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En ce qui concerne la traction, le nombre des trains étant supposé de cinq dans chaque sens, soit 10 trains par jour, le parcours annuel est de 3 650 kilomètres qui, à 1 franc le kilomètre (entretien du matériel compris) donneraient une dépense de 3 650 francs. Mais il faut remarquer que, sur une ligne à faible trafic, les trains sont relativement peu chargés et que, le nombre des véhicules par train étant moindre, la part de l'entretien du matériel rapporté au nombre des trains est également moindre; on peut admettre pour la traction une dépense de 2 500 francs, soit à peu près 0,70 fr. par kilomètre de train.

La dépense de l'exploitation proprement dite peut être réduite aussi, et, en observant la même proportion que dans les exemples précédents, fixée à 2200 francs.

Enfin les frais d'administration peuvent être évalués à 1/20 des dépenses précédentes, soit à 300 francs.

En ce qui concerne les renouvellements, la dépense réelle sera nulle ou à peu près dans les premières années de l'exploitation, mais il n'en faut pas moins la compter, car elle existe. Ce qui constitue la dépense réelle d'une exploitation, ce n'est pas ce qu'elle paie, mais ce qu'elle consomme; or si, dans les premières années, on ne renouvelle ni la voie ni le matériel, on les use cependant et il est indispensable de comprendre la dépense correspondante dans le coût de l'exploitation. Evaluons donc cette dépense.

Pour la voie, ce sera bien peu de chose; en effet, la voie posée en rails d'acier ne donnera lieu, on peut le dire, à aucune dépense pour le renouvellement des rails; ceux-ci pourront avoir sur une ligne à 3 650 trains par an, soit 4000 trains en chiffres ronds, une durée de plus de deux cents ans ; c'est assez dire qu'il n'y a pas à se préoccuper de leur remplacement. Il n'en est pas de même des traverses, qui devront être renouvelées au bout de quinze ou seize ans, comme pour toutes les autres lignes, ce qui constituera la principale dépense du renouvellement. On peut l'évaluer au total à 300 francs environ. Le renouvellement du matériel coûtera environ 3 p. 100 de sa valeur, soit de 20 000 francs, ou 600 francs.

3

100

Quant aux travaux d'amélioration, on peut leur consacrer une somme annuelle de 100 francs.

On a ainsi le tableau suivant des dépenses:

Entretien et surveillance de la voie.

Traction et entretien du matériel.

1 500 fr.

2.500

6 500 fr.

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Telle est la dépense minimum de l'exploitation d'une ligne d'intérêt général, posée en rails d'acier, en la supposant desservie par cinq trains dans chaque sens et assujettie aux diverses obligations du cahier des charges des grands réseaux.

Remarquons que, si la voie était posée en rails de fer, la dépense serait plus élevée, parce qu'il faudrait tenir compte de l'usure des rails et de leur remplacement par des rails d'acier. C'est pour cette raison que M. Sévène, donne, dans les mêmes conditions de fréquentation, une dépense de 8000 francs.

M. Jacqmin, dans son Traité de l'Exploitation des Chemins de fer, donne un chiffre de 8500 francs par kilomètre pour les chemins de fer d'intérêt local exploités par la compagnie de l'Est en 1865.

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Minimum des dépenses d'exploitation. Il ne faudrait pas conclure de ce qui précède qu'il soit impossible d'exploiter une ligne à voie normale pour moins de 7500 francs par kilomètre, même en y comprenant les dépenses de renouvellement. Il est facile de s'en rendre compte.

En effet, beaucoup de lignes à faible trafic peuvent être très convenablement desservies au moyen de trois trains dans chaque sens, au lieu de cinq; il résulte de cette réduction du nombre des trains une notable économie, d'une part, dans les dépenses de traction, d'autre part, dans celles d'entretien et de surveillance de la voie.

Dans la note déjà citée', MM. Piéron et Gasnier ont fait voir que la dépense kilométrique d'entretien des lignes peu importantes, posées en rails d'acier, pouvait être fixée en moyenne à 1500 francs, y compris le renouvellement. Dans les premières années, si la ligne a été bien construite, pourvue d'un bon ballast et de traverses de bonne qualité, elle pourra être entretenue au moyen d'une allocation kilométrique de 1200 francs; puis, à mesure que les traverses s'useront et que leur remplacement s'imposera, il sera nécessaire d'augmenter ce crédit d'une certaine somme, rapidement croissante, et atteignant au bout de quelques années 300 francs. On peut donc porter pour le premier article 1 200 francs et compter 300 francs pour le renouvellement.

Le mouvement de six trains par jour donne 2190 kilomètres de parcours dans l'année; mettons 2400, pour tenir compte des manoeuvres et des trains extraordinaires. A 0,70 fr. le kilomètre, cela donne une dépense de 1680 francs.

Les dépenses de l'exploitation proprement dite peuvent être également réduites, ainsi que nous le montrerons tout à l'heure par des exemples, à la

Revue générale (janvier 1886).

CHEMINS DE FER, T. III. 2. édit.

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condition de se contenter d'installations modestes et d'un personnel restreint dans les gares; elles peuvent s'abaisser au chiffre de 1000 francs.

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20

Admettons, comme précédemment, des dépenses ci-dessus pour les frais d'administration centrale, soit 200 francs.

Comptons 300 francs pour le renouvellement de la voie; 3 p. 100 du prix du matériel roulant évalué à 15000 francs, soit de 15 000 francs, ou

3 100

450 francs; enfin, 70 francs par an pour travaux d'amélioration.

Nous aurons, pour les dépenses, le tableau suivant :

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Telle est le chiffre minimum auquel on peut fixer, croyons-nous, la dépense d'exploitation d'une ligne à voie normale posée en rails d'acier, en y comprenant les frais de renouvellement de la voie et du matériel.

Cette conclusion se trouve confirmée par l'examen des résultats d'exploitation des lignes à faible trafic et, en particulier, par ceux qui ont été obtenus sur les lignes secondaires de la compagnie du Nord, à qui revient le mérite d'avoir, la première, réalisé l'exploitation économique des lignes à faible trafic qui lui ont été concédées par les conventions de 18831.

La compagnie du Nord, en effet, estimant que, pour rendre l'exploitation économique, il fallait la simplifier et ne pas appliquer sur les petites lignes les procédés en vigueur sur les grandes artères de son réseau, a eu l'idée de former de toutes ses lignes secondaires, c'est-à-dire de plus de 1 500 kilomètres, une douzaine de petits réseaux locaux de 80 à 250 kilomètres de longueur, indépendants les uns des autres et s'administrant avec une certaine autonomie par rapport au réseau principal.

«Sans doute, dit M. Sampité, cette indépendance et cette autonomie étaient suffisamment limitées pour qu'on n'eût pas à redouter les inconvénients d'un particularisme exagéré, qui sont fréquents dans les petites compagnies de chemin de fer et qu'il n'est pas rare de rencontrer dans les grandes, tels que détournements de trafic au prix de parcours plus longs sur des profils moins bons, accaparement de matériel au détriment du voisin, etc.

Voir, à ce sujet, Les Chemins de fer à faible trafic en France, par Sampité. Paris, 1888, 1 vol. et atlas.

« Mais on donnait aux chefs de groupe une autorité directe sur leur personnel, des pouvoirs suffisants pour régler promptement les indemnités à payer au public; on leur affectait un matériel de traction spécial. On leur laissait une grande liberté d'action, partant une grande responsabilité; et une sorte de concours était ouvert entre tous les groupes, dont les résultats d'exploitation, dépenses et recettes, faisaient l'objet de comptes distincts. permettant d'établir des comparaisons et d'en tirer des conclusions. »

La compagnie du Nord revenait ainsi, en définitive, au système des compagnies locales, qui exploitaient ces lignes avant le rachat, avec les embarras financiers en moins, avec l'émulation en plus.

Les résultats obtenus par cette importante mesure ont été considérables : en ajoutant aux économies produites par ce procédé les réductions de dépenses réalisées sur les grandes lignes, par suite de la diminution des recettes, la compagnie du Nord est arrivée à ce remarquable résultat, pour l'année 1885, de réduire ses dépenses d'exploitation de 5 407 000 francs, alors que ses recettes ne diminuaient que de 5 184 000 francs.

Les économies réalisées sur les lignes à faible trafic proviennent de plusieurs sources d'une part, le personnel des stations est fort restreint; souvent il comprend un chef de station seul, ou aidé par sa femme, quelquefois assisté d'un homme d'équipe; un certain nombre de stations et de haltes sont gérées exclusivement par des femmes de cantonniers, auxquelles on peut donner un salaire bien plus modeste qu'aux chefs de station. D'un autre côté, le service des trains est assuré soit par des trains légers, dont l'organisation économique a été expliquée précédemment (voy. chap. 1) soit par des trains-tramways, qui ne sont qu'un cas particulier des trains légers, et dont la dépense est bien plus faible que celle des trains ordinaires; d'après M. Sampité, la dépense kilométrique des trains-tramways est, en effet, de 0,29 fr. à peine, en y comprenant seulement les dépenses de personnel, de combustible et de graissage; elle s'élèverait à 0,40 fr. environ si l'on tenait compte des frais généraux, de l'entretien et des grosses réparations.

Dans ces conditions, les dépenses d'exploitation des groupes de lignes secondaires de la compagnie du Nord se sont élevés à 4 500 francs environ, en n'y comprenant pas les frais de gares communes avec le réseau principal, ni les dépenses d'administration centrale; ces dépenses se répartissent à peu près comme il suit :

Voie et bâtiments

Matériel et traction

Exploitation.

1 600 fr.
1870

1 030

Total.

4 500 fr.

Le mouvement est supposé égal à quatre trains dans chaque sens; la recette kilométrique est de 8 000 francs environ.

Pour avoir l'estimation totale de la dépense d'exploitation, telle que nous l'avons définie plus haut, c'est-à-dire en tenant compte des frais d'administration centrale et de renouvellement, il suffirait d'ajouter au chiffre cidessus une somme de 800 à 1 000 francs au plus, de sorte que la dépense totale ne dépasserait pas 5 500 francs.

Ce résultat nous paraît concorder d'une manière très satisfaisante avec les chiffres que nous avons donnés pour représenter la dépense d'exploitation d'une ligne à trois trains dans chaque sens; nous pouvons donc admettre que cette dépense, pour une ligne exploitée dans les conditions les plus économiques au moyen de trains légers et avec un personnel restreint dans les gares, sera de 5 000 francs environ par kilomètre.

Coefficient d'exploitation. -On nomme coefficient d'exploitation le rapport de la dépense d'exploitation à la recette brute pendant la même année. Voici quelles ont été, pendant l'année 1904, les recettes et les dépenses de l'exploitation des grands réseaux français, ainsi que les coefficients d'exploitation correspondants :

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Comme il était facile de le prévoir, c'est le réseau de l'État qui, en raison de ses faibles recettes, a le coefficient d'exploitation le plus élevé. Ce résultat ne tient nullement à une gestion défectueuse, comme voudraient le faire croire certains esprits systématiquement hostiles à l'exploitation par l'État ; ainsi que nous avons déjà eu l'occasion de le faire remarquer, le réseau de l'État est exploité, en France, avec une économie aussi grande, sinon plus grande que les réseaux des compagnies. Malheureusement, la constitution de ce réseau, formé en 1878 par la réunion de tronçons de lignes, disséminés, enserrés entre les réseaux voisins de l'Ouest et d'Orléans, quelquesuns inachevés et mal outillés, l'a placé pendant plusieurs années dans des conditions déplorables au point de vue d'une exploitation économique. Les conventions de 1883 et l'ouverture de diverses lignes ont, depuis cette épo

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