, LOI DU 17 JUILL. 1908, ARRÈT (ABSENCE d'), Délit de FUITE, PRÉSOMPTION, COMMETTANT, PRÉPOSÉ, CHAUFFEUR (Rép., v° Responsabilité civile, n. 343; Pand. Rép., eod. verb., n. 208).

Tout conducteur d'un véhicule, qui, ayant occasionné un accident, ne s'est pas arrêté, est légalement présumé avoir tenté d'échapper à la responsabilité qui lui incombe, et ne peut se soustraire aux sanctions pénales édictées par la loi du 17 juill. 1908, même en rapportant la preuve que telle n'a pas été son intention (1) (L. 17 juill. 1908).

Spécialement, un chauffeur d'automobile ne saurait être considéré comme exonéré de l'obligation de s'arrêter après l'accident qu'il a causé, par ce motif qu'il est notoirement connu des tiers auxquels sa voiture a causé un préjudice, et qui ne pouvaient, dès lors, rencontrer aucune difficulté dans l'exercice des recours qu'ils pouvaient avoir contre lui (2) (Id ).

Par suite, en continuant sa route, ce chauffeur se rend coupable du délit prévu par la loi du 17 juill. 1908 (3) (Id.).

Le commerçant, pour le compte duquel le chauffeur effectuait des livraisons, ne saurait être retenu comme civilement responsable du dommage occasionné par l'acte delictueux imputable au chauffeur, dès lors que ce chauffeur était choisi par une entreprise de transports qui avait mis à la disposition du commerçant, moyennant un prir déterminé, une voiture et son conducteur, et qui seule avait qualité pour payer le chauffeur, le congédier, et lui donner des instructions sur la marche

(1-2-3) Pour qu'il y ait délit de fuite, et qu'on puisse appliquer les pénalités du § 1r de l'article unique de la loi du 17 juill. 1908 (S. et P. Lois annotées de 1909, p. 814; Pand. pér., Lois annotées de 1909, p. 814), il faut que le conducteur du véhicule qui a causé un accident, et qui s'en est rendu compte (V. sur ce point, Angers, 22 janv. 1909, S. et P. 1910.2.86; Pand. pér., 1910.2.86), ait eu réellement l'intention d'échapper par la fuite à la responsabilité qui peut lui incomber. V. Angers, 23 janv. 1909, précité, et la note. Mais l'arrêt ci-dessus décide avec raison que cette intention doit être présumée, dès lors que le conducteur, l'accident s'étant produit, a continué sa route sans observer aucun temps d'arrêt. V. en ce sens, Laborde, La fuite des conduct. de véhicules après un accident, Lois nouvelles, 1909, 1o part., p. 10, n. 20. En effet, la loi n'exige pas autre chose, comme éléments du délit, que la connaissance, par le conducteur, de l'accident qu'il vient d'occasionner, et le fait d'avoir continué ou tenté de continuer sa route. Si ces deux conditions sont réunies, le délit existe, et c'est au conducteur qu'il appartient, pour

et la direction du véhicule (4) (C. civ., 1384).

(Hénault et Pialat C. Graindorge). — ARRÈT.

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LA COUR; Sur le délit de fuite: Attendu que l'article unique de la loi du 17 juill. 1908 impose à tout conducteur d'un véhicule quelconque, sachant que ce véhicule vient de causer ou d'occasionner un accident, l'obligation de s'arrêter; que ces prescriptions impératives ont pour but de permettre de constater immédiatement les conséquences de l'accident, et de déterminer la responsabilité pénale ou civile encourue par celui qui l'a occasionné; que tout conducteur qui ne s'est pas arrêté dans les circonstances précisées par la loi est légalement présumé avoir ainsi tenté d'échapper à cette responsabilité, et ne peut se soustraire aux sanctions pénales édictées, même en rapportant la preuve que telle n'a pas été son intention; que, notamment, ne peut être considéré comme exonéré des obligations imposées par la loi du 17 juil. 1908 le conducteur d'un véhicule, par ce motif qu'il est notoirement connu des tiers auxquels sa voiture a causé un préjudice, et qu'alors même qu'il ne s'était pas arrêté, ceux-ci ne devaient rencontrer aucune difficulté dans l'exercice des recours qu'ils pouvaient avoir contre lui; qu'on ne saurait, sans méconnaître le texte et l'esprit de cette loi, laisser aux conducteurs de véhicules l'appréciation arbitraire des cas où ils doivent s'arrêter après un accident, et de ceux où, au contraire, ils peuvent continuer leur route sous prétexte qu'ils sont connus, ou que leur voiture porte des indications permettant de les identifier aisément; Attendu qu'il résulte de l'information et des débats que, le 4 juin 1910, à Châteauroux, le prévenu, qui conduisait la voiture automobile servant aux livraisons des Nouvelles Galeries, n'a pas arrêté ce véhicule au moment où il venait d'écraser un chien appartenant au sieur Graindorge, et alors que cependant Hérault s'était parfaite

échapper aux sanctions pénales, d'établir que les circonstances dans lesquelles il s'est trouvé sont exclusives de l'intention d'échapper par la fuite à la responsabilité de l'accident. Or, si l'on peut admettre que des hypothèses puissent se rencontrer où le prévenu pourra faire cette preuve, il est bien certain que la circonstance invoquée dans l'espèce, à savoir que le chauffeur était notoirement connu des personnes présentes au moment de l'accident, en telle sorte que les victimes de l'accident n'auraient éprouvé aucune difficulté à exercer contre lui les recours qui pouvaient leur appartenir, était inopérante pour démontrer qu'il n'avait pas eu, en continuant sa route, l'intention d'échapper aux conséquences de l'accident. Ce n'est pas seulement pour permettre d'identifier l'auteur de l'accident que la loi exige l'arrêt; c'est aussi pour permettre de recueillir les indications nécessaires à la détermination de la responsabilité. V. Trib. corr. de la Seine, 6 mars 1909 (S. et P. 1910 2.86; Pand. pér., 1910.2.86), et la note; Nancy, 11 nov. 1909 (S. et P. 1910.2.143; Pand.

ment rendu compte de cet accident; que les déclarations des témoins Pion (Albert) et Pion (Louis) ne laissent aucun doute à ce sujet; qu'ils ont, en effet, déclaré qu'Hérault voyait tres bien le chien qu'il a écrasé, et qu'il s'est mis à rire après l'ac cident; que c'est donc à bon droit que les premiers juges ont retenu le délit relevé par la prévention à la charge du prévenu;

En ce qui concerne la responsabilité civile de Pialat, gérant des Nouvelles Galeries: Attendu que la voiture automobile, qui a causé l'accident incriminé, est, aux termes d'un contrat verbal, en date du 1er mars, mise à la disposition de la Société des Nouvelles Galeries à Châteauroux par une entreprise de transports dont le siège est à Paris, 9, boulevard Malesherbes, pour effectuer les livraisons, à raison d'un prix déterminé par kilomètre parcouru; Attendu que le conducteur de cette voiture est choisi par l'entreprise de transports, qui, seule, a qualité pour donner des instructions en ce qui concerne la marche et la direction du véhicule; qu'à ce point de vue, la Société des Nouvelles Galeries est sans autorité sur ce conducteur; qu'elle doit se borner à lui indiquer les lieux de livraison et les itinéraires à parcourir, et que c'est dans cette mesure seulement que le conducteur doit, conformément aux stipulations de l'art. 6 de ce traité, se conformer aux ordres donnés par le représentant de la Société des Nouvelles Galeries affecté à ce service; qu'à aucun moment, Hénault n'a donc été le préposé de la Société des Nouvelles Galeries; que seule l'entreprise des transports, qui l'a choisi, le paie, à autorité sur lui et qualité pour le congédier, aurait pu être considérée comme civilement responsable du délit qui lui est reproché; Par ces motifs; · Confirme, etc.

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Du 5 déc. 1910.-C. Bourges, ch. corr. - MM. Maulmond, prés.; Kuntz, av. gén.; Thomas, av.

pér., 1910.2.148), et le renvoi. Or, si le chauffeur est connu des personnes présentes au moment de l'accident, et si, par là même, il a fort bien pu, en continuant sa route, ne pas avoir eu l'intention de dissimuler son identité, il n'en reste pas moins qu'il a pu avoir l'intention d'empêcher que la lumière fût faite sur les circonstances de l'accident, et, par suite, d'échapper à la responsabilité de l'accident; il ne fait donc pas, en établissant qu'il était notoirement connu des personnes présentes, la preuve qui lui incombe pour s'exonérer des sanctions pénales de la loi du 17 juill. 1908.

(4) La Cour de cassation a jugé dans le même sens que, lorsqu'une société de garage fournit, pour la conduite d'une automobile remisée dans son établissement, un mécanicien qui demeure à son service et dont elle paie les gages, le propriétaire de l'automobile donnant seulement au mécanicien des gratifications, cette société est considérée à bon droit comme le seul commettant du mécanicien. V. Cass. 3 avril 1908 (S. et P. 1909. 1.423; Pand. pér., 1908.1.423), et la note.

PARIS 6 janvier 1910.

ASSURANCE MUTUELLE, SOCIÉTÉ, CONSTITUTION, FORMALITÉS SUBSTANTIELLES, STATUTS, ASSEMBLÉE GÉNÉRALE, COMPOSITION, IRREGULARITÉ, CONSEIL D'ADMINISTRATION, VALEURS ASSURÉES, MINIMUM, FONDATEUR, DIRECTEUR GÉNÉRAL, NULLITÉ DE LA SOCIÉTÉ Rép., vo Sociétés d'assurances, n. 104 et s.; Pand. Rép., vo Sociétés d'assurances mutuelles, n. 34 et s.).

Les dispositions du décret du 22 janv. 1868, rendu en exécution de l'art. 66 de la loi du 24 juill. 1867, qui déterminent les formalités essentielles de la constitution des sociétés d'assurances mutuelles (autres que celles sur la vie), doivent être observées

(1 à 4) I. Le décret du 22 janv. 1868 (S. Lois annotées de 1868, p. 244.-P. Lois, décr., etc. de 1868, p. 415), rendu en exécution de l'art. 66 de la loi du 24 juill. 1867, sur les sociétés par actions, a établi les règles de la constitution et du fonctionnement des sociétés d'assurances mutuelles (autres que celles sur la vie).

On s'est demandé si ces sociétés sont exclusivement réglementées par le décret précité, ou si les dispositions de ce décret doivent être complétées, sur les points non prévus, par les dispositions générales de la loi de 1867. La Cour de cassation a décidé que les sociétés d'assurances mutuelles sont exclusivement régies par le décret de 1868, et ne peuvent être déclarées nulles pour violation des prescriptions de la loi de 1867, sur la constitution des sociétés. V. Cass. 20 févr. 1888 (S. 1888.1.401. - P. 1888.1.1009, et la note de M. Labbé; Pand. per., 1888.1.254). Contra, Clément, Des assur. mut., p. 65 et 73. V. aussi, Douai, 16 mars 1896 (S. et P. 1901.2.97); Trib. de la Seine, 30 déc. 1908 (Journ. des soc., 1909, p. 331). Comp. Trib. de la Seine, 18 août 1883 (Journ, des soc., 1885, p. 74); Paris, 15 avril 1885 (Ibid., 1886, p. 110); Douai, 20 mai 1897 (Pand. pér., 1898.2.73; Journ. des soc., 1897, p. 428); Lyon-Caen et Renault, Tr. de dr. comm., 4° éd., t. 2, 2o part., n. 931; Arthuys, Tr. des soc. comm., t. 2, n. 913; Astresse, Tr. des assur, mut., t. 1er, n. 45; Houpin, Tr. gén. des soc. civ. et comm., 4° éd., t. 2, n. 1075, 1095 et s.; et notre Rép. gén. du dr. fr., vo Sociétés d'assurances, n. 103.

Or, d'une part, la loi du 24 juill. 1867 (art. 7, 41, 56) a déclaré nulles les sociétés en commandite par actions et les sociétés anonymes qui n'ont pas été constituées ou publiées conformément aux prescriptions de ladite loi; d'autre part, le décret de 1868 a bien indiqué, dans les art. 8 et 38 et s., les formalités à remplir pour la constitution et pour la publication des sociétés d'assurances mutuelles, mais il ne contient pas de sanctions de nullité pour le cas d'infractions à ces prescriptions. Doit-on appliquer, par analogie, aux sociétés d'assurances mutuelles les sanctions de nullité de la loi de 1867, non édictées par le décret de 1868 ? Cette question est controversée en doctrine. Un auteur a proposé d'appliquer les sanctions de la loi de 1867. V. Clément, op. cit., p. 65, 72, 76 et s. M. Astresse, op. cit., n. 50 et 51, estime que la sanction consiste dans la suspension de la constitution définitive, qu'il en résulte une nullité relative susceptible de ratification, et que le droit d'invoquer cette nullité se prescrit par dix ans à compter du jour où elle est parvenue à la connaissance de l'intéressé. D'autres auteurs laissent ANNÉE 1911. - 1er cah.

à peine de nullité (1) Décr., 22 janv. 1868, art. 8 à 12, 15, 16).

Spécialement, est nulle, pour violation des prescriptions essentielles du décret du 22 janv. 1868, la société d'assurances mutuelles, dont les statuts disposent que l'assemblée générale se composera de seize membres choisis par le directeur général parmi les sociétaires, sans s'occuper de la valeur assurée, contrairement à l'art. 16 du décret, aux termes duquel les statuts déterminent, soit le minimum de valeurs assurées nécessaire pour être admis à l'assemblée générale, soit le nombre des plus forts assurés devant la composer (2) (Décr., 22 janv. 1868, art. 16).

Ou la société d'assurances mutuelles, dont les statuts ne déterminent pas le

aux tribunaux le pouvoir de prononcer la nullité de la société, si la violation porte sur des règles substantielles. V. Vavasseur, Tr. des soc. civ. et comm., 6e éd., t. 2, n. 1045; Arthuys, op. cit., t. 2, n. 916. La jurisprudence se prononce pour la nullité des sociétés irrégulièrement constituées. V. Cass. 19 nov. 1900 (S. et P. 1902.1.449, et la note de M. Wahl; Pand. pér., 1901.1.113). Adde, Trib. de Lyon, 6 mars 1890 (Journ, des soc., 1891, p. 165); Douai, 16 mars 1896, précité; Trib. de la Seine, 28 janv. 1898 (Journ. des soc., 1898, p. 235); Trib. de Nantes, 14 mars 1898 (Ibid., 1898, p. 454); Chambéry, 5 nov. 1901 (Ibid., 1902, p. 161). V. aussi, notre Rép. gén. du dr. fr., v° Sociétés d'assurances, n. 113; Pand. Rep., vo Société d'assurances mutuelles, n. 34, 44. V. toutefois, Trib. de Clermont-Ferrand, 8 août 1900 (Journ. des soc., 1901, p. 85). L'arrêt que nous rapportons décide également que les dispositions du décret qui déterminent les conditions essentielles sous lesquelles peuvent être constituées les sociétés d'assurances mutuelles doivent être observées à peine de nullité de ces sociétés.

Pour nous, les sanctions de nullité édictées par la loi de 1867, en ce qui concerne les sociétés par actions, ne sauraient être appliquées aux sociétés d'assurances mutuelles, non régies par cette loi, mais seulement par le décret de 1868. Mais il n'en résulte pas pour cela que les prescriptions de ce décret soient dépourvues de sanction. On doit appliquer les principes généraux du droit, et considérer que, tant que les formalités essentielles prescrites par le décret pour la constitution ne sont pas complétement remplies, la société ne se trouve pas régulièrement constituée, et que, par suite, elle est inexistante ou nulle. V. Houpin, op. cit., t. 2, n. 1095. Mais cette nullité n'a pas le caractère d'ordre public attaché par la loi de 1867 à la nullité des sociétés par actions, qui sont des sociétés de capitanx. Et, bien que les dispositions nouvelles ajoutées à la loi de 1867 par celle du 1er août 1898, en ce qui concerne l'irrecevabilité et la prescription de l'action en nullité, ne soient pas applicables aux sociétés d'assurances mutuelles (V. Douai, 16 mars 1896, précité), pas plus que les dispositions anciennes de la loi de 1867, la nullité peut être réparée et la société définitivement constituée par l'accomplissement régulier des formalités omises ou irrégulièrement remplies. Le tribunal de la Seine a décidé, en ce sens, par le jugement précité du 18 août 1888, que la nomination irrégulière d'administrateurs suspend la constitution de la société, et que l'irrégularité peut être couverte ultérieurement par la nomination régulière de nouveaux administrateurs. M. Astresse

minimum de valeurs assurées nécessaire pour pouvoir faire partie du conseil d'administration, alors que l'art. 15 du décret porte que les membres du conseil d'administration doivent être pris parmi les sociétaires ayant la somme de valeurs assurées déterminée par les statuts (3) (Décr., 22 janv. 1868, art. 15).

Il en est ainsi, surtout alors qu'il résulte de tous les documents de la cause que la société n'a été créée et organisée que dans l'intérêt de son fondateur, qui s'est fait nommer directeur général pour toute la durée de la société (cinquante ans), après avoir eu soin de faire attribuer statutairement au directeur des avantages ruineux pour les sociétaires (4) (Décr., 22 janv. 1868, art. 14).

(op. cit., n. 50) a cité à tort, en sens contraire, un arrêt de la Cour d'Angers, du 1er mars 1899 (Rev. des assur. mut., 1901, p. 67), lequel aurait décidé que l'inobservation des formalités constitutives donnait lieu à une nullité absolue, que rien ne pouvait couvrir, notamment le vote ultérieur d'une assemblée générale régulièrement convoquée. Cet arrêt a décidé que l'assemblée générale n'avait pu couvrir la nullité, par l'unique motif que cette assemblée avait été illégalement composée (V. la note de M. Wahl sous l'arrêt de la Cour de cassation du 19 nov. 1900, précité, rejetant le pourvoi formé contre l'arrêt de la Cour d'Angers du 1er mars 1899, précité).

Mais la régularisation de la constitution de la société d'assurances mutuelles ne se produira pas dans les mêmes conditions et avec les mêmes effets que celle des sociétés par actions, lorsqu'elle a lieu en vertu de la loi de 1893; et, notamment, la convocation d'une assemblée générale sera insuffisante pour empêcher l'action en nullité. Cette action en nullité de la société d'assurances mutuelles se prescrit par dix ans, conformément à l'art. 1304, C. civ., à partir du jour où la société a commencé de fonctionner. L'opinion de M. Astresse, qui fait courir la prescription du jour où la nullité est parvenue à la connaissance de l'intéressé, ne nous paraît pas justifiée.

La nullité de la société n'est pas opposable aux tiers par les associés. V. Cass. 28 nov. 1892 (S. et P. 1894.1.505); adde, Trib. de Lyon, 6 mars 1890 (Journ. des soc., 1891, p. 165); Paris, 30 juin 1891 (Ibid., 1893, p. 270); Trib. de Lyon, 22 juin 1900 (Ibid., 1901, p. 189); Trib. de Clermont-Ferrand, 8 août 1900, précité. Entre les associés, la société annulée produit ses effets pour le passé comme association de fait. V. Trib. de la Seine, 28 janv. 1898, Trib. de Lyon, 22 juin 1900 et Trib. de Clermont-Ferrand, 5 août 1900, précités.

II. Mais quelles sont les infractions aux prescriptions du décret qui entraînent la nullité de la société ?

Les règles spéciales relatives à la constitution des sociétés d'assurances mutuelles font l'objet de la section I du titre II du décret, et sont contenues dans les art. 8 à 13. L'art. 13 concerne l'apurement des comptes de premier établissement; il ne s'applique pas à proprement parler aux formalités constitutives, lesquelles sont indiquées dans les art. 8 à 12. Il n'est pas douteux que les infractions commises à l'une des prescriptions contenues dans ces articles entraînent la nullité de la société (V. pour l'infraction à l'art. 10, Paris, 30 juin 1891 et Cass. 28 nov. 1892, précités). Il en est de même des infractions l'art. 19, qui,

II PART. 3

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Mais que doit-on décider en ce qui concerne les autres dispositions du décret, notamment les stipulations que les art. 14, 15, 16, 25, 29, 31 et 34 prescrivent d'insérer dans les statuts? On considère généralement qu'une solution absolue ne saurait être admise, et que l'on doit laisser aux tribunaux un certain pouvoir d'appréciation; mais qu'en principe, on doit sanctionner des règles impératives imposées comme contre-poids à un régime de liberté, et que la sanction consiste dans la nullité de la société. V. Clément, op. cit., p. 84; Arthuys, op. cit., n. 916; Astresse, op. cit., n. 146 et a.

Nous estimons que l'on doit considérer comme essentielles, et assimilables aux règles constitutives proprement dites, les dispositions qui se rattachent intimement à ces règles, et qui en forment, en quelque sorte, le complément nécessaire.

Par application de ce principe, voici quelles sont, suivant nous, les infractions aux dispositions du décret qui doivent entraîner la nullité de la société :

1o L'infraction à l'art. 14, relatif au mode d'administration de la société. Ainsi, lorsque, conformément au dernier alinéa de cet article, l'administration de la société a été confiée à un directeur assisté d'un conseil d'administration, auquel cas les statuts doivent déterminer les attributions respectives du directeur et du conseil d'administration, la nomination régulière du directeur est l'une des formalités essentielles de la constitution de la société. Or, d'après l'art. 14, le directeur doit être nommé par l'assemblée générale. Il en résulte que, à la différence des administrateurs, qui, aux termes de l'art. 12, peuvent être désignés par les statuts (V. cep., la note de M. Wahl, p. 450, 2o et 3o col., sous Cass. 19 nov. 1900, précité), le directeur ne peut être nommé que par l'assemblée générale constitutive. La nomination statutaire du directeur est nulle, et cette nullité entraîne celle de la société. V. cep. en sens contraire, Astresse, op. cit., n. 148, 149 et 165. Cet auteur invoque à l'appui de son opinion les motifs suivants : Le défaut de nomination régulière du directeur constitue une violation de l'art. 14, lequel concerne l'administration de la société, et non de l'art. 12, relatif à la constitution, lequel ne vise que la nomination des membres du premier conseil d'administration; d'où la conséquence que cette irrégularité ne saurait vicier la constitution de la société; elle rendrait seulement nuls les actes de gestion passés par le directeur, et, s'il en était résulté un préjudice pour les sociétaires, elle pourrait donner lieu à une action en dommages-intérêts contre les administrateurs. n'est pas étrange, comme on pourrait le croire, ajoute cet auteur, que la nomination des administrateurs ait le caractère constitutif, alors que celle du directeur ne l'a pas. Le directeur doit être << assisté d'un conseil d'administration. C'est un rouage secondaire. C'est au conseil seul qu'appartient dans tous les cas la plénitude du droit d'administrer». Cette doctrine ne nous paraît pas fondée. Lorsque, conformément au dernier alinéa de l'art. 14, l'administration est confiée par les

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voirs et attributions de l'administration. Dans la limite de ces pouvoirs et attributions, il a une situation indépendante du conseil d'administration. Il est donc tout à fait inexact de soutenir que, même dans ce cas, le conseil est investi de la plėnitude de l'administration. Le directeur chargé d'une partie des pouvoirs d'administration est assimilable à un administrateur (V. Houpin, Journ. des soc., 1904, p. 297); et, bien que l'art. 12 ne parle pas spécialement de la nomination et de l'acceptation du directeur chargé d'une partie de l'administration, on doit considérer que la nomination régulière et l'acceptation de ce directeur sont des conditions nécessaires de la constitution définitive de la société. On ne saurait, du reste, concevoir pratiquement que la société puisse être constituée et puisse fonctionner, alors que le directeur, rouage essentiel, investi d'une partie de l'administration, n'aurait pas été régulièrement nommé. Il a été décidé, en conséquence, que la nomination du directeur doit, à peine de nullité, être faite par l'assemblée générale, et que cette nullité entraîne celle de la société. V. Cass. 19 nov. 1900, précité, et la note de M. Wahl.

20 L'infraction à l'art. 15, aux termes duquel les membres du conseil d'administration doivent être pris parmi les sociétaires ayant la somme de valeurs assurées déterminée par les statuts, doit également entraîner la nullité de la société. L'art. 15 se rattache, comme l'art. 14, à l'art. 12. Dès lors que, d'après ce dernier article, la société n'est définitivement constituée que par la nomination et l'acceptation des membres du premier conseil d'administration, cela implique que les administrateurs sont éligibles, et réunissent les conditions de l'art. 15. La Cour de Paris se prononce en ce sens par l'arrêt que nous rapportons. V. Trib. de la Seine, 18 août 1883, précité.

3o Il en est de même de l'infraction à l'art. 16, qui prescrit de faire déterminer par les statuts, soit le minimum de valeurs assurées nécessaire pour être admis à l'assemblée, soit le nombre des plus forts assurés qui doivent la composer. Si les statuts ont organisé l'assemblée générale dans des conditions contraires aux deux modes prévus par l'art. 16, l'art. 19, aux termes duquel l'assemblée générale constitutive doit être composée de la moitié au moins des membres ayant le droit d'y assis ter (conformément à l'art. 16), ne se trouve pas observé, et l'assemblée constitutive est nulle, ce qui entraîne la nullité de la constitution de la société. C'est ce qui résulte de l'arrêt de Cass, du 19 nov. 1900, précité, lequel a considéré comme étant sans valeur la ratification par l'assemblée générale de la nomination statutaire du directeur, alors que cette assemblée générale était composée de membres désignés par le directeur, contrairement aux prescriptions de l'art. 16 du décret, qui exige que cette désignation soit faite par les statuts, sans l'intervention du directeur. C'est aussi ce que décide l'arrêt ci-dessus recueilli de la Cour de Paris, dans une espèce où, d'après les statuts,

loi du 24 juill. 1867; que ses dispositions, qui déterminent les conditions essentielles Sous lesquelles peuvent être constituées les sociétés d'assurances mutuelles, doivent être observées à peine de nullité

l'assemblée générale était composée de membres choisis parmi les sociétaires, sans s'occuper de la valeur assurée. Si les administrateurs (et, le cas échéant, le directeur) ont été nommés par une assemblée irrégulièrement composée, la situation est la même que si les administrateurs (et le directeur) n'avaient pas été nommés (V. la note précitée de M. Wahl sous Cass. 19 nov. 1900). M. Astresse (op. cit., n. 146) estime que, si les statuts ont omis de déterminer la composition de l'assemblée générale, tous les sociétaires ont le droit d'en faire partie, et qu'il n'en résulte pas de nullité. Cette opinion peut se justifier, si, dans le silence des statuts, tous les sociétaires ont été convoqués, et si l'assemblée constitutive réunit la moitié de ces sociétaires. V. Lyon-Caen et Renault, op. cit., t. 2, 2o part., n. 953; Houpin, op. cit., t. 2, n. 1116. Mais il en est autrement, si les statuts ont organisé des assemblées générales composées dans des conditions autres que celles prévues en l'art. 16 et s'ils ont été appliqués pour l'assemblée constitutive.

4° Doit encore être sanctionnée par la nullité l'infraction à l'art. 29, sur la fixation par degrés de risques, dans les tarifs annexés aux statuts, du maximum de la contribution annuelle dont chaque sociétaire est passible pour le paiement des sinistres, lequel maximum constitue le fonds de garantie. Les tarifs dont parle l'art. 9 doivent répondre au vou de l'art. 29, lequel se rattache ainsi à l'art. 9. Si les statuts ne déterminent pas le maximum de la contribution annuelle, la société est nulle. V. Cass. 19 nov. 1900, précité, et la note de M. Wahl; Clément, op. cit., p. 84; Astresse, op. cit., n. 147.

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D'après le décret, les statuts doivent aussi déterminer 1° le mode et les conditions suivant lesquels sont contractés les engagements entre la société et les sociétaires (art. 25); 2° le maximum de la contribution annuelle qui peut être exigée pour frais de gestion de la société (art. 31); 3° le mode et les conditions de la déclaration à faire en cas de sinistre par les sociétaires pour le règlement des indemnités qui peuvent leur être dues (art. 34). Les prescriptions des art. 25 et 34 concernent l'administration de la société, et ne se rattachent aucunement à sa constitution; leur violation ne peut donc entraîner la nullité de la société. Comp. Astresse, op. cit., n. 146, et, en ce qui concerne l'application de l'art. 25, Angers, 1er mars 1899, précité. Nous croyons qu'il en est de même relativement à l'art. 31, lequel ne se rattache à aucun des textes de la section I. V. sur ce point, Astresse, op. cit., n. 147. L'arrêt précité de la Cour d'Angers, tout en proclamant que la violation des art. 21 à 23, 25 et 42 affecte seulement l'administration, a prononcé la nullité d'une société, notamment pour violation de l'art. 32, § 3, qui prescrit de déterminer le mode de formation et l'emploi du fonds de réserve; mais cette décision ne saurait être approuvée, car le fonds de réserve est purement facultatif, et, s'il a été constitué par les statuts, contrairement à l'art. 32, il doit être considéré comme inexistant, mais cette infraction ne peut vicier la constitution de la société. L'arrêt de rejet du 16 nov. 1900 n'a, du reste, pas relevé ce moyen de nullité.

Nous n'avons parlé jusqu'ici que des infractions

de ces sociétés ; Or, considérant que c'est à bon droit que Duchef de la Ville et autres, qui ont adhéré à la Nation française, société d'assurances mutuelles contre la mortalité et les accidents des chevaux et bestiaux, ont fait plaider devant la Cour que les statuts de ladite société enfreignent gravement plusieurs des dispositions essentielles du décret précité;

Considérant, en effet, que c'est contrairement aux dispositions de l'art. 16 dudit décret, qui prescrit que les statuts détermineront, soit le minimum de valeurs assurées nécessaire pour être admis à l'assemblée générale, soit le nombre des plus forts assurés qui doivent la composer, que l'art. 53 des statuts de la Nation française laisse le choix des membres de l'assemblée générale au bon plaisir du directeur général, en disposant que l'assemblée générale, à laquelle il donne le nom de conseil général, se composera de seize membres choisis par le directeur parmi les sociétaires, sans s'occuper de la valeur assurée; que cette disposition, qui laisse au directeur général le choix des membres de l'assemblée générale, laquelle a mission de le contrôler, viole directement le texte et l'esprit de l'art. 16 précité;

Considérant, d'autre part, qué, alors que l'art. 15 du décret précité porte que les membres du conseil d'administration doivent être pris parmi les sociétaires ayant la somme de valeurs assurées déterminée par les statuts, aucun article des statuts de la Nation française ne fixe le minimum de valeurs assurées nécessaire pour faire partie du conseil d'administration de la société; qu'ici encore, les statuts de la Nation francaise violent directement le texte et l'esprit d'une des dispositions essentielles du décret; Considérant que, les statuts de la Nation francaise étant entachés de vices aussi radicaux, ladite société ne saurait être considérée comme régulièrement constituée; - Considérant, au surplus, qu'il résulte de tous les documents de la cause et des statuts eux-mêmes que la Nation française n'a été créée et organisée

aux dispositions concernant la constitution des sociétés d'assurances mutuelles. On décide généra lement que, si ces sociétés n'ont pas été publiées, ou ont été publiées sans se conformer aux prescriptions des art. 38 et s. du décret, les infractions à ces prescriptions entraînent la nullité de la société. V. Douai, 16 mars 1896, précité, et les décisions et autorités citées en note. Adde dans le même sens, Arthuys, op. cit., n. 916; Rousseau, des soc. comm. fr. et étr., t. 2, n. 2828 bis; et notre Rép. gen. du dr. fr., verb. cit., n. 121; Pund. Rép., verb. cit., n. 43. Mais V. en sens contraire, Astresse, op. cit., n. 53 et 168.

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BORDEAUX 11 mai 1910.

SÉPARATION DE CORPS, JUGEMENT, DésisteMENT D'APPEL, ACQUIESCEMENT (Rép., vo Divorce et séparation de corps, n. 1826, 2837 et s., 2876; Pand. Rép., vis Divorce, n. 2082 et s., Séparation de corps, n. 560, 644 et s., 652).

Un jugement prononçant une séparation de corps peut être l'objet d'un acquiescement valable; si la séparation de corps ne peut, en vertu de l'art. 307, C. civ., avoir lieu par le consentement mutuel des parties, cette disposition ne saurait avoir pour conséquence d'interdire l'acquiescement aux décisions de justice (1) (C. civ., 249, 307, 310; L. 18 avril 1886).

Par suite, le désistement d'appel équivalant à un acquiescement à la décision entreprise, l'époux, contre lequel la séparation de corps a été prononcée par un jugement duquel il a interjeté appel, peut se désister de son appel, et imprimer ainsi au jugement entrepris le caractère d'une décision définitive (2) (ld.).

(Raymond C. Raymond).

ARRÊT.

LA COUR; Attendu que, par jugement en date du 4 août 1909, le tribunal civil de Lesparre a prononcé la séparation de corps d'entre les époux Raymond, aux torts respectifs et au profit de chacun d'eux; Attendu que le sieur Raymond a interjeté appel de ce jugement par acte

n'ayant pas eu en vue les jugements prononçant la séparation de corps, l'acquiescement demeure possible en cette matière. V. Cass. 28 déc. 1891 (S. et P. 1892.1.120, et le renvoi; Pand. pér., 1893.1.190); Bordeaux, 20 janv. 1899 (8. et P. 1899.2.144), et la note; Grenoble, 4 nov. 1902 (S. et P. 1903.2.190; Pand. pér., 1904.2.809), et les renvois; adde, Planiol, Tr. élém. de dr. civ., 5o éd., t. 1o, n. 1807, p. 424 et s.; Baudry-Lacantinerie et Chauveau, Tr. des pers., 8o éd., t. 4, n. 306, p. 208; Vraye et Gode, Le divorce et la séparation de corps, 2o éd., t. 1o, n. 456. Il s'ensuit que l'époux, contre lequel a été prononcée la séparation de corps, peut valablement se désister de l'appel qu'il avait formé contre ce jugement, encore bien que ce désistement, soit à cause de l'expiration des délais d'appel, soit pour tout autre motif, doive être considéré comme impliquant, non pas seulement désistement de l'instance d'appel, mais acquiescement au jugement. V. la note sous Paris, 4 juin 1892 (S. et P. 1892.2.279).

Une autre opinion décide, au contraire, que, l'art. 249 ne contenant qu'une application spé

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du 5 janv. 1910; Attendu que, par exploit de Jouvenet, huissier à Lesparre, du 2 mars 1910, le sieur Raymond s'est désisté de son appel; Attendu que la dame Raymond demande à la Cour de donner défaut contre le sieur Raymond, faute par lui et son avoué de conclure, et, pour le profit, de lui donner acte de ce désistement, et de dire, par suite, que le jugement du tribunal civil de Lesparre sortira son plein et entier effet; Attendu que le désistement d'appel équivaut à l'acquiescement à la décision entreprise; Attendu que, si exception est faite aux règles du droit commun en matière de divorce par l'art. 249, C. civ., modifié par la loi du 18 avril 1886, ce texte n'est pas applicable à la séparation de corps; Attendu que, malgré quelques controverses, la jurisprudence, avant la loi de 1886, tendait à considérer comme valable l'acquiescement au jugement de séparation de corps; Attendu que la jurisprudence est bien établie aujourd'hui sur ce point (Cass. 28 déc. 1891, S. et P. 1892.1.120; Pand. pér., 1893. 1.190); Attendu que le législateur n'a pas entendu étendre à la séparation de corps la prescription de l'art. 249, revisé par la loi de 1886; qu'il y est dit que le jugement ou arrêt qui prononce le divorce n'est pas susceptible d'acquiescement, mais qu'il n'y est pas question de séparation de corps; Attendu, au contraire, que, par la loi de revision de 1886, le législateur a pris soin de déterminer les dispositions qui seraient applicables à la séparation de corps; que ces dispositions spéciales sont contenues dans l'art. 307, C. civ., où il est dit que les art. 236 et 244 lui sont applicables, et où il n'est pas question de l'art. 249, susvisé, dont les prescriptions se trouvent restreintes au divorce; Attendu que si, dans le même art. 307, il est dit que la séparation de corps ne peut avoir lieu par le consentement mutuel des parties, cette restriction à la libre volonté des intéressés ne saurait être étendue à l'acquiescement aux décisions de justice; que l'exécution sans concert frauduleux des jugements en cette

ciale de la règle suivant laquelle on doit considérer comme inefficace l'acquiescement donné par le défendeur à un jugement rendu contre lui, lorsque de ce jugement résulte une situation qui ne peut être valablement créée par la convention des parties (V. la note, § 1", a, de M. Tissier sous Caen, 27 déc. 1899, S. et P. 1902.2.89), on ne saurait considérer comme valable l'acquiescement à un jugement prononçant la séparation de corps. V. Paris, 4 juin 1892 (sol. implic.), précité; la note précitée, § 1o, a, de M. Tissier sous Caen, 27 déc. 1899, avec les renvois. Mais, dans cette opinion, s'élève une autre difficulté, c'est celle de savoir si l'art. 249, C. civ., a pour effet d'interdire aussi bien le désistement d'appel que l'acquiescement. Sur cette question, la jurisprudence est divisée. V. dans le sens de l'affirmative, en matière de divorce, Bordeaux, 21 nov. 1906 (S. et P. 1907.2. 294), et en matière de séparation de corps, Paris, 4 juin 1892, précité. Mais V. en sens contraire, en matière de divorce, Lyon, 26 févr. 1907 (S. et P. 1907.2.294). V. au surplus sur la question, la note sous cet arrêt.

matière doit donc être assimilée à l'exécution volontaire de tout autre jugement, et peut lui attribuer le caractère d'une décision définitive (Cass. 28 déc. 1891, précité);

Attendu que, par suite, le désistement du sieur Raymond de son acte d'appel imprime au jugement du tribunal de Lesparre le caractère d'une décision définitive; que ce désistement a été valablement signé par le sieur Raymond, et a été signifié par l'huissier à la dame Raymond à la date du 2 mars 1910; qu'il est régulier: que, par suite, l'instance tombe, et qu'il n'y avait pas lieu de venir devant la Cour: qu'il n'y a donc pas lieu de donner acte à la dame Raymond de ce désistement, ni de donner défaut contre le sieur Raymond. Par ces motifs; Déclare régulier le désistement du sieur Raymond, etc.

Du 11 mai 1910. · C. Bordeaux, 2e ch. MM. le cons. Léon, prés.; Chassain, av. gén.

PAU 6 décembre 1910.

CHEMIN DE FER, PESAGE, PESAGE EXTRAORDINAIRE, TAXE, ERREUR, PRÉJUDICE, PRIX DE TRANSPORT, SUPPLÉMENT (Rép., vo Chemin de fer, n. 2991, 3108 et s.; Pand. Rép., vo Chemins de fer, n. 7112 et s., 7127).

Le pesage extraordinaire des marchandises, requis à l'arrivée par le destinataire, donne lieu à la perception de la taxe supplémentaire, s'il a pour résultat de constater que le poids à l'arrivée est le même que celui relevé au départ, ou que les manquants ne sont pas supérieurs aux déchets de route (1) (Arr. minist., 27 oct. 1900, art. 16).

La taxe est encore due, si, du pesage supplémentaire, il résulte que la Comp. a commis une erreur à son préjudice, lors du pesage au départ, et que le poids des marchandises transportées est supérieur à celui porté sur la lettre de voiture (2) (Id.).

Il en est ainsi, sans qu'il y ait lieu de rechercher si cette erreur de pesage a pu préjudicier à l'expéditeur ou au destina

(1-2) V. dans le même sens, Pau, 28 nov. 1889 (S. 1890.2.44. P. 1890.1.233), et la note.

a

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(3) L'arrêté ministériel du 27 oct. 1900 porte (art. 16): « Il est perçu pour toute marchandise qui, sur la demande de l'expéditeur ou du destinataire, serait soumise à un pesage, en dehors de celui que les Comp. doivent faire, à leurs frais, au départ, pour établir la taxe, - un droit de 0 fr. 10 par fraction indivisible de 100 kilogr., et par chaque pesage supplémentaire... La taxe de pesage supplémentaire n'est pas exigible, si ce pesage constate une erreur commise au préjudice de l'expéditeur ou du destinataire ».

Le tribunal de commerce, dont le jugement était déféré à la Cour de Pau, avait pensé que la Comp. de chemins de fer ne pouvait réclamer le supplément de taxe, parce que, en portant sur le récépissé, comme poids constaté au départ, un poids inférieur au poids réel, la Comp. avait préjudicié à l'expéditeur, le prix des marchandises vendues devant étre établi d'après le poids relevé par la

taire, dans leurs rapports commerciaux entre eux (3) (Id.).

Et, en pareil cas, la Comp., en raison des excédents de poids constatés lors du pesage à l'arrivée, est fondée à réclamer un supplément de prix de transport, calculé sur la base des tarifs réclamés et appliqués (4) (Id.).

(Chem. de fer du Midi C. Campagne). ARRÊT.

LA COUR;

-

Attendu que Campagne réclame à la Comp. du Midi, en même temps que le remboursement des frais perçus par cette dernière, pour le pesage supplémentaire fait en gare de Pâu, sur sa demande, d'un certain nombre de wagons de houille venant de Bayonne et du Boucau, la somme de 500 fr., à titre de dommages-intérêts; qu'il s'agit, en conséquence, de décider si lesdits frais doivent être mis à la charge de la Comp.; qu'à cet égard, et aux termes des art. 15 des conditions d'application des tarifs généraux P. V. des chemins de fer du Midi, pour les transports en petite vitesse, et 16 de l'arrêté ministériel du 27 oct. 1900:

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Il est perçu pour toute marchandise qui, sur la demande de l'expéditeur ou du destinataire, serait soumise à un pesage extraordinaire en dehors de celui que la Comp. doit faire à ses frais au départ, pour établir la taxe, un droit de 0 fr. 10 par fraction indivisible de 100 kilogr., et par chaque pesage supplémentaire. (Lorsque le pesage a lieu par camion ou voiture, ou par wagon complet passé à la bascule, ce droit est de 0 fr. 30 par tonne indivisible, avec un minimum de 0 fr. 75 et un maximum de 2 fr. par voiture ou camion, un minimum del fr. par wagon, et un maximum de 2 fr. par wagon de 10 tonnes et au-dessous; de 3 fr. par wagon de plus de 10 tonnes. Dans ce cas, la Comp. doit, sur la demande des intéressés, délivrer gratuitement un bulletin constatant le poids des marchandises pesées). - La taxe de pesage supplémentaire n'est pas exigible, si le pesage constate une erreur commise au préjudice de l'expéditeur ou du destinataire ; Attendu qu'il résulte

Comp. C'était là certainement une erreur; l'arrêté ministériel et les conditions d'application des tarifs généraux n'ont en vue que la taxe à percevoir, fixée d'après le poids de la marchandise transportée. La Comp. des chemins de fer n'a à se préoccuper, pour la perception de la taxe supplémentaire de pesage, que du point de savoir si le poids constaté à l'arrivée est supérieur, égal ou inférieur au poids relevé lors de l'expédition; la Comp. n'est pas chargée de déterminer le poids relativement aux rapports commerciaux pouvant exister entre l'expéditeur et le destinataire; c'est à eux à l'établir comme ils l'entendent; s'ils s'en rapportent au poids relevé par la Comp., c'est à leurs risques et périls. Il est à noter, en outre, qu'avec le système adopté par le tribunal de commerce, on pourrait presque toujours soutenir qu'un préjudice a été porté à l'expéditeur ou au destinataire, et que la taxe de pesage extraordinaire serait bien rarement perçue.

La Cour de Pau avait déjà, d'ailleurs, donné la même solution, par application de l'arrêté minis

des termes exprès de la clause précitée qu'en principe, les frais du pesage supplémentaire doivent être supportés par le destinataire qui l'a requis l'arrivée, et qu'il n'y a d'exception à cette règle que dans le cas où une erreur commise à son préjudice ou à celui de l'expéditeur est constatée par le pesage; qu'il suit de là que la Comp. a le droit de percevoir les frais du pesage extraordinaire, non seule ment lorsque le poids constaté à l'arrivée est le même que celui constaté au départ, mais encore lorsque les manquants, constatés à l'arrivée, ne sont pas supérieurs au déchet de route accordé par l'usage; qu'il est aussi de toute évidence que la Comp. ne peut percevoir les frais du pesage extraordinaire, lorsque les manquants sont supérieurs à ce déchet de route, mais qu'elle a, au contraire, le droit de les percevoir, lorsque le pesage, à l'arrivée, constate un poids supérieur à celui porté sur la lettre de voiture; que, dans ce cas, en effet, le pesage supplémentaire ne constate aucune erreur commise au préjudice de l'expéditeur ou du destinataire, puisque les droits de transport résultant de la lettre de voiture sont inférieurs à ceux que la Comp. a le droit de percevoir, et qu'il ne peut s'agir que des rapports de la Comp. avec l'expéditeur et le destinataire, et non des rapports commerciaux du vendeur et de l'acheteur, considérés, l'un comme expéditeur, et l'autre comme destinataire; Attendu, dès lors, et en fait, que, sur l'expédition n. 972, du 26 février, le pesage réclamé par la Comp. a donné un poids, à l'arrivée, égal à celui du départ; que, sur l'expédition n. 1130, du 5 mars, il a été constaté, au pesage réclamé par ledit Campagne, un manquant de 50 kilogr., inférieur au déchet de route de 2 p. 100 admis pour la houille; que le tribunal a donc bien jugé en déclarant, pour ces deux expéditions, les frais de pesage, payés par Campagne incontestablement dus; Mais attendu, au contraire, que, sur les expéditions n. 875, du 19 février, n. 3008, du même jour, et n. 1161, du 12 avril, il a été constaté, pour la première, un excédent de

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tériel du 30 nov. 1876, qui contenait (tit. 2, chap. 1o, § 3) une disposition analogue à celle de l'art. 16 de l'arrêté ministériel du 27 oct. 1900. V. Pau, 28 nov. 1889 (S. 1890.2.44. P. 1890.1.233), et la note. Adde dans le même sens, Carpentier et Maury, Tr. des chem. de fer, t. 2, n. 2991, 3108 et s.; Féraud-Giraud, Code des transports, 2° éd., t. 2, n. 609.

(4) Il est certain, les Comp. de chemins de fer étant toujours en droit de rectifier les erreurs commises à leur préjudice, que, si le pesage supplémentaire à l'arrivée révèle que le poids des marchandises transportées est supérieur à celui qui a été porté sur la lettre de voiture, par suite d'une erreur commise lors du pesage au départ, la Comp. a le droit de réclamer le supplément de prix de transport qui lui est dû à raison de l'excédent constaté dans le poids de la marchandise transportée. V. Carpentier et Maury, Tr. des chem, de fer, t. 2, n. 3109; et notre Rep. gen. du dr. fr., v° Chemin de fer, n. 3109; Pand. Rep., v° Chemins de fer, n. 7127.

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