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que la créance serait payable à un tiers nominativement désigné. C'est là encore une forme de la cession qui implique la pratique probable d'une notification du transport.

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Droit écrit. Les auteurs sont fort sobres de renseignements sur la façon dont la théorie romaine de la cession fut comprise et vulgarisée dans les pays de droit écrit. L'on y appliqua le droit romain de Justinien, c'est-à-dire le système du cessionnaire procurator in rem sum; il en fut de même dans les Pays-Bas (1).

Sans se livrer à un examen approfondi de la question, il est permis d'avancer que les jurisconsultes français ne sont parvenus à dégager la notion romaine de la cession que sur le tard et sans atteindre une très grande exactitude.

C'est ainsi que l'on attribue à DONEAU (De Jur. civ., lib. XV, cap. 44) le mérite d'avoir trouvé le sens de l'actio utilis translata (2).

Un ancien auteur, qui a produit un traité estimé sur la matière, confesse sans détours l'indigence de la doctrine acquise (3).

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A la fin de l'ancien

Droit de l'époque de transition. régime, la théorie de la cession adoptée par les pays de coutumes devient la seule doctrine enseignée en France.

DOMAT écrit :

« Les choses incorporelles comme une héréditée, une dette ou un autre droit, ne peuvent proprement être délivrées non plus que touchées, mais la faculté d'en user tient lieu de déli» Ainsi le vendeur d'un droit de servitude en fait comme une délivrance, quand il souffre que l'acheteur en jouisse. Ainsi celui qui vend ou transporte une dette ou un autre droit, donne à l'acheteur ou cessionnaire une espèce de possession, par la faculté d'exercer ce droit, en faisant signifier son transport au débiteur, qui, après cette signification, ne peut plus reconnaître d'autre maître ou possesseur de ce droit que le cessionnaire. » Lois civiles, liv. I, tit. II, sect. II, § IX.

vrance.

(1) VOET, ad Pand., 1. XVIII, titre IV, no 11; MERLIN, Rép., vo Transport. (2) SALEILLES, Essai, p. 66.

(3) « Nobilem hunc et utilissimum juris tractatum aggredimur a nemine ad presens, ne dicam elucidatum sed nec degustatum ». Tel est le préambule d'un volumineux in-folio que publia, vers 1650, le jurisconsulte DE OLEA, sous le titre: Tractatus de cessione jurium et actionum. Edition de 1723.

POTHIER s'exprime comme suit :

« A l'égard des droits de créance, quand quelqu'un m'a fait cession ou transport d'une créance, la tradition ne peut s'en faire que par la signification que je fais de mon acte de transport à celui qui en est le débiteur. C'est ce qui est porté par l'article 108 de la Coutume de Paris qui fait à cet égard un droit commun. Il y est dit: Un simple transport ne saisit point; il faut signifier le transport à la partie et en donner copie. Cette signification se fait par un sergeant... Faute de signification ou d'acceptation du transport de la créance, la propriété n'en est point transférée au cessionnaire. » Traité du droit de propriété, no 215.

« Le transport d'une créance est avant que la signification en ait été faite au débiteur ce qu'est la vente d'une chose corporelle avant la tradition. >> Traité de la vente, no 555.

M. SALEILLES (1), dans ses intéressants aperçus de législation comparée, signale un phénomène d'absorption inté

ressant.

La doctrine romaine de la cession fut pratiquée sans partage en Allemagne jusqu'au siècle dernier; puis, apparaît un travail d'évolution qui se traduit dans les enseignements d'une école nouvelle qui assimile la cession d'une créance à l'aliénation d'une chose corporelle.

Voici, d'après lui, la raison de cette transformation. La théorie romaine laisse nominalement la créance au cédant, le cessionnaire s'emparant de son contenu utile; cette distinction revient en définitive à la division de deux domaines en

(1) Essai, p. 67 et 68.

matière de propriété: Le domaine direct et le domaine utile. Une fois l'idée entrevue, il ne fut pas difficile de déclarer artificielle et inadmissible une telle séparation en matière de créance. SCHILTER, en 1717, oppose la pratique germanique à la théorie romaine. Les Romains, dit-il, n'ont pas admis qu'il pût y avoir une tradition de créance, parce qu'ils ont accepté l'idée que le domaine direct devait être réservé, et ils n'ont pu alors procéder que par voie de mandat.

Mais la pratique germanique admet que l'on puisse transmettre le domaine entier de la créance sans réserve du domaine direct, de telle sorte que le cessionnaire soit investi de la créance par la denuntiatio elle même.

Cette explication est probablement fondée, car nous trouvons un raisonnement analogue dans POTHIER:

« Une créance étant un droit personnel du créancier, un droit inhérent à sa personne, elle ne peut pas, à ne considérer que la subtilité du droit, se transporter à une autre personne, ni par conséquent se vendre. Le débiteur s'étant obligé envers une certaine personne, ne peut point par le transport de la créance, transport qui n'est point son fait, devenir obligé envers un autre. On a trouvé le moyen d'éluder la difficulté en donnant au cessionnaire mandat de poursuivre le débiteur à son profit. Un mandat fait de cette manière est, quant à l'effet, un vrai transport que le créancier fait de sa créance. De là il s'est établi dans la pratique qu'on peut transporter les créances, les donner, les vendre. V. Traité de la vente, no 551 (1).

(1) POTHIER, par une étrange distraction, dit, au no 559, que dans la subtilité du droit le vrai créancier est le cédant, le cessionnaire étant un mandataire in rem suam tout simplement. Cette contradiction a suscité des doutes qui se sont étendus jusque sur la théorie de l'art. 1690, C. civ. Ces doutes ont pris corps dans une dissertation de HÉAN, à laquelle MOURLON répondit par une lettre écrite avec une verve et une élégance incomparables et qui apporte une contribution importante à l'étude de la cession. V. la Revue pratique, 1862, t. XIV, p. 498; 1863, t. XV, p. 97; 1863, t. XVI, p. 5 et 65. M. Huc (t. II, p. 102) a levé les derniers scrupules qui pourraient encore subsister sur cette question de principe.

§ 10.

De la prétendue ancienneté de la théorie de la scission du transfert de la propriété.

L'opinion d'après laquelle la propriété peut n'être transférée qu'entre les parties contractantes nous paraît être une conception moderne.

Nous avons un jour été amené à critiquer ses mérites théoriques (1). Il est temps de discuter le silence que gardent les auteurs contemporains sur cette conception anti-juridique; disons donc notre pensée sans détours : supposer deux sujets investis in solidum d'un droit absolu, c'est formuler une proposition dont les données se détruisent, c'est concevoir une chose aussi absurde que le serait un cercle carré, c'est une hérésie que le droit romain a répudiée (2).

Nous ne sommes pas seul de cet avis. A de très rares intervalles et au prix de nombreuses recherches, on rencontre des jurisconsultes qui se sont prononcés contre la théorie de la scission du transfert. Nous en citerons deux.

Par circulaire du 7 mai 1841, le garde des sceaux MARTIN DU NORD demanda aux Cours et Facultés de droit françaises une consultation sur la réforme du régime hypothécaire, dont les résultats sont consignés dans l'ouvrage intitulé: Documents relatifs au régime hypothécaire, recueillis par ordre de MARTIN DU NORD. Paris, 1844.

Dans la partie de cette consultation qui concerne l'Etablissement de la propriété nous avons remarqué l'avis exprimé par les Facultés de Rennes et de Grenoble.

Rennes : « Une grave question se présente: la transcription sera-t-elle nécessaire même à l'égard des parties; remplacerat-elle la tradition exigée dans le droit romain, ou bien la pro

(1) La réforme de l'Enseignement supérieur et l'étude du Droit. Louvain, 1889.

L., 3,

(2) « Duorum in solidum condominium esse non potest; contra naturam est ut cum aliquid teneam tu quoque id teneare videaris ». § 3, D., 41, 2.

priété des immeubles sera-t-elle transférée, respectivement aux contractants, par leur seul consentement, le défaut de transcription ne pouvant être opposé que dans l'intérêt des tiers? Ceux qui excluent toute distinction font observer qu'on ne conçoit guère comment le même individu pourrait, simultanément, être et ne pas être propriétaire réel, selon qu'il s'agirait d'une personne ou d'une autre. Cet argument n'a nul besoin de développement; sa simplicité ne lui donne que plus de force, et les idées pratiques s'en accommoderont parfaitement. » T. I, p. 464.

Grenoble : « Ceci (la transmission de la propriété entre les parties) peut amener des complications fâcheuses; il vaut mieux rentrer dans les principes du droit romain, et distinguer nettement le droit de propriété et le droit de créance, le jus in re et le jus ad rem. » T. I, p. 431.

En 1856, V. THIRY, l'éminent professeur de droit civil à l'Université de Liége, écrivait dans un article, dont il est fréquemment question dans le cours de cet ouvrage : « Le caractère essentiel du droit réel c'est d'être absolu, d'exister envers et contre tous, de s'imposer à tous. Qu'est-ce donc qu'un droit réel qui n'existe qu'entre parties et qui n'existe pas vis-à-vis des tiers? Cette non existence à l'égard des tiers est la négation du caractère fondamental de la réalité. Principe étrange, anti-juridique, irrationnel (1). »

Mentionnons encore l'opinion de LAURENT: « Logiquement la propriété ne se scinde pas. » XXIX, p. 181.

Cette appréciation indulgente dans la bouche de ce jurisconsulte rigoureux, dont la logique impitoyable a ramené la discipline dans les rangs de la jurisprudence, est un sujet d'étonnement. La scission de la propriété n'est pas seulement une chose illogique, c'est une impossibilité juridique.

Les critiques que nous venons de formuler sur la scission de la propriété ne concernent que les choses corporelles à l'exclusion des créances. Une créance peut avoir plusieurs sujets actifs, peut appartenir à plusieurs créanciers solidaires. Seulement, nous avons déjà eu occasion de le dire, la scission

(1) Belgique judiciaire, t. XIV, p. 837.

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