silence qui laissait incertain sur son objet : car on ne savait s'il tombait sur le prince ou sur l'élu. Par cet acte, au contraire, le prince et l'élu se trouvaient séparés, leurs causes étaient à part, et la cour de Rome était forcée de s'expliquer. J'entends bien qu'elle trouva plus commode de continuer à jouir du droit de s'envelopper dans un silence équivoque, qui pouvait s'interpréter également du prince et de l'élu, et qui les frappât tous les deux à la fois, qui impliquât l'élu dans les débats du prince avec le Pape; mais j'entends aussi qu'il était très bon pour la religion, et très conforme à la raison, que cet imbroglio eft enfin un terme. Il l'avait trouvé dans le concordat de Fontainebleau, et, sous ce rapport, cet acte était à la fois un bienfait pour la religion et un hommage pour la raison; car, que peut-il y avoir de plus chrétien que de faire que l'Eglise ne puisse jamais manquer d'évêques, et qu'elle n'ait jamais à souffrir des querelles qui ont lieu ici bas? que peut-il y avoir de plus conforme à la raison que de la faire servir au maintien de la religion? n'est-ce pas alors qu'on la sent s'agrandir et s'épurer? Par ce concordat, il semblait voir le rôle du Pape échu au prince temporel, et celui du prince temporel rempli par le Pape, lorsque l'un employait tous ses soins à faire que l'Eglise ne pût jamais manquer de ses premiers que l'autre mettait les siens à ce pasteurs, tandis qu'elle pût en manquer. Si la prétention mise en avant par le Pape de ne pouvoir être réformé, était admise, il s'ensuivrait qu'il est le maître dans l'Eglise, et que celle-ci n'aurait aucun moyen de se soustraire au joug qu'il pourrait être dans l'intérêt de la cour de Rome de lui imposer. Une autorité irréformable même par le corps de la société à laquelle elle appartient, forme un despotisme absolu et complet. L'intention que dans ce cas montre le Pape, est propre à faire ressortir les inconvéniens des concordats, dans lesquels il est à la fois partie et juge suprême; elle conduit directement à faire sentir plus vivement la nécessité de recourir à l'ordre qui existait avant le concordat. Il avait duré pendant 1500 ans, il avait donné à l'Eglise les pasteurs dont elle ne peut se passer, il avait prévenu les longues viduités des églises que les concordats ont créées, il avait maintenu l'indispensable séparation entre le spirituel et le temporel. Le concordat de Fontainebleau ne faisait que rappeler une faible partie, et, pour ainsi dire, une ombre de cet ordre, puisqu'il ne rendait qu'éventuellement au métropolitain ce dont il avait joui d'une manière certaine et complète, dans les temps antérieurs. Il était donc à l'abri des reproches la lettre du Pape lui adresse, et l'attaquer que était attaquer la longue série de la discipline qui avait régi l'Eglise depuis son institution. Le Pape se dit tenu de revendiquer les droits temporels et le territoire de l'Eglise; il se déclare par les sermens faits à l'époque de son exal lié tation. Cette obligation est commune au Pape avec tous les autres souverains. Il n'en est point qui ne soit engagé, vis-à-vis du peuple qu'il gouverne, à faire tous ses efforts pour maintenir l'intégrité de ses possessions; mais les papes pas plus que les autres princes n'ont pu s'engager à faire prévaloir leurs représentations ou leur opposition. Ils sont bien tenus de révendiquer, mais non de faire restituer. Pour remplir une pareille condition, il faudrait pouvoir répondre du temps, des évènemens, et, ce qui est encore plus difficile, du cœur des hommes. En voyant les fortunes diverses qu'a subies la cour de Rome, on se demande comment et à quelle époque elle aurait pu imposer une pareille condition à son chef. Un prince tenu par serment de ne jamais céder aucune partie de ses états, aurait dans le monde une existence à part de toutes les autres souverainetés; il serait incapable de contracter avec aucune et placé en dehors de toutes les sociétés existantes autour de lui. D'ailleurs, cette allégation est la condamnation ou l'annulation d'une partie de l'histoire des papes; car elle se compose, comme celle de tous les princes, de vicissitudes de fortune, d'accroissement et de diminution dans leur puissance. Un exemple récent devait interdire ce moyen de défense; car le pape Pie VI avait, peu d'années auparavant, auparavant, cédé les trois légations, sans réclamer les obligations imposées par son exaltation, comme sans avoir éprouvé le reproche d'y avoir manqué, ni d'avoir dérogé au grand caractère qui avait illustré son pontificat. Le concordat de Fontainebleau étant destiné à régler tous les différends qui avaient eu lieu entre les deux contractans, le sort des évêques qui avaient quitté ou perdu leurs siéges par suite de ces débats, se trouvait fixé. Ce traité était un arrangement total donnant ouverture à un ordre nouveau; tout ce qui y avait rapport devait donc s'y trouver compris. Ainsi, il règle le séjour, le revenu, la représentation du Pape ; il lui accorde des nominations d'évêchés; il supprime et érige des siéges; il rend la liberté aux prisonniers. C'est, comme on voit, une transaction générale destinée à éteindre tous les sujets de division. Dans le nombre se trouvaient les évêques qui avaient marqué par une forte opposition à Napoléon. Les parties stipulent que le Pape aura la faculté de créer en leur faveur des titres in partibus infidelium, et qu'ils pourront être promus à des siéges, en France ou en Italie. La politique avait sans doute dicté ce dernier article : on voulait les éloigner des siéges dans lesquels on pouvait craindre que leur présence ne devînt une nouvelle source de troubles; tel était évidemment le but de cette stipulation. Ici, il faut reconnaître deux choses: 1o. Que cela n'était pas régulier, puisque des évêques ne peuvent être destitués sans jugement canonique, nouvelle preuve contre le mélange du spirituel avec le temporel. 2°. Que leur destitution n'était pas prononcée formellement, mais seulement annoncée, de manière à ce que ces évêques remissent leurs siéges, d'après les considérations qu'il appartenait au Pape de faire valoir auprès d'eux, et dont on était fondé à attendre une grande efficacité, d'après l'attachement et le dévouement dont ces prélats avaient fait preuve à l'égard du Pape, leur souverain temporel et leur chef spirituel.... Tous ces motifs avaient dû être pesés, allégués et appréciés avant la signature du concordat, et ils ne pesaient pas assez par euxmêmes, pour fournir un fondement solide à un acte aussi péremptoire que la rupture spontanée et non provoquée d'un traité solennel fait avec un prince dont le ressentiment pouvait avoir d'aussi graves conséquences. Il faut donc chercher une autre cause à la rupture du concordat de Fon |