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Tant mieux! Je le sais bien, ce n'est que dans des cas extrêmes, dans des situations malheureuses, que ceci pourrait se produire. Eh bien, je ne voudrais pas que cela pût se produire, même dans ces situations extrêmes, exceptionnelles.

Où est l'inconvénient à réserver au président de la République le droit de savoir les poursuites et de s'expliquer sur leur opportunité? C'est là cependant le seul résultat possible de la modification que je propose; c'est que le président de la République soit mis à portée de savoir s'il lui convient ou s'il ne lui convient pas d'autoriser des poursuites, peut-être inconsidérées.

J'ajoute ceci :

S'il y a à redouter des hostilités éventuelles, il y a quelquefois aussi à redouter le zèle inconsidéré de membres du ministère public, qui voudraient faire preuve de zèle, gagner leurs éperons; ils se laisseront peut-être entrainer; ils engageront des poursuites qu'on regrettera plus tard, qu'on aurait voulu empêcher. (Aux voix ! aux voix !)

Je propose, pour obvier à cet inconvénient, que les poursuites ne puissent pas s'exercer sans l'aveu du président de la République.

LE CITOYEN PRÉSIDENT. M. Charamaule propose de dire: « La poursuite ne pourra être exercée d'office, par le ministère public, que du consentement du président de la République. »

Je mets aux voix cet amendement.
(L'amendement, mis aux voix, n'est pas adopté.

Le paragraphe de la commission est ensuite mis aux voix et adopté.)

LE CITOYEN PRÉSIDENT. Maintenant, voilà les deux paragraphes adoptés; mais on demande le scrutin de division sur l'ensemble de l'article. (Exclamations.)

Voix à droite. Y a-t-il une liste ? où est la liste? LE CITOYEN ÉMILE LEROUx. J'ai proposé une addition, monsieur le président?

LE CITOYEN PRÉSIDENT. M. Emile Leroux insiste pour proposer le paragraphe additionnel suivant:

« Nul ne sera admis à prouver la vérité des faits diffamatoires imputés au président de la République, sauf à exercer, dans les limites tracées par la constitution, les droits qu'elle consacre relativement à la responsabilité de ce magistrat. >>>

LE CITOYEN VESIN. Je demande la question préalable. L'art. ler, tel qu'il demeure rédigé, ne comporte pas cette

addition.

LE CITOYEN ÉMILE LEROUX. Si on veut me prêter un instant d'attention... (La question préalable!)

Permettez! J'ai modifié mon amendement, et vous allez reconnaître que ce n'est pas la question préalable qui doit trancher la difficulté. Cette difficulté esl, je crois, assez grave, et j'espère le démontrer à l'Assemblée.

Je modifie l'amendement en ces termes : « Nul ne sera admis à prouver les faits imputés au président de la République, sauf à exercer, dans les limites tracées par la constitution, les droits qu'elle consacre relativement à la responsabilité de ce magistrat. »

Messieurs, je veux, comme vous, que le président de la République soit environné du plus profond respect; mais je demande que les moyens de répression qui ont été introduits dans la loi soient en parfaite harmonie avec la constitution. C'est par cette raison que je n'ai pas accepté le mot offense; ét que, faisant partie de la minorité de la commission, j'aurais désiré qu'on introduisit les mots outrage, injure et diffamations. (Interruption.)

Vous avez prononcé, je respecte votre décision, mais je veux examiner avec vous quelle est la conséquence directe de

*ce mot.

Une voix. Votre amendement n'a plus d'objet! LE CITOYEN VESIN. Monsieur le président, j'ai demandé la question préalable; j'insiste. Si on ne la met pas aux voix, je demanderai la parole pour un rappel au règlement.

LE CITOYEN ÉMILE LEROUX. Messieurs, cette

tion a divisé la commission, et si je parviens à vous démontrer que la question a été soulevée sous l'empire de la loi de 1819, à l'occasion de la personne du roi...

LE CITOYEN VESIN. La question préalable!

LE CITOYEN PRÉSIDENT. Si on insiste pour la question préalable, je vais la mettre aux voix. (Réclamations à gauche.)

LE CITOVEN ÉMILE LEBOUX. Je demande la parole contre la question préalable.

LE CITOYEN VESIN. On ne peut parler contre la question préalable.

LE CITOYEN LARABIT. Il ne peut dépendre d'un seul membre d'empêcher la discussion. Le règlement n'a pas dit que la question préalable dût empêcher toute discussion.

LE CITOYEN VESIN. Il a dit qu'on pouvait demander la question préalable.

LE CITOYEN LABABIT. Il n'a pas dit qu'on pouvait étouffer la discussion.

LE CITOYEN. VESIN Je demande la question préalable.

LE CITOYEN ÉMILE LEROUX. Je vous demande une minute.

LE CITOYEN PRÉSIDENT. Ce serait déjà fini sans l'incident.

LE CITOYEN ÉMILE LEROUx. M. le président a raison, ce serait fini il y a longtemps. (Parlez! parlez!)

Messieurs, la question sur laquelle j'appelle votre attention a été soulevée sous l'empire de la loi de 1819, à l'égard de la personne du roi, et elle a été résolue par la cour de cassation, non pas dans le sens qu'on donne au mot offense inséré dans la loi, mais en ce sens que la preuve était inconciliable avec l'inviolabilité consacrée par la loi.

L'article que vous insérez dans votre loi est semblable à celui qui existe dans la loi de 1819; le mot offense, y est pris dans la même acception, il renferme à la fois, comme on a dit, les mots outrage, injure, diffamation; mais ce mot offense est-il exclusif de la preuve dans tous les cas? Voilà la question.

Un membre à droite. Oui!

LE CITOYEN ÉMILE LEBOUX. Vous dites oui, moi je dis non, et je le dis avec la cour de cassation.

Le méme membre à droite. Nous allons juger. (Bruit.)

LE CITOYEN ÉMILE LEROUX. Si vous voulez juger sans entendre, je n'ai plus qu'un mot à dire : si vous croyez que la cour de cassation a commis une erreur, je m'incline devant votre décision; mais si vous voulez être eclairés, permettez-moi d'invoquer l'autorité de la chose jugée. (Parlez!)

On demandait, à propos de la personne du roi inviolable, si on pouvait discuter ses actes? La cour de cassation a dit: Non. Mais pourquoi? Est-ce parce que le mot offense était exclusif de la preuve? Non, c'est parce que l'art. 20 de la loi de 1819 était inconciliable avec le principe d'inviolabilité, d'infaillibilité de la personne royale, qui était inscrit dans la constitution d'alors. Pouvez-vous, maintenant, comparer la position du président de la Republique avec celle de la personne du roi? Le président de la République est responsable, il est justiciable de la haute cour, il est justiciable de la justice du pays. Ne dites done pas qu'on peut appliquer à la personne du président de la République ce qu'on appliquait à la personne du roi. Moi qui veux le protéger comme vous, moi qui veux qu'on ne puisse pas traîner le président de la République dans l'arène judiciaire, l'appeler devant tous les tribunaux, le soumettre en quelque sorte à l'obligation, par les procureurs de la Republique, de faire la preuve contraire aux faits articules, moi qui veux qu'il n'y ait pas de scandale et que sa personne soit respectée comme elle doit l'être, je maintiens qu'il y a ici nécessité d'introduire cette exception dans la loi, car, si on ne l'y introduisait pas, qu'arriverait-il? II arriverait que, si on accusait le président de la République de concussion, con

ques-jointement avec un ministre, la preuve étant admise contre le ministre, le jury pourrait ne pas saisir la distinction qui est sous-entendue dans le mot offense, ne pas comprendre pourquoi le même fait peut être prouvé à l'égard du ministre et ne pas l'être à l'égard du président, et, par suite, prononcer quelquefois des acquittements scandaleux.

Prenez bien garde, je viens remplir un devoir de conscience; je veux protéger, comme vous, la personne du président de la République, mais dans la limite de la constitution; je veux, puisqu'il n'est pas inviolable, qu'on puisse, tout à la fois, discuter ses actes et ne pas porter une atteinte à sa considération, une atteinte à son caractère.

Il faut donc, je vous le répète, inscrire l'exception dans la loi. Si vous ne l'y inscriviez pas, l'exception pourrait être invoquée devant le jury; on y porterait cette question grave, qui pourrait recevoir des solutions différentes; et si une cour d'assises ou un jury prononçait un acquittement scandaleux, par cette raison qu'on n'aurait pas admis la preuve des faits, le silence de la loi ne pourrait-il pas avoir un inconvénient grave? Dans une loi de cette nature, il vaut mieux être explicite.

Sans doute, c'est le jury qui prononce; mais la justice a besoin de règle; le jury a besoin de connaître ce que vous avez considéré comme délit, et dans quels cas vous avez admis la preuve.

J'ai dit que, dans l'état actuel de la législation, il y avait incertitude; eh bien, lorsqu'il y a incertitude en une telle matière, et qu'elle est basée sur un arrêt de la cour de cassation, cela vaut bien la peine que vous insériez dans la loi une disposition qui fasse disparaître toute incertitude.

Je demande donc que l'Assemblée veuille bien adopter le paragraphe additionnel que j'ai l'honneur de lui proposer. Quelques membres à gauche. Le renvoi à la commission ! LE CITOYEN PRÉSIDENT DU CONSEIL. Non! non! cela a été discuté dans la commission.

LE CITOYEN RAPPORTEUR. La question portée à la tribune par M. Emile Leroux a été examinée dans le sein de la commission. Personne, dans la commission, n'a nié l'importance qu'il pouvait y avoir à ce que le texte de la loi fût suffisamment clair, pour que le but qu'on se propose, c'està-dire sauvegarder le président de la République, fù complétement atteint; mais je prie l'Assemblée de remarquer que les principes qui font la base de la loi nouvelle sont ceux de la loi de 1819.

C'est la loi de 1819 qui est la base de la législation de la presse en France; c'est de cette loi que date la liberté de la presse. (Rires à gauche.)

Est-ce que c'est, par hasard, sous la convention ou sous le gouvernement du directoire qu'on faisait des lois comme nous en faisons aujourd'hui ? Voulez-vous que je vous lise la loi de germinal an '4, et vous verrez ses dispositions.

Je demande la permission de ne pas m'occuper de l'interruption (Oui! oui! continuez!)

Je reviens à la loi de 1819, et je dis: Le principe de la loi, c'est que nul n'est admis à la preuve des faits diffamatoires. On a fait une exception au principe général, elle concerne les fonctionnaires publics.

LE CITOYEN ÉMILE LEROUX. Les agents de l'au

torité !

LE CITOYEN BRAPPORTEUR. Non, les dépositaires de l'autorité publique.

La loi du 26 mai 1819, qui porte cette exception, est en corrélation exacte avec celle du 17 mai, et c'est précisément à cause de cette corrélation que le mot offense, qui nous a occupés si longtemps aujourd'hui, a été adopté en 1819. Le but de ce mot offense était non-seulement de sauvegarder la personne du roi, mais encore de détruire jusqu'à la possibilité de l'admission de la preuve.

Eh bien, aujourd'hui, qu'avons-nous fait? Nous avons pris le mot offense comme il a été pris dans la loi du 17 mai 1819, dans le décret du 11 août 1848. Nous restons dans le droit commun qui s'applique au mot offense.

Le législateur du temps a eu soin de faire un chapitre spécial pour les délits appelés offenses, portés à l'art 20. A ces délits ne s'applique pas l'exception de la loi du 26 mai 1819.

Voilà pourquoi, dans la commission, on a été d'avis qu'il était inutile d'introduire la rédaction qui vous est maintenant Nous ne faisons pas une loi organique; nous n'avons pas la proposée. C'est aujourd'hui le droit commun en France. prétention de remuer ici toutes les lois sur la presse; nous tenons comme en pleine vigueur tout ce qui n'est pas réformé. Or la base de la loi de 1819 est que nul n'est admis Avec le mot offense, le président n'est plus un fonctionnaire à faire la preuve, si ce n'est pour le fonctionnaire public. auquel s'applique l'exception.

commission ne l'a point adopté.
L'amendement est done inutile, et c'est pour cela que la

LE CITOYEN VICTOR LEFRANC. Je crois que l'amendement est nécessaire, et je vais donner, je crois, des raisons suffisantes pour en justifier la discussion, si ce n'est pour en amener l'adoption.

Sans doute vous venez d'instituer une peine contre le délit d'offense envers le président de la République; on est que les mots outrage, injure, diffamation n'atteindraient pas, convenu unanimement que le mot offense atteindrait des faits et c'est là le but pour lequel on a préféré le mot offense; il n'est donc pas exact de dire que le mot offense a eu pour but exclusif la suppression de la preuve des faits diffamatoires qui pourraient être contenus dans l'offense.

Eh bien, de ce que vous avez institué une peine qui a trait à des faits ou à des attaques autres que ceux qui sont dirigés contre les fonctionnaires responsables, s'ensuivra-t-il nécessairement que vous aurez détruit toutes les peines contre la diffamation, vis-à-vis du président de la République? Je soutiens le contraire, et en voici la raison.

On nous disait tout à l'heure que l'on n'abrogeait que les lois qui étaient incompatibles avec la loi actuelle. Croyezvous, parce que vous punissez le délit d'offense envers le président de la République, que vous avez établi une incrimination incompatible avec le délit qu'on appellera diffamation, délit d'outrage, délit d'injure? Non, certainement.

Au banc de la commission. Ils s'appellent offense!

d'accord; si nous étions d'accord, il est évident que nous ne
LE CITOYEN VICTOR LEFRANC. Nous ne sommes pas
discuterions pas. C'est précisément parce que, sur ces bancs,
la discussion.
on dit oui, et que je dis non, que je prie l'Assemblée d'écouter

Je dis donc que, de ce que vous avez établi un châtiment, un châtiment mérité, puisqu'il y a décision de l'Assemblée, contre ce qui ne serait qu'une offense, il ne s'en suit pas que vous ayez abrogé les châtiments spéciaux contre des délits plus graves que l'offense, c'est-à-dire des délits qui contien draient, dans l'offense, la diffamation, l'injure publique. Je dis que c'est mon sentiment, et je le prouve.

Dans une foule de circonstances diverses qui sont présentes au souvenir de tous les jurisconsultes, il y a eu à la fois, pour des particuliers, et l'outrage et l'injure publique et la diffamation. On a voulu, lorsque c'étaient des fonctionnaires ordinaires autres que le président de la République, il n'y en avait pas alors, on a voulu offrir la preuve des faits diffamatoires. Qu'ont fait les tribunaux? Ils ont fait un triage; ils ont dit: Je mets de côté de l'injure, l'outrage; ils ont dit: toires. On pouvait dire alors cependant que l'outrage conteje ne vous antorise à faire la preuve que des faits diffamanait la diffamation.

Au banc de la commission. Non! non!

mais ce n'est pas le mien; ce n'est pas l'avis de la cour LE CITOYEN VICTOR LEFRANC. C'est votre avis, d'appel de Pau, ce n'est pas l'avis de la cour de cassation.

moi cependant de me fier un peu à ma mémoire d'avocat, Je ne veux pas faire ici le jurisconsulte, mais permettezcomme vous pouvez vous fier à la vôtre.

Je dis donc que l'outrage contient la diffamation et l'in

jure, en ce sens que la diffamation et l'injure ont pour élé- | pas; voilà ce que c'est que de ne pas écouter. La cour rement principal l'outrage; que c'est là précisément le contact poussera la preuve pour l'un et l'admettra pour l'autre, et qui s'etablit entre le fait qui outrage et la personne outragée. ❘ alors le jury acquittera. Comment! vous croyez que le jury Il en est de même de l'offense. Nierez-vous que l'on puisse offenser le président de la République à l'aide de quelque chose qui ne soit ni l'outrage ni la diffamation? (Non!) Eh bien, il y a une offense qui ne sera ni l'outrage ni la diffamation.

Reconnaissez donc avec moi qu'il peut y avoir quelque chose qui sera l'outrage et la diffamation, prévus par la loi, (Rumeurs.)

Comment! vous pourrez nier que, par la manière dont je raconterai un fait, que vous poursuivez, vous pourrez nier que je puisse arriver à faire une diffamation, à faire un outrage? Est-ce que, par hasard, le récit d'un fait de nature à porter atteinte à la considération d'un magistrat, ne s'est jamais fait sans aucune de ces expressions amères qui donnent à la diffamation un caractère qui la rend nécessairement punissable et qui provoque des poursuites? Est-ce que vous pouvez nier que l'offense puisse s'appliquer à un fait diffamatoire, répété avec insistance, avec affectation? Il est évident que l'offense peut se présenter sous l'aspect d'offense pure, sous l'aspect d'offense avec insulte, sous l'aspect d'offense avec diffamation, sous l'aspect d'offense avec injure.

Je veux que les jurés soient à l'abri de l'erreur: voilà pourquoi je vous demande de dire formellement dans la loi qu'il n'y aura jamais de preuve admise contre les faits imputés au président de la République.

On nous en a donné un exemple saisissant. Supposez un instant que le président du conseil des ministres et le président de la République soient compris tous les deux dans les mêmes attaques, dans lesquelles il se trouvera des iaits diffamatoires contre l'un et contre l'autre.

LE CITOYEN BAZE. Il n'y a pas offense légale contre les ministres.

LE CITOYEN VICTOR LEFRANC. Je suis d'accord avec vous. Seulement, messieurs, il y a ceci de fâcheux, c'est que votre esprit s'est placé dans un terrain dont non-seulement vous ne voulez pas sortir, mais où vous voulez forcer les autres à entrer. Eh bien, le mien résiste à se placer sur ce terrain.

Je dis donc que, si un article contenait des faits diffamatoires contre le président du conseil et le président de la République, est poursuivi devant les tribunaux, et si vous laissez poursuivre d'office le ministère public, les tribunaux pourront comprendre les choses comme je les comprends moi-même.

Il pourra arriver qu'on dira au jury: J'offre la preuve des faits contre les ministres et contre le président de la République. On dira: Contre le président de la République, vous ne le pouvez pas; et on aura raison. Mais n'avez-vous jamais vu des tribunaux ordinaires, et la cour de cassation même, donner aux lois un autre sens que celui qui résulte des discussions du conseil d'Etat et des discours des orateurs du Gouvernement? Et ce qu'ont pu faire les tribunaux ordinaires et la cour de cassation, le jury, qui est un peu moins savant, ne pourra pas le faire! Est-ce que le jury pourra faire la différence entre la preuve des faits qu'on peut faire contre les ministres et la preuve des faits qu'on ne peut pas faire contre le président de la République? Est-ce que vous ne voyez pas là un péril? Reconnaissez donc la juste sollicitude de M. Emile Leroux. En vérité, je m'étonne de votre résistance. (Rumeurs.)

Vous ne voulez pas admettre cette idée; eh bien, êtesvous sûrs que les autres ne l'admettront pas? Il vaut mieux des locutions surabondantes qu'un silence périlleux en présence d'un jury qui pourra apporter une grande bonne foi, mais pourra ne pas apporter une grande lumière... (Interruptions.)

Un membre. C'est la cour qui appréciera...
LE CITOYEN VICTOR LEFRANC. Vous ne comprenez

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ne sera pas plus éclairé lorsque le texte lui dira que la preuve des faits n'est pas admise?

Si vous ne lui dites pas, il verra deux hommes égaux; il acquittera. C'est à vous de voir si vous voulez qu'il en soit ainsi; quant à moi, je propose cette addition, et l'avenir prouvera qui sauvegardait le mieux la dignité du président de la République.

LE CITOYEN BOUHER. Je ne comprends pas la portée de la discussion; elle me paraît entièrement rétrospective, elle paraît dénier l'intelligence du vote que vous venez de rendre. Le mot offense, dans le langage du droit, comprend l'outrage et la diffamation, l'injure, l'invective, lous les moyens à l'aide desquels on porte atteinte à l'honneur et à la considération; voilà la portée légale du mot offense.

Sa portée légale est encore celle-ci: c'est que la preuve des faits allégués, de quelque nature qu'ils soient, est essentiellement inadmissible.

Vous avez voté ces deux principes, ces deux idées par l'art. 1o de la loi sur la presse.

Maintenant, on vous propose un paragraphe additionnel qui consiste à dire ceci : La preuve des faits diffamatoires...

LE CITOYEN ÉMILE LEROUX. Des faits imputés. LE CITOYEN BOUHER. ... Des faits imputės, si vous voulez, ne sera pas admissible..

Je déclare, pour moi, que c'est une répétition inutile et puérile; lorsqu'une expression, avec la valeur légale, historique, traditionnelle, mentionnée, dès la loi de 1819, dans nos codes, a été employée, il ne faut pas, lorsqu'on renouvelle une législation, qu'on introduise un prétendu commentaire et une prétendue explication qui se résumerait par ces mots : le mot offense veut dire que la preuve diffamatoire n'est pas admissible.

Les commentateurs diront: Nous qui faisons la loi, à l'aide d'expressions qui sont caractérisées dans leur portée légale, historique, nous n'avons pas besoin d'un pareil amende

ment.

L'honorable M. Emile Leroux me dit: Lorsque la commission a eu à examiner la question, elle a décidé que l'offense faite contre la personne du roi n'autorisait pas, de la part de l'accusé, la preuve des faits diffamatoires, et elle s'est fondée sur l'unique principe de l'inviolabilité royale, principe qui est complétement détruit par la constitution. La raison que donnait la cour de cassation n'existera plus, če ne sera pas par cette raison qu'on devra décider; mais on décidera que l'offense n'autorise pas la preuve des faits articulés, parce que la nature de la responsabilité du président de la République y est complétement hostile et que l'économie de la constitution, qui constitue la responsabilité présidentielle, ne la comprend que par voie de pétition, que sur l'initiative de l'Assemblée nationale et devant la juridiction de la haute cour. Voilà par quelles raisons la cour de cassation serait appelée à décider la question aujourd'hui.

Un membre à droite. Et le jury?

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LE CITOYEN ROUHER. Quant au jury, on vient de dire que le jury sera appelé à juger la question contre le président, appelé à juger la question contre un ministre, à les juger d'une manière diverse ou d'une manière identique; je dis que le jury n'est jamais appelé à qualifier les faits; que c'est la cour qui détermine le caractère du délit.

Si pareil fait se produit, la qualification sera ceci: délit de diffamation contre un ministre, délit d'offense contre le président.

Quant à la décision du jury, elle pourra être entraînée par des considérations de faits; mais ce n'est pas la loi ou l'amendement présenté par l'honorable M. Leroux qui pourra mor difier cette décision.

.i

Je vote contre l'amendement, parce qu'il me paralt inutile.

LE CITOYEN PRÉSIDENT. Je mets aux voix le paragraphe additionnel de M. Leroux.

LE CITOYEN ÉMILE LEROUX. J'ai modifié en disant : • Nul ne sera admis à prouver les faits imputés. »

LE CITOYEN PRÉSIDENT. Je relis l'amendement de M. Emile Leroux, ainsi modifié :

« Nul ne sera admis à prouver les faits imputés au président de la République, sauf à exercer, dans les limites tracées par la constitution, les droits qu'elle consacre relativement à la responsabilité de ce magistral. >>>

(L'amendement n'est pas adopté.)

LE CITOYEN PRÉSIDENT. Je mets l'article 1 aux voix dans son ensemble. Est-ce qu'on insiste pour le scrutin de division? (Non! non!)

(L'article 1 est adopté dans son ensemble.)

DEMANDE D'INTERPELLATIONS.

LE CITOYEN PRÉSIDENT. Voici une demande d'interpellations. (Ah! ah!)

M. La Claudure... (Bruit.) Comme l'Assemblée prononce saus debat, après avoir entendu un des ministres, j'engage à écouter les interpellations.

• Le citoyen La Claudure, représentant du peuple, demande

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Léon Faucher, Faure (Hautes-Alpes), Favreau.
Gasselin (Sarthe), Gavarret, Gérard (Léon), Germonière,

à l'Assemblée la permission d'interpeller le ministère à l'égard Gigon-Labertrie, Gindriez, de Girardin (Ernest), Le Gorrec,

de l'expulsion du territoire français d'un des membres de la famille Bonaparte. Il supplie l'Assemblée de vouloir bien flxer le jour où il lui conviendra d'entendre ces interpellations. » LE CITOYEN MINISTRE DE LA JUSTICE. Le minislère est parfaitement aux ordres de l'Assemblée, mais je dois l'avertir que si, toutes les fois que le ministère croit devoir prendre une mesure qui est dans les termes de la loi, à l'égard des étrangers qui demandent à rester en France, si le ministère est obligé d'en rendre compte à l'Assemblée, et si des interpellations devaient avoir lieu à l'égard de tous et de chacun des étrangers qui doivent se réfugier en France... (Interrup

Gourgaud (le général), Guisard, Gleizal.
D'Hespel, Hovyn-Tranchère, Hubert-Delisle, Huot (Vosges).
Joigneaux.

Kolb Bernard.

Laboulie, Laides (le général), Landolphe, Lasteyras, de Lasteyrie (Ferdinand), Latrade, Laurent (Ardèche), Lebeuf, Le Flô (le général), de Luppé.

Madesclaire, Malbois, Mathé (Félix), Moreau (Creuse). Oudinot (le général).

Pasquy-Ducluzeau, Perreau, Pigeon.

De Rancé, Regnault de Saint-Jean-d'Angély, Renouard, Re

tion), le temps de l'Assemblée n'y suffirait pas. (Bruit à gauche.) pellin, Rey (Drome), Louis Reybaud, Richier, de la Rocheja

LE CITOYEN PRÉSIDENT. L'art. 80 dit que le ministre sera entendu et que l'Assemblée votera sans débat. (S'adressant au ministre.) La conclusion? Vous n'acceptez pas les interpellations?

Plusieurs voix à droite. N'acceptez pas.

LE CITOYEN MINISTRE DE LA JUSTICE. Il n'appartient pas au ministre de déterminer les cas auxquels de pareilles interpellatious peuvent être faites sans déranger les travaux de l'Assemblée. Mais le ministère peut déclarer qu'il a usé de de son droit. (Bruit.) Qu'il a usé de son droit.

LE CITOYEN PRÉSIDENT. Le ministère a le droit de dire qu'il n'accepte pas les interpellations.

LE CITOYEN PRÉSIDENT DU CONSEIL. Le ministère

a déclaré, d'après son appréciation, sauf la décision de l'Assemblée, qu'aucun intérêt politique urgent ne s'attachait à cette interpellation.

LE CITOYEN PRÉSIDENT. A quel jour l'Assemblée veut-elle renvoyer ces interpellations ?

Voiz diverses. Après le budget!

mois! - A trois ans !

A un mois ! - A trois

(Le citoyen La Claudure prononce, au milieu du bruit, quelques paroles que nous ne pouvons entendre.)

LE CITOYEN PRÉSIDENT. Quand le règlement dit :

sans débat. il ne permet pas les interpellations.

Vous n'avez pas la parole.

LE CITOYEN VICTOR LEFRANC. Après la loi tout au

plus! Un mois, c'est ridicule !

..

LE CITOYEN PRÉSIDENT. Je consulte l'Assemblée sur la remise à un mois.

(L'Assemblée renvoie les interpellations à un mois. clamations nombreuses et vive agitation à gauche.)

- Ré

LE CITOYEN CHARRAS. Monsieur le président, pourquoi n'avez-vous pas mis aux voix la remise à trois ans ? La séance est levée à 6 heures moins un quart.

quelein, Romain-Desfossés, Roussel (Lozère), Rouet, RouxCarbonnel.

Sain, Salvat, Seydoux, Signard, Subervie (le général).
Turpin.

Vacheresse, Versigny. De Wendel.

[blocks in formation]

Ménand, Mimerel, Mispoulet, Montholon, Morin, de la Moskowa.

De Panat, Passy, Pelletier, Pfliéger, Pilhes, de Plancy (Aube), de Plancy (Oise), Plichon, Poujoulat.

Rattier, Ravinet, de Rémusat, Richard (Cantal), de la Rochette, Rogé (le général), Rolland, Rollinat, Ronjat, Rougeot, Rouveure, Rullière.

De Saint-Priest (le général), Salvat, de Sesmaisons, Signard, Soult, Subervie (le général), Suchet (Var).

Taschereau, Terrier, de Tocqueville.

borde, Lepeletier d'Aunay, Lepic, Lequien, Leroy-Beaulien, de Lescours, Lespérut, de Lespinay, Lestiboudois, Levavasseur, Leverrier, Levey, de Limairac, Lopès-Dubec, Louvet, Loyer.

Maissiat, Manescau, Marchant, Mareau (Théodore), Maréchal, Marrast (François), Martel, Mathieu Bodet, Mathieu de la Redorte, Maure, Mazé-Launay, Mège, de Melun (Ille elVilaine), de Melun (Nord), Mérentier, de Mérode, Michaut (Meurthe), Molé, Monnier (Morbihan), Monet, de Montalembert, de Montebello (Lannes), de Montigny, Moreau

Vast-Vimeux (le général), Vauthier, Vavin, Verninac, Vic- (Seine), Morel Cornet, de Mornay, de Morny, de Mortemart, tor Hugo.

POUR.

Abbatucci (Charles) [Corse), Abbatucci (Loiret), Achard (le général), d'Adelswærd, d'Albert de Luynes, Alengry, Allier, Ancel, d'Andigné de la Châsse, André (Charente), Arbey, Arène, Arrighi (le général), Aubergé, d'Aubermesnil, Aubertin, Aubry (Vosges), Aymé (Charles).

De Balzac, De Bar (le général), Barbançois, Barchou de Penhoën, Barre, Barrillon, Barrot (Ferdinand), Barthélemy Saint-Hilaire, Bauchart (Quentin) Bavoux, Baze, Behaghel, Belliard, Benoist (Gard), Benoît Champy, Bérard, Bertrand (Yonne), Beugnot, Bigot, Bigrel, de Blois, Blavoyer, Bouchet de Grandmay, Bourbousson, Bouvattier, Briffault, de Broglie, de la Broise, Boissié, Bonaparte (Louis-Lucien), de Botmilliau, de Bryas, Bucher de Chauvigné, Buffet, Bussières.

Callet, Cambacérès, Camus de la Guibourgère, Carteret, Casimir Périer, Caulaincourt, Cazalès, Chadenet, Chambolle, Champanhet, Chaper, de Charencey, Charlemagoe, Charner, Chasseloup-Laubat (le général), Chasseloup-Laubat (Prosper), Chauchard, Chazaud, de Chazelles, Chegaray, Choque, Clary, de Coëtiosquet, Collas, Collas de la Motue, Combarel de Leyval, Combes, Cordier (Calvados), Corne, Coquerel, du Coëdic, Creton, de Crouzeilhes, Cunin-Gridaine, Curial, de Cuverville.

Dabeaux, Dahirel, Dalbis du Salze, Dambray, Darblay, Dariste, Daru, David (Ferdinand), Debés (Ferdinand), Debrotonne, Defontaine, Defontenay, Defourment, Delessert, Demante, Demarest, Demesmay, Denis, Denissel, Denjoy, Depasse, Descat, Desèze, Desjobert, Desmaroux, Desmousseaux de Givré, de la Devansaye, Dieuleveult, Dompierre d'Hornoy, Douay, Druet-Desvaux, Dubignon, Dubois (Amable), Ducos, Dufaure, Dufougerais, Dufournel, Duparc, Dupetit-Thouars, Dupin (Charles), Dupin (de la Nièvre), Dupont Delporte, Dupré, Duquesne.

De l'Espinasse, Estancelin, Etienne, Evain. Fabvier, Failly, Farran, de Faultrier, Febvrel, Ferré de Ferris, Flan fin, de Flavigny, Foblant, Fornier de SaintLary, Fortoul, Fould, Fouquier d'Hérouel, Fournier, Fourtanier, Francoville, Frechon, Fremy, Fresneau.

Gain, Gavini, Garnon, Gasc, Gérard (Meurthe), Gérard (Oise), Gillon, Giraud (Augustin), Godelle, Goldenderg, Gouin, Goulhot de Saint-Germain, de la Grange (Gers), de la Grange (Gironde), Grandin, Granier, de Grammont, de Grasset, Grelier du Fougeroux, Grillon, Gros, Guillier de la Tousche. D'Hautpoul, d'Havrincourt, Hébert, Hennecart, d'Hérambault, Hernoux, Hervé de Saint-Germain, Heurtier, d'Houdetot, Houel, d'Hunolstein, Husson (le général).

Jaffard, Janvier, Jusseraud, Journu, Jouy, Junyen. Kéranflech, de Kératry, de Kerdrel (Ille et-Vilaine), de Kerdrel (Morbihan), de Kéridec, de Kermarec.

Moulin, de Moustier, Murat (Lucien), Murat-Sistrières.

De Nagle, de Neuville, de Noailles-Mouchy, Noblet, Noël (de Cherbourg), Normant des Salles.

D'Olivier, Ornano (le général).

Paillet, Parieu, Parisis, Pascal (Frédéric), Paulmier, Payer, Pécoul, de Persigny, Pervinquière, Peupin, Pidoux, Pioger, Piquet, Piscatory, Porion, Postel, Pougeard, Pongérard, Proa, Prudhomme. Querhoent.

Radoult de Lafosse, Randoing (Somme), Rapatel (le général), Rateau, Raudot, Raulin, Ravez, Remilly, Resal, Rességuier, de Riancey (Henri), Riché, Rioust de l'Argentaye, Rodat, Roger (du Nord), de Roquefeuil, de Roquette, des Rotours de Chaulieu, Rouget-Lafosse, Rouher, Rouillé (Emile).

Sainte-Beuve, de Saint-Georges, Saint-Priest (Félix), de Salis, Salmon (Meuse), Sauvaire-Barthélemy, Sazerac de Forge, Ségur d'Aguesseau, de Seré (Henri), Sevestre, Simonnot, Sonis, Soullié, de Staplande, Suchet d'Albufera, de Surville, Symphor Vaudoré.

De Tathouet, Talon, Tartas (le général), Ternaux (Mortimer), Thiers, Thieullen, Thomine-Desmasures, Thuriot de la Rozière, de Tinguy, Tirlet, Tixier, Toupet des Vignes, Toupot de Bévaux, de Tracy, de Tréveneuc, Tron.

Valette, de Vandeul, de Vatimesnil, de Vatry, Vaudrey, de Vaujuas, de Vendeuvre, de Vergeron, Vernhette (Amé dée), Vernhette (Maurice), Vesin, Viard, Vieillard, de Villeneuve, Vitet.

Wallon, Wartelle-Deretz, Wolowski.

CONTRE.

Anglade, Arago (Emmanuel), Arnaud (Ariège), Arnaud (Var), Aubry (Nord), Auguste Mie.

Bac (Théodore), Bancel, Bandsept, Bard (Antoine), Barrault (Emile), Barthélemy (Eure et Loir), Baudin, Belin, Benier, Benoît (Rhône), Bertholon, Besse, Bixio, Bochard, Bonaparte (Napoléon). Bouhier de l'Ecluse, Bourzat, Bouvet (Aristide), Bouzique, Boysset, Breymand, Brillier, Burgard.

Carbonneau, Cassal, de Castillon, Ceyras, Chaix, Chamiot, Chanay. Charamaule, Charras, Chavassieu, Chouvy, Chovelon, Clément (Auguste), Combier, Constans Tournié, Conte, Coralli, Crépu, Crestin (Léon), Curnier.

Daguilhon Laselve, Delavallade, Delbetz, Delebecque, Denayrouse, Derriey, Detours, Didier, Doutre, Duché, Dufraisse, Dulac, Duprat (Pascal), Duputz, Durand-Savoyat, Durieu, Dussoubs (Gaston).

Emile Péan, Ennery.

Farconet, Faure (Rhône), Favre (Jules), Fayolle (Creuse), Fond, Forel, Fourgassié-Vidal, Francisque Bouvet, Frichon.

Gastier, Gilland, Greppo, Grevy, Guiter.
Huguenin.

Jehl, Jollivet, Juéry.

Labrousse, La Claudure, Lafon, Lagrange (Charles), La marque, Lamennais, Lavergne, Lefranc (Pierre), Lefranc (Victor), Leroux (Emile), Leroux (Jules), Lherbette, Loisel.

Laborde, Labordère, de Labruguière, Lacave, Lacaze, Lacrosse, Ladevèze, Lafayette (Oscar), de Lafosse, de Lagrené, Laimé, Larabit, de Larcy, de Lariboisière, Larrabure, Lauréau, Laurenceau, Lauriston (le général), de Laussat, Lebreton (le général), Le Comte (Eugène) [Yonne], Le Crom, Lefavrais, Lefebvre du Grosriez, Lefebvre Dur flé, LegrosDevot, Lélut, Lemarois, Lemaire, Lemercier, Léo de La- | Morellet, Muhlenbech.

Madet (Charles), Malardier, Mathieu, Michel (de Bourges), Michot, Millotte, Miot, Monnier (Haute Loire), Montagut,

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