Images de page
PDF
ePub

par M. Rolin-Jaequemyns, ministre de l'intérieur, que les officiers des pompiers peuvent invoquer le n° 12 de l'article 1er de la loi du 23 août 1883, dans le cas seulement où les pompiers ont été reconnus comme corps spécial et font alors de droit partie de la garde civique;

Attendu que le corps de sapeurs pompiers que commande le demandeur n'est pas une compagnie spéciale de la garde civique instituée en vertu de l'article 26 de la loi du 8 mai 1848, mais un corps armé de sapeurs pompiers communaux organisé conformément à l'article 128 de la loi du 30 mars 1856, ainsi qu'il résulte des termes exprès de l'arrêté royal du 20 janvier 1889, qui autorise cette organisation;

Attendu qu'il suit de là que l'arrêt attaqué n'a pu violer l'article 1er, no 12, de la loi du 24 août 1883, en décidant que le demandeur n'est pas fondé à en réclamer le bénéfice;

Par ces motifs, rejette...

Du 27 mars 1893. - 2o ch. - Prés. M. De Le Court, président. - Rapp. M. De Hondt. Concl. conf. M. Mélot, premier avocat général.

[blocks in formation]

(1) Cass., 9 juin 1892 (PASIC., 1892, I, 294); cass. franç., 27 avril 1864 (D. P., 1864, 1, 184).

(2) Il en est de même de tous les actes qui rentrent dans l'ordre des fonctions essentielles de l'autorité publique. (Cass., 9 décembre 1880, PASIC., 1881, I, 14).

M. Ch. Beckers, Revue de l'administration, 1879, p. 137, et 1890, p. 104.

Voy. encore ce Recueil, 1889, p. 184, et BELTJENS, Encycl. du droit civil, t. III, p. 121, nos 109 et suiv.

1

de tutrice légale de son fils, fit assigner la ville devant le tribunal de première instance, pour :

Attendu que, le 16 juillet 1891, le fils de la demanderesse, cocher de fiacre, descendait le boulevard du Midi vers la gare;

Qu'arrivé au carrefour formé par les boulevards, la rue d'Angleterre et la rue Blaes, son cheval, sans qu'il pût le prévoir, s'embarrassa dans des cordes tendues à l'effet de maintenir une tente foraine dressée sur la voie publique; que l'animal s'enfonça le poitrail en tombant sur un pieu en fer et mourut du coup; que lui-même fut, par le choc, projeté sur le sol et s'abîma la figure sur les pavés;

Attendu que la ville, sur le territoire de laquelle le fait s'est passé, et qui est, en l'occurrence, représentée par le comité de la foire, est évidemment responsable du préjudice moral et matériel que cet accident a causé aux demandeurs;

Qu'en effet, il y a imprudence et défaut de prévoyance inexcusables, à permettre l'installation sur la voie publique, à un endroit où la circulation des voitures est intense à toute heure du jour, d'une exhibition foraine dont l'appareil extérieur a pour résultat de faire former des attroupements interrompant toute circulation;

S'entendre, la défenderesse, condamner à payer à la demanderesse, la somme de 5,000 francs, à titre de dommages-intérêts.

Sur quoi, le tribunal rendit le jugement suivant :

<< Attendu que les demandeurs agissent en réparation du dommage que leur aurait causé certain accident survenu, le 16 juillet 1891, au champ de foire dans le quartier du Midi, à Bruxelles;

<< Attendu qu'en séance du 6 avril 1891, le conseil communal de Bruxelles vota le principe de l'établissement d'une foire au boulevard du Midi;

« Qu'il résulte des éléments de la cause, notamment de certaine communication faite le 4 mai, au collège des bourgmestre et échevins, que cette foire a été organisée par un comité agissant indépendamment de l'administration communale et auquel celleci s'est bornée à prêter la voirie pour les installations;

(( Attendu que s'il est vrai qu'aucune faute n'a été commise par ce comité dans l'exécution de la résolution du conseil, il est également vrai que l'administration a commis elle-même une imprudence, en abandonnant la voie publique à un comité étranger, sans s'assurer du maintien constant de la

sécurité et de la commodité de la circulation;

« Que cette interprétation n'implique nullement un empiètement sur le domaine de l'administration;

« Qu'en effet, ni l'institution de la foire, ni son installation sur la voie publique ne sont critiquées, ni discutées, le pouvoir judiciaire étant d'ailleurs incompétent pour apprécier les actes d'ordre administratif; mais le pouvoir judiciaire est compétent pour connaître des conséquences dommageables du quasi-délit imputé à une commune, comme à un particulier, alors même que la faute aurait été commise par l'administration agissant, non comme personne civile, mais comme autorité et dans la sphère de ses attributions publiques;

<< Attendu que la défenderesse, sans dénier les faits articulés dans l'exploit d'ajournement, impute, de son côté, certains faits d'imprudence au demandeur Detry;

« Que, dans cette situation, les demandeurs offrent eux-mêmes d'établir que ce dernier n'a commis aucune imprudence; qu'ils offrent aussi d'établir la hauteur du dommage éprouvé;

« Attendu que la preuve offerte est utile et admissible par toutes voies de droit;

<< Par ces motifs, le tribunal, de l'avis de M. Moreau, juge suppléant faisant fonctions de procureur du roi, écartant toutes conclusions non admises, avant de statuer définitivement, admet les demandeurs à prouver par tous moyens légaux, témoignages compris, les faits suivants: 1° que, lors de l'accident du 16 juillet 1891, le cheval conduit par Detry ne s'était point emporté; 2° que la disposition de l'installation foraine était telle, qu'il a été impossible au conducteur d'éviter l'accident; 3° que les demandeurs ont subi un dommage s'élevant à 5,000 francs ou à une somme moindre; réserve à la défenderesse la preuve contraire par les mêmes moyens. » (3 février 1893. Prés. M. De Coster.)

Appel par la ville.

« Attendu que l'action intentée par les intimés tend à obtenir de la ville de Bruxelles la réparation du préjudice qu'ils prétendent avoir souffert par la faute de l'administration communale, à l'occasion de la foire de 1891;

« Attendu que c'est en vain que la partie appelante soutient qu'ayant agi comme pouvoir public, les actes par elle posés ne peuvent entraîner pour elle aucune responsabilité et échappent à la juridiction du pouvoir judiciaire;

<< Attendu qu'en autorisant l'installation de la foire, la ville a agi, il est vrai, dans la

sphère de ses pouvoirs politiques, dont le pouvoir judiciaire ne peut connaître, mais qu'en laissant installer les baraquements de la foire, elle engage sa responsabilité civile, si ces établissements sont faits dans des conditions telles qu'elles entraînent des dommages pour ceux qui usent de la voie publique, dont la circulation libre constitue un droit pour chacun des habitants;

<< Attendu qu'il est incontestable que la ville, chargée de tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, places et voies publiques, en laissant subsister, à l'endroit où l'accident s'est produit, les entraves qui ont donné lieu à cet accident, a commis une faute dont réparation était due, le cas échéant, aux intimés;

« Qu'il résulte, au surplus, du règlement de la foire que l'autorité communale conserve le droit de prendre toute mesure à l'égard de la sûreté des passants, à la facilité des communications et à tous autres objets de police, dans la plénitude de ses attributions;

« Qu'il y avait donc lieu, avant de statuer au fond, d'autoriser les intimés à rapporter la preuve des faits articulés par eux à l'appui de leur action;

<< Attendu que, ne s'agissant que d'un appel d'un jugement interlocutoire, il n'échet pas d'avoir égard à la conclusion subsidiaire de la partie appelante;

<< Par ces motifs, et ceux non contraires du premier juge, la cour, ouï M. l'avocat général de Rongé, en son avis conforme, rejetant les conclusions tant principales que subsidiaires de la partie appelante, confirme le jugement à quo. » (17 février 1892. Prés. M. Holvoet.)

Pourvoi par la ville fondé sur la violation et la fausse application des articles 1382 à 1384 du code civil, 23, 30, 31, 92 et 108 de la Constitution, en ce que l'arrêt attaqué a condamné la ville à la réparation d'un préjudice qu'elle aurait causé par un fait qui constitue un acte du pouvoir public et échappe à l'appréciation du pouvoir judiciaire.

Ce n'est pas la ville qui a installé les baraques; elle les a uniquement laissé installer. Elle se serait donc rendue coupable d'un défaut de surveillance et aurait manqué aux obligations que lui impose la loi communale, quant à la sûreté et à la commodité du passage dans les rues.

Or, l'obligation de la ville d'assurer la sûreté du passage n'est pas une obligation qui lui incombe comme personne privée, mais bien comme autorité, et les dispositions qu'elle prend à titre d'autorité échappent,

même si elles sont mal prises, au contrôle, l'un de ces deux titres; ou bien pour avoir du pouvoir judiciaire.

Ici, la ville n'a pu déléguer à un tiers le soin de veiller à la sûreté et à la commodité du passage dans les rues.

Réponse. - Fin de non-recevoir. L'arrêt confirme le jugement, lequel n'est qu'un simple interlocutoire, en ces termes : « Avant de statuer définitivement, admet les demandeurs à prouver, etc. »

Le dispositif seul constitue la chose jugée. (SCHEYVEN, no 4; cass., 21 décembre 1871, PASIC., 1872, 1, 14; 1er mai 1891, 29 juillet 1886, PASIC., 1886, I, 324; 19 mai 1892.)

Au fond: si élevé que soit le mobile de la puissance publique, encore est-elle tenue à réparation si elle lèse un droit privé (cass., 1er décembre 1881; PASIC., 1881, 1, 415; cass. fr., 10 juin 1884, D. P., 1884, 1, 36.)

<< Dans l'espèce, la ville a manqué à ses devoirs en n'assurant pas la circulation de la voie publique. »

<< Elle est tenue d'entretenir la voie publique de manière que les droits des habitants, des passants, ne soient pas lésés. » Le procureur général conclut à la cassation

en ces termes :

« La fin de non-recevoir opposée au pourvoi serait évidemment fondée, et il faudrait s'empresser de l'accueillir, s'il était dirigé contre une décision purement interlocutoire.

<< Mais l'arrêt attaqué, de même que le jugement qu'il confirme, ne s'est pas borné à admettre le demandeur originaire à preuve, il a, au préalable, écarté l'exception opposée par la ville à l'action dirigée contre elle et tirée de son immunité à titre d'autorité publique; elle repoussait l'applicabilité de l'article 1384 du code civil, et sur ce point, elle succombe définitivement, si bien que si elle n'était pas conseillée aussi bien qu'elle l'est, si elle s'était endormie dans une sécurité trompeuse, si elle avait attendu le résultat de l'enquête et sa condamnation pour se pourvoir contre les deux arrêts par un seul et même recours, il y a quelqu'un qui ne manquerait pas de se prévaloir de son peu de diligence et de démontrer, avec la certitude d'y réussir, qu'il y a ici plus qu'un simple avant-faire-droit, mais une décision définitive, irrévocable, passée en force de chose jugée par l'acquiescement de la partie condamnée.

« La fin de non-recevoir ainsi écartée, abordons immédiatement la discussion du fond.

« Dans les conditions où le débat se présente à votre examen, la responsabilité de la ville ne peut être encourue qu'à raison de

donné à des particuliers l'autorisation d'établir une foire; ou bien pour avoir manqué de prudence en laissant s'élever sur la voie publique des constructions formant obstacle à la libre circulation dont jouit tout habitant.

« Le droit d'établir des foires appartient exclusivement aux municipalités. Sous l'ancien régime, antérieurement à 1789, la faculté d'en tenir ne pouvait être accordée que par concession du souverain (1). (Cass., 30 mars 1871, PASIC., 1871, 1, 153; DOMAT. Droit public, liv. Jer, tit. II, sect. II, n° XVI.)

<< D'après la loi du 30 avril 1836, le conseil provincial statuait sur les demandes des conseils communaux à cette tin (art. 82), et ses décisions étaient, en outre, soumises à l'approbation du roi » (art. 86, no 5).

<<< Mais, dans la suite des temps, on reconnut qu'il n'y avait aucun inconvénient à laisser, à cet égard, une entière liberté aux communes; en conséquence, la loi du 27 mai 1870 leur permit d'en apprécier l'utilité et la convenance. Il est à peine besoin de dire que cet acte n'a en rien modifié le caractère des octrois de cette sorte, qui demeurent, comme par le passé, des actes éminemment politiques.

<< Aussi, d'après le jugement, comme d'après l'arrêt, ce n'est pas de ce chef que l'administration communale se trouve querellée, mais uniquement à raison de son incurie, pour n'avoir pas suffisamment sauvegardé la sûreté et la commodité du passage dans une section de sa voirie, en y laissant subsister des entraves qui ont occasionné un dommage, sujet à réparation. En d'autres termes, la police de la capitale, sur ce point, a laissé à désirer, elle a été mal faite; une administration, soucieuse de ses devoirs et de la protection qu'elle doit à ceux qui empruntent ses rues, eût évité cet accident. D'où faute et responsabilité.

« Mais, à la lecture de ce simple exposé, qui ne voit que c'est bien l'autorité publique qui se trouve citée à la barre d'une juridiction civile, aux fins de rendre compte du plus ou moins de vigilance qu'elle a apportée dans l'accomplissement d'un service communal? Serait-il vrai, comme on vient de vous le dire, que les actes de la puissance publique présentent, avec ceux de la vie civile, une affinité si grande que, bien souvent, il est peu aisé de les discerner.

<< Il nous avait semblé, au contraire, qu'ils

(1) G. DE LONGÉ, Cout. d'Anvers, t. IV, p. 45, titre IV, art. 3. Le duc de Brabant faisait commander de tenir le marché franc annuel. (Jaarmarkt.)

« alors même que la faute aurait été com<< mise par l'administration agissant, non << comme personne civile, mais comme auto« rité et dans la sphère de ses attributions <<< publiques!>>>

se différencient entre eux par des caractères | quand il va jusqu'à affirmer sa compétence, si distincts, que jamais il ne vous est arrivé de les confondre. Ce qui les préserve de toute confusion, c'est qu'ils procèdent de la loi qui les définit, et qu'en prenant celle-ci pour guide on a l'assurance de ne pas errer. << Elle les détermine avec soin, quand elle énumère les fonctions propres au pouvoir municipal (décret du 14 décembre 1789, art. 50); de ce nombre, l'obligation « de faire « jouir les habitants des avantages d'une « bonne police, notamment de la sûreté dans « les rues ». « Ce qui comprend l'enlève<< ment des encombrements. » (Décret des 16-24 août 1790, tit. XI, art. 3, no 1.)

...

« Et puisque c'est là un objet essentiellement de police, qui intéresse la bonne administration de la cité (πόλις), son caractère ne peut qu'être politique. C'est pourquoi il trouve sa règle, non dans la législation civile, mais dans les lois d'administration.

<< Aussi, toutes les fois qu'ils ont à pourvoir à un objet rentrant dans quelque service de cette nature, les administrateurs de la cité ont recours, non à la voie des contrats, des stipulations ou des transactions, mais à celle de concessions et de règlements en forme, sous la sanction de peines contre les infractions à leurs ordonnances, ce qui est le propre de la puissance publique. Pourvoir au maintien de l'ordre public, aux différenis besoins de la société, par l'exécution donnée à ces ordonnances, c'est encore administrer et accomplir un acte de magistrature.

« La police est instituée pour maintenir << l'ordre public, la liberté, la propriété, la « sûreté individuelle. » (Code du 3 brumaire an iv, art. 16.)

« Son caractère principal est la vigilance. « La société, considérée en masse, est l'objet de sa sollicitude. » (Art. 17.) En un mot, c'est l'ordre, le règlement établi pour tout ce qui regarde la sûreté et la commodité des citoyens.

<<< Telle est bien la fonction essentielle de la police administrative; son devoir est de supprimer les accidents ou entreprises de nature à compromettre la facilité et la sécurité des communications; limitée à cet objet elle prend le titre spécial de Police de la voirie.

<< Et lorsque le tribunal aussi bien que la cour se défendent de pénétrer dans ce domaine et de commettre aucune entreprise sur l'immunité politique de la commune, n'est-ce pas se faire d'étranges illusions et se payer de mots?

<< Ce n'est pas des torts et dommages, procédant du fait personnel des entrepreneurs de la foire (art. 1382), que se plaint la victime, mais du fait de l'administration, dont le tribunal s'attribue le droit de connaître,

<< En cela, la responsabilité de l'autorité n'est nullement différente de ce qu'elle est, en droit, dans toutes les autres branches de service public confiées à sa vigilance, de la propreté, de la salubrité, etc., mises par l'article 50 de la loi de 1789, sur la même ligne que la police de la voirie.

<< De telle sorte que si la doctrine de l'arrêt venait à passer en jurisprudence, nos officiers municipaux, ou plutôt la communauté sociale qu'ils représentent, auraient à répondre devant la judicature du dommage causé, non seulement par le mauvais état de la voie publique, mais encore des miasmes et germes morbides dont l'air peut être infecté, du peu de soin apporté au balayage des rues, à l'enlèvement des immondices et de la neige, à l'inspection sur la fidélité du débit des denrées, à la salubrité des comestibles exposés en vente publique, à l'obligation de prévenir, par les précautions convenables, les accidents et les fléaux, etc., etc. (Décret des 16-24 août 1790, tit. XI, art, 3.) Voilà ce que coûterait une police peu diligente.

« Un relief ou une dépression dans le pavement d'une chaussée, une ornière deviendrait une juste cause d'indemnité, et nos cités seraient dorénavant régies sous la surveillance et l'inspection, non des assemblées délibérantes, selon le vœu du dit article 50, mais de la juriction civile; érigés en vrais administrateurs, nos juges deviendraient les arbitres souverains de la convenance des précautions locales, de ce qui importe au bon gouvernement de la cité. Il n'en est pas ainsi; lorsque, par dérogation au droit commun, par une exception toute spéciale, la loi a voulu engager la responsabilité des communes, pour n'avoir pas suffisamment protégé leurs administrés contre des délits commis à force ouverte, elle en a expressément manifesté la volonté. (10 vendémiaire an iv.)

<< En dehors de cette exception, depuis quand nos administrations publiques sontelles devenues justiciables des tribunaux, à raison d'actes accomplis, ou de prétendues incuries, dans l'exercice exclusif de leurs attributions de police administrative?

<< Sans doute, l'atteinte portée par elles à l'exercice ou à la jouissance de quelque droit civil est sujette à réparation et de la compétence de la justice réglée; il en est ainsi de l'expropriation, du dommage causé à la propriété privée par l'exécution de travaux publics, de l'injure causée aux personnes en exécution de quelque ordre supérieur; mais le droit d'emprunter la voie publique et d'y circuler librement n'a pas ce caractère (1), il procède de l'ordre politique, chacun en jouit, non jure proprio, sed jure civitatis; il est subordonné aux règlements et à la direction de magistrats en titre, investis par la nation de l'imperium à ce nécessaire, ayant prêté serment. Nous en usons dans l'état où elle se trouve, non autrement.

« Encore ce droit de réglementation n'estil pas le seul criterium qui empêche de confondre l'exercice de cette puissance avec des actes de simple régie. Le droit de coaction et de contrainte, qui y est inhérent, vient s'ajouter au premier et est un symbole de plus de la majesté du Prince, agissant et requérant. « Décret du 14 décembre 1789, arti<< cle 52. Pour l'exercice des fonctions pro« pres ou déléguées aux corps municipaux, << ils auront le droit de requérir le secours << nécessaire des gardes nationales et autres << forces publiques. »

« A Rome, le roi et, plus tard, les consuls se faisaient précéder de licteurs.

« Aussi, Messieurs, toutes les fois que ce grave problème de la responsabilité des pouvoirs publics s'est présenté à votre examen, vous êtes-vous scrupuleusement appliqués à discerner si l'acte incriminé rentrait ou non dans le cercle des fonctions essentielles de l'autorité publique.

« Il en fut ainsi, en ce qui concerne l'exploitation par l'Etat, des chemins de fer (cass., 9 décembre 1880, PASIC., 1881, 1.14), des travaux d'entretien de la voirie (cass., 1er décembre 1881. PASIC., 1881, I, 415, et 18 juin 1891, p. 165.)

<< Semblables œuvres peuvent être délaissées à des tâcherons vulgaires et n'éveillent aucune idée de supériorité ou de commandement, c'est pourquoi leur exécution n'impose pas à ceux qui en sont chargés l'obligation de ceindre l'écharpe municipale. Simples actes de gestion et de régie, ils n'excèdent pas les pouvoirs d'une personne privée. A la différence des actes de magistrature, ils sont susceptibles de commission et de délégation.

« C'est pour avoir méconnu ces principes, sur l'application desquels jamais vous n'avez varié, que l'arrêt attaqué a encouru votre

censure. »

Conclusions à la cassation,

ARRÊT.

LA COUR; Sur la fin de non-recevoir tirée de ce que l'arrêt dénoncé ne contient aucune disposition définitive :

(1) PASIC., suprà, p. 94.

Considérant qu'en première instance, la ville de Bruxelles avait conclu à ce que l'action fût déclarée ni recevable, ni fondée; et que le dispositif du jugement ne se borne pas à autoriser la preuve des faits articulés pour justifier le fondement de la demande, mais qu'en outre, il rejette, même explicitement, toutes conclusions non admises, c'est-à-dire celles qui tendaient à la non-recevabilité de cette demande;

Considérant qu'en appel, la ville ayant reproduit les conclusions de première instance, la cour les a rejetées et a confirmé le jugement;

Considérant, d'après cela, que l'arrêt dénoncé statue définitivement sur la recevabilité de l'action, et que, partant, il donne immédiatement, de ce chef, ouverture à un recours en cassation;

Au fond:

Sur le moyen, accusant la violation des articles 1382, 1583 et 1384 du code civil; 23, 30, 31, 92 et 108 de la Constitution, en ce que la cour d'appel a imposé à la ville de Bruxelles la réparation d'un préjudice qui aurait été causé par un acte du pouvoir public:

Considérant que les dispositions des articles 1582 et suivants du code civil constituent des lois civiles ou privées, et que, par cela même, elles ne régissent naturellement que les relations civiles ou privées; qu'il suit de là qu'une commune est soumise à ces dispositions toutes les fois qu'elle agit comme personne civile, mais qu'elle y échappe lorsqu'elle agit comme autorité; et que, dans ce dernier cas, la commune n'encourant aucune responsabilité civile, le pouvoir judiciaire est sans qualité pour rechercher si elle n'est pas en faute soit pour avoir pris, soit pour s'être abstenue de prendre une mesure dans la sphère de ses attributions publiques;

Considérant qu'il est hors de doute que, dans l'espèce, la ville de Bruxelles agissait comme pouvoir public; qu'en effet, ce qui lui est reproché, c'est d'avoir autorisé, sur la voie publique, une installation qui pouvait être une cause de dommage, ou d'avoir négligé de garantir la sécurité des passants; et que, dès lors, la faute qui lui est imputée, aurait été commise dans l'exercice des fonctions de police qui lui sont attribuées par la loi;

Considérant qu'en déclarant recevable l'action en dommages et intérêts intentée à la ville de Bruxelles, l'arrêt attaqué contrevient donc aux articles 1582 et suivants visés au pourvoi;

Par ces motifs, rejette la fin de non-recevoir proposée par les défendeurs; casse...;

« PrécédentContinuer »