qui pût y donner plus de poids que vous. Il est cependant possible que votre trève avec les rebelles subsiste encore (1), lorsque cette déclaration vous parviendra; alors il seroit peut-être imprudent que vous la publiassiez vous-même; mais dans ce cas même, je pense que vous êtes toujours plus à portée que tout autre de la faire circuler dans, tout mon royaume. Si, au contraire, vous avez repris les armes, rien ne doit retarder une publication aussi essentielle. Je travaille de tout mon pouvoir à hâter le moment où, réuni avec vous, je pourrai vous montrer en moi un souverain qui fait sa gloire de sa reconnoissance envers vous; et à mes sujets, bien moins un roi qu'un père. Je me flattois que l'Angleterre alloit enfin vous amener mon frère; mais ce moment me pa-roît plus incertain que jamais. N'importe; plus les obstacles sont grands, plus je mettrai d'activité à les vaincre; et je les vaincrai. Continuez, monsieur, à me servir comme vous avez servi mon prédécesseur; et croyez que si quelque chose peut m'alléger le fardeau que la providence m'ordonne de porter, c'est d'être destiné, par cette même providence, à récompenser les plus grands services qu'un roi ait jamais reçus. Signé, Louis. Lettre du Prétendant, à Charette. ....18 septembre 179... Vous affermissez les sentimens que je vous ai témoignés dans mes précédentes; et re (1) Votre trève! C'est de la pacification qu'il entend parler, doublez, s'il est possible, le désir d'être à la tête de mes armées catholiques et royales, et de combattre à côté de vous, leur digne général, pour rendre le bonheur à mes sujets. J'espère qu'en ce moment mon frère, plus heureux que moi, jouit de cette gloire. Vous savez sans doute par lui, que la malheureuse affaire de Quiberon, mais surtout la paix d'Espagne, rendent les secours de l'Angleterre bien moins considérables que nous n'avions lieu de l'espérer. Co contre-temps, loin de me rebuter, n'est pour moi qu'une preuve de plus que la providence veut que je ne doive ma couronne qu'à mes braves sujets; mais je vous le dis avec effusion de cœur: c'est bien plus à leur amour qu'à leur valeur que je voudrois la devoir. J'ai vu avec plaisir dans votre lettre, que vous travaillez à faire connoître l'expression de mes sentimens dans les provinces de mon royaume soumises au joug des rebelles. Je désire aussi vous voir étendre vos négociations le plus loin possible, et que vous m'en fassiez connoître les progrès, afin que j'y proportionne mes démarches; mais ce que je désire par-dessus tout, c'est que vous continuiez celles que je sais que vous avez déjà faites en Angleterre pour obtenir ma réunion avec mon frère et vous. De mon côté, je fais tout mon possible pour pouvoir au moins me mettre en chemin pour me rap procher; mais comme d'Avaray vous l'a marqué dans ma lettre du. . . . . l'esprit de terreur ou de vertige qui a gagné la plupart des princes d'Allemagne, est cause que j'ai été forcé de recourir à l'empereur pour en ob tenir un asile momentané. Je travaille aussi à prolonger la guerre extérieure, que je regarde comme un mal nécessaire, pour empêcher les rebelles de réunir trop de forces contre vous, jusqu'au jour où le bandeau sera tombé des yeux d'un plus grand nombre de mes sujets. Envoyez-moi la liste de tous ceux qui combattent sous vos ordres et que vous jugez dignes de la croix de St. Louis; je les nommerai tout d'un temps. Cette forme est moins régulière que celle d'envoyer des brevets à chacun; mais la difficulté des communications l'exige. Mon frère vous fera connoître que ma sollicitude s'étend à d'autres graces dont vous ne me parlez point, mais dont c'est à moi de m'occuper. Je le charge aussi de confirmer les officiers de votre armée dans le grade que vous leur avez donné, et qu'ils méritent si bien. Adieu, brave Charette; je sens que si je pouvois jamais être jaloux de mon frère, ce seroit en ce moment; mais j'ai la ferme espérance que je n'aurai pas long-tems à l'être. Signé, LOUIS. Lettre du Chevalier Charette à M. Bejary, Chef de division de l'Armée Catholique et Royale. A Belle-Ville, ce 25 juillet 1795, l'an premier du règne de Louis XVIII. Monsieur, Charette est trop connu pour qu'on puisse croire un seul moment qu'il fasse une marche rétrograde et déshono rante. Je vous renouvelle le serment irréfragable de combattre jusqu'à la dernière goutte de mon sang pour mon Dieu et mon Roi; de ne déposer les armes que lorsque l'héritier présomptif sera sur son trône, lorsque la religion catholique sera établie sur des bases solides et protégée par la force armée. Je suis bien sincèrement, monsieur, votre trèshumble serviteur, le chevalier CHARETTE. Le Comte d'Avaray, au Chevalier Charette. Verone, 13 août. Le roi m'ayant appris, mon général, qu'il venoit de mettre le comble aux bontés dont il m'honore, en m'assurant une part à votre estime, je me croirois coupable envers mon maître et vous, si je gardois plus long-temps le silence. L'homme que le roi honore du titre de son ami, sollicite donc les bontés de celui qu'il a si justement nommé le second fondateur de la monarchie. Je n'ai pas la présomption, mon général, de rien vous offrir en retour de ce que je demande avec tant d'instance; il seroit trop hardi de témoigner un sentiment particulier à celui qui a l'admiration de tous. Permettez-moi donc seulement d'espérer que, me connoissant davantage, et me voyant bientôt combattre près de vous, vous ne rejeterez pas l'amitié de celui qui, dans ce moment, n'ose vous offrir que des témoignages de dévoûment et de respect. Pour remplir les intentions du roi, je dois vous dire de sa part, que sa situation est plus critique que jamais. Depuis long-temps, enflammé d'une ambition de gloire dont il ne peut pardonner qu'à vous de lui avoir donné l'exemple, il se voit privé du moyen le plus noble, le plus sûr, et le plus favorable à ses intérêts, d'aller vous rejoindre. L'Espagne, le descendant de Louis XIV et de Philippe V, a fait sa paix; et désormais les sollicitations pour transporter le roi à la Vendée par la Méditerrannée, sont vaines; il ne nous reste donc que les Anglais; c'est eux qui nous porteront en France, si, comme il y a tout à parier, nous ne pouvons obtenir, des vaisseaux russes, de se charger de cette noble entreprise. Le roi va donc incessamment quitter Verone pour s'arrêter dans quelque ville de Suabe, où il attendra le retour d'un courrier anglais que milord Macartney, envoyé auprès du roi, va expédier à Londres. Tout semble se réunir pour conduire S. M. à l'armée de Condé; mais outre que l'empereur ne paroît pas disposé à reconnoître encore l'autorité légitime, le roi n'a d'autre but que sa brave armée catholique et royale. Travaillez donc sans relâche, de votre côté, à lui en applanir le chemin. Atténuez le mauvais effet que peut produire en France la confiance apparente accordée aux Anglais. Si vous avez quelques avis à donner au roi faites-moi passer votre lettre par le comte d'Entragues, jusqu'à ce que je puisse vous donner une nouvelle direction. Si vous apprenez, mon général, que le roi soit à l'armée de Condé, que cela ne vous |