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(Mòngel C. Vaudin et dame Jacquot). AKRET.

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LA COUR; Attendu que Vaudin, propriétaire d'une maison située à Nancy, 41, rue des Jardiniers, a loué verbalement, en mars 1914, à Mongel, un logement de cette maison, moyennant 25 fr. par mois; qu'au mois d'août 1914, Mongel, mobilisé, est parti aux armées, et n'a été démobilisé que le 12 juill. 1919; que, le 3 avril 1919, venu en permission, il alla à son logement, et le trouva occupé par les époux Drège, auxquels il avait été loué depuis quelques jours; Attendu que, le 3 mars 1919, Vaudin avait vendu son immeuble à la dame Jacquot, qui, presque aussitôt, loua aux époux Drège le logement Mongel; Attendu que, si un bail authentique, ou dont la date est certaine, est seul opposable à l'acquéreur, celui-ci ne saurait expulser le locataire, qui n'occupe qu'en vertu d'un bail verbal, sans lui avoir préalablement donné congé, et sans respecter les délais d'usage; Mais attendu que Vaudin, ni dans l'acte de vente, ni verbalement, n'a fait connaître à la dame Jacquot le bail verbal qu'il avait passé avec Mongel; que, d'autre part, le logement Mongel avait été abandonné en 1916 par la dame Mongel, qui l'avait vidé du mobilier, et n'y avait laissé que quelques objets sans valeur; que la dame Jacquot

vertu d'un bail sans date certaine peut-il s'exercer sans notification préalable d'un congé, et sans observation des délais d'usage? La question est controversée.

D'après une première opinion, le preneur, qui ne justifie que d'un bail sans date certaine, peut être expulsé immédiatement par l'acquéreur, sans congé préalable, alors même qu'il serait en possession des lieux loués. V. Douai, 15 févr. 1865 et Montpellier, 4 mars 1867, précités, avec les renvois. Adde, Laurent, op. cit., t. 25, p. 431, n. 389; Thiry, Cours de dr. civ., t. 4, p. 50, n. 52; BaudryLacantinerie et Wahl, op. cit., t. 1o, p. 745, n. 1293. Cette opinion s'appuie sur l'art. 1750, C. civ., qui dispose que, si le bail n'est pas fait par acte authentique ou n'a point date certaine, l'acquéreur n'est tenu d'aucuns dommages-intérêts », et elle en tire la conséquence que le preneur est absolument sans droit vis-à-vis de l'acquéreur, et est par suite démuni de toute action pour obtenir de lui un délai. V. Baudry-Lacantinerie et Wahl, op. cit., t. 1er, n. 1293, in fine. Des arrêts, favorables à cette solution, lui ont cependant apporté un tempérament, en reconnaissant au juge saisi de la demande en expulsion le pouvoir d'accorder au locataire un délai de grâce pour évacuer l'immeuble. V. Douai, 15 févr. 1865 et Montpellier, 4 mars 1867, précités.

Une seconde opinion, plus généralement suivie, décide que, si le locataire occupe les lieux, l'acquéreur ne peut l'expulser qu'en lui donnant congé et en observant les délais d'usage. V. Bruxelles, 13 vend. an 13 (S. et P. chr.); Douai, 11 août 1887, precite, et les renvois. Adde, Trib. d'Alais, 12 juin 1919, précité; Aubry et Rau, 5o éd., t. 5, p. 363 et 364, § 369, texte et note 36; Huc, op. et loc. cit.; Colin et Capitant, op. cit., t. 2, p. 512; Guillouard, op. cit., t. 1, n. 365.

C'est cette dernière solution qui a été adoptée par l'arrêt ci-dessus, bien que, dans l'espèce, le locataire ne fût plus en possession des lieux loués ;

était donc fondée à croire que ce logement était vacant; que, dans ces conditions, sa responsabilité ne saurait être retenue; Attendu qu'en gardant le silence sur l'obligation qu'il avait contractée, Vaudin a commis une faute, qui a occasionné un préjudice à Mongel, puisque celui-ci, auquel l'art. 56, § 4, de la loi du 9 mars 1918 donnait le droit de proroger son bail pendant près de cinq années à dater du 12 juill. 1919, a dù louer un autre logement, au prix de 40 fr. par mois, et aussi a été dépouillé des quelques objets qui se trouvaient encore rue des Jardiniers; Par ces motifs; Réformant partiellement; Dit que Vaudin a commis une faute qui a occasionné un préjudice à Mongel; Mongel; Dit qu'en réparation de ce préjudice, Vaudin devra payer à Mongel, etc.; Confirme le jugement en ce qui concerne la dame Jacquot, etc.

Du 16 juill. 1920.

C. Nancy, Ire ch. MM. Delsart, prés.; Chabrier, av. gén.; Pierre Gutton, Gérard et Larcher, av.

PARIS 22 décembre 1920.

NOM ET PRÉNOMS, NOM PATRONYMIQUE, USAGE COMMERCIAL, CESSION, INTERDIC

TION DE FAIRE EMPLOI DU NOM DANS UNE

INDUSTRIE SIMILAIRE, VALIDITÉ (Rép., vo

mais l'avantage qu'aurait eu pour lui la nécessité pour l'acquéreur de lui donner congé était manifeste, puisque le congé lui aurait permis de réclamer la prorogation de son bail, dans les conditions fixées par les art. 56 et 58 de la loi du 9 mars 1918 (S. et P. Lois annotées de 1919, p. 793; Pand, pér., Lois annotées de 1919, p. 793), modifiée par la loi du 4 janv. 1919 (S. et P. Lois annotées de 1919, p. 853; Pand. pér., Lois annotées de 1919, p. 853),

On admet assez généralement que le locataire, dont le bail est résilié par suite de la vente, a un recours contre le bailleur pour se faire indemniser des conséquences de son expulsion. On peut faire valoir, à l'appui de cette solution, que le bailleur, en exposant le preneur, comme conséquence de la vente, à être expulsé, manque à son obligation d'assurer au preneur la jouissance paisible des lieux loués. V. en ce sens, Douai, 15 févr. 1865, précité. Adde, Aubry et Rau, 5o éd., t. 5, p. 364, § 369, texte et note 37; Laurent, op. cit., t. 25, n. 391; Guillouard, op. cit., t. 1o, n. 373; Huc, op. cit., t. 10, n. 346; Colin et Capitant, op. cit., t. 2, p. 511, in fine. V. cep., en sens contraire, Baudry-La cantinerie et Wahl, op. cit., t. 1o, n. 1294; Planiol, Tr. élém. de dr. civ., 6o éd., t. 2, n. 1742, note 1.

Mais le locataire évincé peut-il actionner l'acquéreur en dommages-intérêts? La négative est certaine, dans l'opinion qui reconnaît à l'acquérear un droit d'expulsion immédiate, l'art. 1750, C. civ., déclarant que l'acquéreur n'est pas tenu à des dommages-intérêts.

La question est plus délicate, si l'on admet que l'acquéreur ne peut expulser le locataire qu'après congé et observation des délais d'usage, car on pourrait soutenir, en pareil cas, que, si les délais d'usage n'ont pas été observés, ni le congé donné, il y a faute de la part de l'acquéreur à expulser le locataire, et que pareille situation est en dehors de l'hypothèse prévue par l'art. 1750.

(1-2-3) Si la propriété du nom patronymique est par nature inaliénable, incessible et impres

Nom [et prénoms], n. 42 et s.. 87 et s.;
Pand. Rép., eod. verb., n. 244 et s.).

Si la propriété du nom patronymique est absolue, imprescriptible et inalienable, l'usage du nom commercial peut, au contraire, être valablement cédé, soit à un tiers, soit à une société, et cette cession est licite, le nom étant alors envisagé comme l'accessoire d'une maison de commerce (1) (C. civ., 544).

Spécialement, est licite la clause d'un acte de société, par laquelle un commerçant, en faisant divers apports à une société, s'est interdit de donner à l'avenir son nom à toute industrie similaire en France et à l'étranger (2) (Id.).

Vainement il serait soutenu que cette stipulation est entachée de nullité comme contraire à la liberté du commerce et aux dispositions d'ordre public des art. 1133 et 1780, C. civ.; en effet, l'interdiction pour le cédant de faire usage de son nom dans une industrie similaire, si elle est absolue dans le temps et dans l'espace, est strictement limitée quant à son objet, et vise uniquement l'usage de ce nom dans une industrie similaire, ou appliqué à des produits analogues à ceux dont la fabrication et la vente étaient concédées à la société, en laissant au cédant le droit de se servir de son nom dans tout autre commerce et toute autre industrie (3) (L. 2-17 mars 1791, art. 7).

criptible (V. Rouen, 10 nov. 1909, S. et P. 1912. 2.177; Pand. pér., 1912.2.177, et la note de M. Perreau), l'usage commercial du nom patronymique peut faire l'objet d'une cession valable (V. Paris, 27 déc. 1893, sol. implic., S. et P. 1895.2.146; Pand. pr., 1894.2.290; Cass. req. 18 mars 1895, sol. implic., S. et P. 1895.1.319; Pand. pér., 1895.1.332; 3 févr. 1909, S. et P. 1909.1.481; Pand. pér., 1909.1.481, et la note de M. Lyon-Caen; Paris, 25 oct. 1910, sol. implic., S. et P. 1913.2.102; Pand. pér., 1913.2.102, Adde, Pouillet, Tr. des marques de fabrique, 5o éd., par Taillefer et Claro, n. 493), en tant du moins qu'elle n'est pas entachée de dol i de fraude. V. Paris, 27 déc. 1893, Cass. req. 18 mars 1895, Paris, 25 oct. 1910, précités, et les renvois.

La clause d'un acte de société, par laquelle un associé, en faisant divers apports à la société, lui cède l'usage commercial de son nomi patronymique, est donc, en principe, valable. Mais en est-il ainsi, si la cession est absolue dans le temps et l'espace, et la clause par laquelle une personne, en cédant l'usage commercial de son nom à une société, s'interdit de donner à l'avenir son nom à toute industrie similaire en France et à l'étranger, n'est-elle pas entachée de nullité comme contraire à la liberté de faire le commerce ou d'exercer une industrie? Il y a lieu à cet égard de faire une distinction.

Il est certain que, s'il est possible de restreindre par des conventions particulières la liberté de faire le commerce ou d'exercer une industrie (V. Cass. civ. 2 juill. 1900, S. et P. 1904.1.175; Pand. pér., 1902.1.15; 15 juin. 1914, S. et P. 1916.1.7; Pand. per., 1916.1.7, et les renvois), pareille convention est eutachée de nullité, lorsque l'interdiction de faire le commerce ou d'exercer une industrie est illimitée quant au temps et quant au lieu (V. Cass. civ. 2 juill. 1900, précité, et les renvois), encore bien qu'elle soit restreinte à l'exercice d'un commerce ou d'un industrie similaire. V.

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(Raspail C. Soc. anonyme des Etablissements Raspail). — ARRÊT.

LA COUR; Considérant que, dans l'acte du 4 sept. 1904, Julien Raspail a fait à la Société anonyme des Etablissements Raspail divers apports, et s'est, par le $ 1er de l'art. 7, interdit de donner à l'avenir son nom à toute industrie similaire en France et à l'étranger; qu'en ses conclusions et plaidoirie, l'appelant soutient devant la Cour que cette stipulation est entachée de nullité, comme contraire à la liberté du commerce et aux dispositions d'ordre public des art. 1133 et 1780, C. civ.; Mais considérant que la prétention développée par le docteur Julien Raspail tend à établir une confusion entre le nom envisagé au point de vue civil et au point de vue commercial; que, si la propriété du nom patronymique est absolue, imprescriptible et inaliénable, l'usage du nom commercial peut, au contraire, être légalement cédé, soit à un tiers, soit à une société, que cette cession est licite, le nom étant alors envisagé comme accessoire d'une maison de commerce, comme enseigne ou réclame pouvant être l'objet de transactions valables; que, d'autre part, le docteur Julien Raspail ne s'est pas dépouillé sans limitation de l'usage de son nom commercial; que, si l'interdiction est absolue dans le temps et dans l'espace, elle est strictement limitée quant à son objet; qu'elle vise uniquement l'usage de ce nom dans une industrie similaire, ou appliqué à des produits analogues à ceux dont la fabrication et la vente étaient concédées à la Société des Etablissements

Cass. civ. 14 mars 1904 (S. et P. 1904.1.444; Pand. pér., 1904.1.432); Trib. de la Seine, 9 mars 1910 (S. et P. 1910.2.261; Pand. pér., 1910.2.261).

Mais, dans l'espèce, il n'y avait pas eu convention restrictive de la liberté de faire le commerce ou d'exercer une industrie, et ce n'est que par une confusion que l'appelant prétendait invoquer le bénéfice de la jurisprudence ci-dessus rappelée ; la convention litigieuse avait uniquement porté sur l'usage du nom; dès lors, c'étaient les règles applicables en matière de cession de nom commercial, qui étaient seules applicables.

Or, il est de principe qu'indépendamment même de toute cession, une personne ne peut invoquer le droit incessible et inaliénable qu'elle a sur son nom patronymique pour faire, au moyen de ce nom, une concurrence déloyale à un tiers qui, portant le même nom, en a fait usage pour la dénomination d'une entreprise commerciale. V. Cass. req. 16 juin 1903 (S. et P. 1904.1.7, et les renvois; Pand. pér., 1903.7.109). Si donc cette personne veut faire elle-même le commerce sous son nom, sans doute il n'est pas possible de lui interdire d'en faire usage (V. Cass. req. 22 oct. 1917, S. et P. 1918-1919.1.126; Pand. pér., 1918-1919. 1.126, et les renvois), mais ce sera à la condition de prendre les mesures nécessaires pour éviter toute confusion avec l'établissement déjà existant sous le même nom. V. Cass. req. 16 juin 1903, précité.

Si, au lieu de faire le commerce elle-même, cette personne veut céder l'usage de son nom à un tiers en vue d'une exploitation commerciale, cette cession, valable en principe, devra être entourée de toutes les garanties de nature à éviter

Raspail; que Julien Raspail pouvait, même commercialement, se servir de son nom pour toute fabrication ou tout commerce ne rentrant pas dans les spécifications prévues au contrat, et pour l'abandon desquelles il avait reçu des avantages et des compensations très importantes; - Considérant que Julien Raspail soutient encore qu'ayant été révoqué de ses attributions de directeur technique dans la société, il aurait repris toute sa liberté ;

Mais considérant qu'une action éventuelle qu'aurait pu lui conférer la constatation d'une révocation. injustifiée ne pouvait l'autoriser à rayer d'un contrat une clause précise licite et librement acceptée; Par ces motifs; - Et adoptant, en outre, ceux non contraires des premiers juges; Confirme, etc.

Du 22 déc. 1920. C. Paris, 4 ch. MM. Tronquoy, prés. ; Bourdillon et Aujay,

av.

TRIB. COMM. DE NANTES 26 mars 1920. RÉTENTION (DROIT DE), OUVRIER, RÉPARATION DE LA CHOSE, FAILLITE, DROIT OPPOSABLE AU SYNDIC (Rép., v° Rétention [droit de], n. 204 et s.; Pand. Rép., v° Retention, n. 200 et s.).

L'ouvrier a un droit de rétention sur la chose qu'il a réparée, pour le paiement du salaire à lui dù à raison de la réparation (1) (C. civ., 2102, 3°).

Ce droit de rétention est opposable aux tiers, et s'applique même au cas de faillile du débiteur (2) (Id.).

En conséquence, le syndic d'une faillite ne peut contraindre un ouvrier à se dessaisir

toute confusion avec les maisons portant déjà, le même nom (V. Rouen, 18 déc. 1918, S. et P. 1920.2.90; Pand. pér., 1920.2.90, et les renvois), et, si la cession a été entachée de fraude et faite uniquement dans un but de concurrence déloyale, elle pourra être annulée. V. Cass. crim. 31 janv. 1908 (S. et P. 1908.1.440; Pand. pér., 1908.1.440); Cass. req. 22 oct. 1917, précité, et les renvois. A plus forte raison en est-il ainsi, lorsque celui qui prétend réclamer le droit de se servir de son nom, soit pour faire le commerce, soit pour le céder à un tiers, en a déjà lui-même une première fois cédé l'usage à une société qui exploite un produit sous ce nom valablement acquis. Dans ce cas, en effet, il est tenu à garantie vis-à-vis de son cessionnaire, et il ne peut rien faire qui puisse le troubler dans la jouissance paisible du nom qu'il lui a cédé.

(1-2-3) Le fabricant ou l'ouvrier, auquel ont été confiées des matières premières à façonner ou à ouvrer, a un droit de rétention sur les objets façonnés jusqu'au paiement de ce qui lui est dû pour son travail. V. Cass, req. 13 mai 1861 (S. 1861. 1.865. - P. 1861.657; Pand. chr.); 25 févr. 1878 (S. 1878.1.470.-P. 1878.1218; Pand. chr.); Tou louse, 29 déc. 1913 (sol.implic.) (S. et P. 1915.2.22; Pand. pér., 1915.2.22), et les renvois. Adde, Aubry et Rau, 5o éd., t. 3, p. 191, § 256 bis, texte et note 11; Planiol, Tr. élém. de dr. civ., 6° éd., t. 2, n. 2521, 11°; Colin et Capitant, Cours élém. de dr. civ., t. 2, p. 773; Guillouard, Du dr. de rétention, n. 83, II; Baudry-Lacantinerie et de Loynes, Priv. et hyp., 3e éd., t. 1er, n. 237. Il en est de même pour l'ouvrier qui a réparé un objet; il a le droit de le

d'une automobile qu'il a réparée, sans lui payer la somme qui lui est due (3) (Id.). (Bocqueho C. Synd. Simonin). — JUGEMENT. LE TRIBUNAL; Attendu que Boc-. queho a effectué diverses réparations aux automobiles de Simonin, et qu'il les a conservées dans son garage; qu'après la faillite de Simonin, il a excipé de son droit de rétention pour ne pas les remettre au syndic, puis à finalement consenti à leur vente publique, sous réserve que sur le prix fût prélevée la somme de 1.419 fr. 60, montant de ses factures pour réparation et frais de garage, et que cette somme fut consignée jusqu'à décision du tribunal; que c'est dans ces conditions que Bocqueho a assigné le syndic en paiement de 1.419 fr. 60; que le syndic s'oppose à cette demande, prétendant que Bocqueho n'avait pas le droit d'exercer la rétention; Attendu qu'il est de doctrine et de jurisprudence que, pour paiement de son salaire, l'ouvrier à un droit de rétention sur la chose qu'il a réparée; que ce droit de rétention est opposable aux tiers et s'appli que même au cas de faillite du débiteur; que, par suite, le syndic ne pouvait contraindre Bocqueho à se dessaisir sans lui payer les sommes auxquelles il avait droit; qu'en conséquence, on doit dire définitivement acquise à Bocqueho la somme consignée de 1.419 fr. 60; Par ces motifs; Dit et juge définitivement acquise à Bocqueho`la somme de 1.419 fr. 60, etc.

Du 26 mars 1920. Trib. comm. de Nantes. MM. Roy, prés.; Sporck et Marie d'Avigneau, av.

retenir jusqu'à paiement de ce qui lui est dû pour la réparation. V. Aubry et Rau, loc. cit.; Planiol, op. et loc. cit.; Colin et Capitant, op. et loc. cit.; Guillouard, op. et loc. cit.; Baudry-Lacantinerie et de Loynes, op. et loc. cit.

D'autre part, le droit de rétention, étant, d'une manière générale, opposable aux tiers (V. Aubry et Rau, 5 éd., t. 8, p. 194 et 195, § 256 bis, texte et note 21; Guillouard, op. cit., n. 111 et s.; Baudry-Lacantinerie et de Loynes, op. cit., t. 1er. n. 227; Planiol, op. cit., t. 2, n. 2536; Colin et Capitant, op. cit., t. 2, p. 769), peut être opposé par l'ouvrier aux ayants cause de son débiteur. V. Cass. req. 13 mai 1861, précité. En cas de faillite du débiteur, le droit de retention peut être opposé par l'ouvrier à la masse des créanciers, représentés par le syndic. V. Aubry et Rau, loc. cit.; Colin et Capitant, op. cit., t. 2, p. 770; Guillouard, op. cit., n. 113, I°; Baudry-Lacantinerie et de Loynes, op. cit., t. 1o, n. 248 in fine, texte et note 2. Il a été jugé notamment qu'un huissier peut exercer son droit de rétention sur les actes de poursuites qu'il a faits, ainsi que sur les expéditions de jugements dont il a soldé le coût, alors même que son client est tombé en faillite. V. Trib. de Rouen, 11 févr. 1870 (S. 1870.2.333.-P. 1870. 1201), et les renvois.

Le droit de rétention de l'ouvrier devra donc être respecté par le syndic de la faillite, et, si celui-ci a néanmoins le droit de saisir et de faire vendre l'objet, avec l'autorisation du juge commissaire, ce ne peut être qu'à la charge de payer à l'ouvrier les salaires qui lui sont dùs. V. Baudry-Lacantinerie et de Loynes, op. cit., t. 1er, n. 248.

PARIS 23 mai 1919. MANDAT-MANDATAIRE, CONTRAT PERSONNEL, MANDAT AU PORteur, Nullité, FONDS DE COMMERCE, CESSION, AGENT D'AFFAIRES, COMMISSION, GESTION D'AFFAIRES, PREUVE Rép., v° Mandat, n. 67 et s.; Pand. Rép., eod. verb., n. 136 et s.).

Le mandat, étant un contrat essentiellement personnel, conclu intuitu personae, qui ne se forme, aux termes de l'art. 1984,

(1-2-3) La Cour de Paris, par l'arrêt ci-dessus rapporté, a tenu à trancher un point de droit, alors que, semble-t-il, il lui eût été possible de solutionner le litige, dans le même sens, par de simples considérations de pur fait. En effet, l'arrêt constate souverainement que la vente du fonds de commerce, à l'occasion de laquelle un droit de commission était réclamé, n'avait pas eu lieu par l'intermédiaire de celui qui, sur la base d'un mandat au porteur, réclamait ladite commission. Mais, tout en tenant ce point pour acquis, les juges ont cra nécessaire de se prononcer sur le problème juridique que soulève la pratique des mandats délivrés an porteur, plus spécialement dans le domaine des cessions de clientèles et de fonds de commerce. Nous avons, à cet égard, le regret de déclarer que nous sommes tout à fait opposés à la solution donnée par la Cour, et à l'argumentation sur laquelle elle la fait reposer. D'une part, la Cour nous paraît avoir une conception beaucoup trop étroite du mandat, dans l'état actuel du droit civil, et, d'autre part, nous croyons qu'elle a méconnu les besoins légitimes du commerce, en même temps que la conformité d'une pratique courante avec l'évolution du droit commercial.

I. Les rédacteurs de l'arrêt semblent en être restés, en ce qui concerne la nature du mandat, à la conception ancienne de ce contrat, telle d'ailleurs qu'elle est consacrée par le Code civil, dans les art. 1984 et s. Sans doute, comme le dit l'arrêt, le mandat est un contrat rigoureusement personnel; il est conclu à raison de la confiance qu'a le mandant dans les qualités du mandataire pour remplir la mission dont il l'a chargé. Sans doute, la responsabilité du mandataire est très lourde, puisque, aux termes de l'art. 1992, C. civ., il répond, non seulement de son dol, mais encore de ses fautes, et qu'aux termes de l'art. 1993, il doit rendre compte de sa gestion, et faire raison au mandant de tout ce qu'il a reçu en vertu de sa procuration, quand même ce qu'il aurait reçu n'eût point été dû au mandant ». Le mandat est même si bien, en principe, un contrat personnel que le législateur serait volontiers disposé à le considérer comme échappant au droit patrimonial, puisque, dans l'art. 1986, on lit que : « le mandat est gratuit Si on s'en tenait à toutes ces prescriptions, on ne pourrait que souscrire à la décision rigoureuse de la Cour de Paris. Mais déjà l'art. 1986 laisse entendre que, dans l'application, le mandat ne correspondra pas toujours à cette conception idéale, puisque, si ce texte consacre la gratuité du mandat, la convention contraire n'en est pas moins réservée par lui. Le mandat peut, d'autres termes, être salarié. Déjà cette nuance enleve au mandat quelque peu de la portée purement morale, et partant personnelle, qu'on eut bien lui prêter; l'idée de mandat salarié, qu'on le veuille ou non, évoque, à certaines différences près, l'idée de louage de services, et, s'il s'agit, après tout, dans ce dernier contrat, d'un contrat également personnel, il n'en reste pas moins que la considération directe de la personne ANNÉE 1921 3 cah.

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C. civ., que par l'acceptation du mandataire, et qui, d'après l'art. 1990 du même Code, ne peut être conféré qu'à une personne capable d'être choisie pour mandataire, est nul le mandat conféré « au porteur, c'est-à-dire à une personne indéterminée, qui peut être inapte, incapable ou indigne (1) (C. civ., 1984, 1990).

Spécialement, l'engagement par lequel le propriétaire d'un fonds de commerce promet au porteur une commission sur le prix

s'y affaiblit au profit de la considération plus abstraite de ses aptitudes techniques. Quoi qu'il en soit, la solution de la Cour de Paris se défendrait encore sur le terrain de l'art. 1986, d'autant que l'art. 1990 permet de confier un mandat aux femmes mariées et aux mineurs émancipés, précisant de la sorte que la personnalité concrète du mandataire l'emporte, en cette matière, d'une façon absolue. Mais l'art. 1994 vient renverser la combinaison. Aux termes de ce texte : « Le mandataire répond de celui qu'il s'est substitué dans la gestion 1° quand il n'a pas reçu le pouvoir de se substituer quelqu'un; 2° quand ce pouvoir lui a été conféré sans désignation d'une personne, et que celle dont il a fait choix était notoirement incapable ou insolvable. Dans tous les cas, le mandant peut agir directement contre la personne que le mandataire s'est substitué. Il se trouve donc que, sauf convention contraire, le mandataire peut se substituer un tiers. V. Aubry et Rau, 5 éd., par Bartin, t. 6, p. 173, § 413, 4′′; Guillouard, Du mandat, n. 119 et s.; BaudryLacantinerie et Wahl, Du mandat, 3o éd., n. 565 et s. ; Planiol, Tr. élém. de dr. civ., 6° éd., t. 2, n. 2246; Baudry-Lacantinerie, Précis de dr. civ., 11 éd., par Chéneaux, t. 2, n. 1206; Colin et Capitant, Cours élém. de dr. civ., t. 2, p. 704. Ce droit de substitution subit néanmoins des restrictions de la part de la jurisprudence, tout en étant parfaitement reconnu par elle en principe. V. Cass. req. 31 janv. 1910 (S. et P. 1913.1.551; Pand. pér., 1913.1.551); 8 janv. 1912 (S. et P. 1912.1. 359; Pand. pér., 1912.1.359). C'est évidemment l'ancienne conception du mandat, contrat rigoureusement personnel, qui dicte ces restrictions, sur lesquelles il n'y a pas lieu d'insister ici, et qui pèse sur la jurisprudence. Cela apparaît encore avec le droit que s'arroge la jurisprudence de réduire le salaire stipulé par un mandataire pour le proportionner aux services rendus. V. Cass. req. 12 déc. 1911 (S. et P. 1912.1.374; Pand. pér., 1912.1.374); 11 mars 1913 (S. et P. 1913.1.240; Pand. pér., 1913.1.240); 28 mai 1913 (S. et P. 1915.1.116; Pand. pér., 1915.1.116), et les renvois. Adde, Guillouard, op. cit., n. 166. V. cep. en sens contraire, Nancy, 17 févr. 1914 (S. et P. 1914.2.215; Pand. pér., 1914.2.215). Adde, Aubry et Rau, 5 éd., par Bartin, t. 6, p. 178, § 414, texte et note 8 ter; Baudry-Lacantinerie et Wahl, op. cit., n. 738; Planiol, op. cit., t. 2, n. 2236.

Quoi qu'il en soit, le droit de substitution d'un tiers par le mandataire, sur la base de la volonté du mandant et sous certaines conditions, est un fait acquis. Un raisonnement logique conduit par voie de déduction à considérer que rien ne s'oppose, dans la loi, à la mise en œuvre de ce droit de substitution sous la forme du mandat au porteur. Que le mandant, en effet, accorde expressément au mandataire le pouvoir de se substituer un tiers ou qu'il lui délivre un mandat au porteur, la situation est exactement la même; le mandant ne connait pas plus dans un cas que dans l'autre le tiers qui un jour exécutera le

de vente du fonds de commerce, si la vente a lieu par son entremise ou sur son indication, est nul et de nul effet, comme ne contenant pas désignation de la personne du mandataire (2) (Id.).

Le porteur de ce mandat ne saurait être admis à réclamer une commission qu'en vertu des règles de la gestion d'affaires, et à la condition de démontrer que c'est bien par son intermédiaire que le fonds a été cédé (3) (C. civ., 1372).

mandat. Sans doute, dans le premier cas, le mandant aura le mandataire primitif comme répondant éventuel, tandis que ce mandataire primitif ne sera pas connu dans le second cas; mais rien ne s'oppose à ce que, sur la base de l'art. 1134, C. civ., le mandant se contente, d'avance, de la responsabilité du tiers substitué. Pourquoi en serait-il autrement en présence d'une clause implicite de cette nature, se traduisant par la délivrance d'un mandat au porteur? La prétention contraire serait d'autant plus extraordinaire que, suivant un fait bien connu, les formes à ordre et au porteur ont de plus en plus pénétré dans la vie du droit civil, et infusé à celle-ci le sang nouveau que réclame l'évolution juridique moderne, toujours plus opposée à l'ancien formalisme, et toujours plus désireuse d'adapter le mécanisme juridique aux besoins de solutions rapides des négociations. Cette solution s'impose tout particulièrement en matière commerciale.

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II. Il est indéniable que, dans le domaine commercial, la considération des personnes fait place chaque jour davantage aux aptitudes techniques et professionnelles des divers agents participant à la vie commerciale. La fonction a pris la place jadis occupée par la personnalité. D'autre part, on constate tous les jours une tendance certaine à la commercialisation des éléments de richesse les plus divers; en ce qui concerne les choses comme en ce qui touche aux personnes, la notion d'individualité s'efface devant la notion de valeur, de représentation pécuniaire. Le fonds de commerce, qui était autrefois considéré comme un bien de famille, n'est plus, la plupart du temps, dans l'esprit de son propriétaire, qu'une valeur circulante. Dès lors, quand le propriétaire d'un fonds de commerce se décide à l'aliéner, peu lui importent la personnalité de l'acquéreur et celle du mandataire; ce qu'il désire, c'est que, eu égard au cours actuel des fonds de commerce de même catégorie, le fonds qu'il met en vente soit normalement vendu. Une seule voie s'offre à lui pour atteindre ce but l'intermédiaire des agents professionnels de cette sorte d'opérations: le vendeur ne peut se faire aucune illusion; l'activité de ces agents n'aura pas d'autre stimulant que le droit de commission promis, et, par suite, ce droit de commission ne sera pas autre chose, de la part du vendeur, qu'une offre commerciale ordinaire, faite sous une forme appropriée. On se trouve, en d'autres termes, du fait de cette offre, en présence d'un engagement unilatéral de volonté dont béné ficiera celui qui saura en tirer parti en l'acceptant; c'est, si l'on veut, une rémunération de services promise à l'avance. La considération de la personne entre si peu en jeu, en pareil cas, que la jurisprudence décide que la rémunération due au mandataire lui est acquise dès qu'une vente conclue par lui a été agréée par le mandant, et ne peut lui être refusée ni lui être réclamée, si, plus tard, par la volonté du mandant, le marché ne reçoit qu'une exécution partielle. V. Cass. civ. 18 juill. 1911 (S. et P. 1912.1.21; Pand, pér,

:

II PART. 5

(Epoux Baijot C. De Reckla et Epoux Rivière. ARRÈT.

Considérant

LA COUR: Au fond: que, par son exploit introductif d'instance du 12 juill. 1913, la demoiselle Reckla a assigne les époux Baijot en mainlevée de Topposition pratiquée, le 10 juillet précédent, par la dame Baijot, en conformité de l'art. 3 de la loi du 17 mars 1909, entre les mains des époux Rivière, acquéreurs de son fonds de commerce d'hôtel meuble, exploite à Paris, 15, rue Edouard-Manet, sur le prix de vente dudit fonds, et ce, pour surete et avoir paiement de la somme de 3.000 fr., que là dame Baijot prétendait lui être due pour commission; que, de leur côté, suivant exploit du 30 juill. 1913, les époux Baijot ont assigné, par voie de demande reconventionnelle, la demoiselle Reckla, et, par voie de demande principale, les époux Rivière, aux fins de validation de ladite opposition et de condamnation solidaire desdits intimés au paiement de la somme de 3.000 fr., dont ils se disaient créanciers à titre de commission sur la vente dudit fonds de commerce; Considérant qu'à l'appui de leur demande, les appelants produisent un engagement, en date du ler inars 1913, signé de demoiselle Reckla, sur papier à en-tête: Ancien Cabinet Gubian, A. Conge, successeur, 79, boulevard Beaumarchais », ledit engagement ainsi libellé : « Je soussigné, etc., promets payer au porteur de ce mandat, si je vends mon fonds par son entremise ou son indication, une commission en espèces de 5 p. 100. Il est bien entendu que, si je ne vends pas par lui, je ne lui devrai absolument rien, pour quoi que soit »: qu'ils produisent, d'autre part, un bon à en-tête de leur firme cominerciale: E. Baijot-Lacon, 1990, faubourg Saint-Denis », en date du 5 avril 1913, signé des époux Rivière, et ainsi libellé : « Je soussigné, reconnais avoir reçu gratuite

1912.1.24), et les renvois. Plus généralement, la jurisprudence décide que, par application de l'art. 1999, § 2, C. civ., l'intermédiaire a droit à la commission stipulée dès que l'opération dans laquelle il est intervenu a été conclue, même si la convention qu'il a passée demeure inexécutée. V. Cass. req, 21 déc. 1892 (S. et P. 1910.2.319, ad notam; Pand. per., 1910.2.319, ad notam); Riom. 23 mai 1910 (motifs) (S. et P. 1910.2.318; Pand. pér., 1910.2.318), et la note: adde, BaudryLacantinerie et Wahl, op. cit., n. 742.

Il ressort, en définitive, de toutes ces considérations, que, si la forme du mandat au porteur peut. au premier abord, choquer les tenants d'un formalisme rigoureux et les partisans du maintien des institutions civiles dans l'esprit qui avait présidé à leur élaboration primitive, il faut savoir, s'incliner devant les exigences de la vie actuelle, et plus spécialement devant les nécessités du commerce. Les regles de droit ne sont pas faites pour arrêter le cours de la vie, mais bien pour l'harmoniser en s'adaptant aux transformations incessantes qu'ame ne chaque jour dans le domaine social.

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ment de E. Baijot-Lacon les adresses des maisons à céder désignées ci-après, déclarant n'en avoir jamais eu connaissance que par la présente indication, et m'engage à ne traiter aucun de ces fonds saus en prévenir, au préalable, ou au plus tard dans les trois jours de la signature de la vente, E. Baijot-Lacon, sous peine de devenir personnellement et solidairement responsable de la commission promise par le vendeur », ledit bon contenant ensuite une énumération de fonds à vendre, parmi lesquels figure celui de demoiselle Reckla: que, dans ces conditions. les appelants soutiennent que, la vente du fonds litigieux ayant eu lieu par leur intermédiaire, demoiselle Reckla leur doit la commission stipulée, qu'ils déclarent d'ailleurs, dans leurs conclusions d'appel, réduire à 1.550 fr., et que les époux Rivière, faute de les avoir avisés en temps utile de leur acquisition, sont tenus solidairement de la même commission;

Mais considérant que le mandat est un contrat essentiellement personnel, ne pouvant intervenir que intuitu personæ »; que ce contrat ne se forme, aux termes de l'art. 1984, C. civ., que par l'acceptation du mandataire, et, d'après l'art. 1990 du mème Code, ne peut être conclu qu'avec une personne capable d'être choisie pour mandataire; que l'attribution du mandat implique donc nécessairement la confiance du mandant en celui qu'il charge de ses intérêts, et qu'on ne saurait concevoir qu'il soit valablement conféré « au porteur, c'est-à-dire à une personne indéterminée, pouvant être inapte, incapable ou indigne; qu'il en résulte que l'engagement signé le 1er mars 1913 par demoiselle Reckla, et constituant un mandat salarié, est entaché de nullité, et que dame Baijot ne saurait être admise à réclamer une commission qu'en vertu du quasi-contrat de gestion d'affaires, et à la condition de démontrer que c'est réelle

(1) D'après l'art. 340, § 11, C. civ., modifié par la loi du 16 nov. 1912, l'action en recherche de la paternité doit, à peine de déchéance, réserve faite des hypothèses visées par le § 12, être forinée dans les deux ans qui suivent l'accouchement. Le délai ainsi imparti pour exercer l'action a-t-il le caractere d'une prescription ou d'une décheance? Si l'on consulte les travaux préparatoires, il semble bien que l'on n'ait pas mis en doute le caractère de délai de prescription du délai accordé pour exercer l'action en recherche de paternité. Le rapporteur de la loi au Sénat, M. Guillier, a qualifié, à diverses reprises, ce délai de « délai prescriptible". V. not., S. et P. Lois annotées de 1913, p. 416, et 20 col., note 16-17; Pand pér., Lois annotées de 1913, p. 416, 1 et 2 col., note 16-17.

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L'opinion exprimée par le rapporteur du Sénat sous cette forme pourrait assurément paraitre insuffisante pour asseoir la conviction; mais, si l'on se reporte aux termes qu'emploie l'art. 340, nouveau : L'action devra, à peine de déchéance, être intentée dans les deux années qui suivent l'accouchement », on ne peut faire autrement que de reconnaître qu'il y a là un délai fixé pour exercer l'action, et passé lequel l'action est éteinte. Or, c'est précisement la définition donnée de la prescription, par opposition à la déchéance, par MM. Baudry-Lacantinerie et Tissier: Tous les cas,

a

ment par son intermédiaire que le fonds litigieux a été cédé ; -- Considérant qu'elle ne fait nullement cette preuve; qu'il apparaît, au contraire, que la vente a eu lieu le 27 juin 1913 par l'entremise d'un autre agent d'affaires, qui a touché sa commis sion; que même l'appelante était si peu au courant des conditions de cette vente qu'elle réclamait, dans son assignation, une commission de 3.000 fr., qui, au taux de 5 p. 100, faisait ressortir le prix de cession à 60.000 fr., alors qu'il n'était en réalité que de 31.000 fr., et que c'est seulement lorsqu'elle l'a appris en cours d'instance qu'elle a réduit, par ses conclusions d'appel, sa demandé à 1,550 fr.:

Par ces motifs et ceux non contraires des premiers juges; Confirme, etc. Du 23 mai 1919. C. Paris, 6 ch. MM. Brégeault, prés.; Gail, av. gén.

NANCY 8 décembre 1920.

1 FILIATION, ENFANT NATUREL, ACTION EN RECHERCHE DE LA PATERNITÉ, LO DE 16 NOV. 1912, DÉLAI EXPIRÉ, PRESCRIP TION, DÉCHÉANCE, RENONCIATION TACITE (Rép., v Enfant naturel, n. 238 et s.; Pand. Rép.. eod. verb., n. 478 et s.). 2o DÉPENS, PARTIE GAGNANTE, ACTION EN RECHERCHE DE PATERNITÉ, DÉPENS DE PREMIÈRE INSTANCE (Rép., v Dépens, a. 1830 et s.; Pand. Rép., v Frais et dépens, n. 651 et s.).

1o La disposition de l'art. 340, C. civ.. modifié par la loi du 16 nov. 1912, qui lemite à deux ans à partir de l'accouchement le délai pendant lequel la mère de l'enfant peut exercer l'action en recherche de paternité naturelle, établit une véritable prescription, et non une déchéance proprement dite (I) (C. civ., 340, § 4; L. 16 nóv. 1912, art. 1. 4).

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En conséquence, il est permis de renoncer disent ces auteurs, où un droit ou une action s'éteint faute d'exercice dans un certain délai sont des cas de prescription extinctive (De la prescription, 3 éd., n. 40). V. égal, la note de M. Tissier sous Cass. req. 14 nov. 1899 (S. et P. 1901.1.289). V. cep., Aubry et Rau, 4° éd., t. 8, p. 426, § 771, note 9. C'est bien ainsi, d'ailleurs, que les commentateurs de la loi du 16 nov. 1912 ont interprété le § 11 du nouvel art. 340, en décidant que le délai fixé par ce paragraphe 'avait le caractère d'une prescription, sans s'arrêter aux expressions, « à peine de déchéance, qui n'ont pas pour effet d'assigner à l'expiration du délai le caractère d'une déchéance, mais simplement d'affirmer plus énergiquement l'idée que, le délai une fois écoulé, l'action n'est plus recevable. V. en ce sens, Wahl, La recherche de la paternite d'après la loi du 16 nov. 1912, p. 85; Lavollée, Code manuel de la recherche de la paternité, p. 168; Brun, La recherche de la paternité, n. 80 bis.

Y avait-il, au surplus, nécessité, dans l'espèce, pour résoudre la question qui se posait. et qui était de savoir si le défendeur à la demande en recherche de paternité peut renoncer à se prévaloir de l'expiration du délai d'exercice de l'action, à se prononcer sur le caractere de prescription ou de déchéance de ce délai? Nous ne le pensons pas, parce qu'il ne peut être contesté qu'aussi bien que

cette prescription, lorsqu'elle est acquise; mais, une fois que l'on a renoncé expressé-, ment ou tacitement à se prévaloir de ce moyen en première instance, on ne peut plus revenir sur sa détermination et le reprendre en cause d'appel (D) (C. civ., 2220, 2221). Spécialement, la renonciation des hérihers du père prétendu d'un enfant naturel

se prévaloir de la prescription du délai de deux ans accordé pour exercer l'action put résulter de ce que ces héritiers ont pourvu à l'entretien de l'enfant jusqu'à une époque voisine de sa majorite (2) (Id.).

Dans une action en recherche de paternité, intentée par la mère d'un enfant naturel contre les héritiers du père prétendu, les frais et dépens de première instance doivent être laissés à la charge de la mère, encore bien qu'elle ait triomphe dans son action, parce que, qu'elle qu'eût été l'attitude des héritiers, un jugement était indispensable pour établir la filiation des mineurs; mais les dépens d'appel doivent être mis, au contraire, à la charge des héritiers qui succombent dans cet appel (3) (C. proc., 130).

(F... C. Due F...).

-

ARRET.

Sur la fin de non-receLA COUR; voir: Attendu qu'il résulte des travaux préparatoires, et notamment du rapport de M. le sénateur Guillier, que la disposition de la loi de 1912, qui limite à deux ans à partir de l'accouchement le délai pendant lequel la mère de l'enfant peut exercer l'action en recherche de paternité, établit une véritable prescription, et non une déchéance proprement dite; d'où cette double conséquence, d'une part, qu'il est perinis de renoncer à cette prescription,

la renonciation à la prescription acquise (C. civ., 2220), la renonciation à une déchéance est valable, dès lors qu'il ne s'agit pas d'une déchéance ayant un caractère d'ordre public, telle que celle qui est attachée à l'expiration du délai d'appel (V. Cass. civ. 19 janv. 1908, S. et P. 1908.1.416; Pand. pér., 1998.1.416; Cass. Belgique, 21 janv. 1909, S. et P. 1910.4.15; Pand. pér., 1910.4.15; Besançon, 25 févr. 1910, S. et P. 1912.2.35; Pand. pér., 1912. 2.35, et les renvois). Seul, en effet, un intérêt d'ordre public peut mettre obstacle à la renonciation à une déchéance. V. Baudry-Lacantinerie et Tissier, op. cit., p. 41, n. 40. Comp. Cass. req. 6 juin 1896 (S. et P. 1897.1.407), et le renvoi; 24 mai 1898 (S. et P. 1901.1.335), la note et les renvois. Or, nous ne pensons pas que l'on puisse prétendre que l'exception tirée de l'expiration du délai de l'action en recherche de paternité soit d'ordre public; cette exception a été introduite dans le seul intérêt du défendeur, pour le mettre à l'abri, aprés un certain délai, de toute poursuite (V. S. et P. Lois annotées de 1913, p. 445-446, note 16-17; Pand, pér., Lois annotées de 1913, p. 445-446, note 16-17); l'ordre public n'est pas intéressé à ce que, ce délai expiré, le débat ne puisse s'engager; s'agit-il d'une déchéance, la reBonciation à s'en prévaloir doit produire effet. (1) V. la note qui précède.

(2) Sur les circonstances desquelles peut être déduite la preuve de la renonciation du défendeur á se prévaloir de l'expiration du délai de deux ans accordé par la loi du 16 nov. 1912, pour intenter I action en recherche de la paternité. V. Wahl, La

COURS D'APPEL, TRIBUNAUX, ETC.
lorsqu'elle est acquise; d'autre part, qu'une
fois que l'on a renoncé expressément ou
tacitement à se prévaloir de ce moyen,
l'on ne peut plus revenir sur sa détermi-
nation et le reprendre en cause d'appel;

Attendu que la renonciation par les
héritiers F... au moyen de prescription
résulte de toutes les circonstances de la
cause, et notamment de ce fait qu'ils ont
pourvu à l'entretien du mineur F... jus-
qu'en 1917; —- Attendu que, la naissance
de l'enfant étant de 1901, et la mort du
notaire F... de 1916, si les héritiers F...
avaient entendu se prévaloir de la pres-
cription, qui leur était acquise depuis 1903,
ils n'auraient pas continué le service d'une
pension alimentaire jusqu'en 1917; que,
conséquents avec eux-mêmes, ils n'ont
pas soulevé le moyen en première ins-.
tance; Attendu que leur renonciation
s'explique d'autant mieux que, le mineur
F... étant à la veille d'atteindre sa majo-
rité, et sur le point d'exercer l'action lui-
même, le recours par eux à un tel moyen
ne pouvait que parer provisoirement et
pour un temps très bref à l'instance dirigée
Au fond: Adoptant les
contre eux;

motifs des premiers juges;
s'il con-
Sur les dépens: --
-Attendu que,
vient de laisser à la charge de la demoi-
selle F... les frais de première instance,
puisque, quelle qu'eut été l'attitude des hé-
ritiers F..., un jugement était indispensa-
ble pour établir la filiation du mineur F.....,
par contre, les dépens d'appel doivent être
mis à la charge des héritiers F..., qui suc-
combent dans un appel mal fondé;
ces motifs;
la disposition de la
que
loi de 1912, qui limite à deux ans à partir
de l'accouchement le délai pendant lequel
la mère de l'enfant peut exercer l'action

Dit

Par

recherche de la paternité d'après la loi du 16 nov.
1912, p. 85; Lavollée, Code manuel de la recherche
de la paternité, p. 174 et 175; Brun, La recherche
de la paternité, p. 131, n. 80 bis.

(3) Si, en principe, c'est la partie qui succombe
qui doit être condamnée aux dépens (V. Cass. civ.
6 nov. 1911, S. et P. 1912.1.197; Pand. pér., 1912.
1.197; 10 nov. 1914, S. et P. 1915.1.43; Pand.
pér., 1915.1.43, et les renvois), les dépens peuvent
cependant être mis à la charge de la partie ga-
gnante, lorsque l'instance a été introduite dans
son intérêt exclusif. V. Trib. de la Seine, 27 juill.
1907, sous Paris, 8 juill. 1909 (S. et P. 1911.2.
145; Pand pr., 1911.2.145), et la note de M. Hu-
gueney; Trib. de la Seine, 23 juill. 1909, sous
Paris, 27 janv. 1911 (S. et P. 1911.2.135; Pand.
pér., 1911.2.135); Cass. civ. 6 nov. 1911, précité,
et les autorités citées. Adde, Garsonnet et Cézar-
Bru, Tr. de proc., 3o éd., t. 3, n. 772, c.

C'est de cette restriction au principe que s'est
inspiré l'arrêt ci-dessus, dans une instance en
recherche de paternité formée contre les héritiers
du père prétendu, pour laisser à la charge de la
mère de l'enfant, qui avait obtenu gain de cause
en première instance et en appel, les dépens de
première instance, par la raison qu'un jugement
était nécessaire pour établir la filiation paternelle
de l'enfant. V. cep., Trib. de la Seine, 27 févr. 1920
(Rec. Gaz. Pal., 1920.2.415).

(4-5) La loi du 17 avril 1919 (S. et P. Lois annotées de 1920, p. 1041; Pund. pér., Lois anuotées de 1920, p. 1041), sur la réparation des dommages de guerre, prévoit, dans trois de ses articles,

en recherche de paternité, établit une véri-
table prescription; Dit que les héritiers
F..., ayant sciemment renoncé à ce moyen
de prescription, ne peuvent le reprendre
et l'opposer en cause d'appel; - Confirme
Condamne les
le jugement entrepris;
héritiers F... à l'amende et aux dépens
- Déclare la demoiselle F... mal
d'appel;
Dit que
fondée en son appel incident;
les frais de l'appel incident ainsi que les
frais exposés en première instance, reste-
ront à la charge de la demoiselle F...
C. Nancy, 2 ch.
Du 8 déc. 1920.
MM. Bertrand, prés.; Chabrier, av. gén.;
Claude et Rassemusse, av.

PARIS 10 décembre 1920.
GUERRE, DOMMAGES DE GUERRE, LOI DU
17 AVRIL 1919, CESSION DU DROIT A L'IN-
DEMNITÉ, AUTORISATION DU TRIBUNAL CI-
VIL, REFUS, APPEL, RECEVABILITÉ.

La décision par laquelle le tribunal civil, statuant par application de l'art. 49 de la loi du 17 avril 1919, refuse d'autoriser la cession, par l'ayant droit à une indemnité de dommages de guerre, en même temps que son fonds de commerce, du droit eventuel à l'indemnité de dommages de guerre, est susceptible d'appel (4) (L. 17 avril 1919, art. 8 et 49).

laIl en est de même de la décision par quelle le tribunal civil, statuant par application de l'art. 43 de la loi du 17 avril 1919, prononce sur la demande d'autorisa tion de cession des titres constatant le montant de la somme attribuée pour réparation de la perte subie (5) (L. Î7 avril 1919, Motifs. art. 8 et 43).

la cession de l'indemnité ou du titre d'indemnité
délivré au sinistré, pour la subordonner à l'auto-
risation du tribunal civil, donnée en chambre du
conseil, par décision motivée, après avis du minis-
tère public (art. 8, 43 et 49). Mais, tandis que
l'art. 8, qui a trait au cas où, le sinistré ne pro-
lui est remis un titre re-
cédant pas au remploi,

présentant la perte subie, et inaliénable pendant
cinq ans, en permettant au sinistré de se pourvoir
devant le tribunal pour obtenir l'autorisation de
céder son titre, ouvre la voie de l'appel contre la
11
décision du tribunal dans les termes suivants : «
pourra être appelé de la décision de première ins-
tance devant la Cour, qui statuera en chambre du
conseil et comme en matière sommaire », l'art. 43,/
qui prescrit la remise au sinistré, en représenta-
tion de la perte subie, d'un titre non négociable,
mais qui peut cependant être transporté, dans les
formes des art. 1689 et s., avec l'autorisation du
tribunal, et l'art. 49, qui permet également la
cession ou la délégation, dans les mêmes formes,
avec l'autorisation du tribunal, du droit à indem-
nité. en cas de remploi ou de réinvestissement,
n'ouvrent aucune voie de recours contre la décision
du tribunal qui refuserait l'autorisation demandée.
Il n'est pas contestable que, si l'on appliquait
strictement ces dispositions, il en résulterait un
singulier défaut d'harmonie entre les diverses dis-
positions par lesquelles la loi du 17 avril 1919 a
réglementé la cession de l'indemnité ou du titre
qui la représente. Ce défaut d'harmonie s'accuse-
rait tout particulierement entre les deux hypo-
theses vis es par les art. 8, §§ 1er et 2, et 43,

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