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4. De la prohibition de contracter mariage dans certains degrés de parenté et d'alliance.

5. Du consentement requis pour la validité du mariage. 6. Des formalités relatives à la célébration.

7. Des empêchemens au mariage.

8. Des obligations qui naissent du mariage; des droits et des devoirs des époux.

9. Des alimens que les pères et mères et les enfans de leur union se doivent respectivement.

10. De la capacité que le mariage donne aux mineurs 1.

SECTION PREMIÈRE.

Du mariage en général.

120. Le contrat qui lie réciproquement deux personnes libres et règle les devoirs et les droits de la société conjugale, précède toujours l'action par laquelle on consomme le mariage. A défaut de contrat, le Code règle les conventions civiles du mariage.

121. Contrat de mariage est synonyme de conventions matrimoniales. De telles conventions sont indestructibles. Les lois les appellent des liens: Obligatio est vinculum juris.

Les mariages ne sont valables et légitimes que lorsqu'ils sont légalement contractés et célébrés suivant les règles du droit civil, devant l'autorité publique.

122. En France, où l'état n'a point de religion, mais où le plus grand nombre des Français professe

1 Pour me conformer à la division du Code civil sur cette matière, je traiterai particulièrement dans le chapitre 35 des conventions civiles des époux.

la religion chrétienne, le mariage participe tout à la fois du droit civil et du droit divin; mais il ne produirait aucun effet civil s'il n'avait été sanctifié que par la bénédiction nuptiale. Les ministres de l'église ne peuvent conférer le sacrement de mariage qu'après la célébration, en face de l'autorité publique.

SECTION II.

De l'indissolution du mariage.

123. Depuis la suppression du divorce, le lien du mariage ne peut être dissops que par la mort naturelle. Voyez mort civile.

Ainsi, il y a cette différence entre le mariage qui participe de notre droit civil et le mariage qui participe du droit divin, que l'indissolubilité de l'un souffre une exception, et que l'indissolubilité de l'autre n'en souffre aucune.

Ainsi, lorsque le mariage civil est dissous par la mort civile de l'un des époux, il subsiste encore dans le droit divin, parce que la dissolution du lien humain ne peut rompre le lien divin.

124. Nous n'entreprendrons point de rappeler ici ces longues et fameuses discussions qui se sont élevées entre des pères de l'église et les plus habiles théologiens sur les questions de savoir quand le mariage pouvait être dissous, soit par l'adultère, soit par l'abjuration de l'un des époux à la religion, soit par l'impuissance constatée de l'un ou de l'autre conjoint, soit enfin par la non consommation du mariage après la bénédiction nuptiale: toutes ces

questions sont plus curieuses qu'utiles; elles sont étrangères à cet ouvrage. Seulement, pour sortir de l'incertitude où nous ont laissés sur cette matière nos plus célèbres canonistes, nous dirons avec Pothier que, depuis l'arrêt rendu au Parlement de Paris, le 2 janvier 1758, dans la célèbre affaire de Borach Lévi, contre Mendel-Cerf sa femme, tous deux Juifs de naissance, dans laquelle cette femme demandait la dissolution de son mariage, parce que son mari avait abjuré la religion juive pour embrasser la religion chrétienne, on tient maintenant pour certain que dans toutes les religions le mariage qui participe du droit divin est indissoluble, suivant ces paroles qu'Adam, inspiré de Dieu, a transmises à toute sa postérité : « L'homme quittera son père << et sa mère et s'attachera à sa femme, et ils seront << deux dans la même chair. »

Una et eadem caro, unum et idem

corpus, una eadem

persona.

Que de lois les législateurs anciens et modernes n'ont-ils pas essayées pour édifier le plus ancien, le plus excellent et le plus important de tous les contrats! Tous ont reconnu que rien n'intéresse plus le bon ordre de la société que le lien du mariage. Les uns ont indiqué le moyen de rompre par des voies légales les mariages mal assortis. D'autres, et l'église gallicane elle-même, suivaient une autre route pour découvrir la véritable preuve de l'impuissance; ils donnaient au mari le pouvoir de détruire sur serment ce que Dieu avait formé pour rester éternel. Ainsi sous des lois, non loin de nous encore, on décidait qu'il n'y avait point d'union

là où il n'y avait qu'un simulacre de mariage; on pouvait, par le scandale le plus honteux, provoquer publiquement la dissolution du plus saint des contrats sur la simple allégation de l'un des époux que l'autre était dans l'impuissance de consommer le mariage.

Le langage du siècle est trop délicat pour transmettre les expressions dont on se servait pour faire constater en justice les caractères et les preuves de l'impuissance. Ces causes, qui outrageaient tout à la fois la nature et la pudeur, étaient un scandale dans nos tribunaux de la justice moderne. Mais, chose étonnante! les ministres de la religion chrétienne soulevaient eux-mêmes le voile de la pudeur; car d'après le droit canon, les preuves de l'impuissance devaient se faire devant le congrès, c'est-à-dire en présence de chirurgiens et de matrones qui ne rendaient le plus souvent qu'un témoignage d'erreur et d'incertitude sur un acte que la nature ensevelit dans l'ombre du mystère.

Si le mari sortait impuissant de cette lutte indécente, l'official, juge ecclésiastique, déclarait le mariage nul. Ainsi on jugeait dans l'église que là où le mariage n'était qu'un simulacre, les lois et la religion n'avaient pu éterniser des nœuds que la nature n'avait pas donné aux époux le pouvoir de former.

D'autres législateurs, à l'exemple de Moïse et de Numa, donnaient à l'homme et à la femme le pouvoir de rompre le lien, si les organes ou la froideur des sens les privaient l'un ou l'autre ou bien tous les deux ensemble de la vertu prolifique, de con

sommer le grand œuvre de la nature qu'ils avaient eu en contemplation lors de leur union. Toutefois la société et la religion gagnaient beaucoup plus qu'elles ne perdaient à cette sage institution : l'homme et la femme pouvaient, en se séparánt, laisser ignorer les motifs de leur séparation; et la honte de l'impuissance était couverte par la conscience des parties; ce voile mystérieux prévenait le scandale des preuves de l'impuissance, dont la deur s'alarmait jusque dans l'église et dans le sanctuaire de la justice.

pu

Des législateurs plus modernes avaient rajeuni cette institution d'une façon plus ingénieuse. Le divorce par le consentement mutuel laissait aux époux le moyen de couvrir les erreurs de la nature, d'étouffer dans le silence les outrages à la foi conjugale, enfin tous les chagrins domestiques et les imputations réciproques des époux dont la publicité scandaleuse fait gémir la société.

Mais ce remède inventé pour venir au secours des malheureuses victimes; pour séparer des époux dont la vie commune était insupportable; pour arrêter et prévenir le désordre des dissenssions renaissantes de caractère, d'humeur et de passions opposées : ce remède si largement approprié à tant de maux, loin de les prévenir, étendait la plaie à des parties qui jusqu'alors encore en avaient été préservées.

Bientôt il fallut détruire ce monument jusque dans ses fondations les plus utiles, pour être d'accord avec les principes de la religion de l'état dans laquelle le mariage est indissoluble, et pour arrêter le démembrement des familles auxquelles il donnait

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