General Toy. گی SOUS LES PINS AROLLES PARTIE DE TENNIS Ne m'appelez plus miss Helen, mais Helen tout court. Oui, vous n'osez pas assez, excepté, toutefois, dans vos chères montagnes. Il rectifia: Nos chères montagnes. Oh! je ne les aime pas autant que vous les aimez, et peut-être même je les aime à cause de vous. N'était-ce pas une déclaration, jetée à la manière d'une balle par-dessus le filet? Ce dialogue s'échangeait entre deux beaux jeunes gens blancs, sauf les bras et le visage pareillement bronzés et patinés par le soleil, sur le plus beau court de tennis du monde, ou l'un des plus beaux, sait-on jamais? Il y en a au bord de la mer, il y en a parmi les jardins. Mais celui de Riffelalp, au-dessus de Zermatt, est comme suspendu sur la vallée, en face du Cervin, le plus décoratif de tous les sommets parce qu'il est isolé entre le col du Théodule et le col d'Hérens et se détache comme un obélisque, dressé d'un jet prodigieux, entre l'assemblée des coupoles (côté du Mont Rose) et celle des aiguilles et des clochers (còté de la Dent Blanche et du Weisshorn). Il est excitant, disait de lui miss Helen. Et c'est le mot exact. Il distribue de la force et de l'énergie. Il secoue la paresse et fait honte au sommeil. Debout et viril comme un héros, il attire et il envoûte. Le regard ne se lasse Copyright by Henry Bordeaux, 1928. pas de le heurter, et le regard est l'avant-coureur du désir. Tantôt il accroche les nuages qui passent et les désagrège, tantôt il s'y perd mystérieusement et, quand il parvient à s'en dégager, sa cime apparaît plus haute encore qu'on ne l'eut cherchée. La lumière, elle aussi, le change. Il reçoit les premières flèches roses de l'aurore, il retient le couchant et le contraint à lutter contre la nuit. A midi, ses pentes rocheuses brillent comme un glacier. Encore, dévêtu cette année de toute glace et de toute neige par l'ardeur brûlante d'un incomparable été, est-il, dans sa nudité, plus athlétique et moins paré. Plus accessible aussi, car il n'y a pas de marches à tailler, ni de glissade à craindre, et dangereux néanmoins à cause des chutes de pierres. Oh! oh! s'était écriée, en battant des mains, miss Helen Arden quand elle avait débarqué du funiculaire à Riffelalp, je voudrais poser le pied là-dessus. Elle parlait en Anglaise conquérante, mais ne connaissait que les Alpes d'hiver, les Alpes de Saint-Moritz, pour la luge, le bob et le ski. Les propos de jeunes filles sont volontiers recueillis par les jeunes gens. Celui-ci avait été entendu par Georges Morgon, le fils de ce Philippe Morgon qui dirige l'une de nos plus grandes compagnies de navigation. Philippe Morgon, un rival de Dal Piaz, l'admirable directeur de la Transatlantique mort récemment, tous deux magnifiques animateurs de notre industrie et de notre commerce marins à qui ils ont ouvert des voies nouvelles, hommes d'affaires et poètes ensemble, renseignés sur le monde entier et désireux d'y élargir la place de la France, sans cesse préoccupés de perfectionnements mécaniques et plus encore de la formation des hommes, pareillement aptes au commandement tantôt par l'exercice de l'autorité et tantòt par celui de la séduction. Mais, comme il arrive dans les familles, séduction et autorité, que Philippe Morgon maniait tour à tour avec tant de maitrise, avaient échoué sur son fils Georges qui l'admirait et néanmoins se dérobait à son influence, comme s'il redoutait d'être absorbé et dévoré par une personnalité trop accentuée et vigoureuse. Georges ne serait pas un successeur. Sorti de l'École polytechnique comme son père, il avait suivi d'autres voies. La terre l'attirait, et non la mer. La terre, pour ses entrailles généreuses où l'on trouve le charbon et les métaux, pour ses chutes d'eau transformables en énergie. électrique, et aussi pour ses solitudes de roc et de glace qui ne |