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(27 juin 1789); 2o le Droit intermédiaire qui comprend toutes les lois rendues depuis le 17 juin 1789 jusqu'à la promulgation du Code civil (30 ventôse an XII ou 21 mars 1804); 3° le Droit nouveau qui se compose du Code civil et de toutes les lois postérieures.

§ I. Droit ancien.

13. Au point de vue législatif notre ancienne France était divisée en deux zones bien distinctes, savoir: les pays de coutume formés par la plupart des provinces situées au Nord de la France, et les pays de Droit écrit comprenant celles situées au Midi.

14. I. Pays de coutume. Les pays de coutume ou pays de Droit coutumier étaient ainsi appelés, parce qu'ils étaient régis par le droit de la coutume ou Droit coutumier, c'est-à-dire par un droit fondé sur des usages constants et prolongés. Les usages étant essentiellement variables d'une localité à l'autre, il y avait une prodigieuse variété dans les coutumes et par suite un défaut complet d'uniformité dans la législation des pays coutumiers. Ferrière évalue à plus de trois cent soixante le nombre des coutumes de notre ancienne France, sur lesquelles on en comptait environ soixante générales et trois cents spéciales. Les coutumes générales étaient celles qui régissaient une portion considérable du territoire, telle qu'une province ou une grande partie d'une province. Celles dont le domaine était moins étendu étaient dites spéciales; il y en avait qui se restreignaient à une ville, à un village, ou même à un hameau.

L'incertitude du Droit coutumier était peut-être un mal plus grand encore que sa variété. On s'en aperçut à l'époque surtout où les appellations devinrent fréquentes. Les juges d'appel, qui étaient peu nombreux et qui par suite exerçaient leur juridiction sur un vaste territoire, étaient obligés d'appliquer un grand nombre de coutumes, et ils ne pouvaient pas les connaître toutes. Comment faire quand le juge ignorait la coutume dont les dispositions devaient servir de base à son jugement? Si les parties n'étaient pas d'accord sur la coutume, ce qui arrivait le plus souvent, il fallait en faire la preuve par témoins. On procédait alors à des enquêtes dites par turbes (de turba), parce qu'on prenait au hasard dix témoins dans la foule qu'on interrogeait sur ce qu'ils croyaient être la coutume. Outre les frais qu'elles occasionnaient, les enquêtes par turbes donnèrent lieu à de monstrueux abus, et c'est principalement dans le but d'y couper court que Charles VII chercha à donner plus de fixité et de certitude au Droit coutumier en ordonnant la rédaction par écrit des coutumes (Ordonnance de Montil-les-Tours de 1453). Cent ans après la mort de Charles VII, ce travail était à peine achevé.

15. II. Pays de Droit écrit. La base de la législation des pays de Droit écrit était le Droit romain. Mais la législation de ces pays n'était pas uniforme pour cela, le Droit romain ayant reçu dans chacun d'eux des modifications plus ou moins profondes en vertu des usages locaux et de la jurisprudence des parlements.

Les pays qui avaient une coutume, mais dans lesquels les cas non prévus par la coutume devaient être réglés par le Droit romain, tels que la Bourgogne, la Franche-Comté, étaient rangés dans la catégorie des pays de Droit écrit, parce que le Droit romain y avait force obligatoire sur tous les points auxquels la coutume ne dérogeait pas. Il n'y avait donc de pays coutumiers que ceux dans lesquels le Droit romain n'avait jamais force de loi et ne pouvait être invoqué que comme raison écrite dans les cas non prévus par la coutume.

Telle était notre ancienne France au point de vue législatif. Au Nord, des coutumes d'une infinie variété; au Midi, le Droit romain plus ou moins mutilé. C'était un véritable chaos !

16. Il y avait cependant une partie de notre ancienne législation qui présentait plus d'uniformité : c'était celle contenue dans les ordonnances royales, qui en principe étendaient leur empire sur tout le territoire. Mais sur ce point encore il y a certaines réserves à faire. Il était de principe dans notre ancien Droit que les ordonnances des rois n'étaient exécutoires qu'après avoir été enregistrées par les parlements. Quand une ordonnance avait été enregistrée par tous les parlements du Royaume, elle était exécutoire dans tout le Royaume; mais si une ordonnance n'avait été enregistrée que par certains parlements, elle n'était exécutoire que dans leur ressort. Or cela arrivait quelquefois, les parlements s'étant arrogé à tort ou à raison le droit de faire des remontrances au roi qui demandait l'enregistrement d'une ordonnance et même de refuser cet enregistrement; mais cela arrivait rarement, parce que le roi triomphait le plus souvent de la résistance des parlements, soit par des lettres de jussion, soit au moyen du lit de justice, soit enfin, à la dernière extrémité, en ayant recours à l'exil du parlement.

§ II. Droit intermédiaire.

17. L'ère du Droit intermédiaire s'ouvre le 17 juin 1789, et se clôt le 18 mai 1801. Le Droit intermédiaire comprend par conséquent les lois qui ont été faites par l'Assemblée nationale, qui prit le nom de Constituante quand elle cût doté la France d'une constitution, par l'Assemblée législative, par la Convention nationale, par les deux Conseils et le Directoire, et une partie de celles faites par le Consulat. L'ensemble de ces lois présentant une physionomie tout à fait à part, on les considère

comme formant un droit spécial sous le nom de Droit intermédiaire ou révolutionnaire. Elles font l'application à un grand nombre de matières des principes nouveaux consacrés par la Révolution: unité de l'Etat, séparation des pouvoirs spirituel et temporel, égalité de tous les Français devant la loi, abolition de la féodalité... L'esprit violent de réaction, dans lequel ces lois furent conçues, porta quelquefois le législateur à dépasser la juste mesure, notamment quand, assimilant les enfants illégitimes aux enfants légitimes, il leur accorda les mêmes droits. Le Jégislateur du Code civil à son tour a peut-être commis une exagération en sens inverse, en réagissant outre mesure contre le nouvel état de choses créé par le droit de la Révolution.

18. Le législateur, pendant la période qui nous occupe, comprit que le plus grand bienfait, dont on pût doter la France, était celui d'une législation uniforme, et il fit d'honorables efforts pour parvenir à ce but. Un article de la Constitution de 1791 portait : « Il sera fait un Code de lois civiles communes à tout le Royaume. » L'œuvre ne fut même pas tentée par l'assemblée qui avait posé le principe, l'Assemblée constituante, ni par l'assemblée qui lui succéda, l'Assemblée législative. Ce n'est pas que la bonne volonté manquât; mais les événements étaient plus forts que les volontés.

Sous la Convention et sous le Directoire plusieurs projets furent successivement présentés; ils échouèrent tous. Mais si le législateur d'alors ne put réaliser l'unité législative qu'il avait rêvée, il en prépara tout au moins l'avènement. C'est quelque chose d'abord d'avoir posé le principe. En outre toutes les lois faites pendant la période révolutionnaire, et elles sont nombreuses, étaient obligatoires pour toute la France.

Sur tous les points faisant l'objet de ces lois, la législation de la France devenait donc uniforme. Le Droit ancien subsistait il est vrai, avec son infinie variété, sur tous les points non réglementés par les lois nouvelles, et à ce point de vue les lois révolutionnaires augmentèrent le chaos législatif; car ce n'était pas chose facile de savoir où commençait le domaine de la loi nouvelle et où finissait celui de l'ancienne; mais par cela même elles rendirent plus nécessaire la réalisation complète du principe de l'unité législative.

SIII. Droit nouveau.

19. Le Code civil ouvre l'ère du droit nouveau, dont il forme le monument le plus important. C'est au Consulat qu'en revient l'honneur. Commencé en 1800, il fut terminé en 1801.

20. Confection du Code civil. Un arrêté des Consuls du 21 ther

midor de l'an VIII (12 août 1800) nomma une commission chargée de rédiger un projet de Code civil. Cette commission était composée de quatre membres: Tronchet, président du tribunal de cassation, adepte fervent du Droit coutumier; Portalis, commissaire du gouvernement près le conseil des prises, fortement imbu des principes du Droit romain; Bigot-Préameneu, commissaire du gouvernement près le tribunal de cassation; Malleville, juge au même tribunal. Tronchet était président de la commission, Malleville devait remplir les fonctions de secrétaire-rédacteur. L'arrêté portait en outre que Tronchet, Portalis et Malleville assisteraient aux séances du Conseil d'Etat, dans lesquelles auraient lieu les discussions relatives au Code civil.

Les membres de la commission se partagèrent le travail, et ils y mirent tant d'activité que le projet fut terminé en quatre mois. On a reproché à ce projet son manque d'originalité. Ce n'est, a-t-on dit, qu'une compilation empruntée à nos anciennes coutumes, au Droit romain et au Droit révolutionnaire. Comme le dit fort bien M. Laurent, le reproche était à certains égards un éloge. La législation d'un peuple ne peut pas sortir de toutes pièces du cerveau d'un jurisconsulte; elle se compose de matériaux accumulés par les siècles et entre lesquels il ne peut s'agir que de faire un triage. Les innovations législatives doivent être rares et faites à bon escient; en cette matière, innover c'est souvent reculer. Toutefois ce n'est pas sans raison qu'on a reproché au Code civil un esprit de réaction exagérée contre le nouvel état de choses créé par la Révolution.

Le projet dont il vient d'être parlé fut imprimé dans le mois de pluviôse an IX. Pour s'éclairer des lumières du pays, le premier Consul communiqua ce projet au tribunal de cassation et aux tribunaux d'appel en les invitant à l'étudier et à proposer leurs observations. Grâce à l'activité et à la bonne volonté de ces grands corps judiciaires, leurs observations furent remises dans le courant de l'année et la discussion du Code civil put commencer immédiatement. Elles ont souvent servi de guide au législateur; celles du tribunal de cassation sont remarquables entre toutes.

Il restait à transformer le projet en loi. D'après la Constitution du 22 frimaire an VIII, qui était alors en vigueur, quatre pouvoirs participaient à la confection de la loi, savoir :

1o le Gouvernement, auquel appartenait l'initiative de la loi.

2o le Conseil d'Etat, qui la préparait. Le Conseil d'État était divisé en cinq sections: législation, intérieur, finances, guerre et marine; il comprenait 80 membres.

3o le Tribunat, qui émettait après discussion un vou favorable ou défavorable à la loi. Le Tribunat comptait 100 membres.

4o enfin le Corps législatif, composé de trois cents membres, qui votait

la loi.

Il faut ajouter que la Constitution de l'an VIII instituait un Sénat conservateur, qui avait pour mission d'annuler la loi quand elle était contraire à la Constitution.

21. Tels sont dans leur ensemble les pouvoirs qui concouraient à la confection de la loi. Voici maintenant l'exposition détaillée de leur mécanisme.

Le Gouvernement, auquel appartenait l'initiative de la loi, la proposait par l'organe du premier Consul. A cet effet le premier Consul envoyait le projet au Conseil d'État, qui était chargé de le préparer, c'est-à-dire d'arrêter sa rédaction en articles.

La préparation de la loi par le Conseil d'État comprend deux phases La première, que l'on pourrait appeler la préparation provisoire, était l'œuvre de l'une des sections du Conseil d'État, celle dans les attributions de laquelle rentrait le projet de loi ; c'était ordinairement, ç'a toujours été pour le Code civil la section de législation. La section examinait le projet, et, après lui avoir fait subir les modifications qu'elle jugeait nécessaires, le renvoyait au premier Consul qui pouvait le retirer, le reproduire modifié ou l'accepter. S'il l'acceptait, il le renvoyait au Conseil d'État, et alors commençait la deuxième phase de la préparation qu'on pourrait appeler définitive. Elle rentrait dans les attributions du Conseil d'État tout entier réuni en assemblée générale. L'assemblée, présidée par le premier Consul ou par Cambacérès, discutait le projet, qui avait été préalablement imprimé et distribué à tous ses membres. Si des amendements étaient proposés et acceptés par l'assemblée, elle en ordonnait le renvoi à la section en vue d'une nouvelle rédaction; puis elle arrêtait la rédaction définitive du projet de loi. Le rôle du Conseil d'État était alors terminé.

Le projet, rédigé définitivement par le Conseil d'Etat, était renvoyé au premier Consul, qui, s'il se décidait à le transformer en loi, en saisissait le Corps législatif. Trois orateurs, choisis parmi les membres du Conseil d'Etat et nommés par le Gouvernement, soutenaient en son nom le projet devant le Corps législatif; le premier nommé en exposait les motifs.

Avant de voter sur le projet de loi, le Corps législatif le communiquait officiellement au Tribunat. Celui-ci désignait un de ses membres pour lui faire un rapport, puis discutait le projet en assemblée générale. Ensuite le Tribunat émettait un vœu favorable ou défavorable sans avoir le droit de proposer aucun amendement.

Le Tribunat choisissait alors dans son sein trois orateurs chargés de communiquer son vœu au Corps législatif. Puis un débat contradictoire

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