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Etranger.

Faillite.

Syndic.

Cessionnaire.

Action en France. Maxime: Nulen France ne plaide par procureur.

Les syndics d'une faillite déclarée en pays étranger, sontils recevables à exercer en leur nom, devant un tribunal français, une action tendant au recouvrement d'une prétendue créance du failli, lorsqu'ils agissent non en vertu d'un jugement rendu par un tribunal étranger, mais en vertu d'un traité particulier qui les constitue cessionnaires de tout l'actif du failli? (Rés. aff.) Dans de telles circonstances et lors surtout, failli intervient en cause pour appuyer l'action de ses syndics et cessionnaires, la maxime: Nul en France ne plaide par procureur, est-elle inapplicable ? (Rés. aff.)

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, que

(Hautecœur contre Morton et Bell, et Reed.)

le

Le 6 avril 1842, les sieurs Morton et Bell, syndics de la faillite du sieur James Reed, commerçant à Sunderland (Angleterre), assignent devant le tribunal de commerce du Havre, les sieurs Hautecœur et Frappart, négocians de cette ville, à fins de paiement de la somme de 30,574 francs représentant au cours du change, 1,182 livres sterlings, pour prétendu reliquat de compte dû au sieur Reed par ces négocians.

Le 9 avril, le Tribunal renvoie les parties devant un rapporteur.

Le 25 du même mois, et pendant les débats suivis devant le rapporteur, le sieur Reed forme

demande en intervention dans l'instance, déclarant s'adjoindre personnellement aux conclusions prises par les sieurs Morton et Bell, et dont il demande même que le bénéfice lui soit concédé en tant que de besoin et pour ce qui le concerne.

D'autre part, les sieurs Morton et Bell communiquent un acte fait en Angleterre le 25 décembre 1841, portant cession, vente, assignation, transport et abandon en leur faveur, par le sieur Reed, de toutes et chacune des dettes en espèces, billets, lettres de change, marchandises, meubles et tous effets, meubles et immeubles, lui appartenant en propre ou à lui dus, ensemble de tous les livres comptes, titres, écrits concernant, de quelque manière que ce soit, les dettes et choses cédées et aussi pouvoir et autorité, auxdits Morton et Bell, de demander, réclamer, poursuivre en justice, donner bonnes et valables quittances et décharges pour les propriétés, dettes et biens cédés au nom du sieur Reed.

En conséquence de cet acte, les sieurs Morton et Bell se présentent devant le Tribunal de commerce du Havre, non pas en leur qualité de syndics, mais comme représentant et exerçant les droits du sieur Reed, leur cédant.

Après le rapport de l'affaire devant le Tribunal, les sieurs Hautecoeur et Frappart soutiennent que l'action des sieurs Morton et Bell est non-recevable par le motif que les demandeurs, syndics d'une faillite déclarée en Angleterre, ne peuvent agir en cette qualité devant un Tribunal français, car, d'une part, le jugement déclaratif de la faillite ne peut recevoir de plano exécution en France, et d'autre part, les sieurs Morton et Bell, étant seulement mandataires légaux du failli, ils se trouvent repoussés par cette maxime d'ordre pnblic : Nul ne plaide en France par procureur.

Le 6 mai 1843, jugement qui rejette la fin de

non-recevoir proposée par les sieurs Hautecour et Frappart, donne acte à Reed de son intervention dans l'instance et de l'adjonction qu'il donne aux conclusions prises par Morton et Bell, et ordonne de plaider au fond.

Les motifs de ce jugement sont ainsi conçus :

Attendu que Hautecœur et Frappart, assignés le 6 avril 1842, par Morton et Bell, syndics de la faillite James Reed, ont répondu à l'action de ceux-ci et se sont défendus;

Que renvoyés devant un commissaire choisi par le Tribunal, ils ont fait valoir devant lui tous les moyens qu'ils ont cru propres à établir le mérite de leurs pré

tentions;

Attendu qu'après avoir eu connaissance du rapport fait par le juge-commissaire devant lequel ils avaient été renvoyés, Hautecœur et Frappart, effrayés des conséquences que les conclusions de ce rapport pouvaient faire peser sur eux, cherchent à méconnaître à Morton et Bell le droit de leur réclamer, au nom de James Reed, le solde de compte par eux dù à ce dernier ;

Attendu qu'en présence des documens dont ceux-ci sont porteurs, il est impossible de leur dénier le droit de poursuivre la rentrée des sommes dues au sieur Reed; que l'action a donc été régulièrement intentée mais que Hautecœur et Frappart, se prétendant créanciers du sieur Reed, et n'ayant pas adhéré à l'arrangement intervenu entre lui et ses créanciers, pouvaient avoir intérêt à ce que Reed fût personnellement présent dans la cause;

Attendu que ce dernier, par signification en date du 24 avril, a déclaré, à Hautecœur et Frappart, qu'il entendait intervenir personnellement dans la cause pendante entre Morton et Bell, ses représentans, et Hautecœur et Frappart, donnent adjonction pleine et entière aux conclusions prises par ces derniers ;

Attendu que, dès-lors, Hautecœur et Frappart ne peuvent plus raisonnablement s'opposer à ce que les objets du litige soient discutés, puisqu'ils se trouvent en

présence non-seulement des représentans du sieur Reed, mais encore du sieur Reed lui-même, et que, par conséquent, la condamnation à intervenir serait, s'il y avait lieu, prononcée contre lui personnellement aussi bien que contre ses syndics ou représentans ;

Appel de la part des sieurs Hautecœur et Frappart, devant la Cour royale de Rouen.

ARRÊT.

Sur les conclusions contraires de M. CHASSAN, avocat-général :

Attendu que l'action des sieurs Morton et Bell n'a pas sa base dans un jugement rendu par un Tribunal étranger, ou dans un acte reçu par des officiers étrangers, jugement et acte pour l'exécution desquels la loi exige, en France, l'accomplissement de certaines formalités,

Que Morton et Bell, agissant en vertu d'un traité particulier et privé qui les investît, sous certaines containes conditions, de l'actif de James Reéd dont ils sont les cessionnaires;

Attendu qu'agissant, évidemment, en qualité de cessionnaires, la maxime de droit public: Nul en France ne plaide par procureur, n'est pas applicable à la cause; En adoptant, au surplus, les motifs qui ont déterminé les premiers juges;

LA COUR, accordant acte à James Reed de ce qu'il déclare donner adjonction aux conclusions de Morton et Bell, confirme le jugement dont est appel (1).

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Du 10 novembre 1843; Cour royale de Rouen; 2o chambre, Prés. M. RENARD; Plaid. MM. DESCHAMP et SÉNARD.

(4) Voy. Jurisprudence de Rouen, 1843, p. 469.

Société anonyme. —

Faillite.

Déclaration.

Une société anonyme peut-elle étre declarée en faillite à la demande de ses créanciers? (Rés. aff.)

(Tartrier contre la Compagnie le Dragon.)

JUGEMENT.

Attendu que Tartrier aîné, d'une part, et Tartrier jeune, de l'autre, demandent que la société anonyme dite le Dragon, compagnie d'assurances contre l'incendie, soit déclarée en état de faillite;

Attendu que cette compagnie, par l'un de ses direeteurs, n'oppose que l'inutilité de cette mesure, puisque la compagnie va s'occuper très prochainement de sa liquidation;

Attendu qu'il résulte des débats, des pièces produites et des renseignemens fournis au délibéré, que cette compagnie a cessé ses paiemens; que des engagemens pris par elle, pour des sommes considérables, ont été protestés et sont impayés aux mains des co-obligés; qu'elle a cédé la suite de ses opérations à une autre compagnie, ce qui rend son existence sans objet; qu'enfin, son passif s'élève déjà à plus de 400,000 fr., et que la réalisation de son actif exigera de nombreuses poursuites judiciaires;

Qu'en cet état, il est urgent, dans l'intérêt des créanciers, que la loi leur vienne en aide, afin de faire opérer la liquidation d'une manière régulière et assez puissante pour que les droits de tous soient garantis;

LE TRIBUNAL déclare en état de faillite la société anonyme dite le Dragon, compagnie d'assurances contre l'incendie, fixe provisoirement à ce jour la date de cette faillite ; dit que les scellés seront apposés au siége de la société et partout ou besoin sera, nomme pour jugecommissaire et pour syndics, MM., etc.

Du 31 octobre 1843; Tribunal de commerce de la Seine; Prés. M. TACONET, juge, Plaid. MM. SCHAYÉ et BORDEAUX.

FIN DE LA DEUXIÈME PARTIE.

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