M. Isambert au sujet des missionnaires, le ministre condamnait ces missions qui, avec un zèle trop imprudent, peuvent aller agiter les consciences et porter le trouble dans les populations; mais, dans certaines circonstances, on ne pouvait interdire à un prêtre, muni des autorisations nécessaires, d'aller prêcher dans les diocèses voisins. A l'égard de l'affaire de M. de Montlosier, le garde-des-sceaux maintenait qu'il n'était pas possible d'ordonner la prière sous peine d'emprisonnement ou d'amende, et qu'il n'y avait d'admissible, en pareil cas, qu'une lente censure, celle qu'exerçait le gouvernement. M. Barthe passait ensuite à l'examen des allégations du préopinant sur les couvents de femmes: Parmi les 129 congrégations de ce genre, autorisées depuis 1830, il y en avait 44 qui tenaient des écoles gratuites pour les jeunes filles, et 79 qui étaient spécialement consacrées au soulagement des malades; il ne fallait pas juger du présent par le passé, et croire, comme M. Isambert, que tout ce qui existait autrefois existe encore. C'est ainsi qu'aucune des congrégations autorisées depuis 1830, ne s'était vouée à la vie contemplative. C'est ainsi qu'on avait fait fermer SaintAcheul, et lancé l'interdiction contre l'enseignement qu'on y distribuait. En un mot, l'opinion de M. le garde-dessceaux était, que la loi ne doit pas persécuter le clergé, mais lui apprendre à ne pas sortir des limites de son droit. Ces explications, sans doute très judicieuses et parfaitement conformes à l'esprit de la législation, suivant M. Hennequin, étaient pourtant insuffisantes; c'est dans cette conviction que l'honorable membre continua l'examen des accusations multipliées, contenues dans le discours de M. Isambert. Les congrégations de femmes, disait-il, sont autorisées, en principe, par la loi du 24 mai 1835, et toutes celles qui existent, en fait, ont paru dans le Bulletin des lois. Les monastères d'hommes avaient, il est vrai, été abolies par l'assemblée constituante; mais s'ils n'étaient pas dans la légalité, ils étaient éminemment dans l'ordre de la raison, de la charité, de l'utilité publique. On ne pouvait davantage condamner les frères de la doctrine chrétienne. Étaient-ils coupables de leurs succès, ces hommes si humbles et si peu ambitieux? Si les pères de famille leur confiaient leurs enfants, c'est qu'ils trouvaient chez eux une instruction suffisante et une éducation vraiment morale. Une question plus grave, c'était celle de la sépulture ecclésiastique, sur laquelle on ne pouvait accepter les opinions du garde-des-sceaux. D'après l'honorable député, les pouvoirs sont inviolables jusque dans leurs erreurs, tant qu'ils se renferment dans la sphère d'activité qui leur est tracée par la loi, par leur condition d'existence, et la société est cruelle et injuste quand elle vient demander à la raison plus que la raison ne peut faire. Les hommes, ajoutait le spirituel orateur, veulent vivre en philosophes et mourir en chrétiens; ils veulent, pour ainsi dire insulter aux croyances, méconnaitre l'autorité de l'église, et exiger après cela que l'église leur accorde tous ses trésors; il y a là quelque chose d'injuste. M. Hennequin regrettait donc que son collègue se fût constitué le défenseur d'office du clergé du second ordre, dont personne n'avait entendu les plaintes. La hiérarchie veut qu'un évêque puisse entraver les actes d'un curé qui lui auraient paru dangereux à l'église. Sans doute, ajoutait l'orateur en terminant, on peut honorer et améliorer la position du bas clergé, mais on ne doit pas penser à l'affranchir de l'autorité épiscopale. M. Delespaul, revenant sur la question traitée la veille, interpella le ministère sur les lenteurs du procès du général Brossard dans l'intérêt de l'accusé et de la justice. M. le ministre de la guerre, ayant déclaré que ces lenteurs avaient été apportées par le général Brossard lui-même, par sa demande de produire cinquante ou soixante témoins à décharge, résidant à Oran ou à Bone, la Chambre passa au paragraphe 10, relatif au remboursement de la dette, après avoir adopté le paragraphe relatif à l'Afrique. M. le ministre des finances, sur l'interpellation de M. Odillon-Barrot, prit la parole: il admettait le paragraphe de la commission, où était exprimé l'espoir de voir l'augmentation du revenu public rendre possible le projet du remboursement de la dette nationale. S'il avait d'abord gardé le silence sur cette importante question, c'est qu'il ne pouvait assigner ni le moment ni le mode de cette opération. M. Lacave-Laplagne annonçait du reste que l'état des finances de la banque et de la caisse d'amortissement était des plus satisfaisants, et que la force des choses appellerait indubitablement la conversion de la dette. Interrompu par M. Lefebvre, qui trouvait la banque assez forte pour soutenir le commerce de l'État dins cette circonstance, le ministre réclama contre cette fausse interprétation de ces paroles, disant que ce n'était pas dans un moment où la banque remplissait le mieux le but de son institution qu'il fallait détourner ses capitaux pour les diriger vers une autre destination. Telle n'était pas la manière de voir de M. Lafitte. La banque avait, disait-il, deux cent millions de billets en circulation et deux cents millions en portefeuille, tandis qu'elle pouvait avoir plus de six cents millions en circulation. La conversion des rentes devait donc s'opérer avec la plus grande facilité. Protestant contre les paroles de l'honorable préopinant, M. Jacques-Lefebvre avouait que la banque avait, à la vérité, à peu près autant de numéraire dans ses caisses que de billets en circulation, mais qu'elle devait au trésor cent-soixante millions, et cinquante à soixante millions à d'autres en compte courant. L'orateur désirait que l'on ajournât ces questions. Après cette courte discussion, le paragraphe 10, ayant été mis aux voix, fut adopté sans difficulté. Ici, M. Gauguier proposait un paragraphe additionnel qui demandait le paiement de la dette due depuis 24 ans aux anciens légionnaires de l'empire, après les promesses du comte Roy ministre des finances, des maréchaux Macdonald et Bourmont sous la restauration, et celles de M. Barthe en 1833. L'orateur pensait qu'il était du devoir du pays de s'acquitter envers les sept mille trois cents légionnaires survivants, de la dette la plus nationale qu'il y eût en France; mais dans la crainte de compromettre la cause de ces braves, en cette circonstance, il réservait son amendement. A propos d'un autre paragraphe relatif à l'organisation de l'état-major général de l'armée, le maréchal Clausel et le général Demarçay demandaient que l'armée fût réorganisée avant l'état-major, et comme M. le président du Conseil faisait observer que ces mots : réorganisation de l'armée étaient vagues et de nature à répandre dans le pays et dans l'armée des doutes fâcheux, le maréchal Clausel retira son amendement; le général Demarçay le maintint seul; en effet, si l'armée avait une organisation, il en était de même de l'état-major dont cependant le ministère regardait l'organisation comme insuffisante. En outre, l'organisation générale de l'armée, était plus défectueuse que celle de l'état-major, et l'on devait commencer par le principal avant de s'occuper des accessoires. La commission repoussa cet amendement. M. Finot parla sur les améliorations administratives annoncées dans le discours du trône. Il réclamait une mesure qui complétât les dispositions du 12 messidor an VIII relatives aux attributions du préfet de police de Paris, et qui rattachât ce magistrat à la responsabilité ministé– rielle. A la suite d'un récent procès qui avait révélé les pouvoirs arbitraires et les privilèges dont venait d'abuser un préfet de police (affaire Gisquet), l'honorable député recommandait ce point à la sollicitude du gouver nement. Après quelques observations de formes, présentées par M. Jollivet, le paragraphe relatif à la naissance du comte de Paris et aux espérances que concevait la Chambre sur ce royal berceau, fut adopté à l'unanimité ainsi que celui qui avait trait à la perte douloureuse de la princesse Marie. La séance du 19 janvier fut consacrée à la discussion du dernier paragraphe qui ne refusait pas formellement au ministère le concours de la Chambre, mais le subordonnait à des conditions auxquelles le Cabinet paraissait, dans la pensée de la commission, ne pas satisfaire. M. Béchard, premier orateur inscrit, vint faire à chacun sa part, à la commission comme au ministère. Le système de conciliation, arboré par le Cabinet, était devenu un vain mot, bien que l'amnistie, qui malheureusement n'avait pas été étendue aux contumaces politiques, eût fait quelques temps la force des hommes du 15 avril, C'était une grande faute, de la part du pouvoir. Le ministère n'avait respecté ni la liberté d'examen prescrite par les lois de septembre, ni la liberté d'association, ni les libertés communales et départementales, ni la liberté individuelle pour laquelle M. le baron Roger avait revendiqué quelques garanties que ne refusait pas l'ordonnance de 1670. Quant à la liberté de l'enseignement consacrée par l'art. 69 de la charte, et qui devait être organisée dans un bref délai, le ministère en avait retardé l'établissement en se plaçant dans des conditions du monopole. Passant ensuite à l'appréciation des |